[ Clos ] No comprendo senior ! [Elvira]

[Chad Kehr]

— Foutu piaf à la con ! C’est ça, dégage et que j’te r’vois pas ! J’espère qu’tu t’étoufferas avec une branche d’arbre en plein ouragan !

J’enrage ! Et ce n’est pas d’hurler après cette saloperie qui saura me calmer. C’est qu’il a failli nous crever, le piaf ! Soi-disant un Deflaisan habitué au trajet Tenkeï – Erasia, capable de braver n’importe quel vent et de voyager d’une traite pour atterrir n’importe où… Tu parles ! À peine Hâmon fut-il sorti de sa pokeball que la traversée s’est transformée en piqué droit vers le sol. Du ciel à la terre en chute libre, quasiment vertical ! Sans toutes les attaches protectrices qui me reliaient à lui, j’aurais fini en crêpe. Et je ne parle même pas de l’autre idiot puant qui s’est enfouis sous ma cape en s’agrippant là où il le pouvait de ses griffes aiguisées ! Ça me fait encore un mal de chien.
Bref, j’ai cru ma dernière heure arrivée, mais l’oiseau contrôla au moins son atterrissage, transformant l’arrivée boulet de canon en un simple écrasage brutale. Après quoi, le fragile à plumes s’est ébroué dans tous les sens, bien trop pressé de me voir détacher la sangle qui nous liait l’un à l’autre pour pouvoir enfin reprendre son envol à la hâte, loin de moi, et par la même occasion de hâmon et son odeur de pourriture.

J’expulse ce dernier de ma cape et l’envoie balader à un bon mètre de distance. Le voir se rattraper avec toute l’agilité dont il est capable et me fixer d’une incompréhension innocente m’enrage d’autant plus. Je hurle, jure et tourne les talons. C’est peine perdue : c’est pas lui qui se flaire, il est bien incapable de comprendre ce qui dérangeait tant ce sale piaf. Le pire, c’est qu’il sait se retenir ! Mais y’a des moments, comme ça, où rien n’y fait, et sortir de sa pokeball en est un. Il sort, il pète. Voilà, c’est dit !

Il ne nous faut guère longtemps pour retrouver un brin de chance malgré nos malheurs. Au-delà d’un brouillard dont le soleil semble se méfier, puisqu’il reste au loin en ce début d’après-midi, je perçois le brouhaha de la civilisation. J’avance sans me préoccuper d’être suivi par l’autre putois. Il me suivrait n’importe où de toute façon, même après une engueulade. Ce n’est pas comme s’il pouvait trouver quelqu’un d’autre pour s’occuper de lui !

D’imposantes silhouettes sombres se distinguent du brouillard, au loin. Des habitations. Des gens. Et surement tout un tas de Pokémon inconnus. Mes paumes se frottent par réflexe tandis que, les yeux mi-clos, j’espère rencontrer à la première occasion un de ces fameux Noctali ! C’est tout à fait le genre d’endroit où je les imagine se terrer. Derrière le brouillard, ne laissant que les lueurs de leur corps apparaître derrière le brouillard parmi l’ombre indiscernable de leur être.
Évidemment, la première créature qui m’aborda ne fut pas celle de mes désirs. Loin de là ! Un humain… Un foutu humain et son groupe discutant entre eux de cette langue dont j’ignore jusqu’aux fondamentaux. Je les regarde d’un air las, fatigué d’avance par l’échange qui se profile.

Les rustres sont au nombre de quatre. De grands et gras bonhommes, du genre à ouvrir la gueule en grand pour t’étouffer de leur haleine puante d’alcool. Je remonte ma cape, non pas à cause de l’odeur – pour une fois, j’suis bien content de ne rien sentir –, mais pour me protéger des postillons qui l’accompagnent. Et les voilà qui ricanent. Mes paupières clignent de lassitude. À priori, mon silence ne suffit pas à leur faire comprendre que je ne parle pas la langue. Alors soit, snobons-les ! Je reprends ma marche en contournant le plus gros du groupe. Hélas, d’un pas de côté, il me barre la route à nouveau.

Foutu boule puante, où es-tu quand j’ai besoin de toi ? Hâmon est à la traine, surement perdu à travers les marécages. Je sais qu’il me retrouvera, mais je n’ai pas envie d’attendre. Voilà que le plus gringalet des quatre me bouscule, tandis qu’un autre tente une virée discrète dans les poches de ma cape.
Oh, je n’avais pas compris ça ainsi ! Je recule d’un bond, ramenant ma cape contre moi pour protéger mes maigres biens. Et qu’est-ce qu’il en ferait, d’la pokeball d’Hâmon, cet idiot ? J’ai vraiment l’air d’un richard égaré, ou en sont-ils réduits à détrousser jusqu’au plus pauvre de leurs confrères ? J’hurle dans ma langue d’origine :

— Lâchez-moi, bande d’abrutis shootés aux Mushana !

Mais au lieu de s’insurger, les rustres se taisent un instant, surpris par mon timbre étranger, puis se mettent à rire à gorge déployée. Un soupire m’échappe. Je réalise seulement l’enfer qui m’attend : j’aurais bien du mal à trouver quelqu’un connaissant ma langue ici-bas. Et les voilà qui reparlent, sur un ton presque machiavélique. J'aimerais bien ne pas avoir à sortir mes dagues à peine arrivé en territoire étranger, mais si Hâmon ne se presse pas un peu, je risque de ne plus avoir le choix. Je résiste néanmoins à cette envie alors que le plus grand du groupe me toise de haut, cherchant à m’impressionner. J’lui souhaite bon courage, le dragon de mes cauchemars est bien plus grand que ça !

— Approche encore et j’t’arrache la gueule ! Fils de…

La suite de mes paroles n’est plus qu’une suite d’injures hurlées. Y’a de quoi s’demander qui est le rustre parmi nous. Bien qu’en toute sincérité, mon courage habituel ne saurait effacer la petite voix dans ma tête qui me hurle de calmer mes ardeurs et courir en marche arrière. Je le redis : Foutu piaf à la con ! Aurait-il pu me déposer à pire destination ?

[Elvira Greyhunt]

Les ailes de cuir claquent dans l’air, pendant que le corps du Ptéra brise l’un des nuages qu’elle traverse avec force. La rouquine, les yeux fermés, profite un instant du vent qui glisse sur son corps tandis que le soleil réchauffe sa peau. Toutefois, elle soupire quand elle sent son hôte bouger énergétiquement dans son dos. Erwina, l’un des membres de l’équipe de Flint, ne pouvait pas s’empêcher de remuer, émerveiller par la sensation de flottement offert par le vol de Khaliset, de liberté qui accompagne le fait de voler dans le ciel. « C’est épatant ! » Lui cris la jeune femme dans les oreilles, pendant qu’elle s’accroche férocement aux hanches de la rouquine. Même sans utiliser ses pouvoirs de lieuse, elle peut sentir la peur qui se mélange avec tout cet émerveillement. « Erwina, calmes-toi, tu vas finir par… » Elle ne finit pas sa phrase, couper par un changement de posture d’Erwina qui bascule vers le côté. « Khaliset ! Chute libre ! » Déclare Elvira en défaisant le harnais et suivant le mouvement d’Erwina. Tandis qu’elle se sent tombée à son tour dans le vide, elle replace un peu ses lunettes de vol et pique vers le vide en direction de la pirate qui n’arrête pas de gesticuler dans tous les sens.

La rouquine grommelle un peu, mais pourquoi avait-elle accepté de revenir ici ? Pourquoi avait-elle simplement accepté de suivre cette femme à Tarouga ? Ses derniers passages là-bas, ne c’étaient pas passé de la bonne manière, mais en même temps, elle s’inquiète de la situation, elle s'inquiète pour Flint. Arrivée près de la pirate, elle étire les bras et l’attrape par les vêtements, elle peine un peu à lui donner une position de ‘’non-chute libre " puis l’obligent à ouvrir grand les bras pour ralentir un peu leur chute. Pendant qu’Erwina lui cri dans les oreilles, la Ptéra finit par venir se positionner sous elles et Elvira finit par attraper les reines et reprendre sa place sur le dos de sa compagne volante. Une fois bien assise avec ça la demoiselle assise devant elle, elle est maintenant sûre que la demoiselle ne sautera pas une deuxième fois. Cette fois-ci, elle attache le harnais à Erwina et l’observe un instant. L’expression terrifiée de cette dernière lui confirme qu’elle sera maintenant sage. « On ne recommence plus ? » La pirate secoue vigoureusement la tête avant de se coller à elle pour ne plus la lâcher.

Cette fois-ci, la guerrière soupire. Parfois, elle détestait vraiment sa vie pour ce genre de situation, pourquoi, c’était elle qui devait toujours réparer les pots cassés par les autres ? Elle secoue la tête, remarquant en même temps la ville de Tarouga qui s’élève lentement dans la brume des marais qui l’entourent. Malgré elle, elle sourit un peu, se rappelant de son premier passage ici. *De bons souvenirs… J’étais si petit à cette époque. * Murmure la voix de l’Ectoplasma dans sa tête. Elle hoche doucement, partageant son sentiment. Au même instant, Khaliset pousse un rugissement, signe qu’elles arrivent à porter de vol. Elle allait lui faire signe de continuer directement vers la ville pour se déposer direct sur le bateau, mais quelque chose attire son attention en contrebas. Tarouga était très connu pour sa population de voleurs, de pirates et de contrebandiers à l'historique coloré. Alors, voir un petit groupe rassembler n’était pas nouveau, mais voir une autre personne se faire trimballer de la sorte, ne voulait dire qu’une seule chose ; quelqu’un allait être volé et probablement tué. Cette ville était dure sur les étrangers qui s’égaraient dans les environs.

