[ Clos ] Donner le bâton pour se faire battre [Solo]

[Kaé]

[Contrainte n°1 : Insister sur les descriptions des lieux et des personnages]


Cela faisait quelques temps que la gamine squattait l’infirmerie du coin, se remettant lentement de sa dure épreuve de maîtresse des lames que lui avait fait passé Nin… euh… cette dame dont le nom lui échappait déjà, alors qu’elle l’avait su plusieurs jours auparavant. Ses blessures cicatrisaient et ses plaies se refermaient, alors qu’elle sentait l’énergie circuler normalement dans son corps à nouveau. Cependant, même si elle se sentait mieux, les docteurs refusaient de la laisser partir, malgré son insistance. C’est vrai quoi, c’est sympa d’être logée, nourrie et avec des gens qui s’occupent bien de vous de temps en temps, mais au bout d’en moment, l’envie de bouger devenait juste trop forte. Finalement, quand les gens ont en eu marre de devoir gérer une fille qui agissait comme une gamine de dix ans, ils acceptèrent de la libérer, à une condition : elle allait devoir faire sa rééducation dans un dojo du coin, et promettre de ne pas faire d’exercices physiques en dehors de ce que lui demanderait le Maître. En effet, les médecins, pas fous, ne voulaient pas qu’elle aggrave son cas en se forçant trop ou en faisant l’idiote, car cela impliquerait de devoir se la retaper pendant encore plusieurs semaines…

Kaé leva donc la tête alors qu’elle contemplait le bâtiment dans lequel elle allait faire sa rééducation. C’était une vieille bâtisse dans le quartier ancien de la ville, construite en bois, et sur lesquelles les signes de fatigue ne manquaient pas. La peinture s’écaillait alors que le bois était mangé par endroit, voire noirci à la suite de feux. La façade paraissait un peu coincée entre les immeubles voisins, comme si elle avait du mal à s’imposer malgré son âge plus avancée. Rien n’indiquait que c’était un dojo, et encore moins un endroit apparemment réputé, à part une enseigne abimée et presque illisible sur la lourde porte que l’infirmière accompagnant la fille poussa brusquement pour pénétrer dans l’immeuble.

La porte débouchait sur un petit couloir de quelques mètres avant de faire rentrer directement les visiteurs dans le vif du sujet : une salle d’entrainement, petite malgré que le fait que c’était, apparemment, la pièce principale, dans laquelle un groupe s’entrainait en faisant un enchainement de kata impressionnant, sous le regard attentif de celui qui devait être en charge. Il ne leur lança même pas un coup d’œil, refusant de se laisser distraire en plein enseignement. La femme accompagnant Kaé l’incita à s’asseoir sur un des bancs sur le rebord des tapis, ce que la gamine fit sans scier, alors qu’elle allait voir l’homme, qui ne bougea pas d’un pouce alors que la jolie petite infirmière lui murmura quelques mots avant de partir, laissant l’enfant sur son banc, à attendre. Elle en profita pour lever les yeux et observer un peu l’endroit où elle avait atterrit. L’intérieur de la bâtisse semblait être fait de bois et de pierres blanches, avec un nombre impressionnant de décorations en tout genre qui cachait la plupart des murs. Il y avait des affiches pour des tournois, ainsi que des étagères remplies de coupes, trophées et photos aussi. On respirait presque l’expérience, la vieillesse et la sagesse qui émanait des cloisons de la maison, tant elle avait du en voir, des choses.

Soudain, le groupe tira Kaé de sa distraction avec un assaut final, puis l’homme en charge s’inclina légèrement devant ses élèves avant de leur faire rompre leur formation. D’un pas sec et autoritaire, il se dirigea alors vers Kaé, qui eut l’impression que le sol tremblait à chacune de ses enjambées. Il se planta finalement devant elle, la surplombant, les bras croisés devant son torse. La fille se sentait toute petite dans l’ombre de ce qui lui semblait être un géant, et, ne sachant pas quoi faire au bout de quelques instants de silence, elle lui décocha un sourire « crochu » gêné, avant d’avaler bruyamment sa salive devant la stature parfaitement impassible de l’individu.

