[ Clos ] Yakusoku da yo [Miku Hatsune]

[Hugo]

La vue est trouble. La lumière brûle la rétine émeraude. Le son est sourd. Le souffle est bruyant et court. Un sifflement lointain se fait entendre. Le sang tambourine dans les tempes et menace de faire exploser le crâne du jeune homme. Tout est flou, le corps est faible. Rien n’a de sens.

C’est avec le bras endolori qu’Hugo se releva doucement jusqu’à s’asseoir difficilement sur le lit d’un centre de soin. La pièce dans laquelle il se trouvait était très sommaire et était constituée d’un simple lit et d’une table grossière, sur laquelle se trouvait une bassine d’eau. Ni Persian ni Teddiursa n’étaient là, Fulmina n’avait pas l’air présente non plus. La nausée envahit de Terrosien qui vomit à terre, rejetant le peu de nourriture qui lui restait dans l’estomac. Où était-il ? Que c’était-il passé ? Le jeune homme se concentrait sur sa respiration pour éviter que la nausée de le surprenne à nouveau. Il réfléchit et les souvenirs revenaient, par petites brides.

Omashu. Le dernier endroit où le jeune homme se rappelait être allé était Omashu. Miku était là également. Il l’avait retrouvée, après de très longues années sans se voir. Puis il l’avait encore perdue, en fuyant un monstre de pierre, un Méga-Tyranocif. Il avait fui ce Pokemon fou et le Xatu de Miku devait l’avoir téléporté à ce moment-là, pour la protéger.  

Les souvenirs se remettent doucement en place, s’assemblent et prennent sens. Il avait donc fui le tyran de roches jusqu’à arriver dans une petite plaine où il fut en sécurité. Du moins c’est ce que le jeune homme croyait. L’élémentale réalisa très rapidement qu’il ne l’était pas quand il fit face, pour la seconde fois, au titan enragé.

Cette fois-ci, il n’avait pas d’échappatoire, plus d’endroit où fuir. Il s’était alors battu. Lui, un jeune maître de la terre, affaibli par une vilaine morsure d’Elecsprint, face à ce maître de la puissance brute. Le combat fut inégal à peine entamé et le jeune homme finit rapidement par être malmené tout du long. Il n’était pas assez puissant pour causer de véritables dégâts à son opposant tout en étant juste assez fort pour se protéger des attaques de l’assaillant. Il se défendit alors comme il put, ne pouvant riposter, il se contentait de contrer les coups avec sa maîtrise récemment acquise.

À cet instant, les sphères contenant ses Pokémon s’étaient ouvertes d’elles-mêmes. Les compagnons d’Hugo voulaient venir en aide à leur dresseur, mais ces derniers, eux-aussi affaiblis par leurs précédentes batailles, ne furent pas d’une grande aide. Afin d’éviter qu’ils ne finissent gravement blessés, Hugo les rappela dans leur sphère. C’est à cet instant que tout se déroula. La balle de Fulmina était ouverte mais la souris électrique n’était pas dans le champ de vision de l’ami de sa dresseuse. Baissant sa garde pendant un instant, Hugo se prit un violent coup de queue dans les côtes, le faisant valser plusieurs mètres plus loin.

Le blond se releva difficilement mais son corps entier le faisait souffrir. Il avait la sensation d’être brisé de partout, que chaque os, chaque muscle était déchiré, broyé. Sa souffrance atteignait le seuil de résistance qu’un être humain puisse endurer quand il voltigea une nouvelle fois, avant de s’écraser, encore une fois, au sol. Cette fois-ci, le jeune homme ne se releva plus, il n’en n’avait plus la force. Tout ce qu’Hugo voulait, c’était que son adversaire en finisse le plus vite possible afin d’abréger ses souffrances.

Le corps élancé du jeune homme fut alors pris de violents spasmes, le faisant se tortiller telle une poupée de chiffon. La douleur lui vrillait la tête, et doucement, il s’enfonça dans les ténèbres.

Un frisson désagréable parcourut l’échine de l'adulte. Comment pouvait-il être vivant en cet instant? Le Tyranocif l'aurait épargné? Mais pourquoi? Le jeune homme fut tiré de ses pensées par l'interruption d'un autre homme dans sa chambre. Une brise fraîche s'engouffra dans la chambre et la lumière aveugla Hugo.

« Ah, t’es réveillé à c’que j’vois ! Bah c’est pas trop tôt hein, t’as pris son temps ! »

L'inconnu portait une longue chemise blanche, maculée de quelques taches de sang. Il était de taille moyenne mais très trapu. Il offrait son plus beau sourire au blessé qui fut incapable de lui rendre la pareille. Il commença à palper l'abdomen d'Hugo et à regarder la cicatrice qui bariolait son bras.

« Où… Où suis-je ? Comment je suis arrivé ici ? »

« Ici mon p’tit gars, c’est dans mon centre de soin ! Le meilleur de tout Palma, c’est moi qui te le garantis ! Eh bah dis donc, t’en fais une tête ! Qu’est ce qui va pas ? Tu dois encore vomir c’est ça ? Tiens, prends ça plutôt que de vomir à terre ! »

Hugo repoussa la bassine que le médecin lui tendait. Ce n’était pas ça qui l’inquiétait.

« Je pourrais savoir comment je suis arrivé ici, s’il vous plait… ? Mes souvenirs sont extrêmement flous et j’ai cru que… J’allais mourir. » il lâcha la fin de sa phrase dans un chuchotement comme si la prononcer à voix haute allait rendre la chose plus… réelle. Le regard du guérisseur se fut plus sérieux et ce dernier prit place face au Terrosien.

« On t’a retrouvé près d’Omashu. Tu es maître de la terre, n’est-ce pas ? Je m’en doutais. En réalité, on t’a retrouvé dans un cocon de terre. On suppose que tu as du affronter un Pokémon qui a changé d’apparence et que tu as perdu ta bataille. Ton inconscient alors a érigé une dernière barrière entre toi et toutes les menaces extérieures en te confinant de la sorte. Tu t’étais un peu enterré vivant si je puis dire ! On t’a retrouvé très rapidement après la fin des affrontements et les plus puissants maîtres de la terre de la ville se sont réunis pour te dégager de ton armure. Pourquoi t’as cet air surpris, petit ? L’inconscient peut être l’arme la plus puissante qu’une personne possède. Personne n’arrivait à percer ta protection seul, c’est pour cela qu’ils s’y mirent à plusieurs. Dans tous les cas, une fois libéré, tu ne pouvais pas rester à Omashu. La plupart des centres de soin de là-bas étaient bondés et aucun d’entre eux ne pouvaient accueillir une personne aussi blessée que toi. C’est pour ça qu’on t’a amené ici, à Palma. Tu es ici chez toi désormais, prends le temps qu’il te faudra pour te rétablir. Maintenant que tu sais tout, dis moi… Quel est ton nom ? »

« Hugo… » le jeune homme était abasourdi par ce qu’il venait d’entendre. Les nausées menaçaient de l’envahir à nouveau, ses doigts s’agrippèrent au sommier du lit et sa respiration se fut plus longue et calculée. Une fois le calme retrouvé, il se tourna alors vers le soigneur pour lui demander :

« Où sont mes Pokémon ? Vous les avez trouvés eux aussi ? Et puis… Combien de temps suis-je resté inconscient ? »

Les compagnons d’Hugo avaient été retrouvés avec lui et ces derniers se portaient bien. Ils devaient être actuellement occupés à chasser mais leur dresseur les reverrait vite, il ne s’inquiétait pas à leur sujet. Cependant, la deuxième réponse le fit à nouveau vaciller.

« Tu es resté inconscient deux semaines. »

[Miku Hatsune]

« Et toujours je reviendrai vers toi,
C’est une promesse. »

Assise en seiza au bord du Temple, la jeune femme, les yeux clos, priait en silence. Elle priait pour le salut des âmes en peine qu’elle n’avait pu sauver, et pour toutes celles qui avaient besoin d’aide, mais dont elle ignorait la souffrance. Depuis qu’elle était devenue Marcheuse, la Nalcienne était restée muette, et aucun de ses camarades n’avait cherché à briser cette absence de son et de musique de sa part. Elle qui était pourtant si attachée au chant et si sensible aux mille mélodies du vent, elle ne disait plus rien. Mais ce mutisme n’avait rien d’inquiétant, au contraire. Rares étaient les Marcheurs nouvellement initiés capables de parler comme avant, surtout dans les jours qui suivaient l’épreuve. D’autant plus que la jeune femme avait été confrontée à un souvenir, qu’elle avait senti comme tel, mais de manière confuse, comme si ce n’était pas le sien. Dans le monde onirique, elle avait rencontré deux âmes jumelles, qui avaient trépassé sans pouvoir rejoindre le Grand Courant. À l’étroite frontière entre réminiscence et au-delà, elle était venue en aide aux deux K, percevant vaguement qu’elle en oubliait un troisième, dans l’horizon, mais oubliant vite ce sentiment fugace que Nestor, son Abra, avait déjà chassé par deux fois. Parce qu’elle ne devait s’en souvenir sous aucun prétexte.

Le rite initiatique s’était achevé par la métamorphose de Nebula, désormais immense et majestueuse. Ses ailes de coton l’emportaient à présent aussi haut et aussi loin qu’elle le voulait, sans aucune contrainte. Elle sillonnait les cieux des heures durant, sans jamais s’éloigner de son âme sœur, dont le lien éternel était devenu plus fort que jamais. Le duo semblait serein et apaisé, et les jours défilaient ainsi, calmement, jusqu’à ce que, près d’une semaine après l’épreuve, l’Altaria ne descende subitement en piqué pour rejoindre une forme jaune en contrebas. Le vent s’affola, chuchotant dans des murmures désespérés et inquiets son angoisse croissante, et Miku se leva, rompant la quiétude de sa concentration et interrompant sa méditation. Sans la moindre hésitation, elle sauta dans le vide, filant à toute vitesse, alors qu’elle devinait avec horreur l’identité de la silhouette effondrée devant l’entrée du Temple.

« Fulmina ! »

Déjà, des religieux s’affairaient autour du corps inanimé. Sans même toucher le sol, la Nalcienne rejoignit son Pokémon, dont le corps était couvert de blessures qui saignaient abondamment. Des Guérisseurs apposèrent aussitôt leurs mains bienfaitrices sur la souris, dont l’état s’améliora nettement en quelques instants. Les plaies se refermèrent instantanément, mettant la créature hors de danger, mais l’inquiétude ne quitta pas le visage de Miku, dont les traits demeuraient figés dans une expression de peur manifeste.

« Je m’en charge. »

Aussitôt, les moines et les prêtresses s’écartèrent pour la laisser passer. Avec douceur, elle prit Fulmina dans ses bras, la serra contre sa poitrine et, d’une impulsion sous ses pieds, se propulsa dans les airs pour regagner sa place au bord du Temple, dans les hauteurs.