Elle allait passer son chemin quand elle se sent irritée par la vision et elle fait signe à Khaliset de descendre. La dragonne préhistorique commence sa descente en effectuant quelques cercles dans les airs. Leur atterrissage, assez bruyant et poussiéreux, attire immédiatement l’attention du groupe d’hommes qui se détourne un instant de leur cible. Après un petit débat avec Erwina pour la faire lâcher brise sur elle (heureusement que la poussière était présente pour camoufler la scène), elle saute de sa monture et s’étire un peu avant de prendre sa route vers le groupe en question. Tout en marchant, elle retire les lunettes de voyage et les place sur sa tête qui vient dégager son visage de son épaisse chevelure rousse. Dans un mouvement d’irritation, elle ouvre grand le long manteau de cuir pour dévoiler son corps de jeune femme. Sans grande délicatesse, elle jette son sac de voyage à terre et glisse les mains dans son dos pour attraper quelque chose. Après un rapide regard aux quatre hommes, qui la dévisageant en retour, elle continue d’avancer pour aller rejoindre celui qui semble être le chef et qui dans un élan de commandement ou de stupidité l’avait rejoint.

Planter l’un devant l’autre, ils s’observent un instant avant que l’homme décide de faire un mouvement. Il allait l’interpeller dans sa langue avec des mots vulgaires ‘’d’amour’’, mais Elvira n’avait que faire et elle n’était certainement pas reconnue pour sa patience. Un sourire carnassier s’étire sur son visage féminin pendant que son regard vert se poser sur le jeune homme. Quand l’homme vient poser la main sur son épaule, visiblement déranger par son manque d’attention de lui, elle vient simplement donner un puissant coup de genou dans ses bijoux de famille qui le font se plier en deux. Elle vient ensuite donner un puissant coup de coude dans le dos de l’homme, ce qui lui fait perdre l’équilibre et il s’écrase au sol. Sans perdre de temps, elle détourne l’homme et vient tirer une Noigrume de son dos. Dans un geste rapide, elle la lance en direction de l’un qui s’était éloigné pour rapprocher pour répliquer. La balle sombre vient frapper le front de l’homme qui surprit s’arrête pour dévisager le Dimoclès qui vient d’apparaître. Les deux lames tournent dans l’air d’un air menaçant avant de donner une jambette à son ennemi du plat de l’une de lame. De l’autre, il vient menacer la gorge de l’homme qui se fige au sol les mains lever dans un signe de soumission.

La rouquine tournait ensuite son attention vers les deux restants qui étaient restés proches du gamin. Parce que maintenant qu’elle avait une meilleure vision de lui, elle se demande bien ce qu’un enfant fait ici, surtout qu’il semble peu équiper. En même temps, son épaisse cape camoufle beaucoup de son corps. Elle revient sur les deux autres qui n’osent presque plus bouger et lève la main dans l’air, dévoilant cinq doigts. Il y a un petit moment d’hésitation et d’incertitude puis ils comprennent quand elle abaisse l’un des doigts pour afficher quatre, trois, deux… Leurs yeux s’étirent avec frayeurs pendant que derrière la guerrière s’élève lentement une figure sombre et terrifiante. Axill, son Ectoplasme avait toujours eu un faible pour les entrées dramatiques et comme il refusait catégorique d’aller dans sa Noigrume et qu’il est toujours caché dans ses vêtements, il était toujours prêt pour l’action. Elle abaisse finalement un autre doigt, affichant un doigt et ce fut le dernier avertissement pour eux. Sans plus attendre, les crapules tournent les talons, abandonnant leur supposer chef et celui tenu en joute par Bélen. « Parfait ! J’adore quand ils prennent la fuite, moins de problèmes. » S’exclame-t-elle. « Axill, occupe-toi des deux autres, donne-leur une bonne leçon. » Sans plus attendre, le pokémon s’exécute et disparaît en avalant les deux autres avec lui.

Elle tourne ensuite son attention de le jeune homme, le dévisageant un instant. « Tu vas bien ? » Elle réalise rapidement qu’elle ne pourra pas discuter normalement avec leur problème de langue. Elle réfléchit un instant avant taper sur sa propre tempe avec deux doigts. *Tu me comprends ? Est-ce que tu vas bien ? * Comment-elle dans la tête du jeune homme grâce à l’habilitée emprunter à Sitara son Mentali.

[Chad Kehr]

Finalement, j’ai bien fait d’attendre ! Hâmon n’est toujours pas là, par contre, les brigands ont vite regretté leurs méfaits. Au moment où l’un des rustres m’attrapait le bras, bien décidé à me malmener, une somptueuse beauté à la chevelure fauve s’empara de l’attention générale. Mes yeux se perdirent sur ses formes féminines, dévoilées à l’ouverture d’un manteau de cuir, et j’en oubliai l’idiot qui me tenait le bras. La tête me tournait, emplies d’émotions impures, et c’est à peine si j’entendis leurs paroles dont le sens m’aurait de toute façon échappé. Ce n’est qu’à la vision d’un genou frappant là où ça fait mal que la conscience me revint. Je sursautai en grimaçant, une main sur mon entre-jambe pour accompagner l’homme plié en deux d’une empathie sincère.  
Oh, ça va, je vous vois venir ! C’est de mon âge, à quoi vous vous attendiez ? J’pouvais pas rester de marbre devant une telle bombe ! Encore moins en la voyant s’élancer à mon secours.

Bref, l’humiliation fut brève. Le genou pour le premier, deux curieuses épées vivantes pour le second, et une frayeur fantomatique pour les derniers. Je tournoyai sur moi-même en sentant celui qui me tenait s’éloigner, happant l’une de ses jambes d’un croche-patte pour le voir s’étaler dans l’herbe avec satisfaction. Il ne m’accorda même pas un regard en se relevant, bien trop pressé de rejoindre l’autre fuyard.
Le temps que je me retourne, les deux autres avaient disparus, tout comme la monstruosité fantomatique. Et voilà comment je me suis retrouvé seul avec Madame coup de genou et son armée d’enfer.

J’exprime mon soulagement d’une voix forte et moqueuse, mon regard balayant les environs à la recherche d’une potentielle trace des victimes :

— Ha ! Ils font moins les marioles !

J’applaudis des deux mains, reportant mon regard sur ma bienfaitrice. En d’autres circonstance, ma fierté aurait surement souffert d’une telle situation… Mais comme j’étais encore debout, sans la moindre égratignure et mes dagues planquées, je n’avais pas ce sentiment honteux du faible secouru. Plutôt celui d’un passant ayant assisté à une arrestation préventive sans qu’il n’ait le temps de réaliser avoir été ciblé. J’en ricanerai presque, mais la guerrière héroïque reprend la parole et me prends de court d’une question (du moins, je crois). "Bien" : il me semble capter ce mot, entre autres, ou un truc s’en rapprochant. À force que les étrangers visitent Dyrinn, j’ai retenu quelques broutilles. Et puis, la question serait évidente dans cette situation !
Mais au lieu d’y répondre, je constate avoir dévié (inconsciemment, promis !) les yeux de son visage à sa poitrine. Mes joues se teintent de rouge et je relève la tête d’un mouvement brusque, l’ensemble de mon corps raidi au souvenir d’un genou balancé.
Je bredouille quelques maladresses incompréhensibles et tente de me reprendre, espérant intérieurement qu’elle n’a rien remarqué. C’est alors qu’elle porte deux doigts à sa tempe.

— AH !

J’ai hurlé. De surprise. De terreur. La télépathie ? Oui, j’connais ! J’connais même très bien, certains chez nous la pratiquent ! Mais qui dit télépathie…
Mes pensées impures et honteuses explosent et résonnent dans mon crâne. Plus je tente de les repousser, plus elles me paraissent omniprésentes. Je me sens mis à nu devant elle, aussi honteux que si j’avais hurlé mon admiration adolescente.

— Je j’vaisj’vaisj’vaisj’vais bien… bien, bien, bien !

Est-ce qu’elle comprend mes mots, ou dois-je télépathiser, moi aussi ? Je l’imagine farfouillant ma tête, ignorant mes paroles pour se jeter sur la vérité au fond de mon crâne. J’essaye de penser à autre chose. Mes yeux se perdent sur sa chevelure fauve, mon cœur bondit, je détourne mon regard lubrique… vers le bas. Grave erreur ! Je remonte aussitôt, tourne vers la droite, la gauche, cherche désespérément quelque chose, autre chose, n’importe quoi sur quoi s’attacher pour détourner son attention et surtout la mienne.

LA-BAS, UN DRAGON !

Mon bras se jette en direction du Ptera, tendu comme une perche et entrainant mon corps dans un mouvement malhabile qui manque de me faire trébucher. J’ouvre la bouche et persiste dans ma langue natale :

— Ton… Ton équipe est cool ! Vachement cool ! Ouep, c’est ça, sont cools !

Et toi aussi. RAAH, CHUT ! Foutus hormones ! J’essaye d’accrocher mon regard à cette créature, chevauchée par une autre étrangère avec qui j’évite tout contact visuel, de crainte qu’elle soit encore plus belle que la première. Bien sûr, la curiosité ainsi qu’un soupçon d’inquiétude me forcent à revenir à madame coup de genou régulièrement. Mais à peine sa chevelure ardente pénètre-t-elle mon champ de vision que je repars vers la bête aux crocs acérés, non sans avaler ma salive avec difficulté.

[Elvira Greyhunt]

Contrainte 10 ; insister sur un style de texte.

Une fois l’action terminée, je me frotte les mains entre elles. En silence, mais sûre de moi, je m’approche du jeune homme, observant avec une grande curiosité l’enfant qui a eu la malchance de se retrouver ici à Tarouga. Ce n’est certainement pas le meilleur lieu pour commencer son aventure. Cependant, je me souviens moi-même de mes premières aventures, aussi problématique que celui-ci. Après avoir remarqué le regard vagabond de mon interlocuteur, que je décide d’ignorer avec un revers de main en essayant aussi d’oublier le rouge qui colore le visage de mon interlocuteur. Je soupire un peu en sachant que je vais amèrement regretter mon prochain choix… La télépathie. En même temps, je sais que je n’ai pas la patience d’essayer d’échanger des mots pour trouver un terrain commun dans notre future conversation.