Maître Kin Kazuma :

Il avait les cheveux bruns, assez longs pour un homme, qui lui arrivaient jusqu’au menton, lui couvrant une partie de ses yeux marrons clairs qui reflétait la lumière du soleil avec un lueur dorée. Ses sourcils étaient froncés sur son front, accentuant son regard perçant qui semblait lire jusque dans les entrailles de la fille. Il avait une cicatrice sous l’œil gauche, symbole de l’expérience qu’il avait du acquérir au cours de ses nombreux combats.

La fille planta ses grands yeux noirs dans ceux de l’homme, attendant qu’il prenne la parole, n’osant pas prendre l’initiative. Les Pokémon de la gamine étaient soigneusement rangés dans leur ball, comme lui avait demandé son accompagnatrice, et la fille se trouvait très seule face à cette montagne de muscles immobile. Le temps lui paru très long, jusqu’à ce qu’enfin, il se décide à prendre la parole.

« Comment t’appelles-tu ? » demanda-t-il avec sa voix caverneuse, qui semblait résonner dans la tête de la gamine.
« Euh… Kaé m’sieur, » répondit-elle, avec une tonalité qui lui paraissait si faible qu’elle n’était même pas sûre d’avoir été entendu.
« Et tu es ici pour ? » enchaîna rapidement le type.
« Ben… » hésita la fille, qui pensait qu’on l’avait mis au courant, « je me suis blessée au cours de mon épreuve pour devenir maîtresse des lames… et du coup je suis là pour la rééducation… »
« Et tu l’as eu ? »
Kaé hocha vigoureusement la tête en guise de réponse.
« Avec quel examinateur ? »

Là, la question prit la miss de court. Ses yeux s’écarquillèrent un peu, alors qu’elle creusait dans sa tête pour se souvenir du nom de la dame. Mais, comme d’habitude, sa mémoire lui faisait défaut, et elle ne pu que lancer un sourire embarrassé à son inquisiteur.

« J’crois que c’était Ninon quelque chose… Euh… une Mizuhanienne avec les cheveux noirs, petite… » essaya-t-elle de décrire, tant bien que mal.

L’homme la dévisagea encore un instant, avant de bouger pour la première fois depuis le début de l’échange. Ses bras se dénouèrent alors que ses mains trouvaient place sur ses hanches, avant qu’il ne tourne son dos à la fille avec un signe de tête, lui indiquant de le suivre.

« Je m’appelle Kin Kazuma, mais ici tout le monde me dénomme “Maître”. Tu arriveras tout les matins au levé du soleil et ne repartira pas avant qu’il soit couché, avec une pause pour manger. Comme tu es en rééducation, tu auras droit à trente minutes de repos toutes les deux heures, en tout cas au début. Tu feras les exercices tels que je te les demande, et tu ne discuteras pas. Ici, nous ne sommes pas très orientés armes blanches, mais cela ne devrait pas t’empêcher de t’exercer avec ton katana qui pend à ta hanche. »

Il débitait toutes ses informations rapidement, faisant des foulées si grandes que Kaé devait trottiner à côté pour ne pas se faire semer. Elle essayait de suivre ce qu’il racontait, mais avec tous ces trucs qui lui passaient autour, elle avait du mal à se concentrer.

« Tu as vu la salle principale donc, c’est là que je donne mes cours collectifs. Tu t’y entraîneras quand on ne sera pas en session. Sinon, tu iras dans la salle secondaire, là-bas. Derrière cette porte tu trouveras vestiaires et salle de bain. Et la pièce à côté contient notre réserve d’armes. L’accès y est interdit, si tu souhaites prendre ou déposer quelque chose, il faudra que tu viennes me voir pour que je te donne la clé. »

Il se retourna brusquement, et la fille manqua de lui rentrer dedans. Il la dévisagea à nouveau, puis avec un ton grave, lui demande solennellement.

« Suis-je clair ? »

La gamine hocha vivement la tête, ne souhaitant pas avouer au type qu’elle avait à peine entendu la moitié de ce qu’il disait et assimilé rien du tout. Mais bon, elle ne s’en inquiéta pas, se pensant capable d’apprendre sur le tas.

« Très bien. Dans ce cas, à demain, » finit-il brusquement, avant de laisser la gamine plantée là, au milieu du gymnase.