La souris dormit pendant trois longs jours, durant lesquels sa maîtresse ne quitta pas son chevet, multipliant les incursions dans le monde onirique pour la délivrer de la prison dans laquelle elle s’était réfugiée. Si elle n’avait pas eu besoin d’utiliser ses capacités de Marcheuse pour comprendre que quelque chose de grave était arrivé à Hugo, à qui elle avait confié son amie, elle avait néanmoins tenu à aller chercher le Pokémon dans son bastion, pour en apprendre davantage. Et au bout de longues heures passées à arpenter les rêves, elle avait vu, et elle était revenue à elle, livide. Le Terrosien avait été grièvement blessé, et il n’avait pas pu protéger Fulmina des assauts furieux du Méga-Tyranocif. Promantis, dans l’urgence, l’avait téléportée au Temple, mais seule, laissant la Pikachu et le jeune garçon aux prises avec le monstre. Miku ne lui en voulait pas : elle savait qu’il avait fait de son mieux, et qu’il était encore un jeune oiseau. Ses capacités psychiques étaient loin d’avoir atteint leur puissance maximale. Mais elle ne pouvait pas rester là en sachant cela. Elle devait aller le voir, pour s’enquérir de son état.

Lorsque Fulmina se réveilla, la prêtresse lui sourit, radieuse, et la rassura. Tout irait bien, à présent, elle était en sécurité. Et, comme la Marcheuse le pensait, son Pokémon décida de l’accompagner, même si elle n’était pas complètement rétablie. Miku accepta, sachant qu’elle serait à l’abri dans sa sphère, et elle ne mit que quelques minutes à rassembler ses affaires pour préparer son départ. De nouveau calme, l’Altaria se frotta contre sa joue en émettant un son à mi-chemin entre le chant et le ronronnement. Elle savait que sa maîtresse l’autoriserait à faire ce à quoi elle aspirait depuis longtemps, et elle en était ravie.

« Je vais faire une halte au Lac, avant de partir pour Terros. Nestor, je compte sur toi pour faire la liaison, et pour épauler le Doyen et son Xatu dans leur tâche. »

Elle s’inclina alors devant ses confrères, qu’elle respectait toujours, même en étant devenue leur égale, puis recula lentement, avant de basculer en arrière, ses longs cheveux bleus disparaissant dans le vide avec elle. Aérienne, Nebula fila à ses côtés, avant de la récupérer dans ses ailes duveteuses, un peu plus bas, tandis que la prêtresse riait aux éclats, partageant l’euphorie de sa compagne enfin capable de l’emmener voler avec elle. Fulmina, à présent perchée sur l’épaule nouvellement tatouée de son humaine, appréciait également le voyage, bien qu’encore un peu faible. Elles survolèrent toutes les trois la pension de la jeune femme, qui fit rapidement une escale pour récupérer son œuf de Tarsal, puis se dirigèrent droit vers Terros, là où Miku avait vu Hugo dans les rêves de la souris électrique. Le trajet fut un peu trop court aux yeux de la Nalcienne (voler sur un nuage était vraiment une expérience magnifique), mais elle se réjouit néanmoins à l’idée de revoir son ami blessé et, enthousiaste, lança :

« Voilà Palma ! »

La ville portuaire s’étendait sous le trio, avec ses voiliers et son port, sa place, où le marché allait bon train, ses habitants et ses touristes, pleins de vie... Et son odeur de poisson, plutôt désagréable au départ, mais à laquelle la Nalcienne s’habitua vite, arrangeante. Et puis, elle était de bonne humeur, même si elle savait Hugo alité. Alors qu’elle était encore à plusieurs kilomètres de Palma, son Fragment de Vent favori, qu’elle portait en pendentif dans une fiole de Kazecristal, s’était mis à vibrer doucement, signe que ses pouvoirs élémentaux s’étaient grandement accrus. Elle arrivait à détecter le Symbole de bien plus loin, et elle était persuadée, au fond d’elle, qu’elle serait bientôt capable de le capter depuis des endroits de plus en plus éloignés de son jumeau...

« Nebula, regarde ! C’est son Persian, j’en suis sûre ! Allons à sa rencontre. »

L’Altaria s’exécuta gaiement, amorçant une descente en piqué pour foncer sur le félin. Au dernier moment, elle l’évita, puis s’arrêta en vol stationnaire, au-dessus de lui. La Nalcienne l’apostropha :

« Tu as l’air d’aller bien, j’en suis ravie ! Comment va ton maître ? Je suis venue le voir, comme tu dois t’en douter. »

Le Pokémon semblait également content de la présence de la prêtresse, et il s’empressa de lui montrer le chemin jusqu’à l’endroit où son dresseur était en convalescence. Après l’avoir remercié d’une caresse sur le crâne, Miku s’éleva jusqu’à la fenêtre du blessé, toujours sur son Dragon, et elle aperçut le jeune homme, couché, qui observait l’extérieur d’un air inquiet, sous le regard de la personne qui s’était probablement occupée de lui jusqu’à présent. Aussitôt, Fulmina sauta de l’épaule de la mystique de l’Air pour bondir sur les genoux du Terrosien, sans aucun geste de rancune ou de colère, carrément contente de retrouver celui qu’elle était censée protéger. Les yeux humides, mais sans pleurer, la prêtresse entra d’un pas souple dans la pièce, par la fenêtre, rejointe par Nebula.

« Je vois que tu es entre de bonnes mains, Hugo, même si je le savais déjà. C’est toujours rassurant de voir les choses par ses propres yeux... J’ai tant à te dire. Je suis désolée... Comment te sens-tu ? »

Miku s’approcha et, émue, prit la main du jeune garçon dans les siennes, en la pressant doucement. La souris électrique, elle, frotta sa joue contre le visage du blessé, générant quelques étincelles qui crépitèrent dans l’air.

[Hugo]

L’annonce que venait de faire le soigneur au Terrosien le laissait sous le choc. Il était resté dans le coma pendant deux semaines entières. Que pouvait-il s’être passé pendant ces quatorze derniers jours ? Hugo s’était rallongé sur son lit de camp, le regard perdu, fixant l’horizon au loin à travers la fenêtre. Le médecin continuait de lui parler, mais il était trop tard, le jeune homme était déjà absent, parti bien loin dans ses pensées. Hugo renoua avec l'élément terrestre et sonda les alentours de la chambre en essayant de retrouver ses Pokémon. Si ces deniers n'étaient pas trop éloignés, le dresseur réussirait à les identifier sans problème. Hugo sourit, son Pokémon quadrupède était près de lui et ne tarderait pas à arriver.

La porte de la chambre s’ouvrit alors et Persian se faufila à l’intérieur de l’abri de son maître, le gratifiant d’une lèche, visiblement très heureux de le voir réveillé. Le jeune homme était soulagé de revoir son ami quadrupède et de constater qu’il était en bonne santé. Le gratifiant d’un sourire, Hugo releva la tête quand, cette fois-ci, le fenêtre s'ouvrit, offrant alors la vision de l’être humain le plus précieux à ses yeux.

S’asseyant maladroitement (ce qui arracha une grimace au maître de la terre dont les côtés faisaient encore extrêmement souffrir), Hugo observa alors Miku qui se tenait dans l’encadrement de la fenêtre. Cette dernière, visiblement émue, déclara être rassurée de constater que tout allait bien pour son ami. Et même si elle n’avait pas changé physiquement, hormis le nouveau tatouage qu’elle arborait de manière très élégante, la prêtresse semblait encore différente. La petite souris électrique de la marcheuse bondit sur les genoux du blessé, frottant ses bajoues rouges contre les pommettes du jeune homme. Des petites étincelles apparurent à ce contact mais l’affiliation d’Hugo à la terre l’empêcha d’y ressentir une douleur.

« Je suis content de voir que tu ailles bien Fulmina » dit le jeune homme en caressant le crâne de la souris de sa main libre, faisant alors tressaillir de plaisir ses deux longues oreilles.

Son autre main était prise dans une douce étreinte exercée par les fines mains du prodige aérien. Le regard émeraude d’Hugo se perdit dans les yeux célestes de Miku. Avait-il besoin de répondre à ses questions ou en connaissait-elle déjà les réponses ? Quoi qu’il en soit, ils passèrent quelques minutes ainsi, l’un comme l’autre n’osant briser le silence qui les entourait, comme si ils n’en ressentaient pas le besoin.

Cette petite bulle fut éclatée quand Teddiursa passa le pas de la porte, arrivant à son tour dans la chambre de son maître. L’oursonne ne put s’empêcher de s’exclamer en voyant son maître réveillé et lui sauta ainsi sur les genoux, chassant par la même occasion la Pikachu qui se réfugia sur l’épaule de sa maîtresse.  Hugo était heureux de voir que ces deux Pokémon étaient en pleine santé, au moins il n’avait pas échoué à ce niveau là…

S’appuyant alors sur le bras que Miku lui tendait toujours, le blond tenta de se relever doucement. Ses jambes vacillaient et tout son corps tremblait sous l’effort que cette simple manœuvre demandait. Son souffle fut soudainement coupé par la douleur qui le submergeait à nouveau, une bouffée de chaleur l’envahit tandis qu’une douleur aigüe fit son apparition à l’arrière de son crâne. Son visage et Hugo se rassit immédiatement, tentant désespérément de faire alors bonne figure devant la mystique de l’air.

« Je pense que tu as la réponse à ta question… Mais ne sois pas désolée, tu n’y es pour rien. Et puis, si j’ai survécu à la rage de ce Tyranocif, je me remettrai de ces blessures. Le principal est que je garde le moral, qui lui est resté intact. Tu as eu des nouvelles d’Anthère par ailleurs ? J’espère qu’elle s’en est mieux sorti que moi. » le jeune homme a fini sa phrase avec un petit rictus rieur, essayant de dédramatiser la situation afin de rassurer ses amis. Reprenant alors son sérieux, le Terrosien enchaîna :

« Mais dis-moi tout, tu as l’air d’avoir encore changé. Que s’est-il passé pendant ces deux dernières semaines ? J’ai cru apercevoir Nebula par la fenêtre, du moins une créature qui y ressemblait ! Elle a évolué, non ? C’est vraiment génial, elle est vraiment majestueuse maintenant. » le jeune homme essayait de garder un ton rassurant mais chaque respiration qu’il prenait le faisait souffrir.

Son teint devait être livide tant il se sentait faible mais il avait la volonté de se remettre sur pieds et il n’avait pas l’attention d’abandonner sa rééducation, surtout que maintenant, il n’était plus seul.