Dans un soupir retenu, je lui fais signe en frappant ma tempe doucement et je laisse mes pouvoirs se glisser dans son esprit. Je ferme les yeux, chassant du mieux que je le peux, les pensées très imaginatives que je semble offrir à mon nouvel ami. Je reste tout de même un peu surprise, personne avant lui n’avait laissé autant d'idée colorée à mon image, surtout aussi… Je secoue la tête, chassant mes propres pensées pour me concentrer sur la seule tâche qui est importante ; la communication. Je suis quand même distraite par le rire peut cacher d’Axill qui partage mes pensées et qui ne cache pas son amusement. Même Bélen et Méleth laissent filtrer leur amusement face à ceci.

* Bien, dans ta tête seulement, reste calme et… * Je me tais, voyant bien qu’il panique et que son esprit divague d’un sujet à un autre sans qu’il ne contrôle rien. Je suis tout de même amusée, il fait tellement d’efforts pour trouver une bonne distraction que j’ai envie de rire. * Merci, j’ai travaillé dur et fort pour eux. * Que je souffle pour l’encourager dans cette direction. C’est à cet instant que je me souviens que je ne suis pas seule et mon sourire s’efface. Ma Ptéra s’agite un peu pendant qu’Erwina saute de son dos pour embrasser le sol terreux. « Tu vas survivre ? » « Oui, oui, maintenant que j’embrasse ma terre natale… » Me répond simplement la pirate avant de se lever enfin. Je l’observe essayer de caresser Khaliset qui elle-même l’observe avec des petits yeux prête à lui mordre les doigts. « Erwina, ne la touche pas… » C’est en disant ceci que j’ai une idée. Je me tourne vers… Humm, j’ignore complètement son nom. * Hey, je m’appelle Elvira et toi ? * Mon Dimoclès en profite pour reprendre sa place dans mon dos, et je demande mentalement à Axill s’il en a encore pour longtemps. J’ai le droit à un long rire satanique ainsi que des cris apeurer, qui ne sont clairement pas à lui.

Je décide d’abandonner l’idée d’en apprendre plus sur son activité du moment et porter mon attention sur Erwina et le jeune homme. Pendant que j’observe Erwina poser son attention au jeune homme, elle se rapproche, ondulant un peu des hanches. Sa peau caramel brille sous le soleil et je suis exaspérée par l’expression qui s’affiche sur son visage. Tous ceux qui habitent Tarouga, on la même expression, celle de vouloir dévorer la nouveauté. Cependant, juste avant que je puisse dire un mot, Erwina me devance et s’exprime dans la même langue de l’étranger. Je ne suis pas une experte en langue, mais je crois qu’elle est rouillée et parfois cassée dans certains mots, mais elle semble se débrouiller un peu.

« Ah Midgardien ? Mais qu’est’que tu fais aussi loin de chez-toi ? C'pas une superbe place pour des vacances ! » Reprends ma passagère pendant qu’elle croise les bras sur sa poitrine. Ces longs cheveux bruns cascadent devant son corps pendant qu’elle attend avec impatience les réponses de son interlocuteur. « Tu es seul ou accompagner ? Pourquoi venir ici ? » Continue-t-elle dans cette langue que je ne comprends pas. Je soupire pour lui, que je n’aimerais pas être à sa place, mais en même temps, ce sont tous des questions importantes et avec un peu de chance, ceci sera suffisant pour calmer son esprit et chasser ces images que j’intercepte encore. « Erwina, laisse-lui une chance… » Je regarde cette dernière soupirer en roulant ces yeux verts vers le haut en laissant le temps à l’étranger de répondre quelque chose.

[Chad Kehr]

Contrainte 9 : Insister sur un sentiment particulier.

Quelle honte, mais quelle honte ! Et elle qui garde son calme. C’est encore pire ! J’crois que j’aurais préféré une baffe, ça m’aurait p’t-être remis les idées en place. Là, j’me sens dépravé devant sa bonté !
Et voilà qu’elle répond. Pas à mes dires, non : à mes pensées. À ce capharnaüm entrecoupé d’illusions malsaines qu’un homme devrait garder pour lui, pour son bien autant que celui des autres. Même ses Pokémon se foutent de ma gueule, et en toute franchise, j’ai l’impression que le monde entier m’entend à présent. Mais bon, les autres, je les emm… par contre, elle…
DRAGON ! Allez, focus ! Le dragon !
Mais il n’y a plus de dragon. À sa place, une autre femme : la cavalière, descendue de sa monture et qui m’en bouche la vue tandis qu’elle échange quelques paroles obscures avec madame coup de genou. C’est bien ma veine ! Comment voudriez-vous que je me focalise efficacement sur les grandes ailes de la bête quand une paire de loches s’incruste entre les deux ?

C’est alors qu’un nom s’invite dans ma tête et me tire de la noyade. Elvira ! C’est noté. Allez, concentre-toi ! Suivant l’exemple de la dame, je ferme les yeux, serre les poings et tente de faire le vide afin d’exprimer une unique pensée en guise de réponse. « CHAD ».
Je crois que je l’ai hurlé, dans ma tête. En tout cas, j’en ai rouvert les yeux aussitôt, dans un sursaut, le visage de nouveau rouge de honte. Tu cumules, idiot ! Ce n’est pourtant pas compliqué, de penser ! Tu le fais tous les jours ! Et voilà, des pensées concrètes, claires et censées. Tout juste bon à s’engueuler lui-même, le gars ! J’dois vraiment faire pâle figure. Presque autant que les deux victimes du fantôme, dont les cris apeurés me parviennent sans me permettre d’en localiser l’origine. Franchement, j’me sens pas en meilleure posture qu’eux !

Un instant. Quelque chose ne va pas. Je ne vois plus les ailes. Plus la rousse. Plus la brume. La paire de loches : elle s’est plantée juste devant moi, à hauteur d’yeux, enserrée par des bras trop bien placés pour être innocents.
… … …
J’crois que mes pensées sont mortes, terrassées par ces malaises successifs. Si Elvira m’écoute encore, je suppose qu’elle n’entend plus qu’un battement sourd irrégulier, bien trop pressé pour faire circuler le sang qui m’est monté à la tête. J’en suis au point où un mince filet de bave menace de s’échapper de ma bouche entrouverte.
Et pourtant, malgré cette pose, des gestes gracieux et désirables et tant d’autres efforts de la dragonnière, c’est elle-même qui finit par briser son propre enchantement. En parlant, tout simplement. Je ravale ma salive juste à temps.

— Mais tu parles !

J’l’aurais pas dit autrement devant un Ratentif doué de parole. Enfin, je parviens à redresser la tête pour retrouver un contact visuel. Un peu flippante, la madame ! À n’en pas douter, le vert de ses yeux à de quoi envoûter le plus pur d’entre nous, sauf que… trop proche, trop insistante. Non, et surtout, ce n’est pas elle qui s’est démenée face aux quatre ploucs. J’avoue, je ne peux réfréner quelques pensées perverses à la simple idée la voir aussi près de moi, surtout avec ce qu’elle me fourre sous le nez. D’ailleurs, le fait que j’y pense encore, comme à cet instant, prouve que je suis loin d’y être insensible. En revanche, grâce à ce langage à la fois familier et maladroit, j’ai repris mes esprits. Et ça, c’est cool ! Je souris. Aussi cool que… Ah non, ce n’est pas le moment de rechuter !

— J’devais pas atterrir ici ! c’est c’t’abruti de Déflaisan qui m’a largué là !

Victoire ! Ma honte s’efface, balayée par la plus magique des émotions : la colère. Enfin, j’arrête de bredouiller. Enfin, mes pensées redeviennent miennes ! Mon corps se relâche, mes bras s’écartent et s’agitent de frustration, écartant ma cape ouverte à l’avant. Et vas-y que je continue ma réponse, l’esprit tranquille :

— Si j’suis descendu sur Erasia, c’est pour trouver un Noctali. (je prononce ce nom étranger d’un air incertain, laissant deviner le peu que je sais de cette créature.) J’pensais aller en ville, pour savoir où ils vivent, mais si vos villes sont aussi accueillantes, j’vais p’t-être me contenter du hasard.

Mon regard se détache du sien, et tente une percée jusqu’à Elvira, poussé par la curiosité. Je me demande si elle m’écoute toujours. J’aimerais m’adresser à elle, maintenant que mon visage a retrouvé sa teinte naturelle, ne serait-ce que la remercier, mais je crains d’hurler à nouveau dans ma tête.

[Elvira Greyhunt]

Pendant que la rouquine essaye de faire le tri dans les pensées de son petit compagnon, elle ferme les yeux, dépasser par les événements. Jamais avant maintenant, elle n'aurait cru vivre une telle situation. Encore moins de gérer les hormones d’un gamin de… Elle s’arrête un instant, dévisageant l’enfant qui se trouve devant elle. Parce que, à ses yeux, ce jeune homme de treize ans était encore un enfant. Elle ne pouvait pas croire que des parents pouvaient laisser leur enfant quitter la maison à cet âge-là… Elle secoue férocement la tête chassant de son esprit ses propres pensées sur le sujet. Il y avait peut-être une bonne raison pour qu’un gamin aussi jeune court le terrain de l’aventure. Au moins, elle comprend un peu mieux l’esprit vagabond et salace du gamin, c’était quand même dans son âge. C’est à ce moment qu’un nom est crié dans son esprit. Elle en sursaute presque puis pose ses yeux verts sur lui. Il est si nerveux qu’elle pourrait en rire, mais elle se tait. * Tu n’es pas obligé de crier, parler normalement comme si on le ferait à voix haute. * Lui souffle-t-elle lentement. Elle fait signe aux autres de se taire et de refréner leurs paroles et pensées, il était clair que la première fois avait été un peu problématique sur lui.

Quand Erwina se plante devant lui, il y a un vide mental, ce fut quand elle pose les yeux sur lui qu’elle comprend qu’il y a une over-charge pour lui, trop d’émotion pour un enfant s'y peut habituer. Elle vient cacher son visage dans sa paume, soupirant face au comportement de la pirate pendant que dans son esprit explosent les sons de sang propulser trop rapidement dans un petit corps. Elle a presque envie de lui envoyer un coup de genou, confirmant ainsi son surnom face à Chad, mais elle se retient quand elle s’exprime dans la même langue que ce dernier. Cette distraction est parfaite, laissant le flot du sang reprendre un rythme normal et ces pensées revivent pour reprendre un coup plus normal eux aussi. Malgré elle, elle sourit tendrement face aux expressions de Chad, puis réalisant son geste elle se reprend un peu, attendant qu’Erwina termine. Elle suit l’échange mentalement, ne faisant aucunement confiance à la pirate. Khaliset profite de ce moment pour se rapprocher et venir poser sa tête draconique sur l’épaule d’Elvira.