***

La fille aux cheveux jais rentra donc sous la tutelle du Kin, qui ne lui laissa que peu de repos. En moyenne, leurs journées se déroulaient toujours suivant la même trame : exercices d’échauffement et de remise en forme le matin, riz le midi, et entrainement plus spécifique le soir. Le maître du dojo l’avait déjà prévenu que le sabre n’était pas son domaine de prédilection, et donc l’après-midi, l’homme avait tendance à délaisser un peu la blessé pour s’occuper de ses autres élèves. En réalité, il passait que peu de temps avec Kaé, venant la voir entre deux autres cours pour lui dire ce qu’elle devait faire. Cela ne lui prenait jamais plus de quelques minutes, mais suffisait amplement à garder la gamine occupée pour plusieurs heures.

Pendant ses pauses qui devinrent, au fil des semaines, de plus en plus courtes et de moins en moins fréquentes, la fille aimait assister aux cours que donnait le Maître. C’était un spécialiste du bô, le « long bâton ». Kaé avait trouvé ça un peu idiot à la base, imaginant le grand type imposant mater des Wattouat avec ce truc de berger, mais après l’avoir vu à l’action, elle devait avouer que ben… ça avait super la classe, quand même. Et plus elle les regardait s’entrainer avec leurs armes qui lui paraissaient si anormal, plus elle avait envie d’essayer, elle aussi.

C’est pour cette raison qu’une après-midi, elle décida de revenir un peu plus tôt que d’habitude de sa pause manger. Il y avait un session en cours, avec, comme d’habitude, Maître Kazuma qui surveillait ses élèves sous un œil ferme. Ramassant son courage, la gamine s’approcha de l’homme, mais n’eut pas le temps de poser sa question que le type lui demanda immédiatement, sans prendre la peine de lui adresser un regard.

« Tu n’as pas des exercices à faire, toi ? »

En réponse, Kaé fit le poisson rouge un moment, un peu déstabilisée. Sa bouche s’ouvrait et se fermait mais aucun son n’en sortait, alors que son cerveau était trop occupé à trouver une répartie à ce que le monsieur venait de lui balancer. Finalement, elle se secoua et opta pour l’approche qu’elle avait déjà prévu de base dans sa tête.

« Ouais mais euh… J’peux avoir les clés de l’entrepôt ? S’il-te-plait ? »

Cette fois, l’homme fut tellement surpris par la quémande qu’il détourna les yeux de son groupe pour regarder la fille, les sourcils levés.

« Pourquoi ? » quémanda-t-il simplement, intrigué.
« Ben… Pour récupérer un bâton, parce que j’en ai pas moi… »

Kin continua à la regarder un moment, puis esquissa un petit sourire. D’un geste rapide, il décrocha les clés qui pendaient à sa ceinture, avant de les tendre à la fille.

« Ramène les moi dès que tu as terminé. N’en prend pas un trop long, pour tes débuts, il sera trop difficile à manier sinon. »

La fille saisit joyeusement les clés, puis se précipita vers la salle avec un grand « merci » !

Il fallu dix minutes à la gamine pour venir à bout de la lourde porte. Elle du essayer toutes les clés deux fois, forcer la porte pour outrepasser la rouille, la pousser violemment pour qu’elle daigne bien s’entre-ouvrir. L’intérieur était assez sombre, illuminé par seulement une fenêtre, placée très en hauteur et gardée par de lourdes barres de fer. Il y avait un bordel monstrueux, pire que celui qui régnait dans la chambre de la jeune fille avant qu’elle ne parte de chez elle. Des armes et boucliers de tous les types et de tous les horizons se superposaient dans tous les sens, si bien qu’il était difficile de s’avancer dans la pièce, voire même de juste mettre un pied par terre sans manquer de se trancher sur un truc. Après avoir jeter un rapide coup d’œil dans la salle, la fille décida de jeter son dévolu sur un vieux bâton juste à côté de la porte d’entrée, pour ne pas avoir à se mouvoir dans ce bordel. Saisissant l’arme, elle tira dessus pour essayer de la dégager, mais le bâton, rebelle, refusait de venir. À force de l’agiter dans tous les sens, un truc finit par céder, relâchant brutalement le bâton de sa position en faisant tomber toute une pile de trucs dans un lourd fracas. La fille s’empressa de sortir de la salle et de fermer la porte derrière elle, espérant qu’ainsi, personne n’entendrait sa bêtise. Elle s’accrocha à la poignée jusqu’à ce que les derniers bruits de métal s’entrechoquant s’évanouissent enfin. Elle regarda autour d’elle, un peu embarrassée, mais remarqua que personne ne faisait attention à elle, et décompressa un peu. Puis il lui fallu à nouveau vingt minutes pour refermer la porte, avant d’aller rendre les clés au Maître et de se rendre dans la salle d’entraînement annexe.

