[ Clos ] Missive fraternelle [Solo]

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Message par Goldfinger Ven 2 Juin 2017 - 18:06

Lettre écrite et postée à Seian par Goldfiner, à l'attention de son frère aîné :

Mon cher frère,

Cela fait longtemps que je ne t’ai pas écrit. Mes propres affaires m’ont tenu occupé, et j’imagine que tu avais fort à faire de ton côté. Je te demanderai cependant de ne pas m’en dire plus sur tes activités si jamais l’envie t’en prenait. Tu connais déjà mon opinion à ce sujet.

Le projet de troupe de théâtre dont je t’avais entretenu la dernière fois a bien avancé. Nous ne sommes que quatre, mais je sais pouvoir compter sur chacun de mes compagnons. La dernière fois, je les avais mentionnés sans donner de détails à leur sujet. Permets-moi de réparer cette erreur.

En ce sens, quoi de mieux pour introduire un acteur que de présenter le rôle qu’il joue dans la dernière pièce que nous avons écrite ? Elle s’intitule « le philosophe de la pierre » et contrairement à mes habitudes, il ne s’agit pas d’une comédie, même si j’ai insisté pour y incorporer une dimension satirique, ce qui ne devrait pas t’étonner.

Il s’agit davantage, comme son nom l’indique, d’un conte philosophique. L’histoire d’un homme sage issu de la pierre et de la terre qui professe sa vision du monde à qui veut bien l’entendre. Il ne vénère pas les dieux, mais la pierre, qui est pour lui la source de toute chose. Le seul élément parmi les quatre sur lesquels les hommes peuvent marcher et vivre. Le seul que les hommes peuvent exploiter. Celui qu’ils ont choisi pour exprimer la richesse et la puissance – tu connais d’ailleurs ma dévotion à ce métal précieux.

Des quatre éléments, la terre est réputée pour être le plus stable, le plus calme mais aussi un des plus universels. Un maître de la terre peut sans souci vivre sur la terre, mais je doute qu’un maître du feu puisse vivre littéralement sur son élément. Ces exemples sont volontairement simples, mais ils ne défendent pourtant pas une quelconque suprématie. La terre n’a pas vocation à rester au sommet, mais à la base. Ensuite les autres éléments s’élèveront au-dessus d’elle.

Cette vision prétendument suprématiste, nationaliste, belliqueuse même, lui est reprochée par Kaaska, une flamenoise incarnée par la jeune Bridget. Bien que le personnage ne soit pas du même pays que son interprète, la fougue de ma jeune complice Terrosienne convient parfaitement à son avatar. Elle représente bien l’ardent tempérament des flamenois.

Le but du sage sera d’ailleurs, lors de leurs nombreuses confrontations, de lui expliquer qu’il ne professe qu’une vision du monde, sa vision, sous-tendue par ses idéaux, et que chacun est libre de l’écouter ou non. Mieux, que chacun est libre de prendre dans ce qu’il professe ce qui lui plait, et de rejeter ce qui ne lui correspond pas, de la même manière que les peuples qui ne sont pas issus de la terre utilisent eux aussi cet élément pour façonner leurs habitations, avec toutefois une architecture, une esthétique et des techniques qui leurs sont propres.

Sans doute la finalité de cette vision ne t’a pas échappée. Nous partageons la même interprétation à ce sujet. Nos mondes, Erasia et Tenkei sont minés par des conflits à la fois visibles et invisibles qui effraient les gens. Mais la nature humaine est faite de telle façon que ce qui lui est étranger doit être adopté, adapté ou détruit le plus vite possible. Hélas, cette vitesse se fait souvent au détriment de l’intelligence et de la sagesse. Les explications les plus simples sont les plus faciles à comprendre… Mais pas forcément les plus avérées. Ainsi les humains ont-ils à mon sens perdu le goût de la complexité. Ils ont conscience que le monde est complexe, mais au lieu de chercher à le comprendre, ils lui préfèrent des explications tronquées et fantasques telles que les dieux… Qui sont loin d’être à l’origine de TOUT, comme tu le sais.

Ici, le sage que j’incarne – presque à contre-coeur dois-je ajouter – rappellera à Kaaska qu’une affaire complexe n’est pas nécessairement compliquée. Une œuvre architecturale complexe – qui paraît compliquée donc - n’est jamais qu’un amoncellement particulier et harmonieux de pierres. Il suffit donc de revenir à ces pierres primaires, en les considérant chacune une par une puis en regardant comment elles sont liées, consolidées, taillées, pour comprendre comment la structure fonctionne, de manière bien plus simple. Et tu sais mieux que moi que là se tient l’essence de toute stratégie, militaire ou non : un enchaînement d’actions simples qui permettent des réalisations complexes/