Machinalement, elle vient caresser la mâchoire de l’énorme créature sans la moindre peur. Il est clair, que pour une première sortie à dos d’oiseau géant. Une vraie malchance pour lui. Elle n’en est plus trop sûre quand toute chance et que la colère enflamme l’esprit de petit. Prise de cours, ses poings ses serres et elle est à deux doigts d’éclater dans une colère ardente, mais elle se retient de justesse, pour être finalement tiré mentalement vers l’arrière par les âmes de Bélen et Méleth son Dimoclès. Elle prend une grande respiration, avant de l’expulser par la bouche en remerciant le couple d’un temps ancien. L’interrogation s’affiche rapidement sur le visage d’Erwina qui tourne son attention à Elvira, faisant la même chose que Chad. Elle les observe tour à tour, « j’ai manqué la fin, il cherche quoi ? » Demande-t-elle à Erwina. « Noctali, il est ici parce qu’il veut un Noctali… » Sur ces mots, elle tourne son attention à Chad et elle reprend mentalement. * Un Noctali ? Tu parles bien de ses créatures félines noires aux anneaux dorés. ? * Termine-t-elle en accompagnant sa pensée d’un souvenir mental de la créature en question.

Si c’était bien cet animal qu’il parlait et bien, c’était un Évoli qu’il lui faudrait. Ensuite, il faudrait qu’il accomplisse plusieurs étapes comme elle avait fait avec Sitara. Tandis qu’elle réfléchit à tout ceci, elle laisse échapper quelques informations sur ledit animal et son évolution, elle voulait savoir à quel point il est informé sur ce qu’il désire. * Je te rassure, les villes de Flamen ne sont pas toutes comme celle-ci. Tarouga est une ville de pirate et de malotrus, tu as été malchanceux sur ta destination. * « Y se passe quoi ? Vous vous regardez dans le blanc des yeux depuis quelques minutes… C’est vraiment étrange… J’t’imaginais pas avoir un faible pour les gamins de son âge ! » S’exclame Erwina. Elvira quitte des yeux Chad pour revenir sur la pirate. « Discussion mentale, je lui pose des questions sur le Noctali. » « Mais j'suis là… » « Et alors ? » « Mais j'suis l'aaaa » « Écoute, retourne au bateau, je t’y retrouve plus tard. Je vais finir avec lui. » « Vraiment ? » « De toute façon, il va déjà te falloir une bonne raison pour expliquer ton départ, alors travaille là-dessus et surtout essaye de ne pas vendre la mèche que tu es allée chercher de l’aide. » Erwina boude un peu. Avant de soupirer à son tour et de quitter rapidement. Pendant que la pirate s’éloigne, elle se tourne vers Chad et s’exprime mentalement. * Alors, si tu veux un Noctali, ce n’est pas ici que tu vas trouver sa première forme… Il va falloir voyager encore… Le plus proche est la ferme du Soleil et l’autre la jungle de Thâ… Tu as peut-être des questions ? *

[Chad Kehr]

La vache, elle est vraiment douée ! L’image d’un Noctali vient de s’imprimer en moi, aussi nettement que dans ses propres souvenirs. Le lieu y est pourtant tout autre, et même la créature dénote de quelques maigres différences par rapport à celle de Dyrinn. Quelques poils en plus par-ci, les pattes moins massives par-là… J’imagine avoir idéalisé celui de mon sauvetage, depuis le temps, mais je reconnais la créature sans aucune peine.
Ah, euh… Là j’y pense, et je suis calme. Mais sur le coup, évidemment, j’ai hurlé en bondissant sur place, mon bras levé en direction d’un mirage, simple transposition du souvenir dans le monde réel.

— OUI ! C’est lui, c’est vraiment lui !

Puis je me suis repris, me rappelant de la contrainte du jour. *Oui !*, pensais-je avec autant de contenance que possible.
L’image s’efface, prenant place parmi mes véritables souvenirs. J’étais drôlement content. Trouver un connaisseur du premier coup : ça, c’était de la chance ! Il faut dire que, l’esprit berné par l’intensité de mes souvenirs, j’imagine la bête comme une créature rare, des plus exceptionnelles, que seuls les plus grands dresseurs (et moi, évidemment) peuvent acquérir. D’ailleurs, d’après les quelques informations d’Elvira, il semblerait qu’un certain nombre de challenges m’attendent. Comme prévu ! Mais je suis prêt. Rien ne m’empêchera de revenir auprès des miens accompagné de cette splendide créature, aussi cool et impressionnante que dans mon souvenir !

Concernant Tarouga, la ville dont les ombres percent à travers le brouillard, tout porte à croire que je ferais mieux de ne même pas y entrer, d’après ce que j’en comprends. Ça me dérange un peu : j’y aurais bien fait une halte, mon vol fut mouvementé. Bref, d’abord la chute, maintenant la destination. *J’commence à croire que ce piaf voulait vraiment ma mort !*. J’ai fini par m’y faire, à cette histoire de télépathie. C’est fou à quel point tout devient plus simple une fois ses pensées éclaircies !
Les deux femmes discutent entre elles, je ne comprends plus rien. J’en profite pour passer mon regard de l’une à l’autre, le cœur tremblant de mes précédentes émotions. Je peine encore à empêcher mes yeux de s’évader à la vue de madame coup de genoux, que ce soit en se perdant parmi sa chevelure, ou ailleurs… En revanche, je me sens calme. Quant à l’autre, la surprise étant passée, j’arrive à l’observer sans arrière-pensée. J’avoue que c’est un soulagement de la voir s’éloigner. Une personne de moins pour se moquer de moi.

La discussion reprend sur le Noctali. J’affiche une mine sérieuse, concentré sur les lèvres de la dame. Je ne réalise l’inutilité de mon regard qu’à la fin de ses explications télépathiques. Et là, je m’égare.

— La ferme du soleil… La jungle de Thâ…

Je me frotte le menton, pensif, en répétant dans ma langue ces noms surement bien éloignés de ceux d’origines. *Bah me v’la bien avancé.* Mon cynisme s’exprime en pensées sans volonté de ma part, tout comme mes suppositions : *P’t-être qu’il pourrait m’y emmener, lui ?*. D’un pas évasif, je me suis rapproché de la guerrière, les yeux focalisés sur l’énorme mâchoire posée sur son épaule. Ouep, après avoir vu ces deux dames en descendre, je m’imagine bien chevauchant l’immense dragon, ça doit être une sacrée expérience. D’autant qu’après mon premier baptême de l’air, cette seconde expérience ne pourrait qu’être meilleure.
Je n’ai pas conscience d’avoir pensé cela tout haut puisque je n’ai fait qu’y penser. Aussi, lorsque je reprends la "parole" mentalement, je suis persuadé de reprendre là où nous en étions en énonçant mon plan :

*Donc j’en trouve un à la ferme, ou l’autre, j’le fait évoluer, et tout est bon ! Ah, j’y pense ! Toi t’as plein de Pokémon super cools, tu t’débrouilles comment pour les attraper ?*

Voilà qui devrait laisser deviner mes connaissances exécrables en Pokémon. À l’exception d’Hâmon et des quelques Pokémon qui trainaient à l’orphelinats, je ne me suis jamais rapproché d’aucune créature sauvage. L’idée même d’en capturer m’est venue il y a peu, et je n’ai pas pris la peine de m’y essayer sur ceux de Dyrinn avant de me lancer à l’aventure. Bref, j’avance à l’aveugle en me contentant d’improviser, et ça se voit. Ça pourrait m’inquiéter, mais que voulez-vous : j’ai confiance en moi !
Tout en discutant, mes pupilles persistent à dévisager l’immense dragon, et une fois encore, mes pensées s’évadent à qui voudra bien les entendre : *Il a trop la classe, lui ! Faut absolument qu’j’le caresse !*
Bien sûr, je n’ose le demander et reste à bonne distance, envieux de cette main remuant contre sa mâchoire. Mes gestes me trahissent tout autant : je piétine sur place, les mains jointes dans mon dos. Rien d’aussi évident que mon regard et mes pensées, par contre, j’ignore combien de temps ma maigre méfiance me retiendra d’agir.

[Elvira Greyhunt]

Maintenant qu’elle est seule avec Chad, elle se sent plus à l’aise. Tout ceci était sûrement dû au fait qu’elle n’aimait pas plus qu’il faut Erwina, elle ne pouvait simplement pas faire confiance à une pirate. Les actions de Chad étaient plutôt drôles et sa manière d’agir mignonne. Le fait de savoir qu’il avait encore la naïveté et une certaine innocence rassure Elvira sur les intentions non-dangereuses du jeune homme. C’était plutôt étrange à dire, mais elle avait tellement été entourer de crapules, qu’elle avait un grave problème de confiance. * C’est plutôt étrange, d’ordinaire les oiseaux de longs voyages sont assez bien entrainés, il a dû avoir un problème extérieur qui la déranger. * Pense-t-elle en cherchant vaguement une excuse. Avant avoir Khaliset, elle avait souvent chevauché les créatures de voyage et elle n’avait jamais eu le moindre problème et elle doute que le ranger qui s’occupe du transport, offrirait une monture peut habituer à un nouvel aventurier, quelque chose clochait.

Puis lentement, les pensées du jeune homme se tournent sur sa Ptéra. Il est clair qu’il est intéressé à faire un tour sur son dos. Elle sourit moqueusement, Khaliset n’était pas du genre à laisser monter sur son dos n’importe qui est-il fallu qu’elle l’accompagne pour que la dragonne accepte un minimal sa présence. Elle reste un peu surprise sous le cynisme de Chad qui s’exprime maintenant plus librement dans leurs esprits temporairement liés. Plus experte que lui, elle a eu la décence de fermer son propre esprit aux pensées qui lui serait superflu et qui pourrait le mélanger plus d’autre chose. Après avoir réalisé que les rires d’Axill et de Bélen l’est quelque peu intimidé, elle avait pris la peine de lever un écran entre eux pour les empêcher de s’entendre mutuellement. Elle allait taquiner Chad sur son idée de vouloir monter sa Ptéra, mais elle reste boucher face au manque d’information qui est lié au pokémon en question. * Chad, avoir un Noctali est plus complexe que ceci, du moins pour le Noctali. Tu es chanceux, j’ai un peu d’expérience en la matière vu que j’ai moi-même un pokémon de la même famille, un Mentali. * Tout en disant ceci, elle tire la Noigrume de Sitara et laisse la féline mauve sortie.

