[ Clos ] Une nouvelle piste [Khael/Styx/Sylver]

[Sylver Belister]

« Attendez, attendez, expliquez-moi encore une fois ce que nous faisons ici, à Seian ? Que nous allions à Terros, soit, après tout, votre amie la cinglée vous a confirmé que votre père s’était bien rendu dans ce pays. Mais selon ses informations, il se serait rendu sur l’île d’Io Maï ! »

Le Zarbi semblait légèrement irrité, comme à son habitude.

-Certes. Et pourtant, selon ce qu’il me disait lorsqu’il partait en voyage, il affirmait se rendre à la capitale du pays de la terre.
-Simple diversion pour ne pas vous inquiéter voyons ! Vous n’étiez qu’un gosse ! Seian est un lieu plus sûr que cette île sauvage ! Et peut-être souhaitait-il également dissimuler des activités moins licites que le simple commerce ! Qu’avez-vous en tête à la fin ?
-La recherche directe du meurtrier de ma famille n’a absolument rien donné. J’ai donc décidé de modifier mon angle de recherche.
-Quoi encore ? »

Le Zarbi semblait passablement énervé, aussi décidai-je de ne pas le faire languir davantage.

« Il est possible que le commerce mené par mon père soit justement la cause de sa mort. Mais j’ai eu beau chercher dans les registres à l’époque, mon père restait très vague quant à ses relations à Terros alors qu’il faisait preuve habituellement d’une extrême minutie lorsqu’il couchait sur papier le compte rendu de ses négociations.
-Vous voulez donc retrouver le partenaire de votre père ici à Terros ? Quarante ans après ? Et vous pensez qu'il se trouve à Seian parce qu'il vous a dit qu'il se rendait là-bas ? Vous divaguez ! Ce négociant, s'il existe, n’est probablement plus de ce monde !
-Peut-être… Et peut-être pas. En outre, nous avons un indice.
-Et lequel ?
-Mon père était avant tout, comme je l’ai été moi-même par la suite, négociant en houille. Par conséquent, il y a de bonne chances qu’il ait fait affaire avec des gens qui utilisaient ce matériau et en bonne quantité.
-Des forgerons… Ce n’est pas ça qui manque par ici. Si c’est bien pour cette raison qu’il se rendait dans ce pays, ce dont je doute fort. Mais je suppose que pour ne pas attirer l’attention, votre père aura pris soin de faire un peu de négoce, afin d’avoir une explication à sa présence dans ce pays ?
-Précisément.
-Et comment comptez-vous vous renseigner ? Les gens vont trouver ça bizarre si vous posez des questions sur une affaire qui s’est déroulée il y a quarante ans. Or, vous devez rester discret.
-Très simple. J’ai décidé d’adjoindre le métier de biographe à la fonction de conteur de ce cher Sylver Kiplinger. Et même si mon père n’était pas célèbre au point d’avoir son biographe personnel, il me suffira de dire que le comité de direction de son entreprise m’a engagé pour réaliser un ouvrage à la gloire de leur fondateur. L’idéalisation des figures fondatrices est un procédé de plus en plus prisé dans le monde des affaires de nos jours. Cela fait une bonne publicité auprès de la concurrence et de la clientèle.
-Je vois. C’est assez malin. Mais le résultat reste incertain. D’abord, il faut que votre père ait effectivement fait affaire avec ce forgeron. Ensuite il faut que ledit forgeron soit encore en vie et enfin qu’il se souvienne de votre père, et comme vous le savez vous-même, la mémoire humaine est à peu près aussi fiable que celle d’un Ramoloss, ce qui prouve encore une fois la futilité de votre espèce. En conclusion, nous ne sommes pas encore sortis de l’auberge !
-Raison de plus pour commencer tout de suite les recherches !
- Je suppose que c’est pour cela que vous avez envoyé votre chat et votre chien devant ? Elles jouent les éclaireuses ?
-Exactement. Après tout, ce sont des ramasseuses certifiées et grâce à leurs cheminées, les forges sont assez faciles à repérer. Je préfère malgré tout attirer le moins possible l’attention et dans la mesure du possible, éviter de parler aux gens de mes recherches…
-Je suppose que deux précautions valent mieux qu’une… Et le machin de pierre sans cervelle ne peut-il pas nous aider depuis le ciel ?
-Kaiser préfère parcourir les cieux à sa guise, comme d’habitude, et tant qu’il ne s’agit pas d’une épreuve ou d’un combat je préfère ne pas faire appel à lui. C’est un guerrier avant tout et il lui faut en permanence relever de nouveaux défis physiques. Une simple recherche de bâtiment n’est vraiment pas dans ses cordes…
-C’est bien ce que je disais, une brute sans cervelle…
-En attendant, je vous propose de nous rapprocher du centre-ville. Les forges sont par là-bas, non loin des armureries normalement, et qui sait, peut-être apprendrons-nous des choses intéressantes en nous mêlant à la foule.
-Je n’ai rien à objecter si ce n’est que votre plan me semble bien trop hasardeux et incertain…
-Nous verrons bien… »

Et nous nous dirigeâmes vers le centre-ville à la recherche de forges. En combinant mes recherches à celles de mes Pokémon, nous localiserions rapidement ces bâtiments et en ferions rapidement le tour. Ensuite… Je n’avais plus qu’à prier Sulfura pour que la chance nous sourie.

En réalité, j’avais bien une autre idée sur la raison qui aurait pu pousser mon père à se rendre ici à Seian. Mais déjà que Tétrocruchamoule n’était que moyennement convaincu par des explications élaborées à partir d’éléments certains, je doutais fort que théories qui ne reposaient sur aucun fait concret allaient le convaincre. Et pourtant…

Pourtant Victoria m’avait révélé avoir découvert que mon père avait mené ses affaires  sur l’Io Mai, comme l’avait rappelé le Zarbi. Dès lors, j’avais imaginé une théorie : Et si mon père s’était bien rendu à Seian par le passé mais pour une autre raison que ses affaires… Contrairement à mon Pokémon, je ne pensais pas à un quelconque commerce illicite, mais plus à des considérations… Familiales.

Plus j’y réfléchissais, plus je trouvais logique que mon père se soit rendu dans la capitale non pas pour vendre son charbon, mais pour voir comment se portait son enfant. Après tout, dans son testament, n’avait-il pas indiqué que le libertinage était une coutume familiale fortement encouragé ? Coutume que par ignorance je n’avais pas perpétuée. Mais tout de même… Si mon père était au courant de la menace qui pesait sur notre famille… Le fait d’avoir plusieurs enfants à plusieurs endroits différents sur Erasia ne constituait-il pas là un moyen de survie face au danger ? Mais quel danger au juste ? Qui avait tué ma famille ? Mon père lui-même le savait-il ? Probablement pas, car il n’avait aucune raison de me cacher la vérité dans ce testament. Au contraire, elle m’aurait permis d’être mieux préparé… Mais s’il s’était effectivement rendu à Seian pour confier son fils (ou sa fille) à des gens de confiance, alors ma recherche d’un forgeron qui l’aurait connu perdrait son intérêt… Néanmoins, comme c'était ma seule pist, je décidai de la suivre malgré tout.

Je réfléchissais encore à tout cela tandis que Tétro et moi entrions sous une grande halle sous laquelle se tenait un marché qui proposait apparemment mille et un produits.

[Styx Léthé]

Avis aux amateurs de bonne bouffe.

Le chou farci, c’est super bon, et ça se descend comme du petit lait avec la bonne technique. Pratique si par exemple vous essayez de gagner un concours de bouffe lors du carnaval d’une grande cité dont c’est la spécialité.

Mais putain, ça vous reste sur l’estomac pendant des heures, ce truc !

« Euh… J’veux bien vous croire, mam’zelle Styx, mais pourquoi vous me dites ça ? »

… Ah. Oups. Apparemment j’ai pensé un peu trop fort. Boulette… Eeeeeeeeeet maaaaaaaaaaayrde, maintenant je pense à de la viande !

« Aïe… Bobo le ventre… Trop mangé… » Elle avait belle mine, l’une des recordwomen du concours sus-cité ! Avachie sur un banc le long d’une des artères majeures de Seian, le ventre gonflé à m’en faire péter la ceinture (que j’ai été forcée de relâcher pour éviter ce cas de figure), avec un Zorua atterré par tant de bêtise assis sur ses genoux.

« Zoru ! Rua ! » Bon, à sa tête, c’est un reproche, et… Non non non non non, n’approche surtout pas ton museau de– AAAAAAARGH SALE BÊTE MON BIIIIIIIDE !

