Pour de tels yeux. [Tyrande]

[Shira Shôsai]

La patrouille dans les Plaines Fleuries n’avait rien donné de particulier. Outre sa rapide discussion avec Anthère, il n’y avait rien eu qui se passa de perturbant ce matin-là. Les Plaines étaient semblables à ce qu’elles étaient. Ou du moins avaient-elles continué de recouvrir lentement les cicatrices des derniers évènements tragiques qui avaient eu lieu quelques années auparavant. Tant qu’Arceus permettait à sa création de renaître, et à ses serviteurs d’agir en ce sens, aucun espoir n’était perdu pour qui aurait la patience suffisante.

Sur le dos de sa Helledelle, le Champion de Geffen finit par retourner à son Arène à la fin de la matinée. Il était toujours un peu fatigué de sa nuit passée. Certes les matchs lors des pleines lunes pouvaient durer un peu. C’est pourquoi il fermait l’Arène l’après-midi aux challengers lorsque l’astre de nuit en était à sa phase maximale, de quoi prendre le temps de se reposer. Mais rares avaient été les matchs aussi violents et éreintant que le précédent. Son équipe officielle étant mise hors concours pendant un petit moment, il allait devoir stopper son activité pendant au moins trois jours. Aussi, en arrivant sur le toit du grand dôme, il entra dans ses appartements en laissant Helledelle un instant, et récupéra une planchette rangée sur une étagère. Puis il ressorti, et descendit avec sa monture au pied de l’Arène à la porte d’entrée. C’est avec l’aide d’une petite cordelette qu’il accrocha la planchette à la grande pancarte, sur laquelle on pouvait désormais lire : "Equipe en cours de soins. Fermeture de l’Arène pour quelques jours.". Ceci fait, il fit revenir l’oiseau bleu et blanc dans sa Pokeball, entra à l’intérieur, prit le temps de fermer chaque gros volet épais qui jusqu’alors était resté ouvert pour aérer l’Arène le matin, et passa la porte qui donnait sur l’escalier menant à ses appartements.

Ce n’est qu’une fois là-haut qu’il prit enfin un peu de temps pour lui. Un rapide déjeuner de ce qui restait de la veille et hop ! Il se jeta au lit pour une sieste qui dura une heure. Dormir davantage ne l’aurait pas dérangé, mais il voulait avoir des nouvelles de ses Pokémon au plus tôt pour voir s’il était déjà possible de les récupérer. C’est donc en début d’après-midi qu’il reparti de chez lui, un peu plus revigoré, sur le dos d’Haydaim. Prenant son temps, il entra en ville et pénétra dans l’un des quartiers qui jouxtait la maison de santé du Guérisseur.

« Il faudra que je fasse les comptes ce soir…pensait-il tandis que sa monture avançait dans les rues populeuses. Je vais devoir refaire appel au paysagiste pour le terrain extérieur, prendre quelques nouveaux outils de soins pour Pokémon, refaire un stock de nourriture, payer six patiens au Guérisseur…Fichtre, les dépenses seront plutôt conséquentes aujourd’hui. Enfin…tant que l’argent de la Ligue me parvient la semaine prochaine… »

Mais quelque chose le fit sortir de ses pensées : Haydaim s’était arrêté, et ses oreilles de cerf changeaient de direction, il entendait quelque chose de louche. Shira regarda autour de lui mais il ne vit rien d’anormal, alors il ferma les yeux et écouta à son tour. Le brouhaha de la ville était omniprésent, mais parmi tous les sons que la populace pouvait faire, tous n’étaient pas synonymes de bonnes intentions, et en l’occurrence…quelque chose se passait. C’était un peu plus éloigné, mais c’était présent, et personne ne l’avait remarqué. Les gens étaient sûrement trop occupés à leurs besognes quotidiennes, et la chose devait se dérouler suffisamment discrètement pour qu’on ne la remarque pas. Oui, quelque chose de louche se produisait.

Doucement, Shira descendit de sa monture, fit revenir Haydaim dans sa Pokéball et rabattit son capuchon noir sur sa tête. Il garda les yeux fermés et, tel un véritable aveugle, se faufila dans la masse en suivant les sons qui ne semblaient pas des plus pacifiques. Son avancée le conduisit quelques minutes plus tard vers une rue plus petite que les autres où il ne semblait y avoir personne. Rouvrant les yeux, il se glissa furtivement à l’angle de celle-ci et observa d’un œil depuis sa capuche ce qui s’y passait.