La Mentali s’étire un peu avant de poser ses yeux sur Chad et de sourire. * Bonjour. * Souffle-t-elle directement dans l’esprit de Chad. Elle saute ensuite sur l’épaule libre d’Elvira, délogeant avec douceur la Ptéra en frottant ton visage contre le sien avant de se coucher sur les épaules de la rouquine. Elvira soupire un peu, se retenant de dire un mot, mais malgré le côté très ouvert et amical de Sitara, elle l’avait beaucoup trop habituée à prendre cette place quand elle était toute petite. * Dit nous Sitara, pour évoluer un Noctali, il y a bien une manière spéciale. * * Mon jumeau nocturne ? Eh bien, tout comme moi, il où elle doit avoir un lien très fort avec son partenaire et il doit évoluer de nuit, sinon ça donne un Mentali comme moi et ne surtout pas utiliser une pierre, sinon ça va donner autre chose. * Termine la féline en bâillant un peu. Khaliset en profite pour renifler la Mentali, ébouriffant le pelage de cette dernière avant de capter une autre odeur.

Intriguée par l’odeur, elle se rapproche sans gêne de Chad et commence à le respirer, ébouriffant ses cheveux, elle finit par descendre sur le devant de son corps, puis sous sa cape avant de capter l’odeur en question et de se redresser avec une étrange expression sur son visage reptilien. Elle soulève ensuite le nez dans l’air, respirant une nouvelle fois l’air dans les alentour avant de s’envoler brusquement dans les airs. Aveugler un instant par la poussière, la rouquine cache son visage avant d’observer la dragonne s’éloigner dans une direction. « Et bah… C’est une première ça… » Elvira et Sitara se jettent un coup d’œil avant de regarder Chad avec des yeux interrogateurs. * Elle finira par revenir, mais… Pour ce qui est d’attraper les pokémon… Tu as bien déjà un pokémon ? Tu en auras besoin pour combattre l’Évoli. Il y a aussi de faible chance de pouvoir l’attraper sans combat, mais… Hey, rassure-moi, mais tu as des Noigrumes pour attraper d’autre pokémon ? Je veux dire, sans ça, tu ne pourras pas l’attraper et il faudra que tu en achètes. *

Cependant, en suivant les flots de pensées de Chad, elle semble comprendre qu’il a pu d’expérience de ce côté-ci aussi. Ressentant de la déception, elle fait un petit signe à Chad, * Ne t’inquiète pas, elle va revenir et à ce moment-là, tu pourras la caresser. Elle semblait bien t’apprécier. Je ne sais pas ce qu’elle a senti sur toi, mais la dernière fois que je l’ai vu aussi exciter, c’était face à un buisson de baie, alors surement quelque chose qu’elle aime manger. Quand elle aura fini, ce qui ne sera pas long, elle sera de retour. *

[Chad Kehr]

Un Problème extérieur. Bel euphémisme ! J’étais bien conscient de ma part de responsabilité, ou du moins, de celle d’Hâmon dans cette méprise. Néanmoins, j’aurais cru ces piafs mieux entrainés à supporter tout et n’importe quoi. Je ne manquerai pas d’injurier son éleveur de mille noms d’oiseaux une fois retourné sur Tenkeï.

Bref, je préfère laisser cette désagréable mésaventure derrière moi. Car à présent, j’ai quelque chose de beaucoup plus intéressant sous les yeux ! J’observe l’apparition du Mentali, le cœur serré à l’idée de découvrir un semblable de l’être que j’idéalise. Le faisceau rougeâtre m’éblouit un instant avant de prendre une forme quadrupède, très similaire à celle que j’attendais. En revanche, au lieu de ce pelage de noirceur aux anneaux dorés qui m’a tant marqué, la créature se pare d’un mauve uni qui, en toute franchise, m’attire peu. Puis cette pierre, sur le front, le rend trop précieux à mon goût. Je l’imagine hautain, limite réfractaire au combat et à l’idée de secourir autrui. Et pourtant…
Un timbre nouveau s’immisce entre Elvira et moi, dans ma tête. Dans un premier temps, je refuse de croire que cette voix mentale provienne du quadrupède et balaie des yeux les environs. Lorsqu’ils reviennent sur l’animal grimpé aux épaules de madame coup de genou, le doute n’est plus permis.

— Mais tu parles !

La même phrase, le même geste et le même ton qu’avec la pirate. J’avais certes déjà entendu les rires moqueurs des Pokémon d’Elvira, mais je ne m’imaginai pas qu’un échange serait aussi fluide avec de simples Pokémon. On m’avait déjà raconté que beaucoup étaient aussi intelligents que nous, et même davantage, mais le constater en vrai, c’était… Surprenant ? Choquant ? Ou déstabilisant ? C’est ça, déstabilisant, comme si l’humanité entière chutait subitement de son piédestal.
Toujours est-il que cette créature est une mine d’informations ! Il semblerait que la pré-évolution de Noctali soit capable d’évolutions différentes selon l’heure. Tu parles d’un processus à la con ! J’abaisse la tête les bras repliés sur mon torse, pensif. * Pas question de se louper là-dessus ! Manquerait plus que je me retrouve avec un chat bourgeois au lieu de ce que je cherche !* Mes pensées m’échappent toujours sans que j’en ai conscience. Le pire, c’est qu’il n’a pas l’air si terrible, le mauve. Au contraire, je le trouve plutôt sympatoche. Mais bon, les premières impressions, vous savez ce que c’est !

Je n’ai pas le temps d’y penser plus longtemps. D’un coup, le dragon s’est rapproché de moi pour me renifler de toute part, comme un rosbif bien cuit ! Je me suis dressé comme un pic, surpris et un peu effrayé par l’imposante créature. Je n’en demandais pas tant ! Enfin si… Un peu plus, même, puisque je voudrais grimper dessus. Mais là, ça a été si soudain que j’ai à peine eu le temps de lever la main vers son buste que, déjà, il s’envolait au loin sans demander son reste.
Sa dresseuse reprend la discussion comme si de rien était. Mes yeux ronds clignent. Une fois. Deux fois. Je bredouille quelques mots inintelligibles avant de retrouver ma contenance. J’peux pas me décomposer à chaque nouvelle expérience, j’vais encore passer pour un con ! Allez, on reprend, comme elle : *Ben, j’ai la noigrume d’Hâmon, c’est tout* Je la sors et l’ouvre, révélant le vide à l’intérieur. *Mais pourquoi Hâmon d’vrait le combattre ? J’veux juste l’attraper, pas lui péter la gueule, le pauvre ! Pis si j’commence par l’exploser, on risque pas d’avoir un lien fort.* Ou alors, j’ai mal compris ? P’t-être qu’il faut prendre ces explications au pied de la lettre et garder la bête attachée toute une nuit pour la faire évoluer.

La guerrière revient sur son dragon parti dans les cieux. Enfin, sur le coup, j’ai cru qu’elle parlait de sa Mentali, parce qu’elle parlait au féminin. Mais cette dernière n’étant pas partie, et n’étant pas la créature que je voudrais caresser, je me résous à imaginer l’immense bête féroce en demoiselle. En guise de réponse, je hausse les épaules et pense avec négligence : *Franchement, j’vois pas c’qu’elle a pu renifler, depuis que mon Moufouette s’est lâché en plein vol, j’dois pas sentir grand-chose d’autre.* Je me passe une main sur le visage, un peu honteux à l’idée de trimballer cette odeur de pourriture. Mais bon, ça, j’ai l’habitude. *D’ailleurs, j’sais pas ce qu’il fout celui-là...*
UN INSTANT ! Je recule d’un pas, sur mes gardes et le regard inquiet en pensant : *Mais comment tu sais que j’voulais le caresser ? je te l’ai pas…*
Dit ? Quel idiot ! J’essaye de me repasser le flot de mes pensées dans ma tête, espérant au fond de moi que je n’ai rien lâché de plus honteux depuis… Bah, depuis mes dernières gaffes qu’on ne compte déjà plus.
Rien ne me vient. Je suppose qu’en plus d’être maladroit, j’ai la mémoire courte. Ou alors je n’ai pas gaffé, ce qui serait étonnant. Allez, on se concentre, et on essaye de penser différemment. En fait, évitons de penser, ça serait plus simple. Je n’exprime aucune inquiétude pour Hâmon, comme s’il était parfaitement naturel que mon Pokémon ait disparu sans laisser de trace en terres inconnues, et reporte plutôt mon attention sur la proposition de caresse d’Elvira :
*Et du coup, j’pourrais le… la chevaucher aussi ? Ça doit être trop classe de voler sur un dragon comme elle !*
Et tandis que je m’emporte à l’idée d’un voyage à dos de dragon, je suis bien loin d’imaginer les mésaventures que pourrait vivre mon compagnon de voyage, perdu dans les marais qui bordent Tarouga.