[Miku Hatsune]

« Ancrée dans ce coeur grâce au Lien stellaire »

Hugo se redressa avec peine sur ses coussins, avec une grimace, laissant voir à la jeune femme les séquelles que la folie de Mewtwo avait laissées derrière elle. Il semblait avoir mal aux côtes (probablement cassées, ou au moins fêlées), et il respirait avec difficulté. Aussitôt, Miku laissa son pouvoir affluer jusqu’à ses fines mains, qui se mirent à luire doucement, éclairées par une lueur pâle. La lumière se dirigea alors vers le torse du garçon, avant de s’y arrêter pour s’y diffuser par cercles concentriques. La Nalcienne n’était pas Guérisseuse, et elle ne le serait jamais, mais elle avait au moins des notions en soin de blessures physiques, même si elle s’était spécialisée dans la résolution d’autres maux... Elle pouvait au moins le soulager un peu en atténuant la sensation de souffle coupé, et en « lissant » les fractures. Elle ne pouvait pas les faire complètement disparaître (et si le Guérisseur qui s’occupait de lui n’avait pas réussi, c’était sans doute pour une raison précise), mais elle faisait de son mieux pour que le Terrosien se sente moins oppressé.

Fulmina se laissa caresser avec plaisir, émettant une sorte de petit ronronnement très particulier. Elle était très attachée au garçon, et elle s’en voulait de n’avoir pu le protéger... Incapable de le retrouver, et dans un état de fatigue extrême, elle avait néanmoins réussi à regagner le Temple, demandant de l’aide aux Pokémon sauvages et se glissant tour à tour dans un charriot, un bateau ou un véhicule divers, sachant qu’elle ne parviendrait pas au bout de son voyage si elle tentait de l’accomplir par ses propres moyens. La souris ne faisait pas vraiment confiance aux autres humains, bien que relativement sociable, ce qui avait motivé son choix de tout faire pour rejoindre Miku...

« Elle est encore faible, mais elle va beaucoup mieux, grâce à mes frères et sœurs du Temple de l’Air Boréal. »

La Nalcienne avait la gorge serrée. Son Pokémon avait eu la chance d’être incroyablement robuste et volontaire, et d’avoir été prise en charge par les meilleurs Guérisseurs du pays... Elle avait achevé de la soigner en s’aventurant dans ses rêves, mais si Fulmina avait survécu, c’était surtout grâce à sa remarquable envie de se battre et de vivre.

La Teddiursa du jeune homme arriva alors, brisant le silence relatif de l’instant, prenant la place de la souris sur les genoux du Terrosien. Fulmina, pas fâchée pour un sou, escalada doucement sa maîtresse pour se loger sur son épaule, au-dessus du tatouage qu’elle arborait fièrement, comme un précieux trésor durement acquis. Quand Hugo essaya de se lever, et en voyant ses difficultés à se mouvoir, Miku lança, un peu plus précipitamment qu’elle ne l’aurait voulu :

« Non non, reste assis ! Ne bouge pas, tu risquerais d’aggraver tes blessures. C’est à moi de m’asseoir. »

Avisant une chaise en bois simple, la prêtresse s’y installa, alors que son ami lui expliquait, avec philosophie, qu’il s’en remettrait, tout en lui demandant des nouvelles d’Anthere.

« Je n’en ai pas pour le moment. Mais ensemble, nous avons aidé des Pokémon à Terros, à la Vallée Chamarrée, et nous avons chacune un œuf de Gardevoir avec nous. Anthere me ressemble beaucoup, et je pense que nos destins sont liés, quelque part. Je ne saurais pas expliquer précisément pourquoi, mais je t’assure qu’en cas de problème sérieux pour elle, je serai avertie, par mes pouvoirs ou par les siens. J’en suis persuadée. »

Pour dissiper tout malentendu, Miku montra l’œuf qu’elle avait emmené avec elle, explicitant par ce geste ce qu’elle voulait entendre par « les siens ». La Nalcienne savait quel type de créature sommeillait à l’intérieur, car des voyageurs qui avaient fait halte au Temple lui en avaient montré un. Et parmi ses camarades moines, certains d’entre eux les préféraient aux Abra, plus distants et moins « affectueux », en tant que compagnons de méditation.

« J’ai le sentiment qu’il arrivera malheur à cet œuf si Anthere a des ennuis. »

En passant doucement sa main sur la coquille, dont il émanait une aura de quiétude, Miku écouta les questions de son ami. Un sourire éclaira son visage déjà avenant.

« Nebula s’est transformée, oui. Je suis venue avec elle jusqu’ici... Voler sur un Altaria donne la sensation de chevaucher un nuage. C’est merveilleux. Approche, Nebula ! Hugo ne va pas te manger, tu sais ! »

Avec un cri à mi-chemin entre le piaillement et le rugissement, le Dragon entra dans la pièce, en prenant soin de ne pas abîmer ses ailes duveteuses. Aérienne, elle se posa tout près du lit du malade, tendant le cou pour quémander des câlins en « ronronnant ».

« Quant à moi, eh bien... Je suis devenue Marcheuse. J’ai arpenté consciemment les Rêves pour la première fois, avec l’aide de la Clairvoyante, Yubaba, qui est une Marcheuse respectée et honorée dans mon pays. C’était à la fois étrange et magnifique... J’ai accueilli en moi un souvenir qui ne m’appartenait pas, mais qui m’évoquait quelque chose de nostalgique. J’ai aidé des jumeaux défunts, mais qui n’avaient pas eu droit au repos éternel depuis leur décès, en affrontant ce qui les retenait entre deux mondes. Ils sont partis en paix, maintenant et, étonnamment, je me sens beaucoup mieux, comme si je m’étais libérée d’un fardeau trop lourd pour moi... »

L’Altaria frotta sa tête contre le bras de la jeune femme, sachant combien cette épreuve avait été dure pour elle.

« Répondant à ma propre métamorphose, Nebula a changé à la fin du rite. Elle aussi a atteint ses propres rêves, même si elle en a beaucoup d’autres à réaliser. Je suis d’accord avec toi, elle est bien plus impressionnante que lorsqu’elle n’était qu’une Tylton ! »

Faussement courroucée, la créature bleutée piailla, ce qui fit rire sa maîtresse.

« En tout cas, c’est en allant chercher Fulmina dans le bastion onirique qu’elle s’était constitué que je t’ai vu en rêve, blessé, et que j’ai su où tu étais. Et puis, je suis heureuse de savoir que tu as toujours mon Fragment de Vent sur toi : c’est ce qui m’a permis de te localiser plus précisément, et ton Persian a fait le reste en me conduisant jusqu’à toi. Mais assez parlé de moi ! Je veux savoir ce que j’ignore encore. Que t’ont dit les Guérisseurs ? As-tu une idée du temps qu’il te faudra pour te rétablir ? Quoi qu’il en soit, je resterai là jusqu’à ce que tu puisses te lever et marcher comme avant. Je n’ai plus besoin d’être auprès des gens pour soigner leurs maux d’âme : il me suffit d’aller à leur rencontre dans les rêves. J’ai donc tout le temps nécessaire pour t’aider à aller mieux, tu sais. D’ailleurs, est-ce que tu as des projets, toi aussi ? Des rêves à accomplir ? Une voie à emprunter, parce qu’elle t’appelle ? »

Dans ses bras, l’œuf devint plus chaud, alors qu’une fissure naissait au sommet de la coquille, silencieuse.

[Hugo]

Hugo écoutait de manière quasi religieuse les tirades de la prêtresse de l’air. Elle n'avait pas eu des nouvelles d’Anthère depuis leurs mésaventures à Omashu, mais la Nalcienne expliqua à Hugo qu'elle ne devait pas avoir de problème, auquel cas l’œuf qu'elle tenait dans ses bras subirait un événement malheureux. Miku, voyant la visage interloqué du jeune homme, expliqua qu’elles avaient toutes les deux un œuf de Tarsal provenant de la même mère dans leur équipe respective et que leurs destins étaient pour ainsi dire liés. Le jeune homme sourit en voyant le visage de Miku s’éclairer tandis qu’elle parlait du petit être psychique qui allait bientôt naître. Il aurait pu écouter la maîtresse de l’air pendant des heures durant, sa voix pure et mélodieuse l’emmenant vers des contrées bien plus lointaines que celles de Palma.

Nebula fit ensuite son entrée dans la chambre en prenant bien soin de ne pas salir ses immenses ailes cotonneuses. Le terrosien flatta la gorge de l’Altaria puis passa délicatement sa main valide dans une de ses ailes duveteuses, s’étonnant de la texture de ces dernières. Le jeune homme commença à s’imaginer sur le dos d’une telle créature, volant dans les airs avec grâce. Un nouveau sourire s’étira sur le visage élancé mais blafard du blond qui semblait un peu moins souffrir après les soins que la marcheuse lui eut prodigué.

Hugo écouta ensuite ce que Miku vécut ces deux dernières semaines. Elle était devenue marcheuse. Le Terrosien ne saisissait pas vraiment ce que ce terme impliquait et les explications qui suivirent ne l’aidèrent guère plus. Son amie serait capable de se promener dans les … Rêves ? Elle aurait acquis cette faculté avec l’aide de Yubaba, une prêtresse reconnue du temple de l’air boréal. La mystique continuait de décrire à Hugo ce qu’elle vécut durant cette épreuve comme sa rencontre avec des âmes qu’elles avaient menées au salut. C’est d’ailleurs en voyageant dans les rêves de Fulmina que la mystique sut localiser le jeune homme. Le maître de la terre, très rationnel, avait du mal à concevoir qu’on puisse se balader dans quelque chose d’aussi imperceptible et fugace qu’un rêve.

S’en vint alors d’innombrables questions que la jeune chanteuse adressa à l’égard de son ami malade. Il est vrai, que depuis leur rencontre, les deux jeunes adultes n’avaient jamais eu vraiment le temps pour discuter et apprendre à se connaître. Paradoxalement, le Terrosien n’avait jamais vraiment ressenti le besoin d’en apprendre plus sur son ami aux cheveux turquoise, ce qu’il en connaissait lui suffisait pour savoir qu’elle était quelqu’un de bien et de… Différent. Miku possédait quelque chose qui la rendait unique, mais Hugo ne savait pas encore quoi.

« Bien sûr que j’ai gardé ton symbole, il m’est inconcevable de m’imaginer sans tu sais… Je n’ai pas vraiment encore eu le temps de m’entretenir avec les guérisseurs, il se trouve que je viens de me réveiller d’un coma de deux semaines… Mais selon le soigneur que tu as aperçu en entrant dans la pièce, il sera plus facile de me soigner maintenant que je suis réveillé. Mon esprit faisait obstacle à toute intrusion extérieure, même celles qui ne voulaient que mon bien. Du coup, je ne saurai te dire exactement dans combien de temps je serai capable de remarcher comme avant. Ça prendra du temps et ça ne sera pas amusant mais j’ai la foi. »

Persian frotta alors son crâne contre le mollet intact de son dresseur tandis que Teddiursa se pendait au cou de ce dernier. Les Pokémon normaux seraient présents pour leur maître et l’attendraient, peu importe le temps qu’il prendrait pour se rétablir complètement. Hugo sourit devant cette démonstration d’affection et décrocha doucement son oursonne pour la reposer sur ses cuisses. Tout en caressant l’oreille marron de sa plus jeune compagne, l'élémentale s’attela à continuer à répondre aux questions de Miku.

