[ Clos ] Les Fantômes du Passé [ Solo Contrainte ]

[Andromède di Neralitha]

Les fantômes du passé

Contrainte n°9: Insister sur un sentiment en particulier ( la rancune )

Contexte: Andromède, lorsque son esprit fut sondé par l'étrange homme dans les Vestiges d'Ebène, s'est rappelé de plusieurs choses dont cet épisode de sa vie arrivé peu avant sa rencontre avec Luciano.


Jamais il n’aurait imaginé faire ce qu’il était en train de faire. Pourquoi nager dans l’océan du passé alors qu’on a enfin réussi à rejoindre la terre du présent ? L’enfance du maudit avait été rythmée par la cruauté de ses frères et la passivité de son père. Il avait été puni par les dieux à une double peine, porter le fardeau des di Neralitha et endurer les abus quotidiens des deux monstres qui venaient lui rendre visite la nuit. Ces deux goules qui, lorsque la violence ne leur suffisait plus, s’enivrait dans une débauche incestueuse. Ces deux vautours qui, dans l’escalade de leur jeu malsain, causèrent la perte du bras gauche du garçon. Et, en dépit de toutes ses complaintes, ses hurlements, ses pleurs, ses suppliques, son père ne vint jamais l’aider. Il jouait le sourd, celui qui ne voyait rien, qui n’entendait rien, un homme trop faible pour passer outre le décès de sa femme et s’occuper de sa famille comme il l’aurait dû.

Le maudit se souvenait de toutes ces nuits où il imaginait sa famille souffrir, brûler jusqu’à ce que la chair fonde sur leurs os. Il voyait toutes les nuances de leur mort, de la plus plus longue à la plus courte en passant par la plus douloureuse. Il souhaitait qu’ils souffrent et ces supplices ne seraient qu’une juste rétribution. Il n’avait jamais demander à vivre ainsi, il n’était pas le responsable de la mort de leur mère. Etait-ce sa faute si elle était morte en couche ? Etait-ce sa faute de naître maudit incapable de voir les visages des autres ? Pouvait-on le blâmer de hurler de terreur chaque fois qu’il était confronté à l’affreuse vision d’un visage dénué de traits ? Et pourtant tous ces fardeaux lui incombaient. Même aujourd’hui, en train de se frayer un chemin dans ces terres sinistres, Andromède s’imaginait comment il pourrait les torturer. Oh cette branche serait parfaite pour les pendre jusqu’à ce que le manque d’oxygène tuméfie leur épiderme. Voir leurs doigts se serrer sur la corde dans une ultime tentative de sauver leur peau, entendre le son de leur voix se battre pour sortir de leur trachée écrasée par le poids de la justice. Si il le pouvait Andromède les ferait souffrir, c’était son seul véritable regret : leur avoir offert une mort trop rapide.

Certes, périr dans les flammes était une mort déjà bien assez atroce sur le papier. Mais, au regard de la haine qui mûrissait en lui depuis tant d’années, c’était de la clémence. La vengeance d’un enfant faible qui n’avait qu’une seule envie : être libre. Mais, dorénavant, ces fantasmes de délivrances ne faisaient plus rêver le maudit. Quand il voyait une étendue d’eau il ne s’émerveillait pas à l’idée de pouvoir sauter dedans. Non, il s’imaginait comment il pourrait les noyer et les réanimer perpétuellement jusqu’à ce que l’épuisement arrache leur dernier souffle. Quand il mangeait, il réfléchissait aux nombreux poisons qu’il aurait pu dissimuler dans la nourriture et ainsi se délecter de leur agonie. Voir leur veine gonfler, leur corps lutter contre la létalité du nectar, leurs yeux s’injecter de sang et, bien sûr, voir la peur infecter leur iris. On dit que la dernière chose qu’un défunt voit reste imprimée sur sa rétine. Andromède voulait que ce soit lui, son visage fissuré d’un rictus malsain, qui y soit gravé à tout jamais.

En l’état actuel des choses, c’était son seul désir. Mais jamais il ne serait en mesure d’atteindre ce but. Ils étaient morts à présent. Le maudit devrait pouvoir tourner la page et laisser les fantômes du passé derrière lui. Plus jamais il n’aurait à craindre que ces deux silhouettes se glissent dans son lit la nuit pour lui faire subir toutes les atrocités dont le genre humain était capable d’infliger. Pourtant, il continuait de se réveiller en sursaut. Il continuait de revivre les traumatisme que leurs actions avaient créé chaque fois qu’il fermait les yeux. C’était lui qui était condamné à souffrir toute sa vie alors qu’eux avaient bénéficié du doux baiser de la mort. Là où ils étaient, ils n’agonisaient sûrement pas. Les dieux n’étaient pas justes, les mauvaises personnes n’étaient jamais punies. Pourquoi serait-ce différent dans l’au delà ?

Andromède, après avoir marché pendant de longues minutes dans la brume de la crypte, était enfin arrivé à sa destination. Il aurait sûrement du mal à sortir d’ici, tout se ressemblait. On aurait dit un labyrinthe macabre dont nul, morts comme vivants , ne pourrait en sortir. Il regarda de plus près ce qu’il était venu chercher et il ne pu s’empêcher de rire. Un rire qui contrastait totalement avec la personnalité calme et sage du maudit. C’était celui de la folie, un ricanement malsain, un écho dans les ténèbres des nuits de pleine lune.

« Je trouverai un moyen de vous faire souffrir même là où vous êtes, croyez moi. » murmura le maudit désormais assis devant trois tombes chacune frappée du sceau impie de la famille di Neralitha.

ASHLING POUR EPICODE