*****

Mon pauvre Chad ! Cela fait si longtemps qu’il a disparu, je commence à m’inquiéter. Tout ça à cause de ma vilaine curiosité : la terre où il m’a lancée s’amollissait sous mes pattes et me couvait jusqu’au cou par endroits, j’ai trouvé ça agréable de m’y rouler entièrement, comme dans ces mousses odorantes dont il me badigeonnait souvent. Hélas, quand Chad a repris la marche, ce délicat traitement m’a alourdie jusqu’à m’empêcher de le suivre. J’avançai, peu à peu, mais comparé aux enjambées vivaces de mon ami, autant dire que je pataugeais sur place. Bientôt, mes yeux le perdirent parmi les ombres et sa piste m’échappa. Chez nous, quand on se perd, c’est simple : je rentre, il rentre, et magiquement, la vie nous réunit. Mais ici ? J’ai beau fureter de gauche à droite, je n’y reconnais ni les arbres, ni la terre, ni le ciel.
Je bénis mon odeur lorsque, enfin, je retrouve ma propre piste incrustée dans ses vêtements parmi les marais en un léger filament d’espoir tressé parmi la brume. J’allais le suivre quand un trio désagréable m’en barre la route. Deux rats dégoutants et un Panda qui s’imagine être le caïd du coin, avec sa feuille qu’il mâchouille en me jetant un regard assassin. Ce dernier s’avance d’un pas lent et menaçant, tapant du poing pour m’impressionner. L’évidence de ses vilaines intentions m’inspire un dégoût profond. Pas question de laisser une brute ruiner mon masque de beauté avant que j’aie rejoint Chad ! Je m’ébroue pour évacuer le surplus de boue qui me ralenti, lève la queue et tente d’hérisser mon pelage tout gluant en guise d’avertissement. Je ne dois pas être assez claire, puisqu’il continue à avancer. La boue cache ma colère. Allons bon, tant pis pour eux !
Mon odeur nauséabonde s’exprime d’une vague toxique déchainée autour de moi. À peine parvient-elle au museau des trois autres qu’ils manquent de régurgiter leur déjeuner et prennent leurs jambes à leur cou. Quant à moi, je remue la queue avec satisfaction, la tête haute, et reprend la route.

Sauf que, la route, il n’en reste rien. Mon parfum englobe la zone de son puissant arôme et s’imprègne sur chaque carré de terre, chaque arbre et chaque brin d’herbe. Impossible de retrouver la piste délicate flairée plus tôt. Je couine de frustration. Tout ça à cause de ces vilains ! Me revoilà perdue, loin de la douceur de mon Chad ! Et s’il lui arrivait un malheur durant mon absence ? Je ne me le pardonnerai jamais !

[Elvira Greyhunt]

Devant l’exclamation du jeune homme, Sitara éclate dans un rire joyeux juste avant de sauter sur les épaules de la rouquine. Cependant, elle ne souffle aucun autre commentaire autre que ce que lui demande Elvira. Malgré son air hautain, c’est avec une voix claire et joyeuse qu’elle répond au jeune homme. Voyant bien que le jeune homme n’a pas conscience de ses pensées volatiles et directes, les deux demoiselles se regardent un instant avant d’échange un petit sourire moqueur. Elvira croise tout de même les bras sur sa poitrine, elle n’imaginait pas Sitara comme un chat bourgeois, mais encore une fois, elle ne sait pas si elle doit en rire. Tout en enchaînant sur les questions, elle soulève un sourcil quand il dévoile une Noigrume vide. Punaise… Soit elle est avec un désillusionner soit son pokémon avait pris la fuite… À moins que… Même si elle n’y avait pas fait attention, par souci d’intimité personnelle, elle avait peut-être manqué de l’information, comme le pourquoi sa monture s'était agitée de la sorte. Est-ce que c’était le pokémon du jeune homme qui avait pu offrir une frayeur à l’oiseau ? Il est parfaitement possible, mais elle laisse ceci pour une autrefois, elle avait des questions à répondre. *Ah… C’est plus complexe que ceci Chad. Certains pokémon accepteront peut-être de te suivre, naturellement ou parce que vous avez partagé un moment fort à ce moment-là. En revanche, d’autres Pokémon seront beaucoup moins dociles et gentils. Certains mêmes t’attaquerons sans hésiter. Et puis, tu crois avoir la patience pour trouver un Évoli qui va vouloir te suivre volontairement ?* Termine-t-elle doucement.

Elle l’observe un instant, s’assurant que ce qu’elle vient de lui dire avait bien passé. En même temps, il pouvait bien gérer comment attraper un pokémon seul, mais elle avait des doutes qu’il trouverait le cheminement difficile. Surtout que plus elle l’entendait s’exprimer et parler, elle réalise qu’il ne semble pas avoir une haute connaissance de la vie extérieure, du moins pour le voyage. Elle réfléchit rapidement, quand Khaliset démontre un intérêt particulier envers Chad. Elle jette un coup d’œil à Sitara qui ne fait que secouer la tête, ne comprend pas plus ce qui pousse la dragonne à agir de la sorte. C’est dans un silence confus qu’elles observent toutes les deux quitter l’endroit sans savoir. Elvira aurait très bien pu pénétrer son esprit, mais elle connaissait le sentiment que pouvait ressentir la dragonne face à ceci. Elles avaient placé des termes en place et elles les respectaient toutes les deux. Puis elle est à nouveau distraite par les pensées du jeune homme. Ainsi donc, il possède un Moufouette… À bien y comprendre, il l’avait probablement depuis un petit moment… Est-ce que c’était l’odeur du pokémon qu’avait senti la dragonne ? En même temps, elle ne comprend pas pourquoi… Elle se souvient vaguement d’une histoire dans l’armée Terrosienne

Quand enfin Chad comprend qu’elle peut suivre le flot de ses pensées, il semble reculer brusquement et elle ose un sourcil. *Oui ?* Souffle-t-elle dans une voix moqueuse. *Tu sembles comprendre enfin ce que veut dire un lien télépathique…* reprend-elle doucement. Elle ne lui en veut pas, au départ, elle était pareil, mais à la différence du jeune homme, elle était celle qui envahissait l’esprit des autres. Sans professeur pour lui apprendre à contrôler ses nouveaux pouvoirs, elle avait eu quelques difficultés à gérer les flots de pensées de tous les gens qui pénétraient son esprit mal protégé. *Eh bien, si tu veux te rendre aux Fermes du soleil, il te faudra bien un moyen de transport et comme tu ne sais pas où est l’endroit…* termine-t-elle sans finir sa pensée. Elle hausse les épaules puis jette un coup d’œil à Sitara qui sourit doucement. Étrangement, aujourd’hui Elvira se sent généreuse, ce qui est plutôt rare. Elle avait la vague impression qu’une fois qu’elle allait pénétrer dans Tarouga, qu’elle n’en sortira pas avant un long moment. *En attendant qu’elle revienne de son aventure, parlons un peu. Qu’est qui ta pousser à partir à l’aventure ?*

***

Pendant qu’elle bat des ailes, elle respire puissamment l’air autour d’elle. L’odeur qu’elle avait faiblement sentie chez cet humain de petite taille lui avait remémoré des vieux souvenirs. Tout ceci date que sa naissance où elle avait été prise en charge par l’armée de Terros. Malgré sa taille assez impressionnante de l’époque, elle avait été adoptée par un Moufflair qui avait pris soin d’elle. L’odeur ne l’avait jamais dérangé vue qu’elle avait le sens de l’odorat quelque peu détraquer. Il fallait qu’elle passe énormément de temps avec la même odeur pour bien l’assimiler et vu qu’elle avait vieilli avec un Moufflair, l’odeur était maintenant imprégnée en elle, tout comme celle d’Elvira. Tandis qu’elle remonte la piste du jeune homme, elle essaye de retrouver celle du Moufouette. Un sentiment de nostalgie envahit la dragonne tandis qu’elle sillonne le ciel. Tout ceci remonte à, si longtemps qu’elle peine à se souvenir du visage du vieux Moufflair et pourtant, son odeur et ses attentions, qu’il a eu envers elles sont gravé à jamais dans son esprit.

Ce ne fut que de longues minutes plus tard qu’elle retrouve ce qui ressemble à une croûte de terre sèche mouvante. Si elle n’avait pas assisté à l’étrange scène entre la terre mouvante et les trois Pokémon étranger, probablement qu’elle n’aurait jamais remarqué que c’était ce qu’elle recherche. Loin d’être stupide, elle reste ne l’air, regardant avec un air de dégoût le nuage fétide explose autour du Moufouette. Elle observe le nuage s’étirer dans l’air avant de s’évaporer. Tout en suivant des yeux le petit Moufouette, elle réalise que s’il continue dans la direction qu’il suit, qu’il m'a manqué la position de son maître. Elle décide de piquer vers le sol, laissant son poids la faire descendre plus rapidement. C’est à quelques mètres de la position du Moufouette qu’elle étire les ailes et qu’elle bat rapidement pour ralentir sa chute. En faisant ceci, elle fait soulever un nuage de terre qui l’enveloppe le temps qu’elle se pose lourdement au sol. Les pieds bien ancrés dans le sol, elle bat une deuxième fois des ailes, chassant la poussière du marais et l’odeur encore présente du Moufouette.

Elle prend la peine de se secouer un peu avant de poser ses yeux sombres sur la petite créature. Elle ne réalise pas immédiatement que la présence prédatrice qu’elle dégage pourrait être un problème et elle se pense un peu vers l’avant pour s’assurer que c’est bien lui qu’elle cherche et non pas un imposteur. Une fois sur de ceci, elle pousse un petit grognement dans une tentative de communication, mais faute de douceur, ceci rassemblement à un avertissement que simplement à une question. Très peu reconnue pour sa patience, la dragonne finit par s’impatienter et pousse un grognement plus imposant, cherchant une réponse plus rapidement. Que ce soit par le manque de communication, ou la peur ou encore l’instinct, la Ptéra finit par abandonner l’idée de discuter et reprend son envolée en attrapant, entre l’une de ses puissantes pattes, le Moufouette avec la claire intention de le ramener là où il devait être, auprès du gamin.

[Chad Kehr]

Contraint 1 : Insister sur la description des lieux et des personnages.

De la boue à gauche, des mares couvertes de nénuphars à droites, le tout sous une brume odieuse arrachant à ma vue l’entièreté du monde au-delà de quelques mètres. Guidée par de maigre repères, ombres à demi-effacées d’arbres pourtant si proches, je persiste à explorer l’inconnu, le cœur gonflé de courage à l’idée de retrouver mon Chad.
D’autres le trouvent grossier, impulsif, et clament mille esclandres devant sa dégaine négligée, mais moi, j’ai trouvé en lui la rareté d’un ami. Ils ignorent sa bonté, le jugent sur son regard froid, méfiant, ou sur sa cape tâchée par une vie d’abandons. Lui aussi, il a vécu seul. Personne pour le chouchouter. Personne pour s’assurer qu’il reste présentable. Lui aussi, il pue la solitude.

