[ Clos ] [Château de St Fiacre] Revers de médaille et nouvelle chance

[Konari]

Au sortir de la ville minable de Tarouga, Éris avait entreprit un long voyage durant lequel elle ne parla quasiment pas. Remettre les pieds au château de St Fiacre était à la fois une source de joie et de déprime, néanmoins, elle repartit aussitôt vers un lieu reculé, indiqué par le vieux parchemin qu'elle avait trouvé. Elle s'était préparée à ce voyage, cette fois, et comme pour les mines abandonnées, l'avancée dans cette cave fut un peu compliquée. La raison de sa venue ici était extrêmement simple, elle convoitait le trésor des Deux Renards. En voyant ce mot, c'était comme si son esprit avait été illuminé. Cette note ne pouvait pas faire référence aux statuettes maudites, puisqu'elles étaient trois. Par contre, le Feunard de Jade, qu'elle avait trouvé seul, ne l'était sans doute pas. Éris n'avait pas pris la peine de faire des recherches, un lieu indiqué, c'était tout ce qu'elle demandait. Et c'est tout ce qu'il y avait. Si Éris avait pris le temps de revenir dans son ancien foyer, ce n'était pas par hasard, en réalité, le lieu indiqué se trouvait au sud du pays, non loin de là, le domaine offrait donc une halte intéressante.

Phobos sous son air impassible, commençait à se sentir inquiet par cette nouvelle obsession, mais comme Éris n'y prêtait aucune intention et ne s'occupait que de ce fameux trésor, il n'y pouvait rien, pour l'instant. Il savait que ces statues avaient un pouvoir très puissant, mais elle semblait déterminée. En peu de temps, elle fut sur place et entrait dans la cave. L'entrée était tout à fait ordinaire, après qu'elle en eut cherché l'entrée pendant une journée, puis se changea de façon un peu étrange. À bien y réfléchir, cela ressemblait à la salle de l'eau, qu'elle et Yuu avaient croisé, c'était tout à fait le même genre d'atmosphère. À partir de là, Éris dû faire face à la magie des lieux. Elle tomba successivement dans une sorte de labyrinthe illusoire (jusqu'à ce qu'elle en ait assez et balance une colonne de feu devant elle), pour tomber ensuite dans une salle inversée. Où tout y était inversé, elle-même y comprit. Le plafond était au sol, la magie ne fonctionnait pas et elle s'aperçut qu'elle se retrouvait dénuée de tout pouvoir, mais la pyromancienne dû lutter en particulier contre elle-même.

D'habitude plutôt téméraire, elle réalisa que le sortilège s'attaquait à sa personnalité. Recroquevillée dans un coin et n'osant plus bouger de peur de réveiller les gardiens ancestraux, une petite voix souffla à son oreille que c'était stupide… Depuis quand avait-elle peur de la magie ? En ayant l'impression de se réveiller d'un long rêve, elle réalisa également qu'elle avait perdu une bonne partie de sa journée. Pendant un long moment, Éris ne rencontra plus rien, durant cette avancée, elle se demanda vaguement ce que donnerait le pouvoir des deux statues, activée en même temps et dont les trois petites répliques, n'étaient que des sceaux… Finalement, elle arriva sans trop de mal dans une toute petite salle, où trônait le fameux deuxième renard. Elle fut déçue. La pièce, minuscule, ne comportait rien d'autre. Elle s'était peut-être un peu attendue à voir un autre trésor… Le Feunard de Grenat, la regardait droit dans les yeux d'un regard luisant. Se méfiant, mais sans crainte, elle s'approcha de la statue et lui retira ses yeux. La salle se changea. La magie disparut et avec une certaine stupeur, Éris vit alors qu'elle se trouvait à peine à quelques mètres de l'entrée.

Le retour fut plus aisé, elle passa par le château pour y déposer le Feunard de Grenat et partit immédiatement pour la Crevasse. Après plusieurs jours de voyage pénibles, elle emmena l'Airmure vers la mine abandonnée. Elle retrouva facilement l'entrée de la grotte, suspendue sur le flan de la falaise. Mais cette fois, elle pénétra dans la salle au trésor avec une méfiance extrême… Rien ne se produisit, les yeux des statues étaient en quelques sortes, les déclencheurs, se disait-elle, bien que ce ne fût pas tout à fait exact. Immédiatement, elle alla remplir les énormes malles et divers sacs qu'elle avait emportés avec elle. Il y avait entre autre, deux boîtes particulières. Elle plaça, avec l'aide de Phobos, le Feunard de Jade dans la plus grande et retraversa les salles déjà visitées avec Yuu pour récupérer les trois petites. Ce qui n'eut rien de simple en réalité, elle eut particulièrement du mal à gravir les passages étroits et retrouver celui ou le tentacule l'avait entrainé. Heureuse, elle fourra les trois statuettes dans leur petite boîte et remballa le tout. La salle avait été entièrement vidée et ne comportait plus une seule pièce d'or.