« Pour ce qui en est de mes projets… Pour l’instant je dois t’avouer que je ne sais pas vraiment ce que je compte faire à long terme… J’ai découvert il y’a peu que je maîtrisais la terre, chose que je n’aurais même pas soupçonné auparavant. Tu sais, dans mon village natal, les élémentaux se révèlent assez rapidement, parfois même quand ils sont en bas-âge, alors apprendre que je peux maîtriser l’élément de mon pays à plus de 20 ans… C’est presque insensé pour moi ! Du coup je pense affiner ce don et m’améliorer dans ma maîtrise. Je n’ai jamais vraiment rêvé de devenir un grand maître mais maintenant que cette voie s’ouvre à moi, je pense m’y engager. Je pense que je vais vite quitter Terros une fois rétabli. Pas pour toujours, parce que ça reste mon pays d’origine, mais après ce que je viens d’y vivre, j’ai besoin de voir autre chose. Pourquoi ne pas m’orienter vers ton pays, Nalcia, c’est bien ça ? Ou bien peut-être aller dans le pays des flammes ? Le continent flottant ne m’intéresse que très peu pour le moment mais je compte bien aller le visiter lui aussi ! Je veux comprendre le monde dans lequel on vit, dans lequel on évolue. Je n’ai vu que très peu de chose dans ma vie et je compte bien y remédier. »

Le cœur du jeune homme s’emballait et une lueur d’excitation apparut dans ses iris émeraude. Hugo  n’avait pas de grand projet chevaleresque, juste celui de voyager et de profiter de ce qu’il y découvrirait. Mais quand il tourna le regard vers Miku pour entendre ce qu’elle avait à répondre à ses déclarations, c’est un spectacle magnifique qui se déroula sous ses yeux. L’œuf que son amie tenait dans ses bras commençait à fissurer ! Après quelques minutes, la coquille se brisa, faisant apparaître une petite tête verte, surmontée d’une corne rouge.

Le miracle de la vie venait de se produire devant le jeune homme qui restait émerveillé parce qu’il venait de voir. Hugo observait le petit être qui venait de faire son entrée dans ce monde si particulier, souriant à pleines dents.

« Bienvenue toi ! »

[Miku Hatsune]

« Watashi wa naze umareta no deshô ?
Pourquoi suis-je née ? »

En souriant, Miku regarda Hugo caresser Nebula, et elle lut sans peine l’expression qu’affichait le Terrosien. Il s’imaginait probablement sur son dos, sillonnant les cieux au contact du vent... La Nalcienne croisa le regard de son Pokémon, qui avait aisément deviné ce qu’il désirait.

« Quand tu iras mieux et que tu seras en état de supporter quelques acrobaties aériennes, je t’emmènerai avec moi, dans les nuages. Ne t’en fais pas pour ça, tu as ma parole. »

Quand elle expliqua qu’elle avait enfin atteint sa vocation, en revanche, elle aurait préféré ne pas comprendre ce que ressentait le jeune homme. En effet, elle percevait son désarroi et son incompréhension ; elle s’était attendue à une telle réaction, mais elle devait avouer qu’elle était un peu déçue. Elle avait aimé se dire qu’il la comprendrait, au moins un peu... Mais elle ne s’en formalisa pas pour autant : en essayant de se mettre à sa place, elle imagina que le concept de marcher dans les Rêves était un peu abstrait, et insaisissable, pour qui n’avait pas eu la chance d’arpenter ce monde si différent. Chassant sa déception en quelques secondes, elle dit, sur un ton d’excuse :

« Je vois bien que tu as un peu de mal à appréhender ce que parcourir les Rêves implique. Désolée, c’est difficile à expliquer... Le plus simple, c’est que tu voies ça de tes propres yeux... Par toi-même. Quand tu le voudras (et si tu le désires, bien sûr !), je te montrerai. Je t’emmènerai avec moi, là-bas aussi. Pas longtemps, car une âme saine ne doit pas demeurer dans un autre monde. Mais si, un jour, tu as besoin d’en savoir plus sur ton passé, sur des moments précis de ta vie qui te gênent, ou sur ta maîtrise, n’hésite pas à me demander. Il va me falloir un peu de temps pour pouvoir naviguer sur le Fleuve de la Terre, puisque c’est l’élément le plus éloigné du mien, mais je sais que j’y arriverai ! »

Lorsque le blond lui expliqua qu’il s’était réfugié derrière une barrière pour empêcher toute intrusion mentale, Miku se mordit la lèvre. Sa guérison avait été ralentie, de fait...

« Je suis désolée... Si j’avais su plus tôt que tu étais bloqué dans les Rêves, j’aurais pu tenter de venir te chercher, et ton corps aurait commencé à aller mieux plus vite... »

Même si Hugo était optimiste, la prêtresse s’en voulait. Mais elle savait très bien qu’elle aurait probablement lutté longtemps, et en vain, parce qu’elle était justement affiliée à l’Air, tandis que lui maniait la Terre. Pour la première fois, la chanteuse s’interrogea sur leurs éléments respectifs : à défaut de partager le même, pourquoi étaient-ils des mystiques d’éléments contraires ? Pourquoi avait-il fallu qu’ils soient séparés ainsi ? Miku aimait le vent, comme le vent la chérissait, et elle était certaine que son ami ressentait la même chose vis-à-vis de la terre. Mais elle était un peu... Frustrée. Cependant, rien ne disait qu’elle serait incapable de lui venir en aide, plus tard, une fois son niveau de maîtrise avancé. Elle avait juste à être patiente... Comme toujours.

Le jeune homme lui parla de son désir de s’engager sur la voie de l’Élémental, en mettant à profit ce don tardif, mais bel et bien réel. Comme à son habitude, Miku sourit, en hochant la tête.

« Pouvoir parler avec son élément est quelque chose de merveilleux, et j’ai conscience d’être une privilégiée, avec ma maîtrise de l’Air. Parmi mes sœurs prêtresses, certaines n’ont pas de pouvoir aérien, même si elles compensent avec d’autres savoirs : beaucoup d’entre elles sont de puissantes Maîtresses de l’Esprit. Je peux te dire que c’est assez impressionnant de les voir déplacer des objets, non pas grâce au vent, mais par la seule force de leur volonté ! Elles peuvent aussi parler directement dans l’esprit des gens, c’est un peu surprenant, au début, mais on s’y fait. En tout cas, je pense qu’entretenir son don élémental est important, et tu as raison de vouloir le développer. Il t’a déjà sauvé la vie, c’est un signe, non ? »

Elle s’interrompit un instant, malicieuse, avant de reprendre :

« Est-ce que tu sais déjà vers quelle utilisation tu veux orienter ton pouvoir ? Si tu veux t’en servir pour protéger autrui, même si nous sommes normalement contraires, je peux te montrer les bases : il y a des choses communes à tous les mystiques, en fait. Enfin, ce ne sera pas avant que tu sois totalement rétabli, et si tu décides d’en faire autre chose, je ne pourrai malheureusement pas t’aider, même si je te soutiendrai, quel que soit ton choix. Après tout, c’est ta maîtrise, et ta décision. »

Hugo parla de son désir de voyager, et évoqua la possibilité de visiter Nalcia. Enthousiaste, la chanteuse s’enflamma.

« C’est une très bonne idée ! Et puis, malgré les tensions entre les pays, Nalcia reste un pays plutôt accueillant, même avec les membres de l’alliance adverse. C’est dans notre caractère, j’imagine... Surtout que ces conflits ne mènent à rien, du moins pour le moment. Ils n’ont servi qu’à ôter la vie à des milliers de gens, dont nous avons parfois du mal à guider les âmes damnées et égarées dans les Rêves. Mais pour en revenir à la nation de l’Air, je pense que tu te plairas, là-bas. Et puis, nous avons plusieurs temples : le Sanctuaire du Vent, le Temple du Savoir et, bien évidemment, le Temple de l’Air Boréal, où je vis depuis plusieurs années. Et, tu sais, comme j’ai recueilli pas mal de Pokémon, j’ai ouvert une pension, au bord du Lac de la Liberté, à quelques kilomètres du Temple. Si ça te dit, tu pourras venir les voir, ils sont tous gentils, même si certains sont encore un peu sauvages ou timides. Vu le nombre de créatures que j’ai récupérées, je songe sérieusement à agrandir la pension, et à devenir Éleveuse, professionnelle, je veux dire, avec un certificat, une épreuve, un diplôme et des papiers officiels. Je sais que je ne pourrai pas laisser des Pokémon en danger ou en détresse tout seuls, et j’ai tendance à tous les amener chez moi pour m’en occuper ! Ce serait sans doute mieux pour eux d’évoluer dans un espace reconnu comme un endroit qui leur est dédié. »

Fulmina, encore faible, se détendit et, fatiguée, se laissa un peu tomber pour somnoler sur l’épaule de sa maîtresse. Sa queue vint balayer, lentement, le tatouage rituel de la jeune femme.

« Quoi qu’il en soit, si tu veux me rendre visite au Lac, ou au Temple, n’hésite pas. Mes frères et sœurs seront ravis de te rencontrer, même s’ils ont l’impression de déjà te connaître, vu que je leur ai beaucoup parlé de toi... Et puis, même quand je suis absente, il y a toujours quelqu’un chez moi. Une prêtresse qui s’est retirée du Temple en raison de son âge habite à la pension, et elle s’occupe de mes Pokémon quand je n’y suis pas. On me contactera très vite pour me prévenir de ton arrivée, et je rentrerai dès que possible, de toute manière. »

Miku allait se lancer dans une autre tirade lorsque l’œuf dans ses bras se mit à craquer, d’abord doucement, puis de plus en plus fort, sous l’œil bienveillant de sa propriétaire. Lorsque la corne émergea de la coquille, suivie de l’être en robe blanche, la Nalcienne lui fit un grand sourire, alors que son aura était plus lumineuse que jamais. Levant ses grands yeux vers sa « mère », la Tarsal resta immobile, bouche bée, pendant quelques instants... Jusqu’à ce qu’une voix mentale fluette, mais douce, ne résonne dans la pièce.

« Mi... Ku ? Mama ? »

Surprise, la prêtresse regarda Hugo, puis son Pokémon. Cette créature savait déjà son nom et son statut ! Elle avait probablement entendu les mots prononcés alors qu’elle était encore dans sa protection, mais le fait qu’elle les ait déjà mémorisés et qu’elle puisse les reproduire trahissait ses grands pouvoirs psychiques, même si ces derniers étaient encore en sommeil. Heureusement, la Tarsal aurait tout son temps pour les faire grandir, aux côtés de la jeune femme.