Mes pensées s’effritent à la vue d’une ombre immense perçant les cieux à une vitesse folle. D’instinct, mes griffes se plantent dans la terre molle et en arrachent une motte où quelques brins d’herbes s’abandonnaient lorsqu’une bourrasque m’éloigne de la bête échouée au sol. Les yeux mi-clos, j’assiste impuissante au balayage de mon nuage toxique protecteur. La terre vole, tournoie, meurtrie par la puissance d’un titan. Je recule à tâtons, ventre contre terre, espérant ainsi passer inaperçu aux yeux du nouveau venu. Non que ma confiance ait flanchée, mais combattre une créature dotée d’une telle force en ces lieux désolés retarderait mes retrouvailles avec Chad. Alors j’attends, immobile, aussi boueuse que le marais qui m’entoure, avec pour seule trait de vie mes pupilles fixées sur le nuage de terre qui achève sa danse.
Enfin, je la vois. La créature. Un halo de lumière solitaire s’est glissé jusqu’à elle à travers son sillage, illuminant ses écailles d’une lumière divine au milieu des ombres du marais. Grâce à cela, je la perçois avec netteté, de sa queue frappant le vide derrière elle jusqu’à ses immenses ailes surplombées de serres tranchantes qui s’agitent, défiant brumes et odeurs. Ne pas bouger. Rester loin d’elle. J’attends. Qu’elle se fige, qu’elle s’éloigne : peu m’importe, tant qu’elle ignore ma présence. Hélas, le destin en a décidé autrement : sa tête se penche vers moi puis ses yeux me transpercent de leur noirceur au son d’un grognement. Je trésaille, donnant vie à la boue qui me recouvre. Tel un Dieu descendu pour punir le pêcheur, la bête est venue pour moi.
Je me redresse, lui renvoie son regard sans trembler, la tête haute et les yeux brûlant d’une détermination nouvelle. Chad ne saurait supporter qu’une faible trouillarde l’accompagne. Lui, dont les yeux pétillent de courage au-devant du danger ! Je suis son exemple dans l’espoir que son aura m’accompagne dans l’adversité.
Second grognement. Plus fort, plus menaçant. Je ne faiblirai pas ! Au contraire, je m’avance et grogne à mon tour, prête à balancer la sauce une seconde fois. Qu’elle essaye de me chopper dans sa gueule, cette chimère monstrueuse ! Je vais lui faire regretter le goût du Laporeille.

Tiens ? Sa tête s’éloigne et ses ailes s’agitent de nouveau. Je penche la tête sans comprendre, déroutée par un abandon si rapide. Ma menace l’aurait inquiétée ? Je n’ose y croire. Pourtant, la bête cherche bien à s’envoler, comme attirée par la lumière que les brumes cherchent déjà à recouvrir. Je me crois sauvée lorsque, d’un mouvement agile de ses serres, elle s’empare de moi et m’arrache à la terre boueuse. Mon cœur tambourine dans ma poitrine, frappé de plein fouet par la sensation du décollage. J’en oublie de me débattre, presqu’assommée, et ne recouvre mes esprits qu’en sentant mes pupilles agressées par l’éclat fabuleux d’un soleil enfin libéré des brumes. Le corps pendant de ma prison griffue, je pivote ma tête dans tous les sens, observant tour à tour le marais brumeux qui s’éloigne en contrebas, les nuages plus proches que jamais, et le buste robuste de la prédatrice. J’exprime mon mécontentement en m’agitant sans exagération. Juste assez pour agacer l’autre et perturber son vol, sans pour autant risquer de lui glisser entre les griffes. Ce ne serait pas judicieux. Pas pour l’instant. Elle ne perd rien pour attendre, cette prédatrice de pacotilles ! Chaque mètre m’éloignant de mon Chad par ses battements d’ailes s’ancre dans mon esprit. Ils s’accumulent aussi surement que les gaz de mon ventre, prêts à resurgir d’un seul coup pour lui faire regretter son geste sitôt que nous retrouverons la terre ferme.


*****


Les évènements se sont succédés rapidement. D’abord cette histoire de télépathie, puis la pirate douteuse, et maintenant cette interruption de la dragonne interrompant la discussion ! J’ai à peine eu le temps d’acquiescer avec fermeté à la question d’Elvira, pleinement confiant en mes capacités. Rien ne saurait ternir l’éclat doré de mes souvenirs. Mon futur Noctali me suivra. Et s’il ne le fait pas, je l’y convaincrais par tous les moyens nécessaires ! De la patience ? Pas besoin de patience avec une volonté comme la mienne !
Bref, si j’ai bien compris cette histoire de lien télépathique, mon absence de réponse aura néanmoins été entendue par Elvira. Et par son chat bourgeois. J’observe leur complicité, silencieux. Un lien fort, hein ? Quand j’les vois, j’trouve qu’elles se ressemblent. Pas physiquement, bien sûr : je sais encore différencier une humaine d’un Pokémon. Plutôt dans leur façon d’être : ces coups d’œil rapides, ces sourires moqueurs qui se cherchent, se répondent, avant que leurs yeux ne reviennent sur moi. Comme s’ils partageaient un secret, une vérité inaccessible au débutant que je suis. Je fais la moue, jaloux de leur complicité. En revanche, cela ne dure pas : l’idée de chevaucher la dragonne m’enthousiasme beaucoup trop pour laisser n’importe quoi d’autre gâcher le moment. J’m’imagine déjà, chevaleresque sur ma superbe monture. On dévalerait les cieux à la vitesse du son, écartant les nuages sur notre passage. Même la ville de Tarouga, au loin, paraîtrait insignifiante de là-haut. Ces maisonnettes en bois auraient l’allure d’un minuscule dépotoir, aussi inutile que les truands qui y vivent. J’risquais pas de m’inquiéter de rater une visite des lieux si en contrepartie je pouvais profiter d’une telle balade !

Hélas, pour le moment, il nous faut attendre. Mon regard brillant dû en dire long sur mes pensées du moment, de toute façon en libre-service en ce jour télépathique, je suis presque frustré de devoir continuer le blabla alors qu’une telle aventure nous attend. Naturellement, mon regard se porte vers la direction prise par la dragonne, pistant son ombre parmi le bleu du ciel.
*Partir à l’aventure ?* Je répète cette phrase, l’esprit incertain. Il est vrai que je vis une aventure. En revanche, je m’en fiche un peu. *Je cherche juste un Noctali moi, j’rentre dès qu’c’est fait.*
Mes yeux se posent sur la guerrière. Son équipement, ses Pokémon, jusqu’à ces deux épées vivantes que je sais collées à son dos. Je l’imagine sur les routes, régulièrement. J’me demande si ça serait une vie pour moi. Oué, j’ai un bon exemple sous les yeux, une femme splendide, forte et prête à tous en plus d’être bien accompagnée. Mais avant ça ? Avant ce jour où elle rencontra le gamin de Dyrinn, à quel point elle a morflé, la madame ? J’en sais rien, mais j’le devine. C’est pareil, chez nous. Y’en a, des costauds, des voyageurs. Ils ont tous morflé. Même moi, j’ai morflé, sans même sortir de chez moi ! *J’en ai vu un qu’une seule fois, de Noctali. Durant une nuit, où tous les Pokémon ont pété un plomb. Les plus gros, surtout, même que certains ont doublé de taille. Mais pas lui. Il était là, aussi brillant que chaque jour, et…*
J’sais pas si j’l’ai pensé volontairement, tout ça, mais je m’arrête, gêné. Mes yeux clignent, se détournent de l’adulte pour se perdre parmi les brumes d’où je viens. *Je cherche pas à revivre ce genre d’emmerdes. J’veux juste… J’sais pas…*
Je ne saurais l’expliquer. Il le fallait, voilà tout.

Après un temps, une ombre attira mon regard en direction des cieux. La dragonne ! Elle revient, enfin ! Je la suis du regard jusqu’à ce qu’elle touche pied à terre.

— Hâmon ?!

Ce n’est qu’en voyant un tas de boue remuer jusqu’à mes pieds que je réalise l’arrivée d’Hâmon. Il grogne, feule et bondit sur place entre moi et les dames – humaines ou Pokémon –. Son pelage collé par la boue s’agite, comme s’il essayait de le hérisser avec colère. D’abord, je m’en étonne. Puis je vois sa queue se dresser. Mon cœur rate un battement : je bondis. L’instant d’après, tous peuvent me voir soulever le Moufouette de mes deux mains, prendre un brin d’élan et le balancer aussi loin que possible. Un nuage de puanteur tout juste relâché accompagne mon lancé, tandis que le pauvre Moufouette virevolte à plusieurs mètres d’ici et se rattrape au loin, une fois encore avec une grâce et agilité des plus frustrantes.