La gamine passa le reste de l’après-midi à essayer de faire les mouvements stylés qu’elle avait pu observer, sans succès. Le bô lui échappait toujours des mains, ou alors partait dans toutes les directions possibles sauf celle qu’elle désirait lui faire prendre. Cependant elle ne laissa pas tomber de suite : elle n’avait pas appris à manier le sabre en une nuit, et il n’y avait pas de raison que ce soit différent pour cette arme là. Elle s’obstinait encore alors que le soleil était en train de se coucher, laissant des traces rouges derrière lui. Kin venait de terminer son dernier cours de la journée, et, à son habitude, venait faire un tour dans la salle de derrière pour voir comment ça se passait pour les élèves ou membres qui travaillaient là. Il regarda Kaé galérer un moment, puis décida d’intervenir, un petit sourire sur les lèvres.

« C’est pas un katana que tu tiens là, t’es au courant ? »
« Hein ? … » – « BOUM » voulu demander l’interpelé avant de tomber sur les fesses, trébuchant alors qu’elle était surprise par la voix s’élevant derrière elle.

Le type ne put pas s’empêcher d’étouffer un rire avant de s’approcher d’elle.

« Ta pause est correcte pour une épéiste, mais quand il s’agit de maitriser le bô, il faut que tes jambes soient plus écartés, ou tu perdras rapidement l’équilibre, comme tu viens si brillement de nous le démontrer. »

La fille se releva en se frottant les fesses, acquiesçant de la tête. Elle refit une tentative, qui fit voler son arme de l’autre côté du tapis, manquant d’embrocher une autre personne qui méditait paisiblement. À nouveau, Kin pouffa un peu, avant d’aller chercher le bâton et de se rapprocher de la gamine incapable.

« Attend un peu, je vais te montrer… »

***

Les semaines passèrent, jusqu’à ce que les médecins annoncent enfin que la demoiselle était parfaitement rétablie. Elle avait continué à s’entraîner au maniement du bô, sous l’œil attentif du Maître, qui s’amusait à coacher une élève à la fois si douée et si incapable. Il lui permit même de participer à plusieurs de ses cours de groupe dans la grande salle, où elle manquait de tuer ses petits camarades, faisant rire Kin à chaque fois. Elle progressa assez vite, aidée par les années passées à apprendre le maniement du sabre ; certes, les deux disciplines étaient très différentes en de nombreux points, mais, au moins, elle avait déjà la carrure physique.

La gamine finit par se détacher de ses vieilles habitudes pour en prendre de nouvelles lorsqu’elle avait un bâton entre les mains. Elle finit même par trouver ça plaisant ; ça changeait un peu de tous les mouvements qu’elle connaissait par cœur à force, et elle appréciait découvrir et manier ainsi quelque chose de nouveau. Et puis c’était quand même rigolo tout plein, y’avait plein de trucs qu’elle pouvait faire avec le bâton et pas avec le sabre – le contraire étant vrai aussi, bien entendu – et elle trouvait cela chouette de pouvoir passer d’une arme à une autre de la sorte.

Elle se présenta le dernier jour de se rééducation, prête à dire au-revoir à Maître Kazuma. En effet, si elle serait restée volontiers plus longtemps, le service d’organisation des épreuves lui avait fait bien comprendre qu’il ne payerait pas pour une journée de plus au dojo une fois sa rééducation terminée, et si la gamine avait quelques sous, c’était juste suffisant pour se nourrir une fois sortie de l’hôpital. De plus, elle envisageait sérieusement de retourner à Terros, voir comment allaient ses parents, après tout ce temps… Car cela faisait déjà un an ou deux depuis qu’elle avait quitté la maison, au moins… La notion du temps était un peu abstraite dans la tête de la fille.