Alors que l’abominable petit monstre sautait de mes cuisses pendant que je me tordais de douleur, par sa faute, Bolin me regardait d’un air autrement plus inquiet. Me demande bien pourquoi d’ailleurs, il a déjà reçu sa part pourtant…

« Z’allez bien ? » … Ooookay j’avais oublié qu’il était quand même un peu concon au fond.

« Parfaitement, gamin. Me sens prête à mettre une branlée à un Arcanin au 100 mètres ! » Hein, comment ça c’est du fiel qui s’écoule de mes dents grinçantes ? « J’ai l’air d’aller bien ?! Au lieu de poser ce genre de questions, rends-toi utile. Tiens. »

Parvenant tant bien que mal à atteindre ma besace, je tâtonnai dedans jusqu’à en extraire une poignée de piécettes.

« Va faire un tour jusqu’au maraîcher le plus proche et ramène-moi des Baies Prine. Si t’es assez rapide, tu peux garder la monnaie. Allez, yip yip ! »

Je le regardai s’éloigner après un salut qu’il imaginait sans doute militaire (ça se voit qu’il a jamais vu un corps d’armée au garde-à-vous… Bon, moi non plus certes, mais j’ai déjà eu l’opportunité de voir des sentinelles veiller, et z’étaient autrement plus tendus que ça), avant de jeter un regard rapide à Yoru et de lui donner quelques instructions à voix basse.

« Isoloir, please. Tu le dissiperas quand le gamin reviendra, mais là j’ai juste pas envie de subir encore plus de regards de la part de tous les péons qui me passent devant. »

Le Sombrenard hocha la tête avant de fermer un œil. Et alors que je sentais le monde alentour s’estomper sous l’effet du voile avec lequel il nous dissimulait aux yeux des passants, je m’autorisai à fermer les yeux et tomber dans les bras de Cresselia le temps que Bolin remplisse sa mission.

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« Fiouuuuu. Ca fait du bien par où ça passe ! »

« Ravi d’avoir pu aider, mam’zelle. » Vu ton pourboire t’as intérêt à être ravi, gamin !

Après avoir soigné mes maux de ventre, j’avais trouvé une dernière utilité à mon guide servile avant de m’en séparer : m’amener au grand marché le plus proche. En effet, si mon grand sac à dos était plutôt bien rempli, j’avais pas exactement prévu de dézinguer mes fringues dès le premier jour. L’ajout d’un petit nécessaire de couture à mon barda s’avérait donc primordial !

Il ne nous fallut qu’une dizaine de minutes pour qu’il me conduise en face de ce qui ressemblait vaguement à un grand entrepôt, plutôt bien aéré vu les énormes portes ouvertes sur chaque côté du bâtiment, sous lequel je distinguai vaguement une myriade d’étals.

« Et voilà, mam’zelle. »

« Merci bien, gamin. Sincèrement. » Je lui donnai quelques petites tapes sur le cuir chevelu. « Bon, ça fait quand même un p’tit moment que je te retiens. T’as pas de la famille qui commence à s’inquiéter ? » Ah, si j’interprète bien son expression, ça lui était complètement sorti de la tête. Un peu con, comme je le disais. Mais attachant quand même. « Allez, file ! »

Je ne pus retenir un léger sourire en le voyant me faire de grands signes alors qu’il mettait le turbo pour retourner auprès des siens… Huh, j’ai rêvé ou les pavés glissaient légèrement sur son passage pour le faire accélérer ? Et apparemment sans effort conscient de sa part… Il réalise clairement pas son potentiel, ce petit.

Mettant ces considérations de côté, je pénétrai dans l’espace de vente. Wow, on trouve vraiment de tout ici… De la bouffe… Du matériel de camping… Du mobilier… Des imagés très tendancieux des champions Altanin et Ivanoé ? Eurgh…

Et c’est tout naturellement que, distraite en essayant de me sortir de la tête ces images d’horreur, je percutai un vieil homme au détour d’une allée.



[On va dire que le passage au festival n'a pas été sans conséquences : me fallait bien une excuse pour te retrouver au marché ^^']

[Sylver Belister]

« Vous pouvez m’expliquer quel intérêt vous avez à acheter de veilles boussoles en argent ? me demanda le T d’un ton exaspéré.
-J’ai l’intuition qu’elles nous serviront bientôt.
-Mais pourquoi en avoir pris deux dans ce cas ? Et ces objets n’indiquent même pas le nord ! Juste la localisation des petites aiguilles fournies avec ! Vous voulez quoi ? Organiser une chasse au trésor pour des mômes ? Les glisser dans les vêtements de vos ennemis pour les suivre à la trace ? Je pensais que vous aviez passé l’âge de tel enfantillage, mais je m’aperçois hélas que la vieillesse ne vous a point offert son seul bienfait, la sagesse ! En revanche, en ce qui concerne la gâterie et la sénilité, elle ne vous a pas loupé. »

Je laissais le Zarbi déblatérer sans rien dire. Avec lui, mieux valait ne pas polémiquer. Tel un jeune Doduo, il suffisait d’attendre qu’il s’essouffle pour qu’il revienne de sa propre initiative à de meilleures dispositions. Je ne pus d’ailleurs m’empêcher d’esquisser un sourire à cette pensée. Si ce Zarbi millénaire et si fier de son grand âge savait que je venais de le comparer à un « jeune »…

-Je peux savoir ce qui vous fait rire ?
-Vos propos m’ont fait me rappeler mes jeux d’enfant, mentis-je, quoi que ce ne fut qu’un demi-mensonge car j’avais bien joué dans ma jeunesse avec de tels outils.
-C’est bien ce que je disais, soupira le Zarbi, la sénilité… ATTENTION ! »

Malheureusement pour moi, l’avertissement du Zarbi arriva trop tard et je fus heurté de plein fouet par une personne visiblement pressée. Je serai tombée à la reverse si une paire de bras secourables ne m’avaient pas retenu in extremis. Je repris rapidement mes esprits, et, levant les yeux, je vis qui m’avait percuté : il s’agissait d’une jeune fille d’un peu moins de vingt ans aux longs cheveux blancs. Relativement musclée, il n’était pas difficile de deviner chez elle une certaine aptitude pour le combat. Mais je n’avais pas encore récupéré mon équilibre que Tétrocruchamoule intervenait déjà, à sa manière :

« Non mais dites donc vous, ça vous arrive de regarder où vous promenez vos membres dégoutants que vous appelez « jambes » de temps en temps ? Je suis sûr que vous avez foulé des excréments et des tas d’ordure avant de venir en plus. Vous êtes bien une humaine, vous ! Aucun souci à rester en contact avec ce sol si sale ! Tssss J’espère au moins que vous allez vous excuser ! D’accord, mon dresseur n’est plus tout jeune et il commence même à devenir sénile, mais d’après mes calculs, il ne tombera pas en poussière avant quelques années, et jusque-là, j’ai besoin de lui ! Alors vous n’avez pas intérêt à l’abimer tant qu’il est en vie, sinon je vous raconte l’intégralité de l’histoire pathétique de votre pitoyable espèce, et croyez-moi, devant tant d’inepties, même un esprit aussi limité que le vôtre aura soudain envie de se suicider avant même la fin du premier quart du premier chapitre de votre histoire ! Tenez vous le pour dit, foi de Tétrotruchamoule, puissant leader de la Multitude !
-Mince, les aiguilles » m’exclamai-je alors.

En effet, dans ma chute, j’avais malencontreusement fait tomber les petites pointes de métal fournies avec les boussoles. Heureusement, Tétro en rattrapa neuf sur les douze avec ses pouvoirs, tandis que deux autres furent malencontreusement déviées de leur trajectoire par un courant d’ar, et allèrent rouler sous des étals non loin. Quant à la dernière aiguille, un Pokémon tout rose me la tendit gentiment, car il veanit de la ramasser ! Par Sulfura, avec tout ça, je ne l’avais même pas remercié de m’avoir retenu ! Il s’agissait d’une Grodoudou ma foi fort serviable.

« Merci beaucoup, lui répondis-je. Pour cette aiguille, et pour avoir évité une mauvaise chute. »

Le gentil Pokémon m’adressa un grand sourire tout en gazouillant, mais mon attention fut bien vite attirée de nouveau par les plaintes du Zarbi :

« Raaaaah, c’est malin, vous êtes contente de vous, j’espère ! A cause de votre maladresse, nous avons perdu deux aiguilles ! Je ne sais pas ce qui me retient de vous… Bah, oubliez ça, votre espèce si pitoyable n’est même pas digne de ma colère ! »

J’avais désormais repris contenance et à ce que je vis, la jeune demoiselle ne semblait faire que peu de cas de la diatribe du Zarbi irrité. A y regarder de plus près, avec ses cheveux blancs et le Zorua qui se trouvait non loin d’elle –le sien ?- elle me faisait beaucoup penser à Yuki, que j’avais rencontrée à la nouvelle-Gilénas. Mais la ressemblance s’arrêtait là car celle qui me faisait face semblait bien plus âgée et plus musclée que la jeune Terrosienne.