[Elvira Greyhunt]

Malgré l’agitation de son petit prisonnier à fourrure, la dragonne ne semble pas réellement déranger par son comportement. Loin de là même, elle se doute un peu qu’il doit être terrifié à l’idée qu’un tel monstre comme elle, le kidnappe pour l’amener on ne sait où. Retrouver son chemin d’origine ne lui fut pas très long et pendant qu’elle retrouve au loin la petite silhouette de sa maîtresse, elle commence sa descente vers le trio. Loin d’être attentive à la conversation qui se passe entre Elvira et Chad. Le petit silence qui s’installe après sa question, intrigue la rouquine et lentement de flots d’images agités lui son partager. Elle se doute une nouvelle fois, qu’il ne fait pas ceci par exprès et elle sent ses interrogations à son propos. Puis lentement, elle capte des souvenirs douloureux qui datent d’un temps antérieur à maintenant ou… Elle reconnaît facilement un Carchacrok en Méga-Évolution. Les restes des images sont floues, mais très brutal et agité avant qu’elle soit vaguement aveuglée par des halos dorés et c’est là qu’elle a l’image net du Noctali qui l’a sauvé lui. Les sentiments qu’elle ressent son fort et puissant et pendant un instant, elle se perd dans les sentiments du jeune homme. Elle soupire, attrister par les événements qui ont durement frappé la vie de ce gamin…

Elle secoue doucement la tête pour chasser ses souvenirs et ses émotions, qui n’étaient pas, les tiennent. Elle hoche doucement la tête, un léger sourire accroché aux lèvres. Pendant qu’il pose les yeux au loin, elle fait un pas vers et pose la main sur son épaule. *Je comprends… Ne t’en fais pas avec ceci. C’était simplement une curiosité de ma part.* Glisse-t-elle doucement mentalement. Même la renarde avait retrouvé une expression plus sérieuse et maternelle. Elle n’avait pas cherché à apporter la tristesse sur le moment, elle se sent même stupide d’avoir terni le moment. *Elvira, ce n’est pas ta faute… Alors, arrête de te blâmer…* Murmure Sitara à l’intention d’Elvira. Toutes les deux savaient pertinemment, qu’elle ne pensait pas juste à la situation actuelle, mais à une autre en particulier. Quand Chad lève la tête, elle fait de même, suivant le regard du gamin pour retrouver la silhouette familière de Khaliset. Soulevant son bras droit, elle salue la dragonne qui se pose non loin d’eux. Elle remarque immédiatement la forme boueuse qui s’agite entre l’une de ses pattes et se demande bien ce qu’elle a bien pu lui ramener.

Il est plutôt rare de voir la Ptéra rapporter de pauvres proies sans défense. Cependant, l’exclamation de Chad face à la créature, annonce à Elvira que c’est le pokémon de ce dernier. Elle allait afficher un large sourire de rassurer, face à la petite boule d’énergie qui sautille devant eux. Toutefois, le geste de Char surprend le trio quand il agrippe la créature, s’élance et le lance plus loin. La surprise se dessine sur les visages respectifs de chacune. Sitara est la première à réaliser ce qui va se produire, ressentant le danger de la situation. Pendant qu’elle se prépare, elle conseille à Elvira d’attraper Chad et de la ramener vers eux, ce qu’elle fait sans discutant. Son geste est tellement rapide et fort, qu’elle plaque face première le gamin contre elle, avant de lever le bras droit devant elle. Au même moment, Sitara créait, juste à temps, une bulle de protection qui empêche le nuage de puanteur de les envelopper. Malgré la rapidité d’action de Chad, il semblerait que le rayon de puanteur soir très large. Malgré la bulle de protection, l’odeur acérée fait plisser du nez Khaliset et Sitara. Loin d’avoir un odorat aussi développé que les deux demoiselles, l’humaine ne comprend donc pas l’expression de dégoût des deux Pokémon.

Ce n’est qu’une fois que le gros du ‘’l’action’’ est terminé, qu’elle réalise qu’elle étouffe presque Chad contre elle. Elle rougit un peu avant de relâcher sa prise et de se détourner vers Khaliset pour cacher la rougeur sur son visage. « Khaliset, tu veux bien nous débarrasser de ce nuage ? » Dit-elle en toussant un peu. Elle sent le regard rieur de Sitara sur elle, mais la renarde à l’intelligence de ne dire aucun mot. Presque au même moment, Axill immerge du sol juste en face d’elle, dévisageant la rouquine sans comprendre la situation actuelle. Il jette un coup d’œil à Chad puis revient sur Elvira. *Tout va bien ? Tu es toute rouge… Ne me dis pas que tu es malade…* Ah cette réplique, Elvira le dévisage, incertaine s’il est sérieux ou s’il rit d’elle, puis elle éclate dans un grand rire. La dragonne profite de cet instant pour battre brusquement des ailes et envoyer une puissante bourrasque pour éloigner le nuage de pétulance. L’Ectoplasma est pratiquement évaporé par l’action et finit par retrouver refuge dans les vêtements de la rouquine, disparaissant à nouveau.

*Ouff… Ton compagnon animal est toujours aussi… Excité à l’idée de te retrouver ? Quand tu seras prêt, tu pourras remettre… Hâmon dans sa Noigrume ? On partira vers la ferme du soleil. Il faudra juste qu’a face à un petit arrêt entre-temps, je dois refaire le plein de matériau avant un long voyage… En même temps, aussi bien te présenter l’une de nos villes hospitalières du coin. Il serait dommage que tu ne profites pas de la nourriture étrangère.* Termine-t-elle avec un large sourire.

[Chad Kehr]

L’adulte s’est montré compréhensive devant ma peine. Aucune question n’a été relancée. Je l’avoue, c’est un soulagement. Si j’idolâtre les Noctali depuis ce jour, j’en garde néanmoins de mauvais souvenirs. Beaucoup de gens ont crevé, cette nuit-là. Aucun de mes proches – j’en avais d’jà plus –, mais des gens que j’connaissais, que j’croisais parfois dans la rue. Et puis, y’avait ces Pokémon, après la bataille. Les tueurs. Ou plutôt, les survivants. J’en ai vu, des dévastés, allongés sur le corps meurtri de leur dresseur pour le pleurer d’une rivière d’incompréhension. Ils ont erré des jours, des mois, certains allant jusqu’à se laisser pourrir sur le rebord des chemins. C’est à peine si on osait s’approcher d’eux.
Puis y’avait les autres. Puis y’avait nous. Bref : j’ai pas envie d’en parler.

Heureusement, le retour de la dragonne et d’Hâmon ont su nous faire oublier ce malaise. Rien de tel qu’une bombe puante pour passer à autre chose ! J’crois que j’ai réagi à temps. Le gaz, visible à l’œil nu, a démarré presqu’aussitôt. Si on court vite, avec un peu de chance, on pourra s’en tirer sans dégobiller notre… no…
… … … … … …


Hum… Veuillez excuser cette brève interruption, il semblerait qu’en raison d’une situation des plus perturbantes, on ait perdu le contact avec l’esprit de Chad. Dans l’attente de son retour, je vous laisse en compagnie de notre Moufouette préférée en plein vol plané :


Sacrilège ! J’ai échoué à gagner sa confiance : Chad me croit faible, incapable de lutter face aux titans du monde du dessous. Quand je pense qu’il a préféré m’éloigner aussitôt, usant de toute sa vivacité et sa force pour me projeter aussi loin de l’ennemi plutôt que de me laisser l’affronter, quelle bravoure… Chad, tu n’aurais pas dû ! Je refuse de te laisser te sacrifier pour moi ! Je ne t’abandonnerais pas à cette terrible créature ailée et sa garce d’humaine. Sitôt rattrapée sur mes quatre pattes, je feule de loin, les yeux rivés sur cette bulle protectrice sordide qui nous séparent, mon héros et moi. L’humaine a emprisonné Chad entre ses bras et le serre de toutes ses forces ! Le pauvre peut à peine respirer, étouffé dans la poitrine de cette brute. Il est tout figé, les bras en l’air et dans un équilibre précaire, comme frappé d’un maléfice soudain ! Je me sens démunie. Pourtant, mes pattes s’élancent, foulent la terre humide du marais et rejoignent la protection sphérique pour en griffer l’extérieur. De là, j’en comprends l’origine : discrète, bien qu’au cœur de l’action, une créature psychique me jauge de son perchoir. Son nez plissé ne trompe pas : cette mécréante débecte les étrangers que nous sommes. C’est sans doute sa faute, si Chad ne bouge plus ! Heureusement que mon esprit ténébreux est immunisé à sa sorcellerie, elle ne verra pas les coups venir ! Sitôt que cette barrière s’abaissera, je contre-attaquerai. Oui Madame ! Seule contre vous trois, s’il le faut ! Personne ne s’en prend à mon Chad !

Pour toute réponse, le titan des airs déchaine une nouvelle fois la fureur de ses ailes. Je me cloue au sol et lui jette un regard mauvais. La boue se détache peu à peu de mon pelage, quelques poils violets perçant à travers le brun. Pauvre masque de beauté, lui aussi, il aura bien souffert. Mais pour mon Chad, j’abandonnerai jusqu’au dernier de mes poils.
Et mince, les ennemis s’accumulent ! Voilà qu’une forme spectrale s’élève du sol, rejoignant le groupe d’assaillant au moment où l’humaine écarte Chad de sa poitrine. Le pauvre titube, le regard vide. Ses bras flasques sont retombés le long de son corps, et j’aperçois un peu de bave au creux de ses lèvres, signe de l’emprise maléfique exercée sur son esprit. Je dois le libérer ! Et bon sang, que fabriquent-ils, dans cette protection ? C’est un silence complet, comme s’ils discutaient sans mots… J’imagine leurs incantations silencieuses qui s’immiscent dans l’esprit de mon pauvre Chad. Je vois sa tête balloter de haut en bas, vaguement captivée par des mots que je ne peux entendre. À n’en pas douter, il en manque le principal. D’ailleurs, j’en manque au moins autant en l’entendant bredouiller :

— Hâmon ? Oui, oui… oui… il est comme ça…

Il parle, mais sa tête est vide, privée de pensées par un sortilège maléfique.

Enfin, la barrière s’abaisse. Tremblez, mécréants, devant Hâmon l’inarrêtable !
Oh… Attendez…
… … … … … …


Eh bien, décidément ! Il semblerait qu’un rayon rouge ait fait fermer son clapet à Hâmon, nous nous voyons donc dans l’obligation de retourner voir ce qu’il reste de l’esprit de Chad :


Je repose la pokeball dans ma poche machinalement après avoir rappelé Hâmon. C’est à peine si j’lui ai jeté un regard. ‘Toute façon, mes yeux servent plus à grand-chose. J’crois que quelques images parviennent à mon cerveau, de temps à autre, mais celui-ci refuse de les traiter, bien trop occupé par le choc agréable de deux coussins envouteurs annoncé par mes joues auparavant. J’acquiesce à tout ce qu’Elvira me dit sans rien entendre. Elle a raison de toute façon. Faut l’écouter. Une superbe guerrière comme elle, elle a forcément raison. Ah, elle sourit ! Alors je souris et acquiesce à nouveau.
J’crois qu’ensuite, on est monté sur la dragonne, et on est parti. C’est un peu flou, dans mon esprit. J’me souviens juste de… enfin de… Bref, c’était quand même vachement bien !

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