Bien évidemment, tu vas m’objecter – et Kaaska le fait dans la pièce – que les hommes pour comprendre ont besoin d’une éducation minimale qu’ils n’ont pas forcément reçue. C’est vrai. Pour construire un édifice avec des pierres, encore faut-il les avoir taillées au préalable. Ce à quoi le sage lui répond : "en ce cas, je vais t’apprendre à tailler". Et Kaaska de lui répondre : "le pauvre qui doit nourrir toute sa famille a mieux à faire que de tailler la pierre". Ce à quoi le sage lui répondra : « c’est exact. Mais il n’est pas le seul à avoir besoin d’éducation. Et un autre que lui aura peut-être plus de temps pour construire. Par respect envers la pierre, je dois être là pour lui. »

Car le sage n’est pas un baratineur. Il est aussi homme d’action et de serment, et se consacre corps et âme à sa vision du monde à la transmission et à l’éducation. Quels seront les sentiments de Kaaska face à cela ? Sans doute sera-t-elle à la fois admirative de sa force de caractère, et dédaigneuse devant un combat aussi vain. Ce qui est une réaction tout à fait compréhensible et acceptable.

Lors de ses voyages, le sage rencontrera ensuite Katsuo, un vieux, militaire mizuhanais à la retraite, incarné par mon ami Jii. Tous les deux ont le même métier et la même nationalité, ainsi qu’un caractère très proche. Katsuo est une des personnes avec qui le sage discutera le plus. Tous deux ont une certaine expérience de la vie, et tous deux ont le respect du temps, intimement lié à l’acceptation de la complexité, que j’ai citée plutôt. Car le monde est ainsi. La pierre et ainsi. Elle a besoin de temps pour être érodée par la nature, pour être domptée par les hommes. La terre a besoin de temps pour porter ses fruits tout comme la mère pour porter son petit. Avec l’avancée des techniques, le monde accélère de plus en plus. DU moins dans l’esprit des gens. En réalité, il existe des choses aux rythmes immuables, mais ces choses ont tendance à être occultées car trop lentes, ce qui peut parfois provoquer de grands malheurs ou de grande défaites.

Le sage apprendra ainsi de la part de Katsuo que son respect du temps, sa patience, sa capacité à apprendre sont à l’origine de ses plus grands succès militaires. L’expérience et la mémoire sont des vertus qu’on n’acquiert qu’avec le temps, n’en déplaise aux jeunes officiers aux dents longues. Pourtant, cette pièce n’est pas un éloge de la gérontocratie. Car le sage et Katsuo auront malgré leur amitié un point de désaccord. Le militaire est en effet bien trop nostalgique de l’ordre ancien. Pour lui, le respect du temps ne peut se réacquérir que par un retour total en arrière. Chose à la fois simpliste et impossible. Nous retombons alors dans le travers du non-respect de la complexité que j’évoquais tout à l’heure. Malgré le fait que les deux hommes partagent la même vision du monde, leurs recommandations pour l’améliorer sont donc très différentes.

Enfin, le sage rencontrera une dernière personne, la Nalicenne Lunalya, incarnée par Floriana. Je crois qu’il est inutile que je t’en dise plus à son sujet. En revanche, bien qu’il soit un peu tard, je tiens tout de même à t’adresser toutes mes félicitations. Mais revenons à la pièce.

Floriana n’est pas Nalcienne, mais son statut de Gardienne, lui offre une double maîtrise, du feu et des plantes. Cette complexité que je chéris tant était indispensable pour incarner le personnage. Contrairement à Kastsuo et Kaaska, Lunalya n’a pas encore de vision du monde bien tranchée du fait de sa jeunese. Elle reste libre et prête à apprendre, et écoutera attentivement le sage. Elle sera sa disciple en quelque sorte. Et bien plus que cela. Car si le sage est en perpétuel questionnement, en perpétuelle évolution telle la pierre lentement érodée par le temps, il reste une pierre et n’est donc pas représentatif de l’ensemble de l’humanité. D’où la nécessité pour lui de transmettre son savoir et sa philosophie au plus de personnes possibles. Et quoi de mieux qu’un libre enfant de l’air pour remplir cette tâche ? Bien évidemment, le message sera ensuite transmis par Lunalya qui y ajoutera sa propre vision du monde, tout en conservant l’essence de la pensée de son maître. L’objectif de ce dernier sera alors accompli.

A ce sujet d’ailleurs, je voyais bien plus Jii que moi pour ce rôle, mais il a décliné, en arguant qu’il était trop vieux pour s’ouvrir à toutes ces théories. En revanche, il m’a chaudement conseillé de prendre ce rôle moi-même, ce que j’ai fait, puis nous avons ensuite composé le rôle de Katsuo. Pourtant, je reste persuadé au vu de son action qu’il aurait justement fait un sage parfait. Pas lui.