« Oui, je suis Miku. Ta vraie maman t’a confiée à moi, parce qu’elle me fait confiance. Elle veut que nous devenions amies. Elle m’a dit que toi, tu t’appelais Tanaquil. Tu es en sécurité, avec moi, et tu es chez toi partout où je serai, d’accord ? »

Une fois l’étonnement premier passé, la joie gagna le petit être, qui se lova dans les bras de la Nalcienne, cherchant à retrouver la chaleur perdue de son cocon initial. Nebula, elle, rassembla les débris de la coquille ensemble pour les mettre dans un coin de la pièce, comme si elle voulait laisser les autres profiter de l’arrivée de ce nouveau compagnon dans leurs existences.

[Hugo]

Hugo observait avec tendresse le petit être psychique qui venait de venir au monde. Visiblement un peu perdue, la petite Tarsal prit Miku pour sa maman ce qui fit sourire le jeune homme. Ce petit Pokemon était des plus adorables ! Le fait qu’il puisse communiquer à peine éclot permit aux humains présents dans la pièce de déceler en lui un très grand potentiel. La petite chose se blottit alors contre la poitrine de celle qui venait de se présenter comme une amie. La Nalcienne semblait on ne peut plus ravie, bordant avec amour la petite fée. Nebula entreprit de regrouper les bouts de coquille dans un coin de la pièce, ce qui fit sourire le jeune homme. Il ne connaissait pas le petit côté maniaque du dragon de coton. Hugo baissa alors le ton pour ne pas perturber Tanaquil et s’adressa à sa dresseuse :

« Je sens que ce petit est promis à de grandes choses… Je ne saurai te dire pourquoi, mais je le sens… ». Il enchaina ensuite « Ça me ferait extrêmement plaisir de rencontrer tes frères et sœurs du temple de l’air… Boréal c’est ça ? Je veux rencontrer ceux qui t’ont permis d’évoluer et de grandir de manière si magistrale. Tu te rappelles comment tu étais la première fois que je t’ai trouvée, dans la forêt d’Agatha ? »

Pendant de longues années Hugo s’était demandé ce que la jeune fille aux cheveux turquoise était devenue après qu’elle ait fui Arkan. Cet épisode avait profondément marqué le jeune homme qui avait été incapable de retenir la prêtresse de l’air qui était si vulnérable à l’époque. Il s’en voulu. Très longtemps, puis doucement, il avait appris à vivre avec et à avancer malgré tout. Le Terrosien sourit en voyant la femme qu’elle était devenue, il s’était bien trop inquiété pour elle.

La porte s’ouvrit alors et deux personnes entrèrent dans la chambre du blond. Hugo reconnut le soigneur, Marc, qu’il vit quelques instants auparavant mais détailla la femme qui se tenait à ses côtés. Elle devait avoir la quarantaine, quelques cheveux blancs seulement trahissaient son âge. Son teint basané contrastait énormément avec ses vêtements bleu et blanc. Une maîtresse de l’eau. Le jeune maître de la terre mit son index devant ses lèvres avant de pointer la petite Tarsal du doigt. Le calme était dès lors de rigueur. Le soigneur chuchota :

« Hugo, voici Leanne. C’est une excellente guérisseuse qui nous vient de Mizuhan. Maintenant que tu es réveillé, elle va pouvoir commencer à s’occuper de toi. Mais avant ça, on va faire ta toilette. Nous allons être obligés de demander à ton amie de sortir de la pièce. Tu comprends petite, les guérisseurs ont besoin de calme. »

Le soigneur adressa cette dernière phrase à la marcheuse. Hugo sourit immédiatement à son amie pour lui signifier qu’effectivement, il préférait être seul. Le fait qu’elle assiste à la séance de soin ne l’ennuyait pas, au contraire, mais il préférait vraiment la solitude pour être… lavé comme un enfant. Leanne remplissait déjà la bassine qui se trouvait sur la table quand le terrosien adressa cette phrase à son amie :

« Tu peux y’aller. Je suis sûr que dans le camp, des personnes pourraient avoir besoin de ton aide. Peut-être même que certaines personnes ont besoin d’une aide plus… Spirituelle. Je suis entre de bonnes mains, je te préviens quand la séance est finie. »

Le soigneur aida alors le jeune homme à retirer son T-shirt blanc, dévoilant ainsi son corps meurtri par les évènements passés.  Leanne s’empressa d’imbiber un tissu d’eau parfumé qu’elle passa d’abord sur le bras intact, le gauche, puis qu’elle aventura minutieusement sur le bras droit, où la morsure du canidé électrique était encore très visible. Nettoyant par la suite le torse bleui par endroit, l’abdomen, le dos et les jambes. Pendant qu’il se faisait laver, Hugo ne put s’empêcher de réfléchir à une des questions que Miku lui avait posée. Quelle utilisation de ses pouvoirs voulaient-ils faire ? Voulait-il devenir un guérisseur, comme celle qui s’occupe de lui à l’instant, un élémancien, privilégiant la force brute ? Hugo n’en avait aucune idée, tout ceci était tellement soudain… Le jeune homme était perdu dans les méandres de ses pensées mais en fut sorti par Leanne qui lui tendait le tissu mouillé à Hugo, se doutant qu’il préférerait laver ce qui lui restait à laver lui-même.

« Me…merci. » bredouilla le jeune homme.

Une fois la toilette intime du jeune homme terminée, Marc aida l’élémental à enfiler un large short tandis que Leanne approchait, les mains entourées d’eau lumineuse. C’est alors que la guérisseuse prit parole pour la première fois :

« Je suis Leanne, guérisseuse de Mizuhan. Bien sûr, tu le sais déjà, mais je tiens toujours à me présenter moi-même. Les deux plus grands dangers pour toi actuellement sont la blessure à ton bras droit et l’état préoccupant de certaines de tes côtes. Heureusement pour toi, je suis très douée dans ce que je fais. » elle finit sa phrase par un clin d’œil amical.

Leanne posa alors ses mains bienfaitrices sur les hématomes qui se formaient un peu partout sur son thorax. Hugo crut qu’il allait souffrir, comme à son habitude, mais au lieu de cela, un sentiment de soulagement prit possession de son corps mutilé. L’eau soulageait la douleur et la tension accumulée dans chacun de ses muscles depuis l’accident. Tout en fermant les yeux, Leanne prit la parole et s’adressait à son patient sur un ton très calme :

« Je t’explique ce que je suis occupé de te faire, d’accord ? Je pense que c’est important pour les gens de savoir ce qu’on est occupé de leur faire. Nous, les guérisseurs de l’eau, avons, parmi les guérisseurs des autres nations, la plus grande faculté de soulagement. Nous permettons aux fluides de mieux circuler dans ton corps, ceux qui diminue la sensation de douleur et de fatigue. L’eau va aussi me permettre de désinfecter toutes tes plaies pour y favoriser une bonne cicatrisation. Mais la cicatrisation sera plus lente que si tu avais eu affaire à un guérisseur du feu par exemple. Nous avons tous notre spécialité, mais au final qu’un seul but, que nous atteignons presque à tous les coups. »

La guérisseuse fit briller ses mains sur le corps d’Hugo pendant une bonne heure, le soulageant alors de toutes ses douleurs, gommant ainsi toute trace de faiblesse. Bien sûr, il n’était pas guéri, et les effets n’étaient que temporaires mais en continuant la cure comme celle qu’il venait de subir de manière quotidienne, le jeune homme finirait inexorablement par mieux se porter.

« J’en ai fini avec toi pour aujourd’hui. Je repasserai demain. En attendant, ne fais pas d’excès, tu es toujours en convalescence. Même si tu souffres moins, tes blessures ne sont pas guéries, le processus de guérison a pris du retard avec la barrière que tu avais érigé.  Ton bras restera bandé pour éviter de devoir recommencer la désinfection et je te conseille de marcher avec une des béquilles que Marc t’as ramené.»

Hugo cala alors uns des bouts de bois sous son aisselle et se leva à l’instant même où Marc et Leanne quittèrent la pièce. D’un pas chancelant, il se dirigea vers la fenêtre, s'asseyant difficilement dans l’encadrement, et regarda le soleil se coucher sur le camp de Palma tout en faisant léviter une petite pierre du bout de ses doigts.

[Miku Hatsune]

« Sphère sécurisante… »

Hugo pressentait les immenses pouvoirs qui étaient ceux de la Tarsal, et Miku acquiesça. Il avait raison mais, pour le moment, ils étaient encore latents... Et ils s’éveilleraient en temps voulu. Lorsqu’il évoqua une future rencontre avec les pairs de la prêtresse, ainsi que la leur, la Nalcienne sourit.

« Oui, c’est bien ça. Le Temple de l’Air Boréal. C’est vraiment un endroit hors du temps et de l’espace... Un lieu pur et préservé, qui n’est pas souillé par la guerre, les conflits d’intérêts ou les jeux de pouvoir. Là-bas, un être en vaut un autre, et chacun est traité avec respect et déférence, sans différence d’âge, d’expérience ou de niveau. Je pense vraiment que ça te plaira. Quant à la Forêt d’Agata... Je m’en souviens, en effet. J’étais tellement... Neuve. Oui, c’est le mot, neuve. Je ne savais que mon nom, et celui de Nebula... J’avais oublié comment parler. Cela me semble tellement irréel, et tellement loin, aujourd’hui ! J’ai grandi, mais au fond, je n’ai pas vraiment changé. Je crois. »

Dans ses bras, Tanaquil poussa un soupir d’aise, avant de s’endormir complètement, se sentant parfaitement en sécurité. Comprenant qu’elle n’aurait pas faim dans l’immédiat, sa maîtresse l’enferma dans une sphère, histoire qu’elle y soit à l’abri, et qu’elle soit préservée d’éventuelles nuisances sonores qui auraient pu perturber son sommeil. À cet instant, deux personnes firent irruption dans la pièce, et elles eurent à peine le temps de voir la Tarsal disparaître dans un rai de lumière blanche. Miku se leva, puis s’inclina profondément pour les saluer. Lorsqu’on lui expliqua qu’elle devait sortir le temps que le Terrosien soit lavé et soigné, elle hocha la tête.

« Bien sûr, je comprends. Tu sais où me trouver, quoi qu’il arrive. Tu as toujours mon Symbole. »

Laissant là Fulmina, qui s’était roulée en boule dans un coin pour dormir, elle aussi, Miku s’assit sur le rebord de la fenêtre et, comme elle aimait à le faire, se pencha en arrière pour s’abandonner au vide et aux vents. Glissant avec souplesse, elle atterrit sur le dos cotonneux de Nebula, qui l’emmena survoler Palma avec délice.