Je profitai que le T marquait une courte pause dans son réquisitoire, probablement afin de réfléchir rapidement à de nouveaux arguments prouvant l’ineptie de la race humaine, afin d’en placer une.

« Sachez que je ne partage pas les propos de mon Pokémon mademoiselle et…
-QUOI ?
- Vous m’avez bien entendu, répliquai-je à la lettre télépathe. Il ne s’agit que d’un banal accident sans gravité, inutile de rameuter l’armée pour si peu !
- Sans gravité ? Il y a des jours où je ne sais vraiment pas pourquoi je voyage avec un sénile comme vous, et pourtant, je puis vous assurer que mon savoir est infini ! »

Et il plongea dans un mutisme obstiné, ce qui me permit enfin de me présenter convenablement :

« Bonjour mademoiselle, sachez que je suis désolé pour ce petit incident, mais n’étant pas responsable des actes de Tétrocruchamoule, je ne peux m’excuser à sa place. Je suis Sylver Belister, conteur itinérant originaire du Cosmo Canyon en Flamen. Enchanté de faire votre connaissance. »

Et je m’inclinai en souriant comme à mon habitude selon l’usage consacré. Comme je l’avais dit au T, cette petite bousculade n’était pour moi qu’un incident mineur, et provoqué par une femme de surcroît, je n’allais donc pas remuer ciel et terre pour châtier la coupable ! Et puis la musculature de cette jeune personne indiquait clairement qu’elle savait se battre, et mieux valait ne pas chercher querelle à une guerrière, bien que la placidité dont elle avait fait preuve face au discours accusateur du Zarbi me rassurât sur ce point.

Soudain, je sentis qu’on tirait sur ma manche pour attirer mon attention. C’était la Grodoudou, qui me désigna deux étals différents avec sa patte. Se pouvait-il que…

« Tu as vu où sont tombées les aiguilles ? »

La Pokémon hocha la tête en souriant puis se déplaça vers un des points qu’elle m’avait indiqué. Mister T aurait pu sans doute récupérer les deux pointes réfractaires en un instant, mais borné comme il l’était, il ne me proposerait pas son aide de sitôt maintenant que je l’avais « vexé »… J’allais donc devoir me mettre en quête des aiguilles seul mais heureusement, cette charmate Grodoudou était disposée à m’aider.

« Merci beaucoup, lui dis-je, j’arrive dans un instant ! »

Puis me retournant vers la jeune fille :

« Veuillez m’excuser mademoiselle, mais je dois aller récupérer mon bien qui a roulé sous cet étal. Je vous souhaite une bonne journée ! »

Et je m’inclinai une dernière fois puis rejoignis la Grodoudou, inspectant attentivement le sol à la recherche des aiguilles manquantes.

[Styx Léthé]

Légèrement hébétée par le recul de la collision, je m’apprêtai tout de même à tendre un bras pour retenir le vieillard (j’allais quand même pas prendre le risque qu’il se casse un os en faisant une mauvaise chute) avant de m’apercevoir que quelqu’un couvrait déjà le problème ; un Grodoudou qui se trouvait juste derrière lui venait en effet de l’empêcher de tomber sur les fesses.

Remarquant assez absentement que Yoru avait apparemment sauté de son perchoir au moment de l’impact, je focalisai mon attention sur l’homme que je venais d’heurter. Plutôt âgé comme j’avais déjà pu le remarquer, au vu des rides qui creusaient le contour de son visage (j’aurais bien mentionné la blancheur de sa pilosité comme indice, mais c’aurait été plus qu’hypocrite de ma part). Des yeux noirs encore un peu confus, ce qui était compréhensible vu ce qui venait de se produire. Un brushing presque impeccable. Une moustache qui avait clairement demandé un certain temps d’entretien pour atteindre sa forme du moment. Un petit gilet noir par-dessus une chemise blanche, assorti à son pantalon en tissu et à ses chaussures. Un nœud-papillon rouge venait compléter l’ensemble, qui formait donc un gentleman fort bien vêtu pour l’endroit où nous nous trouvions… Un négociant peut-être ? Pas un gars du coin en tout cas ; outre sa tenue, il était clairement beaucoup trop maigrichon pour être Terrosien, même en tenant compte de sa vieillesse.

Ah, oui, j’allais oublier !

« Ah, désolée mon vieux ! J’étais perdue dans mes pensées, j’vous avais pas vu arriver ! Pas trop de mal j’espère ? »

Mais avant qu’il puisse me répondre, je me dis soudainement agresser par… Une lettre. Littéralement hein : un T noir avec un gros œil en bas de sa barre verticale qui venait de remplir l’ensemble de mon champ de vision. Et avant que j’aie le temps de pleinement absorber le regard courroucé qu’il me lançait, une voix nasillarde se mit à résonner dans mon esprit et se lança dans une diatribe !

Ok, PAUSE ! Analyse rapide de la menace. Le physique de la bestiole ressemblait aux descriptions que j’avais pu lire d’un Zarbi. Espèce de type Psy, donc probablement la source du monologue qui se jouait à l’intérieur de ma tête. Réputés pour vivre et se déplacer en groupuscules, mais celui-là était visiblement le seul du coin, donc selon toute vraisemblance appartenant au vieux monsieur (hypothèse presque immédiatement confirmée par ses propos). Individu apparemment doté d’une option multitâche, si le léger halo bleuté autour de quelques aiguilles d’argent en suspension était une indication ; action non-hostile ceci dit, aucune de pointée sur moi. Et, au ton de son discours, extrêmement imbu de sa petite personne ; sérieusement, pour un simple œil décoré, il avait une sacrée grande gueule le machin !

Retour à la situation présente. Ignorant à moitié le discours de ce "Tétrocruchamoule" et ne le gratifiant que d’un haussement de sourcil, j’échangeai un regard rapide avec mon Zorua. Il inclinait légèrement la tête sur le côté, comme s’il cherchait à comprendre ce que cette drôle de chose noire faisait aussi près de mon visage… Ce qui en y réfléchissant était probablement le cas : pouvoirs d’origine Psy sur un type Ténèbres, c’est sûr que ça risquait pas de marcher. Je lui fis signe de laisser passer : pas la première fois qu’un péon mécontent essayait de me donner ses quatre vérités, après tout.

Ah, apparemment le vieux va un peu mieux, vu qu’il m’adresse la parole… Pour se lancer dans une rapide dispute avec son Pokémon. Huh. Il avait l’air sérieux pourtant. Meh, ça doit être un truc de vieux. Bref. Leur problème réglé, il se présenta comme un conteur itinérant Flamenois. Bien un étranger donc, bien joué moi-même ! Oups, la politesse…

« Styx Léthé, adolescente désœuvrée en voyage autour du monde, qui vient d’un trou paumé à Mizuhan dont vous avez probablement jamais entendu parler. Enchantée aussi. Et la p’tite boule de poils à côté de moi, c’est Yoru. Vous en faites pas pour ça, j’ai l’habitude d’entendre des vieux grincheux, humain comme Pokémon, me faire la leçon. J’ai vite appris à les ignorer.»

Encore une fois, une réponse de sa part fut retardée par son Grodoudou qui lui faisait de grands gestes de sa patte. De ce que je compris de leur échange, les aiguilles en suspension n’étaient qu’une partie d’un tout, et le reste était parti voler sous les étals. Probablement une conséquence de la collision… Oups ? Bon, bah vu que c’est un peu complètement de ma faute, y’a plus qu’une seule solution hein ?

Je lui emboîtai le pas alors qu’il tentait de me congédier.

« Nan mais vous allez pas faire ça tout seul quand même ? J’vais pas vous laisser vous casser le dos par ma faute ! Laissez faire, j’vais vous les récupérer vos aiguilles, c’est la moindre des choses ! »

Puis, après un court instant de réflexion, j’ajoutai un peu gênée :

« Euh… Par contre… Si vous pouviez demander à votre coussin rose de me montrer où elles sont passées, ce serait pas de refus. »

Je me retournai sans attendre la fin de sa réponse et remarquai le bras désormais fixe du ballon souriant. Ah bah. Merci bien.