Revenir au château se fit sans encombre. Un soir cependant, elle remarqua la présence furtive de trois personnes. Ne souhaitant pas attirer l'attention sur elle, elle éteignit le feu de camp avec son pouvoir propre, appela l'Arcanin et grimpa dessus. Voyager à dos d'Airmure était sans conteste très rapide et confortable, mais il était loin d'être d'une discrétion à toute épreuve, ses ailes d'acier crissant à chaque battement d'ailes. L'Arcanin en revanche se montra tout à fait à la hauteur de la tâche, ses pas feutrés lui permirent de se retirer discrètement et, en jetant un œil par-dessus son épaule, elle vit les trois ombres chercher autour du feu, sans réellement comprendre. Parfait. Éris talonna Aliénation et elles traversèrent une grande partie des plaines durant la nuit. Au petit matin, elle rappela le canidé, épuisé et laissa sortir Phobos. Les Masseball qu'Éris avait prévu pour son trésor, éclatèrent. Peu ravie de cet échec, elle mit ses Pokémon en faction, le temps de trouver dans le village le plus proche, un village mourant, à moitié détruit, de quoi faire un convoi. Les paysans intrigués par cette étrange fille n'eurent pas très envie de l'aider, mais cédèrent face à ses promesses.

Les promesses de richesse, ou au moins d'un service grassement payé furent les plus forts (ce qui n'avait rien de surprenant, ces gens-là étaient très pauvres et n'avaient plus rien, à peine de quoi se vêtir correctement et même les petits enfants devaient travailler). Ce convoi de paysans ne payait pas de mine, ce qui lui permit de ne pas attirer les regards, comment soupçonner qu'un trésor se cachait dans les malles ? Ils arrivèrent sans encombre dans le domaine à l'abandon et Éris transporta les malles dans le hall ; Elle paya les paysans, qu'elle autorisa à rester au domaine pour la nuit. Le château paraissait triste, les vitres encrassées diffusant une lueur blafarde, alors qu'il faisait grand soleil dehors, quand les rideaux fermés ne pendaient pas tristement devant les fenêtres. La poussière et les toiles d'araignées s'étaient entassées, comme les nids de divers Pokémon nuisibles. Les Rattata et les Mimigal étant les plus nombreux. La jeune fille travailla toute la nuit au sous-sol. Il s'agissait d'avoir une salle pour son beau trésor et surtout, pour les deux Feunard de Gemme. Au milieu de l'après-midi, deux jours plus tard, la salle secrète était installée, gardée par les deux grandes statues. Curieuse, Éris prit l'énorme risque de replacer les yeux… Il y eut une onde psychique, Éris la ressentit très nettement, qui traversa le château et le domaine. Alarmée Phobos fit irruption dans la pièce, mais tout allait bien.

Comme la pyromancienne ne tarda pas à le comprendre, le trésor des deux Renards consistait en en une Bénédiction et une Malédiction. Les arcanes lui étaient familières et elle avait vu de nombreux sorts et enchantement ces dernières années. Éris semblait à nouveau retrouver une chance dont elle avait profité les premières années de sa vie, mais elle attirait également les convoitises jusqu'à elle. En sortant du château pour prendre un peu l'air et voir l'air triste du domaine abandonné pendant des années, elle eut la surprise de découvrir que les paysans n'avaient pas quitté ses terres. Suspicieuse et mécontente, elle fut abordée par une femme maigre en triste état qui lui fit une demande à laquelle la jeune fille ne s'attendait pas. N'ayant plus ni foyer, ni travail, dans leur village en dépérissement, elle lui suppliait de les laisser travailler pour elle, au Château de St Fiacre. La jeune fille resta interdite. Elle n'avait pas pensé à trouver du personnel. Elle accepta. Il y avait donc, à compter de ce jour, des paysans pour travailler et entretenir les jardins et le château, retravailler les terres, refaire vive le domaine. D'ici peu, un village se construirait un peu plus loin, le village de ce qui devenait ses gens.