Au bout de plusieurs minutes d’escapade, la jeune femme se sentit comme transpercée par une flèche particulièrement précise et pointue, au niveau du cœur. D’une pression des jambes, elle fit descendre l’Altaria vers l’origine du malaise, et elle sauta à terre, se précipitant vers ce qu’elle devina être une boîte abîmée. Une fois devant, elle regarda à l’intérieur, pour y trouver une boule de poils recroquevillée sur elle-même, les yeux clos, en proie à un sommeil fort agité.

« Oh... Trop d’amour dans un si petit chat... Regarde, Nebula, elle est si jeune ! Apparemment, quelqu’un a voulu se débarrasser d’une portée entière... »

En effet, on avait griffonné à la hâte un « servez-vous » sur un parchemin jauni et maladroitement collé sur le côté du conteneur. Prise de pitié, Miku tendit les bras pour prendre le chaton, et un frisson la parcourut. Il émanait de cet être quelque chose de malsain, de dérangeant, ce qui expliquait sans doute son abandon et sa non-adoption. Combien avait-il eu de frères et sœurs, lovés contre lui dans cette boîte ? Depuis quand était-il tout seul, livré à lui-même, sans que personne ne s’arrête et ne fasse attention à sa détresse ? Sereine malgré tout, la Marcheuse s’agenouilla en psalmodiant, s’aventurant rapidement dans le Rêve de la chatte pour chasser ce Cauchemar. Quelques minutes suffirent à la Nalcienne pour calmer la créature, mais elle préféra néanmoins s’en aller et s’isoler pour mieux s’occuper d’elle. D’une impulsion sous ses pieds, Miku s’envola subitement, sautant de toit en toit en ne faisant qu’effleurer les bâtisses de son pas léger et aérien. Elle s’arrêta finalement en hauteur, près d’un édifice ressemblant à un temple, sans vraiment y faire attention, et elle rit lorsqu’elle s’aperçut de la nature du lieu. À croire qu’elle était indéniablement attirée par les édifices religieux...

Pendant environ une heure, elle caressa la Miaouss, inlassablement, jusqu’à ce que la boule de poils ouvre timidement les yeux, affrontant la lumière déclinante du couchant. La chatte émit un tout petit « miou » qui acheva d’abattre les barrières de l’humaine, et c’est avec un plaisir non dissimulé qu’elle se laissa gratter sous le menton, en ronronnant.

« Quand je disais à Hugo que j’avais tendance à recueillir tout ce qui avait besoin d’aide... En parlant de lui, il va être temps de retourner le voir. Nebula ? »

Le Dragon, enthousiaste, suivit la Nalcienne dans sa course aérienne. Tout sourire, la prêtresse retrouva son ami assis dans l’encadrement de la fenêtre, occupé à jouer avec une pierre, affichant ostensiblement son don de manipulation de la terre.

« Comment tu te sens ? Tiens, regarde ce que j’ai trouvé. Encore une âme perdue et dont personne ne voulait... une petite Moïra. »

Miku montra la chatte blottie contre elle, qui dévisageait Hugo de ses grands yeux curieux.

« Ça fera deux bébés Pokémon à ma charge, en même temps, mais je suppose que je ne suis plus à ça près, finalement. Connais-tu la Moïra ? C’est l’incarnation du Sort, du Lot, de la Destinée, en fait. Je me plais à croire que cette petite est une portion de Destin, en vérité. Elle n’a pas choisi le sien, je l’ai trouvée dans une boîte à l’abandon, toute seule. On a déjà dû emmener le reste de la portée... Pauvre bête. Espérons que la suite de sa vie soit bien meilleure ; en tout cas, je vais y travailler dès aujourd’hui. Voyons voir ce qu’en pense le grand Sage ! »

Amusée, Miku présenta la créature à celui qu’elle venait de désigner, par plaisanterie, comme le plus posé de tous les Persian d’Érasia.

« Alors, Monsieur Sophos, qu’est-ce que tu en dis ? Digne ou pas digne ? Seul l’avenir nous le dira. »

Assise sur le dos de Nebula, dans les nuages de ses ailes, la jeune femme se tut, toujours aussi rayonnante et spontanée. Une nouvelle fois, elle venait de prouver sa gentillesse et sa bonté légendaires... Au loin, un éclair zébra le ciel, tandis que de grosses gouttes se mettaient à tomber.

« Oui, définitivement, je crois que Moïra t’ira à merveille. »

Dehors, le ciel pleurait à chaudes larmes.

[Hugo]

« Mieux, merci! Léanne est très douée dans ce qu’elle fait, je la revois demain normalement. Quant à ta petite nouvelle… Elle est vraiment adorable! Tu verras comme avoir un Miaouss à tes côtés est… Une expérience unique. Ce sont des Pokémon vraiment faciles à vivre, ils sont très agréables! Moïra est très mignonne! »

Hugo avait quitté les yeux de son amie pour plonger les siens dans ceux du petit félin. Un sentiment étrange émanait de l’être recueilli par la marcheuse. Dans ses yeux ronds, on pouvait contempler toute l’innocence du monde. Le Terrosien sourit, bienveillant. Miku avait toutes les capacités pour élever plusieurs jeunes Pokémon en même temps, il ne se permettait pas d’en douter. Un léger rictus rieur s’étendit sur son visage quand il entendit parler du grand sage. Hugo appela alors son premier compagnon tandis que la prêtresse lui présentait Moïra.

Le plus grand des félins toisa alors du regard sa cadette, la jugeant silencieusement. Soudain, les oreilles du félin se mirent à remuer frénétiquement tandis qu’il humait l’air. Le Persian plongea alors son regard perçant dans les yeux émeraude de son dresseur et ami avant de retourner à l’intérieur de la cabane, de manière totalement désinvolte.

« Allons-nous abriter, il va commencer à pleuvoir. »

À peine avait-il fini sa phrase que des grosses gouttes commencèrent à tomber du ciel. L’air était chaud et humide, chargé d’électricité. L’orage n’allait pas tarder à s’abattre sur Palma et en cette saison, il valait mieux éviter d’être à l’extérieur quand le Dieu de la foudre décidait de frapper. Se réfugiant à l’intérieur, Hugo s’adressa à la fille du vent.

« Moïra est spéciale, elle ne ressemble à aucun Miaouss que j’ai pu voir… Mais Persian semble s’en accommoder. D’ailleurs… Comment tu l’as appelé ? Sophos c’est ça ? C’est vraiment joli. Je trouve que ça lui correspond bien. Tu en penses quoi ? »

Il avait lancé sa dernière phrase en direction de son ami quadrupède. Le Persian acquiesça d’un mouvement de tête avant de venir se coucher aux pieds de son maître qui s’était rassit sur son lit d’appoint. Teddiursa, qui n’était jamais loin, se rapprocha de ce dernier et s’assit sur ses cuisses pour se blottir contre son maître.

« Toi aussi tu mérites un nom un peu plus personnel…  Laisse-moi te regarder un peu. Ça y’est, j’ai trouvé ! Irémia, ça te conviendrait ? »

Il n’eut pour seule réponse qu’un cri enjoué de la part de sa plus jeune de ses Pokémon. Hugo caressa alors le dos de son oursonne avant de lui grattouiller le menton. Sophos et Irémia… Le sage et la calme. La pluie battait son plein, fouettant la fenêtre avec ardeur. Le vent n’en faisait pas moins, soufflant par rafales violentes. Le châssis de la fenêtre grinçait sous les assauts invisibles du vent. Un léger courant d’air s’infiltrait par le bas de la porte, sifflant de manière persistent. Hugo remédia au problème en élevant une petite bande de terre à l’extérieur, recouvrant ainsi la partie non isolée.

« Quel sale temps ! Je n’ai jamais été friand de la pluie, c’est d’ailleurs pour ça que je n’ai jamais réussi à m’habituer à Mizuhan. J’espère qu’elle va vite passer en tout cas. »

La porte claqua de manière soudaine. Elle s’était ouverte sous une bourrasque des plus virulentes. Un vent froid s’engouffra dans toute la pièce, rendant Hugo frissonnant.

« Ne bouge pas, je m’en charge. »

En synchronisant un mouvement de pied ancré dans le sol à un geste vif de la main, le Terrosien éleva un mur de terre, recouvrant ainsi tout l’encadrement de la porte. Le jeune homme passa furtivement une main dans ses cheveux, replaçant une mèche qui était tombée sur son front durant l’effort. Le blond n’était pas peu fier de sa maîtrise. Il était resté pendant longtemps un non-initié à l’élémentalisme mais avait pris rapidement le coup. Il lui restait beaucoup de progrès à faire mais il était confiant. Voulant tuer le temps que la pluie cesse, Hugo s’adressa à la fille chérie des vents.

« D’ailleurs Miku… Comment tu as découvert ton don ? Le côté élémental du monde m’est tellement étranger ! Tu as eu des maîtres qui t’ont permis d’évoluer dans ta maîtrise ? Peut-être je devrais me trouver un maître de la terre pour m’aider… Je sais que tu es là, mais en étant marcheuse, tu dois avoir tellement de gens à aider ! D’ailleurs, je t’ai parlé de mes projets, mais quels sont les tiens ? Ouvrir ta pension ? Je me rappelle que lors de l’attaque des Elecsprint, tu as utilisé un arc à flèches ? Tu es également une tireuse ? Tu es décidemment une femme accomplie. »

Hugo disait ceci avec une pointe de déception dans la voix. Où en était-il, lui ? Il avait toujours repoussé les choses au lendemain, se contentant de vivre au jour le jour sans se soucier de l’avenir. Tout ceci devait changer, et il était bien déterminé à s’améliorer, lui aussi.

[Miku Hatsune]

« Aura »

Miku fut ravie d'apprendre que le jeune homme allait mieux, et qu'il était suivi de près, puisqu'il devait revoir la Guérisseuse le lendemain. Puis, Hugo lui vanta les vertus des Miaouss, leur caractère facile et agréable, et leur compagnie appréciable. La Nalcienne sourit.

« Je n'ai jamais eu de Pokémon vraiment difficile, jusqu'à présent. Tous mes compagnons sont gentils, et ils m'aident volontiers. Oh, bien sûr, j'ai bien quelques fortes têtes, ou des camarades un peu trop agités, mais tant que j'arrive à les tenir, je ne me fais pas trop de souci ! »

Comme pour répondre à ses mots, la chatte aux teints rougeâtres jaillit de sa Ball, en poussant un miaulement faussement courroucé. Alors que tous les regards se tournaient vers la Delcatty, Miku se mit à rire, dans un son rappelant le tintement d'une clochette traditionnelle, comme il y en avait dans les Temples de Nalcia. Curieuse, Pardalis s'approcha de la nouvelle venue, la renifla délicatement, sous toutes les coutures, donna un coup de tête amical au Persian, puis s'assit calmement, son petit numéro comique achevé. Lorsque le félin se détourna, alors que son maître conseillait à Miku de rentrer pour se protéger de la pluie, la jeune femme entra dans la pièce, ne laissant que sa main à l'extérieur. Rapidement, la pluie ruissela sur sa paume, paume qu'elle utilisa pour nettoyer un peu Moïra. Le chaton, en confiance, se mit bientôt à ronronner, plutôt fort pour un Pokémon de sa taille et de son âge.