Me dirigeant vers l’étal désigné, j’expliquai rapidement le problème au vendeur (de tapis pour ceux qui se poseraient la question) avant de me plaquer au sol… Eeeet de remarquer que mon bras allait être trop court pour couvrir toute la surface couverte. Et franchement la flemme de me relever juste pour de petits déplacements. Heureusement, dans ce genre de situations, y’a une solution très simple : je débouchonnai ma gourde et, usant de mes dons d’hydrokinésie, générai des appendices extensibles que je fixai aux extrémités des doigts de ma main droite.

Désormais prête à l’action, je me remis en position et attendis les instructions du Pokémon Bouboule.

[Khael]

Carnaval ... Il n'y a pas à dire, c'est la plus belle des fêtes. Les costumes, les stands, les confettis et le reste, j'ai toujours adoré. Mais parfois, il vaut mieux s'éloigner de la file, et se reposer quelques temps, avant de recommencer à festoyer. Que ça soit pour regarder le paysage, lire ou même écrire, il nous faut toujours quelques instants de répit, pendant une fête aussi excitante. Et c'est ainsi, que juste après avoir été au stand de Tir, je décidai de faire un petite pause, afin de profiter pleinement  de la fête, quand je la reprendrais. Ainsi, je m'assis sur un banc, d'une des plus calmes des places de Seian, afin de profiter de laz sérénité du lieu, et de lire un livre. A côté de moi, quelques passants admiraient la place, si impressionnante, ou encore, se reposaient, allongés par terre. Des Cotonvoles s'amusaient à planer de bâtiments en bâtiments, dans la place, tandit que quelques Larvayettes s'amusaient à tisser des vêtements avec ce qu'ils trouvaient. Mon Doudouvet était déjà partis s'amuser sur la place, avec tout les autres pokémons. Je l'ai même vu s'amuser à lancer de la poudre dodo à certains Chacripans, un peu trop agressif à son égard. Le monde est vaste, mais tout les lieux sont plus merveilleux les uns que les autres. C'est la leçon que j'ai réussis à tirer de mon voyage, malgré sa courte durée pour l'instant. J'attendis comme cela quelques dizaines de minutes, quand un premier homme arriva, et fit briser le silence. D'après ce que je comprenais, il était entrain de chercher une piste, mais je ne sais pas pourquoi, et son pokémon, un zarbi je crois, avait peut-être trouvé quelque chose. En tout cas, le papi faisait vraiment trop de bruit pour que je puisse me concentrer correctement. Et puis  ce n'était pas finis ! un deuxième personnage arriva, encore plus bruyant et plus vulgaire que le premier. Celui-ci se plaignait de tout, et percuta même le vieil homme. Je les ignora, reprenant ma lecture de livre, mais les deux personnages discutaient si fort, que cela m'empêchait de me concentrer. Pfff ! ces deux personnes ne respectaient rien, comment faisaient les autres passant pour ne pas se plaindre ? Moi, j'avais trop peur pour leur demander de se taire. Je continua donc mon livre.

Après encore quelques minutes, les deux personnes continuaient de parler, toujours aussi fort. Je n'arrivais vraiment pas à lire ! que faire ? La seule solution était de leur demander de parler moins fort. Je sais, oui, ça n'était pas poli, et les deux brailleurs risquaient de mal le prendre, mais avais-je d'autres solutions ? Je pouvais toujours m'en aller, mais si même cette place, pourtant si calme d'habitude, était agitée, je ne trouverais pas de meilleurs endroits. Je pris donc tout mon courage, tout en me dirigeant vers les perturbateurs, et leur déclara, d'un seul trait, en fermant les yeux :

-  excusez-moi messieurs, mais pourriez-vous parlez un peu moins fort, s'il vous plait ? je n'arrive pas à me concentrer sur mon livre, tant vous criez.

[Sylver Belister]

Tandis que la jeune demoiselle prénommée Styx se mettait en position sous ‘étal du marchand de tapis, la Grodoudou la regarda quelques instants puis se retourna vers moi, ces grands yeux verts exprimant la perplexité. Je remarquai alors que le Pokémon rose tenait un petit panier sous son bras. Il devait être ici pour faire les courses, et visiblement, il ne comprenait pas ce que Styx attendait de lui. Mais alors que je m’apprêtais à le lui expliquer, une jeune voix masculine m’interrompit et nous demanda de parler moins fort. Certes, ma collision avait provoqué quelque tumulte, mais tout de même, je n’avais pas l’impression d’avoir fait plus de bruits lors de ma présentation que les badauds qui évoluaient en discutant de choses et d’autres tout autour de moi. Mais bon, le jeune homme avait été poli dans sa demande et je ne pouvais décemment pas l’ignorer :

« Mille excuses si nous vous avons dérangé, jeune homme. Toutefois, je vois que vous êtes occupé à lire… Puis-je vous conseiller de vous rendre sur la place qui se trouve derrière cette halle ? J’en viens, elle est bien plus petite et bien moins fréquentée que le marché où nous sommes, et je pense que vous y serez plus à votre aise pour bouquiner. Loin de moi de vous obliger à bouger, jeune homme, ce n’est qu’un simple conseil. De toute façon, nous n’allons pas tarder à partir, ce Zarbi et moi. Bonne journée. »

Je me tournai ensuite vers la jeune fille couchée :

« Malheureusement, je pense que cette Grodoudou ne peux pas vous en dire plus, elle ne sait pas où sont actuellement les aiguilles sous cet étal, elle les a juste vues tomber. Il va donc vous falloir chercher à tâtons… Ceci dit, je peux vous aider. »

Me concentrant, je fis apparaître une fine lanière de flamme, du même type que celles que j’utilisai habituellement pour immobiliser un Pokémon dangereux, puis fis descendre cette mèche enflammée jusqu’au sol et la fit ramper sous l’étal en prenant bien garde à éviter tout contact entre les flammes et le stand en bois. Afin de prévenir encore plus tout risque d’incendie, je dissipai la majeure partie de l’énergie générée sous forme de chaleur, tout en veillant à dispenser assez de lumière à Styx. Les aiguilles récupérées, je convertis tout le feu en chaleur et laissai cette dernière s’élever dans les airs.

Je remerciai ensuite Styx mais aussi le marchand de tapis pour leur collaboration, et machinalement, je laissai mon regard se poser sur l’étal que je n’avais qu’aperçu jusque-là. Or, parmi les tapis proposés, certains me semblaient familiers, et je finis par reconnaître deux d’entre eux : ils ornaient autrefois le grand salon de ma demeure, celui qui avait brûlé… Et si cet homme était… Non impossible, il avait à peu près mon âge, il était probablement trop jeune à l’époque… Et pourtant… Oui, mais cela risquait de compromettre ma couverture… Mais le jeu en valait la chandelle !

Finalement, je demandai donc au vendeur :

« Excusez-moi, mais produisez-vous vous-même ce que vous vendez ?
-Bien sûr ! me répondit l’homme avec un sourire teinté d'orgueil ! Nous sommes fabricants de tapis depuis six générations dans ma famille ! Et nous fabriquons nos propres modèles et de grande qualité. L’un d’entre eux vous intéresse ?
-Eh bien, deux d’entre eux en fait. Ce rouge-ci, et celui aux motifs triangulaires. C’est idiot, mais il me semblait avoir les mêmes chez moi autrefois… Mon père les avait achetés il y a des années… Il voyageait alors régulièrement à Terros, serait-ce possible que ce soit chez vous ? »

L’homme ne répondit pas tout de suite, occupé à réfléchir, puis il eut un sourire et me demanda :

« Votre père vous ressemble, non ?
-C’est mon portrait craché, répliquai-je, plein d’espoir.
-Alors vous avez de la chance. Oui, il se trouve que je l’ai connu. Je n’étais qu’un gamin à l’époque et il a eu à faire à mon père, mais oui, je me souviens de lui, parce qu’il a marchandé pendant quatre heures pour ces deux tapis. Et bien sûr, mon père n’allait pas se laisser faire ! Le vôtre était dur en affaire, mais il a malgré tout fini par payer ses biens un peu plus cher qu’il ne l’aurait voulu, du moins de ce que m’en a dit mon père. En fait, cette transaction a été ma première leçon de marchandage et mon père s’en est servi de base pour m’apprendre à négocier. Il répétait souvent qu’une aussi belle négociation, il n’en voyait pas tous les jours ! Je crois d’ailleurs que ce fut sa plus longue !
-Ce doit être lui, oui ! Il était négociant, et il considérait le marchandage comme un art et un passe-temps.
-Cela ne me surprend pas.
-En ce cas, oserai-je vous demander s’il était accompagné lors de cette transaction ? D’ordinaire, mon père emmenait souvent des clients voir des transactions qu’il faisait avec des vendeurs sur les marchés comme vous, afin de les intimider…
-Ah, sourit le marchand, je comprends mieux pourquoi mon père avait cette sensation d’inachevé alors ! Le vôtre a volontairement coupé court pour passer à la suite… Eh bien ma foi, ma mémoire n’est plus aussi exacte que naguère, mais oui, il me semble qu’un homme l’accompagnait. Par contre, je ne me rappelle pas de lui… Mais… »