Elle alla voir le Maître et s’inclina devant lui, respectueusement. Il hocha la tête en réponse, les bras croisés devant son torse, à son habitude. Ils se regardèrent un moment, l’une ne disant rien car elle ne savait pas quoi dire et l’autre parce qu’il préférait s’amuser à regarder la moue de l’une alors que son cerveau tournait à fond pour trouver un truc intelligent à raconter. Finalement, l’homme prit la parole, après s’être assez amusée de ce sourire embarrassé de Kaé auquel il avait fini par s’habituer.

« Tu viens nous faire part de tes aux-revoir ? » La gamine hocha la tête vigoureusement, répondant ainsi à la question. « Dans ce cas, j’espère que ton séjour ici t’as été instructif, et que tu continueras à t’aventurer sur les voies que je t’ai ouvertes. »

« Ah ça, vous pouvez compter sur moi ! » s’exclama la gamine en affichant un son plus beau et grand sourire « crochu ». « D’ailleurs, ça vous gêne si j’embarque le vieux bâton du coup ? » demanda-t-elle en parlant du bô qui lui avait servi d’arme d’entraînement au cours des dernières semaines.

Il y en avait plein de semblable dans la réserve, et elle ne pensait pas de ce fait que cela puisse poser problème qu’il y en ait un de plus ou de moins. Un des sourcils de Kin grimpa sur son front alors qu’il analysait la proposition. Non, qu’elle prenne l’objet ne le dérangeait en rien, mais il y avait d’autres aspects pratiques sur lesquels il s’interrogeait quand même.

« Tu peux te l’approprier sans souci, mais tu comptes voyager, n’est-ce pas ? Comment imagines-tu transporter un objet aussi encombrant dans ces conditions là ? »

La fille bugga en entendant la question, littéralement. Elle ne bougeait plus, la bouche ouverte comme un poisson rouge dans un premier temps, avant d’afficher une mimique très débile alors qu’elle se visualisait dans un futur proche, traînant le bâton derrière elle. En voyant cela, Kin laissa explosa un long rire bruyant, se moquant de la petite toujours confuse.

« Toi, tu vas me manquer quand tu seras partie, je me suis rarement autant amusé depuis que j’ai repris ce dojo, » dit-il en dépliant ses bras pour poser lourdement une de ses mains sur la frêle épaule de Kaé. « Je vais t’offrir un beau conseil, en cadeau. Un de mes amis est un formidable fabriquant d’armes à Mizuhan, si tu vas y faire un tour en lui présentant cette carte, » expliqua-t-il en tirant un morceau de papier d’une de ses poches avant de le tendre à la gamine, « il devrait accepter sans trop de mal de te donner quelque chose de plus adapté. »

La fille saisit la carte et la contempla un instant. Elle était toute simple, avec le nom du Maître et du dojo écrit finement en italique au centre. La seule décoration était le croquis d’une petite fleur dans le coin en haut à gauche, peinte dans une encre brune clair, la rendant presque invisible.

« Sans trop de mal hein ? » répéta la demoiselle sans lever de suite la tête du papier, tirant un autre rire au Maître Kazuma.

***

La fille poussa la porte grinçante du dojo, se retrouvant dans une des petites ruelles de la villa d’Alfen. Elle jeta un ultime regard derrière elle, observant une dernière fois la plaque défraichit avec un petit pincement au cœur. Toutefois, elle se ressaisit, se souvenant qu’elle venait de promettre au Maître de revenir pour lui faire part de ses progrès.

D’ailleurs, parlant de cela, il y avait quelqu’un d’autre à qui elle devait rendre visite avant de quitter la ville, maintenant qu’elle était rétablie. Elle n’arrivait pas à savoir si elle était heureuse ou paniquée à l’idée de revoir cette personne ; car si cette femme était remarquable, elle était aussi parfaitement effrayante, parfois. Prenant son courage à deux mains, Kaé se mit à avancer dans la cité d’un pas décidé, faisant genre de savoir vers où elle se dirigeait alors qu’elle était, en réalité, comme d’habitude, parfaitement perdue.