« Eh bien, quelle puissance dans un si petit corps ! Trop pouloute. »

Totalement absorbée dans la contemplation du petit chat, la Marcheuse s'assit, confirmant le nom par lequel elle avait appelé le Pokémon du Terrosien. Mais, à sa grande surprise, la créature s'en accommoda plutôt bien, puisqu'elle ne protesta pas lorsque son dresseur lui proposa d'en faire son nom définitif. Hugo lui affirma que Moïra, elle, était « spéciale ». Peut-être à cause de son destin hors du commun ? Ou peut-être à cause de la chance qu'elle avait eue de tomber sur quelqu'un comme Miku, songea Nebula en se nettoyant consciencieusement les plumes. Finalement, la mystique de l'Air ferma la fenêtre, trouvant que la pluie était un peu trop intrusive pour la laisser entrer ainsi. Son compagnon blond confirma ses craintes, et elle se félicita d'avoir pris l'initiative d'aller les protéger un peu mieux. Quand Hugo utilisa sa propre maîtrise pour achever de barricader la pièce, Miku leva le pouce en l'air, enthousiaste.

« Impressionnant ! Même si j'ai un bon niveau de maîtrise de l'Air, je serais bien incapable de faire une chose pareille. Je peux rendre le vent solide, mais c'est moins instinctif que le maniement de la terre pour ce genre de choses... Mon élément sert plutôt à voyager, à se déplacer, et à communiquer, aussi. Sais-tu que les vents chantent réellement ? Ils ont une voix propre, et elle est magnifique. Il paraît que les Terrosiens sont les moins sensibles à ces sons, parmi tous les mystiques. Mais j'espère que j'arriverai à te le faire entendre un jour. »

Tout en caressant ses compagnons tour à tour, pour veiller à ne pas faire de jaloux, elle écouta les questions de son ami, qui semblait toujours en quête de connaissances au sujet de la Marcheuse. Cette dernière réfléchit un moment, pour se souvenir des circonstances dans lesquelles elle avait découvert son pouvoir, avant de dire :

« Hm... Je crois que j'ai toujours eu ce pouvoir de parler avec le vent et de l'implorer de me venir en aide. La première fois qu'il s'est manifesté, c'était... C'était au moment du festival de Suicune, quand le braconnier a voulu s'en prendre à Murex. Enfin, tu étais là, toi aussi, tu dois t'en souvenir. »

Constatant que Moïra s'était lovée sur ses genoux, roulée en boule, Miku entreprit de tresser ses longs cheveux bleutés d'un air distrait.

« Par la suite, j'ai effectivement eu des mentors pour m'aider à perfectionner ma maîtrise. J'ai voyagé en Tenkei, et j'ai rencontré Pardalis, et j'ai décidé de devenir Défenseur, pour protéger les autres. C'est pour ça que je me suis rendue au Temple de l'Air Boréal, pour demander aux moines et aux prêtresses de m'apprendre à utiliser le vent à cette fin. Depuis ce jour, le Temple est devenu mon foyer, et la compagnie de mes aînés m'a beaucoup aidée à m'améliorer, sur tous les plans. Peut-être qu'avoir un maître de la Terre en tant qu'enseignant te serait bénéfique, c'est vrai... J'ai entendu dire qu'à Seian, on dispense des cours de maîtrise de la Terre, et que des tournois ont lieu pour déterminer qui sont les meilleurs earthbenders. Mais on dit aussi que les cours là-bas sont assez onéreux, et parfois difficiles... Et malheureusement, mes compagnons nalciens ne pourraient pas t'aider dans ce domaine. Chez nous, on pratique surtout la méditation, et les exercices sont adaptés aux manieurs de vent, un mystique de la Terre n'y trouverait que peu d'intérêt... Ce n'est pas parce que je suis Marcheuse que je ne peux pas t'apporter grand-chose, mais bel et bien parce que la Terre m'est parfaitement inconnue ! »

Miku était réellement désolée de ne rien pouvoir faire pour assister son ami dans sa démarche. Hugo l'interrogea alors sur ses projets.

« Ouvrir ma propre pension, c'est déjà fait. J'ai pu m'installer au bord du Lac de la Liberté, non loin du Temple de l'Air Boréal. Par contre, vu le nombre de Pokémon que j'ai (je viens de compter, Moïra est ma quatorzième compagne !), je pense que je vais devoir agrandir mon domaine, pour en faire une pension professionnelle. Mais je t'avoue que là, je n'ai pas trop le temps de me poser pour m'y atteler : on me sollicite déjà beaucoup et, même si j'ai pu trouver le temps nécessaire pour venir te voir, je ne pourrai pas m'éterniser et rester plus d'un mois ou deux, grand maximum. Nous sommes nombreux à arpenter le Grand Rêve, mais on aura besoin de moi, tôt ou tard. »

Quand le Terrosien évoqua ses talents de Tireuse, la jeune femme posa instinctivement son regard sur ses affaires, qu'elle avait posées dans un coin. Son arc laqué et orné de symboles dépassait un peu, rappelant à la Nalcienne qu'elle pouvait compter sur ses capacités de tir pour prendre le relais lorsque ses pouvoirs élémentaux ou ses Pokémon étaient insuffisants.

« En effet, je suis Tireuse. Avant, on appelait ça « Archère », mais la nomenclature officielle a changé, pour une raison plutôt obscure, d'ailleurs. C'est aussi au Temple que j'ai appris à manier mon arc, parce que cela fait partie de la formation dispensée là-bas. Au début, c'est vrai que j'étais plutôt réticente, je n'étais vraiment pas emballée à l'idée de devoir utiliser des projectiles pour blesser autrui. Mais j'ai compris peu à peu qu'il m'était nécessaire d'avoir autre chose que le vent ou mes Pokémon à disposition, en fonction des situations. J'essaie vraiment de ne faire de mal à personne avec mes flèches, mais j'ai parfois dû les utiliser en dernier recours, pour protéger les autres d'eux-mêmes, et pour me protéger, aussi, comme à Kamiki. Cela ne m'a vraiment pas fait plaisir de clouer ces chiens électriques au sol, mais je n'avais plus que ça pour les empêcher de se blesser davantage. Et puis, cela me sert aussi à diffuser certaines fragrances apaisantes, quand je suis dans l'incapacité de me servir des vents pour le faire. Certains de mes camarades du Temple sont vraiment des moines guerriers, et ils décochent des flèches pour se battre, comme un bretteur se servirait de sa lame. Je respecte leurs choix, car aucun d'entre eux n'est foncièrement mauvais, ni animé de mauvaises intentions. Mais c'est quelque chose que je ne peux me résoudre à faire en priorité. Il y a tant de moyens de soutenir autrui sans faire de mal ! »

La jeune femme sentit quelque chose de râpeux sur sa peau, et elle eut un sourire doux en constatant que la responsable n'était autre que la Miaouss, occupée à lécher consciencieusement sa sauveuse.

« Elle doit trouver que je ne suis pas assez propre à son goût » , s'exclama la Marcheuse, pas fâchée pour un sou.

[Hugo]

Hugo écoutait attentivement les réponses que Miku apportait à ses réponses. La mystique de l’air avait déjà sa propre pension qui comportait déjà plus de dix Pokémon ! Elle était devenue marcheuse onirique, tireuse, avait voyagé sur le continent flottant et avait accompli bien d’autres exploits encore. Le Terrosien se sentit soudainement honteux de ses petites prouesses élémentales. Son amie était revenue de si loin… Pour au final finir bien plus accomplie que lui. Une sensation de vertige assaillit le jeune homme encore mal au point. Son corps avait subi de nombreux bouleversements aujourd’hui et ce dernier semblait bien décider à rappeler Hugo à l’ordre.

Le jeune homme s’allongea alors sur son lit en hauteur, laissant son bras endolori pendre tel un poids mort. Les fins doigts du maître de la terre caressaient la robe beige de son Persian, faisant ronronner le félin de plaisir. Il continua ce petit manège, en insistant bien à la base des oreilles de son Pokémon tandis qu’il fixait le plafond au-dessus de lui…

« Je suis vraiment fatigué tu sais… J’ai l’impression d’avoir du plomb qui me coule dans le corps, m’empêchant de faire le moindre mouvement. Je pense que je vais me reposer un peu le temps que la pluie passe si ça ne te dérange pas. Je vais me concentrer pour essayer d’entendre le chant des vents… »

Et Hugo plongea alors directement dans les bras de Cresselia pour au final ne se réveiller que le lendemain matin. Et une petite routine s’installa dans la vie d’Hugo durant le mois qu’il passa à Palma. Tous les jours, Léanne venait le voir et lui apportait ses soins. Les deux élémentaux finirent par se lier d’amitié, les longues heures passées ensemble les ayant rapprochés. Elle disait qu’Hugo lui rappelait son fils, qu’elle avait perdu lors de la guerre qui secoua le pays des années auparavant. C’est à partir de cette époque-là qu’elle décida de cultiver ses capacités de guérison, pour éviter qu’un autre innocent ait à mourir faute de soins.
Peu à peu, les blessés finissaient par quitter le camp de rétablissement dirigé par Marc. Hugo fut parmi les derniers à bénéficier de l’attention des soigneurs de Palma. Il se sentait si bien dans cette petite bulle où les gens prenaient soin de lui, le félicitaient quand il effectuait des progrès ou le réprimandaient quand il voulait repousser ses limites au-delà du raisonnable. Puis surtout, il avait Miku à ses côtés.

Les deux jeunes gens eurent enfin l’occasion de se connaître réellement, de découvrir qui était la personne qui comptait tant à leurs yeux. Ce que découvrit Hugo l’impressionna tant son amie à la chevelure turquoise n’étaut que bonté et générosité. Toujours à penser aux autres avant son propre confort, elle avait vraiment tout d’un défenseur élémental. Moïra et Tanaquil quant à eux grandissaient également à leur rythme, sous l’œil bienveillant de leur dresseuse.

Un jour, alors que le jeune homme était plongé dans une piscine peu profonde remplie d’eau réparatrice, Léanne lui annonça qu’il était prêt à partir. Son bras s’était entièrement remis, ne gardant qu’une légère cicatrice tandis qu’il ne souffrait plus de ses côtes. Il devait dorénavant aller de l’avant, reprendre sa vie de voyageur et de visiter ce qu’il n’avait encore jamais eu l’occasion de voir. Bien sûr, Hugo s’était confié à la guérisseuse sur ses volontés de découvrir le monde qui l’entourait, d’apprivoiser l’inconnu. Cette dernière jugea que le moment pour lui de réaliser ses rêves était venu. Elle l’enlaça très chaleureusement à la fin de la dernière séance de thérapie aquatique et lui rappela qu’à tout moment, ses portes lui étaient ouvertes.