Un Alakazam sortit alors de derrière le marchand et se posta devant moi. Son dresseur repris :

« Mon ami ici présent a une mémoire infaillible. Je veux bien lui demander de vous aider à une condition
-Quoi donc ? demandai-je par politesse, sachant déjà ce qu’il allait me demander.
-Achetez-moi donc les deux tapis qui vous intéressent !
-Négociations neutres ?
-Certainement. Je m’engage à ne pas utiliser mon Alakazam pour lire en vous, vous ferez de même avec votre Zarbi.
-Soit, je vous en propose 200 pièces d’or la paire !
-Vous exagérez, vu leur rareté, je ne peux les vendre à moins de 600 ! »

J’avais volontairement indiqué un premier prix très bas pour disposer d’une bonne marge de manœuvre, mais pas trop bas pour ne pas rebuter mon interlocuteur. Ces tapis remplaceraient les tapis perdus, mais ils ne valaient rien face aux informations que je pouvais gagner. Mais bien sûr, je ne devais pas montrer à quel point ces informations m’intéressaient. Pour le tapissier, j’étais un simple vieil homme un peu curieux qui cherchait à en apprendre plus sur son père… Mais il se trouve que j’avais été négociant, moi aussi !

Les tractations durèrent un moment, mais pas aussi longtemps que celles de mon père, et finalement j’eus les tapis pour 390 pièces d’or, soit une légère victoire en ma faveur. Modeste, mais c’était toujours ça de pris. Finalement, l’Alakazam me communiqua ses souvenirs ainsi qu’à son dresseur, et ce dernier me révéla l’identité de l’homme :

« Je connais ce monsieur, c’est un forgeron très réputé de Seian, maître Smith. Mais aujourd’hui, il n’exerce plus. Je peux vous indiquer où trouver sa forge si vous voulez
-S’il vous plait, cela me serait d’un grand secours ! J'ai justement entrepris ce voyage pour renouer avec mon passé, revenir aux origines. Si cet homme peut me parler de mon père, il m'intéresserait beaucoup de le rencontrer. »

Il me donna l’adresse, mais alors que j’allais m’y rendre, j’eus soudain une grosse frayeur : la boussole marchait-elle encore après la chute des aiguilles et leur manipulation par tant de monde ? Les pouvoirs psy de Tétro avaient-ils altéré leur développement ? Avec tous ces événements, j'avais oublié la raison première qui m'avait fait explorer ce marché !

« Mademoiselle Styx, voudriez-vous je vous prie me rendre un service ? Pourriez-vous tester si cette boussole fonctionne ? Normalement, elle a été enchantée pour indiquer la position des aiguilles qui sont tombées tout à l’heure, et vu qu’elles sont maintenant toutes en ma possession, elles devraient indiquer ma position. Je vais partir devant en direction de cette forge, voulez-vous bien me suivre avec la boussole ? Je vous dédommagerai pour votre aide cela va sans dire ».

Et pour la deuxième… Mais alors que je m’apprêtais à sortir de la halle, j’eus la surprise de voir Tétro en train de flotter au-dessus du jeune homme qui lisait un livre un peu plus tôt. Vu sa posture, il semblait lui faire la leçon, hélas. Apercevant que je l’avais remarqué, il m’ouvrit sa communication. Il était en train d’expliquer au jeune homme à quel point il avait été grossier d’interrompre ses aînés. Par « aîné », il ne parlait bien évidemment pas de moi mais de lui-même, puisqu’il était plurimillénaire ! Apparemment, le T volant n’avait pas du tout apprécié l’intervention du garçon et il le lui faisait savoir. Comme quoi, son mutisme ne durait jamais longtemps, hélas. Heureusement, il suffit que je dise au Zarbi que j’avais avancé dans nos recherches pour qu’il oublie aussitôt le garçon et me suive dehors, en direction de la forge. Pauvre jeune homme ! Un sermon de Tétro ! De si jeunes oreilles n’étaient pas prêtes pour autant de vilénies… Il me faudrait faire quelque chose pour me faire pardonner.

[Styx Léthé]

Ah. Apparemment la grosse boule rose n’appartenait pas à m’sieur Sylver, finalement. Boah, pour ce que ça aurait changé, pas la peine de me fustiger pour cette erreur. Comment je pouvais savoir, hein ? Bon par contre, sans guide, ça allait pas être évident de repérer les petits machins. J’ai pas encore le niveau pour avoir le retour tactile avec mes tentacules aqueux, moi ; Yoru aurait p’tet pu aider vu qu’il voit relativement bien dans le noir, mais il était trop gros pour tenir sous cet étal… Une illusion pour partager avec moi son champ de vision ? Ca peut le faire, mais faudrait compenser le décalage visuel dans mes mouvements…

Ouuuuu bien le vieux pouvait juste montrer qu’il s’y connaissait au moins un peu en pyrokinésie en générant un filament de flammes qui vint se glisser près du sol, me fournissant ainsi une source de lumière et révélant ainsi quelques éclats métalliques. Huh, mais y’en a pas que deux ? Voyons voir ça…

Je déployai mes appendices d’eau vers les différentes sources de réfraction, en prenant soin d’augmenter leur tension de surface une fois la cible atteinte pour assurer l’adhésion prolongée et ne pas avoir à faire de deuxième essai. Une fois les quatre objets sécurisés, je ramenai mon bras vers moi tout en contractant les extensions de mes doigts, et pus contempler mon butin.

Je déposai immédiatement deux aiguilles argentées dans la main tendue du vieil homme, acceptant d’un hochement de tête ses remerciements. Le laissant se retourner pour faire la causette au marchand (une histoire de famille pour ce que j’en entendais), je reportai mon attention sur mes deux autres prises. L’une était une simple pièce d’or, probablement tombée de la bourse d’un client distrait ; meh, c’est toujours ça de gagné, y’a pas de petits profits comme me disait souvent P’pa. L’autre, plus massif, me rendit perplexe : il s’agissait en effet d’un cylindre creux, affublé à chacune de ses extrémités d’un petit disque. Ca me disait vaguement quelque chose, mais je n’arrivais à mettre le doigt métaphysique dessus…

La réponse me vint en l’empochant et en parcourant les étals proches du regard. Je me retins de justesse de me mettre une baffe : on était dans la zone textile du marché, évidemment que c’était une bobine de fil vide ! Elle avait dû tomber de l’étal voisin, qui était visiblement celui d’un couturier/mercier si les quelques vêtements en présentation à côté du petit matériel étaient une quelconque indication. Exactement ce que je cherchais en venant ici, tiens. Le hasard fait bien les choses !

Je me décalai des deux messieurs occupés dans un va-et-vient féroce de négociants afin de m’adresser au petit jeune (un apprenti probablement) qui tenait boutique.

« Salut p’tit.

– Bonjour mademoiselle ! » Ah, il a déjà plus de tact que Bolin, c’est bien. « Que puis-je faire pour vous ?

–Me dépanner. J’ai eu un petit souci de parcours, comme tu peux voir. » J’écartai mon manteau pour indiquer d’une main les quelques déchirures de ma chemise. « Et vu que j’ai pas tant de rechanges que ça, je me suis dit qu’investir dans un peu de matos pour rafistoler tout ça serait une bonne idée. Qu’est-ce que t’as à me proposer ? »

Le gamin –enfin, je dis gamin, il doit quand même avoir quoi, 15-16 ans, mais il reste plus jeune que moi, muahaha– observa l’étendue des dégâts et tendit une main pour jauger la texture du tissu. Je lui décernai mentalement un bon point pour ne pas s’être attardé sur ma poitrine, c’est suffisamment rare pour être noté, cette attitude. Il réfléchit quelques secondes, puis son regard s’éclaira et il se mit à farfouiller dans son stock.

« Je crois que j’ai ce qu’il vous faut… Là ! » Il sortit fièrement une bobine de la teinte exacte de mon habit et la posa sur son comptoir. « Pur produit de Cotovol, tressée à la main, teinture à base d’extraits de Baie Zalis. 10 pièces d’or la bobine, pour quatre achetées la cinquième et une aiguille sont offertes. Et pour 10 pièces de plus, je vous fais votre réparation ici et maintenant ! »

Là, vous serez obligés d’être d’accord avec moi, ce serait criminel de laisser passer la perche qu’il venait de me tendre.