Peu à peu, le château reprenait vie et ravie de voir ce nouveau changement, Éris estima qu'il était temps de retourner au Canyon Cosmo. Pour la première fois en quatre ans, elle retournait dans ce village où sa mère l'avait emmenée vivre, après être tombée dans la pauvreté et avoir dû fuir le château. Éris ne pensa à rien d'autre durant la route qui la séparait du village et fut profondément choquée une fois sur place. Il se trouva qu'on lui fit un bon accueil, mais elle remarqua tout de suite leur regard triste et profondément désolé. Quand elle leur demanda ce qui était arrivé, on ne lui répondit pas tout de suite. Éris l'apprit d'elle-même en allant directement chez elle. La maison était vide et on aurait dit que plus personne n'y habitait depuis longtemps, bien qu'elle soit toujours entretenue. Une villageoise lui expliqua alors que sa mère avait disparu, il y avait de cela quelques années, pour partir à sa recherche. Elle ne revint jamais et personne ne la revit, malgré les battues qu'ils avaient organisées. Sans rien montrer, Éris remercia les habitants du village Cosmo et partit. Définitivement, il n'y avait plus rien ici.

Les jours suivants, Éris se montra extrêmement silencieuse et passait la plupart du temps près d'un feu de cheminé. Un soir, inquiet, Phobos décida de rompre le silence, mais elle fut la plus rapide.

« Si j'avais donné des nouvelles, ça ne serait pas arrivé. »
« Peut-être pas, mais en sachant quel risque tu prends tous les jours, elle aurait peut-être essayé de te retrouver quand même. »
« Ça m'étonnerait. »

Phobos pencha la tête sur le côté.

« On ne sait jamais comment peuvent réagir les humains dans le malheur.. Quand est-ce arrivé ? »

La jeune fille réfléchit quelques instants.

« Quelques mois après la maladie de Dialga. » dit-elle, pensive. « Il y a quelques années les dieux dragons sont entrés en conflit, je me suis réveillée un matin, j'avais vieilli de plusieurs dizaines d'années en une nuit et j'avais une puissance magique folle. C'était terriblement grisant et même si cette expérience n'avait rien de très normal, j'ai bien aimé cette nouveauté. À la suite de ça, j'ai voulu trouver Sulfura, on dit que posséder ses plumes vous accordent un pouvoir plus grand, mais j'ai fait choux blanc. Et puis le conflit s'est apaisé et tout à reprit sa normalité. »

« Hmm, je vois… Ça n'a peut-être rien à voir avec toi, qui sait comment cela a pu l'affecter. Comme tu as pu le voir, Crépuscule a été et est toujours affectée parce qu'elle a vécu. »

Éris resta silencieuse. De lassitude, elle posa sa tête sur se genoux, fixant la danse du feu du regard. Jamais elle n'aurait pensé que les choses puissent prendre cette tournure un jour. Le malheur allait-il enfin lâcher sa famille ? Que se passerait-il encore, si on apprenait en plus qu'Éris la chasseuse de prime, vivait là ? Elle avait déjà quelques rivaux dans le métier, elle ne voulait surtout pas les attirer jusque dans le domaine… Elle aurait aimé que tout cela change un peu.

« J'ai envie de changement. Je ne veux pas attirer mes rivaux ici. J'en ai trop fait, s'il s'en prenait au domaine… »

Phobos dressa une oreille attentive.

« Éris devrait disparaître… »
« Qu'est-ce que tu vas faire ? »
« Changer de nom… Pas pour ici évidemment… Pendant les voyages. D'ailleurs, vous aussi, vous devriez changer de nom. Par prudence. »
« Ce serait bien en effet, des noms, plus appropriés. »
« Ça ne te gêne pas ? » demanda la jeune fille en tournant la tête vers lui.
« Non, dans la culture de mes anciens maîtres, il était courant de changer de nom lors d'un évènement. Ou du passage à une autre vie. »

Les deux autres concernés pointèrent le bout du museau.

« Bon… (elle prit garde qu'une servante ne se trouve pas dans le salon), Pulsar, Nova et Orage, ça vous va ? »

C'était bien la première fois qu'elle leur demandait leur avis… Cela sembla leur convenir, seul Crépuscule, enfin Orage, ne semblait toujours pas comprendre. Cela dit, elle n'avait pas l'air de comprendre grand-chose de toute façon…

« Moi ben… Lyssa, ça devrait aller… »