À la sortie de la tente de Léanne, Hugo fut secoué par une myriade d’émotions, passant de l’euphorie à la plus profonde tristesse. Ce départ de Palma avait des conséquences qu’Hugo aurait voulu éviter… Mais il ne pouvait être blessé indéfiniment. Il se mit alors à chercher activement son amie chanteuse. Il n’eut pas de difficultés à la retrouver tandis qu’elle était impassible, immobile au centre de l’abri que Marc lui avait attribué. Le Terrosien savait que dans les situations comme celle-ci, il était primordial de ne pas perturber la méditation de la Nalcienne, sous peine d’écourter, non pas sans danger, son séjour dans le monde des rêves. Il se posta alors à sa porte, veillant à ce que personne ne perturbe la quiétude régnant dans la pièce. Une fois la prêtresse revenue dans le monde matériel, Hugo fila s’asseoir face à elle, plongeant son regard émeraude dans les morceaux de ciel de Miku.

« Miku… Je… Je pense qu’il est temps pour moi de partir… Léanne estime que je n’ai plus de séquelles de mon accident et que je n’ai plus besoin de rester ici… Et je crois qu’elle a raison. Je me sens tellement mieux depuis quelques temps, je ne souffre plus quand je marche, quand je fais de l’exercice ou même quand je respire ! Puis je pense que Sophos et Irémia en ont un peu marre de rester ici et je les comprends, ils ne sont pas fait pour rester enfermer dans des endroits si restreints, ils ont besoin d’espace ! Mais dans tous les cas, je veux que tu saches que passer ce mois avec toi a été quelque chose de si merveilleux et de paradoxal. À la fois douloureux physiquement mais si apaisant mentalement. Mais toutes les bonnes choses ont une fin. On se retrouvera, bientôt, et dans d’autres conditions, mais on se reverra, yakusoku da yo! »

Puis le jeune homme prit son amie entre ses bras, la pressant délicatement contre sa poitrine. Il n’était pas très démonstratif et en règle général n’aimait pas vraiment le contact physique avec d’autres personnes, mais pour cette fois, il en avait besoin. Il avait besoin de la serrer contre lui comme pour s’assurer de sa réalité. Puis une dernière fois, il se perdit dans le turquoise de ses yeux, et une dernière fois, il dut en sortir à contre cœur. Il se releva et regagna sa cabane personnelle. Il embarqua son sac à dos et revêtit ses chaussures pour la première fois en un mois.

Hugo avait pris l’habitude de marcher à pieds nus pour garder un contact constant avec la terre. Le contact chaleureux qu’il entretenait avec son élément l’aidait à mieux l’appréhender, à mieux l’apprivoiser. Sa maîtrise s’était améliorée en un mois et le jeune homme avait décidé qu’il attendrait un peu avant de se rendre à Seian pour suivre des cours de maîtrise. Une monde neuf s’offrait à lui et il ne voulait faire marche arrière pour rien au monde.

En jetant un dernier coup d’œil sur Palma, Hugo s’enfonça dans les collines Siffl’Herbes, le sourire aux lèvres.

[HRP : fini pour moi, merci à toi pour ce RP]

[Miku Hatsune]

« Yakusoku da yo. »

Le jeune homme eut soudain l'air très fatigué, ce qu'il confirma à son amie, une fois allongé sur son lit. Il mentionna ses efforts pour entendre le chant des vents, ce qui fit sourire Miku, même si Hugo ne put résister bien longtemps à la torpeur qui s'empara de lui. Il était tout de même en convalescence, et il avait été soigné pendant une heure, alors il avait clairement besoin de repos. Une fois les yeux du blond fermés et sa respiration régulière et paisible, la Nalcienne se leva calmement, tenant contre elle le chaton qui pétrissait sa maîtresse avec ses petites pattes. Laissant Fulmina près de Sophos, elle quitta la pièce sans un bruit, avec Nebula et Moïra, pour laisser le Terrosien dormir tranquillement. Elle fut apostrophée par un Guérisseur au détour d'un couloir, et elle le suivit jusqu'à une grande salle où se réunissaient les médecins, quel que soit leur art de prédilection. Miku eut l'occasion d'échanger avec le personnel : il y avait des gens qui travaillaient ici à plein temps, mais aussi des mystiques qui venaient d'un peu partout et qui profitaient d'un passage dans les environs pour prodiguer leurs soins aux malades. Enfin, certaines personnes avaient fait le déplacement exprès, sollicitées pour leurs talents particuliers dans un domaine donné, ou parce qu'elles avaient des proches accueillis ici. Elle discuta jusqu'à une heure avancée de la nuit, heureuse de pouvoir partager ses connaissances et son expérience avec des tas d'autres gens qui, comme elle, avaient choisi de venir en aide à autrui, en veillant à nourrir ses Pokémon et leur trouver un coin au calme pour qu'ils dorment près d'elle. Elle accorda d'ailleurs une attention toute particulière à ses dernières recrues, qui se blottirent l'une contre l'autre pour somnoler sur les genoux de Miku ; cette dernière commença à trouver que son corps manquait de place pour accueillir tout ce petit monde ! Finalement, sentant la fatigue la gagner à son tour, la Nalcienne s'endormit, confortablement installée dans un canapé moelleux...

Le lendemain, après avoir pris le temps de laver toute sa petite équipe (y compris elle-même), Miku partit voir comment allait le Terrosien. Chaque jour, le même rituel se répéta, la Marcheuse quittant la chambre de son ami lorsque Léanne venait pour sa séance habituelle. Elle mettait à profit ces heures pour méditer, quand elle ne s'entraînait pas au tir à l'arc, ou quand elle n'exerçait pas sa voix pour maintenir son niveau de puissance élémentale. Dans ces moments-là, ses Pokémon restaient à ses côtés pour l'écouter chanter, comme envoûtés, bientôt rejoints par les créatures des patients, puis par celles qui vivaient dans les environs. Parfois, la jeune femme allait si loin dans sa maîtrise qu'on pouvait littéralement voir ce qu'elle chantait, sous la forme de couleurs chaudes et bienveillantes, dans lesquelles transparaissaient sa bonté d'âme et son total dévouement. Un jour, une femme s'était même agenouillée même devant le spectacle, en pleurant à chaudes larmes et en prétendant qu'elle avait rencontré la réincarnation d'une divinité de son village natal... Morte de honte, la Marcheuse s'était interrompue aussitôt pour infirmer ses propos, mais la dévote n'avait rien voulu savoir et avait tenu à lui offrir son temps et son existence. Miku avait finalement pu être débarrassée de la fanatique par un camarade Arpenteur de Rêves, qui l'avait rassurée en lui expliquant l'état de confusion mentale dans laquelle la patiente était depuis qu'elle avait perdu une partie de sa famille dans la catastrophe de Mewtwo.

Mais cet incident n'empêcha pas la Nalcienne de poursuivre ses séances de méditation, de chant et de tir à l'arc.Elle apprit également à mieux connaître son camarade terrosien, elle l'accompagna dans sa guérison, et elle put expérimenter la véracité du dicton qui disait qu'on n'était riche que de ses amis, même si elle profita de son séjour pour découvrir des techniques qui lui étaient jusqu'alors inconnues. Elle eut tout le loisir d'observer l'application du feu, de la terre et de l'eau à des fins curatives, et elle trouva les méthodes de ses pairs intéressantes et originales, d'autant plus que chaque mystique avait son propre savoir-faire et sa propre approche du métier.

Elle s'aventura quelques fois dans les Rêves, aussi, pour communiquer avec ses frères du Temple de l'Air Boréal ou pour ramener des personnes égarées en plein Cauchemar. C'est lors de l'une de ses excursions que son ami choisit de venir la chercher, puis de veiller à ce que personne n'interrompe son voyage en constatant qu'elle n'était pas vraiment présente dans l'immédiat. Une fois revenue à elle, la Nalcienne laissa Hugo s'asseoir en face d'elle et lui annoncer son départ à venir. Il lui adressa alors quelques mots dans sa langue à elle, des mots qui la touchèrent profondément. Il savait qu'elle était plus à l'aise avec ce langage-là, même si, n'étant pas mizuhanienne par sa maîtrise, elle en ignorait la raison. Elle l'étreignit également, sentant la douleur des adieux poindre en elle, mais se sentant mieux à la pensée qu'elle le reverrait.

« J'ai été heureuse de passer du temps avec toi, et de te voir guérir peu à peu. J'espère qu'à notre prochaine rencontre, nous serons tous les deux en pleine possession de nos moyens, afin de profiter pleinement de ce qui nous entourera ! »

Lorsque finalement, Hugo se dégagea de cette étreinte, la Marcheuse tendit son petit doigt vers lui pour attraper le sien et l'enlacer, scellant ainsi leur promesse.

« Hai, yakusoku da yo ! »

En essayant de ne pas penser à la boule qui naissait dans son ventre à la vue du Terrosien qui rassemblait ses affaires, Miku passa sa main sur le crâne de Sophos, puis sur celui d'Irémia. Le Dragon se posa en douceur à côté d'elle, sans un bruit, pour assister sa maîtresse dans ce qui ressemblait fortement à une épreuve difficile. La Nalcienne regarda la silhouette du blond s'éloigner lentement, en lui faisant de grands signes de la main, puis se détourna lorsqu'il ne fut plus qu'un point quasiment invisible à l'horizon. Sereine malgré tout, elle rejoignit ses collègues Défenseurs, leur offrit une dernière soirée de partage et de d'échange, regagna son abri pour y passer une dernière nuit et se leva à l'aube pour se préparer.

« Va chercher Tanaquil, s'il te plaît. Il est l'heure. »

Dans un bruissement d'ailes cotonneuses, l'Altaria fila vers la salle commune, où la Tarsal aimait passer du temps à jouer avec tous les Pokémon possibles et imaginables, sans distinction de taille, d'âge ou d'espèce. L'équipe fut finalement au complet, et on se rassembla près de l'entrée pour saluer la prêtresse du Vent.

« Je vous remercie de votre accueil, votre hospitalité m'a réellement touchée, et vos conseils m'ont été très précieux. J'en ferai bon usage, je vous le promets. Que le Vent vous accompagne ! »

Alors, juchée sur Nebula, Miku s'éleva, aérienne, pour entamer son voyage de retour vers le Temple de l'Air Boréal. Pour elle aussi, il était temps de partir.

[Merci à toi pour ce RP bien sympathique, et à la prochaine ]

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