« Hé bah, tu perds pas de temps, toi ! Attends de m’avoir invitée à dîner avant de me demander d’enlever ma chemise devant toi, quand même ! »

J’affichai un grand sourire alors que le jeune virait à l’écarlate en réalisant la portée de sa proposition et se répandait en excuses. Et les petits ricanements de Yoru, qui s’était re-perché sur mon épaule entretemps, n’arrangeaient pas son état.

« Du calme, c’était juste une blague ! Plus sérieusement, merci pour l’offre, mais je vais pas m’éterniser ici, donc non merci en fait. Mets m’en cinq avec l’aiguille, je règlerai ça moi-même. »

Je préparai la monnaie alors qui lui se calmait en empaquetant le tout. La transaction accomplie, je me retournai vers Sylver, qui avait apparemment terminé son affaire, pour prendre congé, mais il avait quelque chose à me proposer.

Huh. Jouer à un jeu de piste à travers Seian pour tester une boussole magique ? Meh, pas intéres– récompense à la clé ? J’ai rien pensé !

« Bah, j’ai rien de prévu pour le moment, donc ouais pourquoi pas. Je vous laisse quelques minutes d’avance et je vous suis ? Parfait, bon bah à toute alors.»

Le laissant s’éloigner, je réfléchis un instant à la marche à suivre. J’aurais bien voulu passer par les toits pour faire une ligne droite, mais les messieurs de la sécurité que j’avais déjà croisé allaient pas bien le prendre, et j’avais pas particulièrement envie de me retrouver au trou. Surtout si les rumeurs sur le lavage de cerveau étaient fondées. Bon, bah on va juste tourner à chaque rue et on verra ce que ça donne, hein ?



[Je décrirai probablement le labyrinthe des rues avant d'arriver dans le prochain post, pendant que toi tu discutes avec ton forgeron.]

[Sylver Belister]

Je finis m’éloigner du stand du marchand, mes deux tapis sous le bras. Tant que Yuko n’était pas là, je ne pouvais le lui confier, comme je le faisais avec le reste de mes bagages. Mon trajet jusqu’à la maison du forgeron se déroula sans le moindre problème, et je trouvai assez facilement la maison du vieil armurier grâce aux indications de l’Alakazam. Je fus néanmoins surpris en constatant qu’il n’y avait aucune habitation à côté de la vieille forge proprement dite. Ce devait donc être à la fois le lieu de travail et de résidence de ce monsieur Smith…

Je fus également relativement étonné de trouver BlacJack qui rodait devant la batisse. Relativement car après tout, je l’avais envoyé à la recherche des forges de la ville, il était donc logique qu’elle finisse par arriver. Lorsqu’elle me vit – bien avant que moi je ne la remarque – elle me fixa aussitôt du regard et ses oreilles se dressèrent. Elle avait probablement déjà compris que c’était une raison assez particulière qui m’amenait ici… Après tout, avant de les envoyer en vadrouille, Yuko et elle, je leur avais indiqué que je me rendais aux halles pour interroger des gens au sujet de mon père. Elle aussi devait donc s’étonner de me trouver là.

« Regardez qui voilà ! Commenta alors le Zarbi d’un ton Acerbe. Sakastatitik est de retour ! Quel plaisir ! »

Mais un seul regard meurtrier de ma chatte le fit taire aussitôt, et il replongea dans son mutisme habituel.

« Oui BlackJack, expliquai-je à mon Pokémon, je crois que j’ai trouvé quelque chose. L’homme qui habite ici connaissait mon père et je pense qu’il pourra m’en dire plus sur lui. »

La Persian hocha la tête. Elle ne ferait rien tant que je n’aurais pas décidé de bouger. Mais avant même de toquer à la porte, j’examinais l’extérieur de la forge, et plus particulièrement l’aspect de la porte d’entrée devant laquelle je me trouvais. Bien que manifestement de très bonne facture, sa peinture défraîchie était écaillée en de nombreux endroits et les zones privées de ce vernis n’avait pas manqué de rouiller avec le temps. Si l’homme qui vivait ici avait construit cette porte, alors il y avait de bonne chance qu’il soit… Il n’y avait qu’un seul moyen d’en être sûr.

« Entrez ! » me répondit une voix sifflante mais non dépourvue de puissance bourrue. Je posai mes tapis devant l’entrée sous la garde infaillible de ma Persian qui se posta aussitôt devant mes biens et entrai.

La pièce ou je pénétrai était de petite table. Elle contenait quelques meubles, dont une table centrale et trois chaises. Au fond à gauche se trouvait un escalier qui menait à l’étage supérieur, et sur le mur droit, j’aperçus une autre porte en fer que je soupçonnais de mener à la forge proprement dite.

L’homme qui avait parlé était assis sur une des chaises, occupé à tailler un bout de bois avec un couteau. Lorsque j’entrai, il posa son ouvrage sur la table puis braque ses yeux d’un bleu de glace sur moi. Sa tête était chauve et ridée, marquée par l’âge mais ses yeux perçants et sa musculature encore bien développée pour un homme de son âge – il devait avoir une petite dizaine d’années de plus que moi - démentaient cette impression de faiblesse. Lorsqu’il me parla, sans me laisser le temps de me présenter, le chuintement que j’avais entendu un peu plus tôt avait disparu.

« Et moi qui pensait que c’était le docteur qui venait pour ma femme… Inutile de vous présenter. Votre physique parle pour vous. Vous lui ressemblez énormément. Mais en plus jeune, bien évidemment. Seriez-vous son fils ?
-SI vous parlez de Lucius Belister, alors c’est le cas. Je me nomme Sylver Belister.
-Et j’imagine que vous marchez sur les traces de votre paternel ? »

Le ton sur lequel il avait posé cette question me mit aussitôt sur mes gardes. Que voulait-il dire par là ? Que je venais lui vendre du minerai pour sa forge ? Impossible, il était à la retraite depuis longtemps. Que j’étais moi aussi un négociant ? Non, il y avait autre chose, aussi choisis-je une réponse modérée :

« Oui et non. J’ai découvert il y a peu que j’ignore trop de choses à son sujet pour pouvoir affirmer que je connais bien son passé. J’ai découvert récemment que mon père avait souvent fait affaire avec vous, et il est passé vous voir peu avant sa disparition. J’aurais simplement voulu savoir s’il ne vous avait pas confié quelque chose, la dernière fois que vous l’avez vu
-Oh ça oui il ‘a fait !
-C’était un enfant, n’est-ce pas ?
-Un bébé, pour être exact. Ma fille. Belister votre père était un sacré requin. Il monnayait sa moralité aussi bien que n’importe quelle autre marchandise. Environ cinq ans avant sa mort, il avait sauvé ma forge de la faillite. Je manquais de clients suite à l’ouverture d’un concurrent, et d’expérience. J’étais jeune à l’époque. Mais votre père a investi massivement chez moi et cela m’a permis de moderniser mon équipement et de faire face. En échange, il m’a simplement demandé de lui rendre un « service » le moment venu. Il m’a simplement expliqué qu’il ne pouvait pas s’en occuper lui-même.
-Je vois… Et votre fille… Où est-elle ? Et… Comment s’appelle-t-elle ?
-Wanda Serwin, femme du Capitaine Serwin… S’il n’a pas été rétrogradé depuis… Cet homme est fou. Il n’a fait qu’apporter le malheur à ma fille et à sa famille…
-Je vois… Mais pourquoi m’avez-vous révélé tout ça ? Vous ne semblez pas porter mon père dans votre cœur…
-Peut-être, mais je suis un homme de parole. Et le service que je lui ai rendu incluait de dire la vérité à ses enfants si jamais ils venaient me poser des questions…
-Et… Wanda… Est donc au courant ?
-Elle sait que je ne suis pas son géniteur. Mais elle n’a jamais cherché à savoir de qui il s’agissait. Je n’ai donc jamais eu à répondre à ses questions…
-Je vois… Mais je manque à tous mes devoirs. Vous disiez que votre femme était souffrante, et il se trouve que je suis défenseur. Je ne suis pas médecin, mais si vous le désirez, je peux toujours…
-Ne le prenez pas mal, monsieur Belister, mais suite au « service » rendu à votre père, j’ai juré de mettre le maximum de distance entre vous et votre famille. Je ne peux vous empêcher de voir ma fille. Je suis trop vieux pour ça et c’est une femme adulte à présent. Mais je vous demande de ne pas lui faire de mal, même indirectement. Elle a déjà assez souffert. Et ne vous inquiétez pas pour ma femme, elle n’est pas à l’article de la mort, loin de là. C’est simplement son dos qui est coincé.
-Je vois. Eh bien je vous remercie pour votre mise en garde. Soyez assuré que je ne lui ferai pas le moindre mal, de quelque manière que ce soit. Tous mes vœux de prompt rétablissement à votre épouse. Sur ce, je vais vous laisser, d’autant plus que vous attendez de la visite.
-C’est ça. Au revoir ».