Du coup, je me retrouve avec un disciple joué par une actrice plus âgée, donc plus expérimentée, que moi ! Le monde est étrangement ironique parfois, n’est-ce pas ? Ou devrais-je dire complexe ? Mais bon, j’espère que cela ne perturbera pas la transmission du message de la pièce.

Tu voudras d’ailleurs sans doute savoir comment celle-ci se termine. De manière assez cruelle serait ma réponse, puisque certains officiels Flamenois et Mizuhanien accuseront le sage de prosélytisme et de paganisme et le condamneront à finir lapidé puis enterré vivant dans la pierre qu’il chérit tant. Cruelle ironie, n’est-ce pas ?

Pourtant, ces officiels, dont la présence ne sera pas montrée sur scène mais simplement suggérée par les dialogues, ne reprennent ni Kaaska, ni Katsuo, ni Lunalya. Aucun des quatre personnages principaux n’est fondamentalement mauvais. Chacun, y compris le sage, a ses qualités, mais aussi ses défauts : Kaaska tire de la fougue de sa jeunesse une assurance et une répartie à toute épreuve mais prend rarement le temps d’avoir une réflexion poussée. Katsuo sait s’accorder ce temps, mais son expérience et son attente ne le poussent au final, qu’à la lamentation et à l’inaction. Le sage, justement parce qu’il reconnaît la complexité du monde, accepte que sa pensée soit incomplète et qu’il ait lui aussi besoin d’un autre pour l’enrichir. Malheureusement, il manquera de temps pour le trouver. Lunalya, avec ses origines multiples, sa curiosité et sa manière de se questionner sur le monde, pourrait être cette autre. Mais elle est encore jeune et sa réflexion n’est pas arrivée à maturité. Pas encore du moins.

Cette histoire est donc pleine de contradictions, que ce soit dans les théories qu’elle aborde, ou dans sa forme avec les nationalités des personnages qui ne correspondent pas forcément aux acteurs. Mais le but ultime de la philosophie de la pierre n’est pas d’éliminer ces contradictions, mais de permettre qu’elles persistent pour offrir un maximum de liberté à tous. C’est donc un équilibre très délicat à maintenir, mais je ne pense pas qu’il soit possible de trouver mieux dans notre monde, ni qu’il soit souhaitable d’imposer autre chose.

Malgré tout, il existe un cinquième archétype de personnes qui n’apparaît pas directement dans ma pièce. Parmi ceux qui s’opposent au sage, certains ont la même pensée que Kaaska, d’autres que Katsuo. D’autres encore ne veulent même pas se poser la question par manque de temps, d’envie ou de capacité. Aucun d’entre eux n’est réellement coupable car aucun n’agit en désintérêt total des autres. Tous veulent agir pour le mieux. Tous… Sauf ceux qui croient autant que moi en l’équilibre que je viens de décrire mais qui ne rêvent que de le briser car ils pensent que là est l’ordre des choses, la destinée de l’humanité, et la leur qui doit déboucher sur la domination, par la même occasion. Le chaos qui rencontre et renverse le cosmos qui tente justement de se construire à partir du chaos.

C’est bien de toi que je parle, mon frère. Toi aussi tu crois en cet équilibre, qui t’as été enseigné autant qu’à moi. Avec la mort du sage, tu dois penser que tu as désormais les mains libres. Après tout, le monde ne l’a-t-il pas détruit ? Cependant, j’attire ton attention sur un point : tout ceci n’est qu’une fiction. En réalité, je ne suis pas le sage et ne prétends pas l’être. Je suis Goldfinger le gentleman, et cette figure est ce vers quoi je tends. Et cela impliquera forcément que je doive t’affronter. Car je cherche à construire autant que tu cherches à détruire. Et contrairement au sage, mon destin est loin d’être tracé.

Mon frère, le monde te connaît sous bien des noms, mais moi seul connaît ton vrai nom. Tu es le roi noir de la destruction. Te souviens-tu de la partie d’échecs que nous avions commencée il y a fort longtemps ? J’ai longtemps cru que tu avais triché pour commencer le premier. En réalité, je sais maintenant que j’étais bien le premier à jouer. Car même si je suis ton puiné, j’ai construit depuis mon enfance l’homme que je suis aujourd’hui. Ton art de la destruction, tu ne peux l’exercer que de manière sporadique quand tu trouves quelque chose à détruire, ce qui te confère moins d’expérience que moi. Alors que je commençais à construire, tu as détruit en représailles. Mais désormais, mon tour est venu à nouveau, et mes pièces sont prêtes. Je crois d’ailleurs avoir réussi à prendre ta dame, et ceci est un succès pour moi, et un revers pour toi. Mais je sais aussi que tu es un adversaire redoutable et encore meilleur que moi. Je resterai donc sur mes gardes, mais je finirai par vaincre. Car en tant que gentleman, je m’y emploierai de toutes mes forces.

Reçois toute mon affection en attendant mon prochain courrier.

Ton petit frère.

Goldfinger.
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