Une fois dehors, je commençai à réfléchir à cette conversation tout en caressant machinalement le crâne de BlackJack qui avait remarqué mon trouble. Peut-être valait-il mieux ne pas rendre visite à… ma sœur… Wanda… Dès maintenant. Je risquais de l’impliquer dans un conflit qui la dépassait. Je réfléchissais encore aux implications de tout ceci tandis que j’attendais l’arrivée de jeune Styx devant la vieille forge.

[Mon avant-dernier post je pense, à moins que t'aies des truc à ajouter]

[Styx Léthé]

Bordel.

Qu’est-ce.

Que.

C’est.

CHIANT !

Ça m’apprendra à ouvrir ma grande gueule juste parce qu’il y a une carotte à la clé tiens ! Bon, pas que pour ça en fait. Il a l’air sympa ce m’sieur Sylver, et c’est vrai que j’avais franchement rien d’autre à foutre, donc Yoru m’aurait probablement mis un coup de patte accompagné d’un regard insistant, et j’aurais fini par accepter même sans la promesse d’une récompense.

J’avais juste oublié un touuuuuuut petit détail :

LES RUES DE SEIAN SONT UN PUTAIN DE LABYRINTHE !

Ok, j’avais laissé au vieux une bonne dizaine de minutes d’avance avant de partir, mais je me disais que j’aurais aucun mal à rattraper un plus-ou-moins sexagénaire chargé de deux tapis ! Mais là ça va faire une bonne demi-heure que je me perds dans ce dédale de ruelles à la noix, et ça commence sérieusement à me concasser les ovaires ! Suis déjà repassée devant les stands du carnaval (j’en ai d’ailleurs profité pour troquer mes jetons contre quelques babioles qui me semblaient utiles pour plus tard), mais là j’en ai ma claaaaaaaque !

Il est temps de prendre les mesures qui s’imposent ! Fuck la sécurité !

« Eh, Yoru ? »

« Rua ? »

« A ton avis, ces mecs aux grands chapeaux qu’on a croisé tout à l’heure, ils peuvent nous repérer juste par le poids de nos pas sur les tuiles ? »

« … Zoooooo… ? »

« Ouais, bien ce que je me disais, tant qu’ils sont pas sur le même toit ça devrait aller… Tu penses à ce que je pense ? »

« Rua Zo. » Eh, c’est quoi cette tête d’enterrement ?!

« Sale gosse va. Nan, plus sérieusement, tu penses pouvoir tenir le rythme ? J’vais essayer de minimiser le temps de contact, mais on sait tous les deux que t’as du mal sur les transitions comme ça. »

« Zoru Zorua ! »

« Bon, bon, si tu l’dis ! Allez, en place l’artiste, on va pas tarder à décoller ! »

Alors que mon compagnon remontait se caler dans ma capuche, je me glissai aussi discrètement que possible dans une ruelle sombre et étroite. Vérifiant que personne ne pouvait me voir, je me mis à lentement escalader le mur d’une des deux baraques qui la formaient, prenant appui sur les briquettes irrégulières et mal alignées qui le formaient. Bénis soient les Terrosiens fauchés et leur impossibilité de se payer un Maître pour dresser leurs maisons d’un bloc !

Au fil de mon ascension, je sentis le monde extérieur s’estomper, comme s’il appartenait à un plan d’existence légèrement décalé. Quoique, j’en sais foutrement rien en fait pour cette comparaison, j’ai jamais eu l’opportunité de traîner avec Palkia ou Giratina moi. Enfin bref, vous saisissez l’idée : Yoru utilisait ses petits talents pour me rendre le plus invisible possible à un regard extérieur, ce qui forcément affectait une partie des informations que recevaient mes sens.

Une fois arrivée en haut, je m’arrêtai un court instant pour observer les alentours. Parfait, aucun agent de sécurité flippant en vue, c’est parti mon kiki ! Me propulsant par-dessus le rebord du toit, je sortis la boussole que j’avais stockée dans une poche le temps de la grimpette et, après avoir vaguement vérifié la direction à prendre, je m’élançai à toute berzingue dans celle-ci.

Pourquoi tant de hâte me direz-vous ? Bah pour une raison extrêmement simple que beaucoup ont tendance à oublier :

Yoru n’est qu’un Zorua.

OK, il a déjà des capacités illusoires qui dépassent celles de la majorité des autres espèces, surtout pour son stade évolutif. Mais elles restent quand même vachement limitées dès qu’il s’agit d’autre chose que le camouflage pour lequel ses semblables sont réputés. Il se débrouille plutôt bien quand il s’agit juste de surimposer une information sur les sens d’une personne… Mais quand c’est une illusion généralisée, ça lui demande toute sa concentration, et il a du mal à la faire varier rapidement. Et si les messieurs que j’essaie d’éviter remarquent que y’a des ridules bizarres sur le toit à côté du leur, c’est pas glop du tout quoi.

Limitant en conséquence au maximum le nombre de fois où je devais rebondir, je me dirigeai en ligne presque droite dans la direction de Sylver.

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Dix minutes, quinze agents du Dai Li esquivés, et une presque collision avec un seizième plus tard :

« Bon, bah au final on s’en est plutôt bien tirés, tu trouves pas ? »

Un faible grognement que l’habitude me permit de reconnaître comme dubitatif fut ma seule réponse alors que je corrigeai ma trajectoire pour suivre la modification du cap indiqué par la boussole. Je dois plus être bien loin, ça évolue de plus en plus souvent… Là ! Un vieux avec deux tapis, un Zarbi T et… Huh, il a aussi un(e ?) Persian ? Soit, c’est classe, ça fait gentleman, c’est approprié.

Remarquant la toiture légèrement pentue des bâtiments les plus proches de ce qui semblait être une vielle forge, ainsi que l’auvent qui semblait assez solide au-dessus de la porte de celle-ci, je décidai de m’amuser un peu.

« Tu coupes le voile quand je fais le dernier saut, ok ? »

Re-grognement, cette fois d’un ton plus affirmatif. Oui, il est pas très causant quand il bosse, comme je vous disais. Avec son aval, je pris une petite pause sur le rebord de la dernière bicoque, puis poussai de toutes mes forces pour parcourir les quelques mètres qui séparaient les deux bâtiments. Me réceptionnant le plus délicatement possible sur le toit de la forge, je me laissai glisser jusqu’à l’auvent, et pris une dernière impulsion pour finir par un salto alors que je sentais le monde réaffirmer sa présence.

Et une Styx qui tombe quasi-littéralement de nulle part devant un vieux, une ! Je saluai mon commanditaire, qui s’il avait été surpris par mon arrivée surprise le dissimulait plutôt bien.

« Eh bah, pas évident à trouver, ce coin, monsieur Sylver ! Bon, la bonne nouvelle, c’est que votre boussole marche nickel, même si je vous raconte pas le bordel que ça a été pour tracer un chemin. Vous comptez en faire quoi au fait, si c’est pas trop indiscret ? Un jeu de piste pour des minots pendant vos voyages ? »

Je lui tendis l’objet, qu’il récupéra avec un rapide remerciement.

« Ah, au fait, vous parliez d’un dédommagement tout à l’heure ? Nan, pas la peine de sortir votre bourse, j’ai une meilleure idée… » Je glissai un regard vers la lettre qui me faisait le gros œil. « Où est-ce que je peux en trouver un comme ça ? Enfin, en terme d’espèce je veux dire, j’ai pas envie d’avoir un caractère ou une voix comme ça en permanence dans mon voisinage, mais… C’est compact, c’est discret, c’est Psy… Ca pourrait m’intéresser pour plus tard, vous voyez. »



[En mode ninja sur les toits de la ville :p
Avant-dernier post aussi normalement, tu sais déjà pourquoi Styx pose ces questions. Je me suis permis d'un peu anticiper sur l'idée générale des réactions de Sylver pour pas avoir à faire des posts supplémentaires juste pour le Q/R.]

[Sylver Belister]

« Attendez, vous avez fait tout ça pour retrouver cette fille et vous ne comptez même pas aller la voir ?
-Ce serait inutile. Vous avez entendu ce monsieur Smith comme moi. Elle a déjà connu le malheur. Elle sait qu’elle est en danger. Mais apparemment, on ne s’en est pas encore pris directement à ele. La rencontrer ne ferait que la mettre davantage en danger.

-Votre raisonnement se tient, admit le Zarbi, mais il y a juste un tout petit problème : on fait QUOI maintenant ? Cette piste était la seule qui nous restait !! Nous n’avons rien appris de plus sur celui qui a tué votre famille, vous avez découvert que votre père a caché sa fille -ou plus probablement un de ses enfants – à Terros, e vous ne pouvez pas aller lui parler ! Vous attendez quoi ? De vous faire attaquer vous aussi ?
-Pour le moment, j’ai une épreuve à faire passer, éludai-je. Et quant à savoir ce qu nous allons faire, c’est très simple. J’ai la conviction que mon père a été tué pour la même raison que celle pour laquelle on m’a attaqué. Cette mystérieuse malédiction au sujet de laquelle je ne sais rien. Je n’ai donc pas le choix. Si je veux savoir de quoi il s’agit, je dois remonter l’histoire de ma famille en commençant par celle de mon père. Et puisqu’il est mort sur l’I Maï, nous commencerons là-bas. De plus, grâce aux recherches de Victoria, nous disposons d’un indice pour savoir où chercher…
-Mouais… Je suppose hélas que nous n’avons pas mieux à faire… Ah, si vous m’aviez écouté depuis le début… »

Mais notre conversation fut interrompue par l’arrivée de la jeune Styx, qui me rendit ma boussole. En échange, elle me demanda non pas la récompense promise, mais un renseignement… Où trouver des Zarbi?

Mais je n’eus pas le temps de lui répondre que Tétro s’en chargeait avec son emphase coutumière :
« Alors comme ça vous vous intéressez à la VRAIE connaissance ? Donc vous êtes moins stupide que je ne le pensais. Sachez que je suis originaire du temple du volcan, et plus précisément des ruines environantes, qui se trouvent à Flamen, dans la partie centrale de la chaine Efferos. Si vous souhaitez qu’un membre de la multitude vous accompagne dans vos voyages, dites-lui donc que c’est le grand Tétrocruchamoule qui vous envoie ! Avec un peu de chances, nous arrivrons à fire quelque chose de vous…
-Je me suis laissé dire, complétai-je, qu’il se trouvait maintenant une colonie de Zarbi dans la tour de l’Eternité, sur Tenkei…
-HERESIE ! Me coupa aussitôt Tétrocruchamoule ! La Multitude est la seule colonie Zarbie digne de ce nom ! LA SEULE ! Et vous, que je ne vous voie pas vous rendre dans cette tour remplie de vermine !
-Quoi qu’il en soit, répliquai-je, je vous remercie de votre aide, Mademoiselle Styx, et j’insiste pour que vous preniez en plus la récompense, dis-je en sortant une eptite bourse de ma poche. Ce renseignement ne rémunère absolumet pas la peine que vous vous êtes donnée, et je l’aurais communiqué gratuitement à qui m’en aurait fait la demande, aussi je vous demande de bien accepter cet or. J’insiste.
-J’ai du mal à comprendre comment vous avez battu votre fortune en étant aussi nul en affaires…" Tança le Zarbi. Mais il n’ajouta rien et replongea dans un mutisme ma foi bienvenu.

Je saluai puis pris congé de la jeune Styx, et attendis patiemment que Yuko vienne nous retrouver, ce qui ne lui prit guère longtemps car Tétro la prévint par télépathie que nous allions partir. J’avais désormais un objectif à court terme, superviser cette épreuve pour laquelle j’avais été réquisionné, et un plus important à long terme, à savoir en apprendre davantage sur mon père. De fait, je n’avais plus grand-chose à faire ici, il était temps de partir.

Mais alors que j’allais prendre une rue qui menait à la sortie de la ville, où nous attendait Kaiser, je percutai soudain que je n’avais pas vu. Un obstacle qui sembalit avoir été sonné lui aussi puisqu’il grommela :

« Aïe ! Ca fait mal ! »

Lorsque je repris mes esprit, je me rendis compte que j’étais rentré dans une jeune fille blonde d’une quinzaine d’années.

« Oh, je suis sincèrement désolé mademoiselle, je ne vous avais pas vu arriver… Vous n’avez pas mal ?
-Non, non, ça va, me répondit-elle. Mais… Je suis où ?
-Vous rentrez dans les gens maintenant ? Railla le T. Votre sénilité ne va décidément pas en s’arrangeant.

Yuko se précipita alors sur moi pur vérifier que j’allais bien tandis que BlackJack regardait fixement la nouvelle venue. On aurait dit qu’elle étudiait attentivement cette dernière.

Par Sulfura ! Aurais-je causé une amnésie chez cette jeune personne ? Je n’étais pas sûr que mes pouvoirs puissent soigner une telle infirmité… Pourvu que ce ne soit pas trop sévère… Sinon je ne pourrais me le pardonner…

[Styx Léthé]

Hm, faut croire que je saurai jamais à quoi va lui servir son jouet, au vieux. Meh, pas grave, au final j’m’en fous un peu, c’est son choix de pas vouloir faire la discussion. Mais bon, au moins il a eu la gentillesse de me donner l’info que je lui ai demandé. Ou plutôt, son Zarbi dans ce que je pus reconnaître être son infinie bonté daigna me révéler où trouver son club avant de retourner s’engueuler avec son propriétaire sur la légitimité de la population indigène à Tenkei. La Multitude, il dit ? Je note, je note…

Oooooh, non seulement j’ai l’info mais en plus j’ai droit au bonus pécunier initial ? Woooooot, du butin ! M’attendais presque à juste recevoir de l’expérience en navigation par les toits avec cette quête !

« Ah bah… Merci bien, m’sieur Sylver. Même si j’appellerais pas ça de la peine, mais bon, c’est votre argent, c’est vous qui voyez. » J’empochai la bourse qu’il me tendait avant d’incliner légèrement la tête vers son Pokémon. « Et merci pour le tuyau de Tétrocruchamu… Tétrocruchon… Bref, de Tétro. Au plaisir de vous revoir un de ces quatre ? »

Je lui tendis la main, qu’il serra volontiers, avant de me retourner et de repartir en direction des quartiers plus habités. Je laissai mes pensées vagabonder vers ce que je savais de l’endroit indiqué par le T mégalomane. La chaîne Efferos, à Flamen… Plus ou moins dans le secteur nord du pays, si je me souviens bien… Ouais, c’est ça, juste avant le Lamakan. Distance… Heu… Les trois quarts de la longueur de Terros au bas mot, plus la distance aux montagnes… Pas loin de quatre mille bornes je dirais ? Pétard ça fait loiiiin !

Je tournai machinalement dans une ruelle alors que je passais en revue mes options. A pied ? Nan, trop loin, j’en aurais pour des plombes. Louer une monture ? Possible, mais vu la distance à couvrir, ça va me coûter un ovaire, et si les parents ont plus ou moins accepté de me financer dans un premier temps, ça veut pas non plus dire que je dois croire que j’ai des fonds illimités. J’ai pas de sbire avec Téléport sous la main, et de toutes façons j’ai pas la destination en mémoire, donc ça laisse comme option… Les caravanes marchandes. Hm… L’ambiance risque d’être un peu lourde, mais au moins ça me coûtera pas grand-chose…

Eh, une minute.

J’ai battu le Roc. Qui était considéré un champion dans son domaine, si j’ai bien compris. Et avec le festival en cours, une bonne partie des forces de sécurité du pays doivent être concentrées sur Seian. Ce qui fait que les marchands vont avoir besoin de gens pour protéger leurs convois. Des gens avec des références qui montrent que ce ne sont pas des brêles…

Je sentis un petit sourire se dessiner sur mon visage à ces pensées. En jouant bien mes cartes, je pouvais négocier mes compétences contre le couvert lors du trajet, quitte à passer par plusieurs groupes. Zéro dépenses, full bénéfices. Y’a pire comme situation quand même !
Sur cette pensée, je me reconcentrai sur mon environnement… Pour remarquer que je me trouvais au croisement d’une demi-douzaine de ruelles plus étroites les unes que les autres.

… Mais je suis où en fait, là ?

…

FAIT CHIER PUTAIN !

[Et voilà, sujet clos. Mon premier RP. Je suis zému.
Merci Papy pour avoir accepté de guider ce petit scarabée !]

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