[ Clos ] Le Village perdu dans la forêt [Raiyoko/Hako/Mako]

[Mako]

« Là, encore une autre ! Tu vas me la chercher s’il te plaît ? »

La grenouille se retourna pour voir ce que sa dresseuse pointait du doigt, puis il aperçut la fleur rouge dont elle parlait, qui avait poussé à même le tronc d’un arbre. En quelques bonds, Léo atteignit une branche proche et cueillit le végétal, avant de le rapporter à Mako. Cette dernière le plaça dans sa besace puis avança de quelques pas et reprit son observation attentive de la flore.

« Merci Léo »

Malgré tout, elle ne pouvait pas ne pas s’interroger. Une fois son épreuve terminée, sa mère l’avait aussitôt envoyée en mission dans la lointaine forêt Terrosienne, avec pour objectif de ramener quelques fleurs utilisées dans l’élaboration de remèdes dont le village commençait à manquer. Du moins étais-ce ce qu’elle lui avait dit. Mais pour la jeune femme, ce n’était pas logique.

En effet, elle aurait eu plus vite fait d’aller acheter ces mêmes herbes à Fla’Or, qui n’était qu’à deux jours de marche de Loukai alors qu’Agata se trouvait à une bonne semaine… Même d’un point de vue économique, ce choix ne tenait pas : ce qu’elle économisait en n’achetant pas les herbes partait dans la nourriture et la logistique nécessaire à un tel voyage…

Non, la seule explication qui se tenait un tant soit peu, c’était que sa mère adoptive souhaitait qu’elle apprenne de cette mission. Et qu’elle apprenne autre chose que simplement ramasser des herbes en forêt… Ca, elle avait largement eu le temps de l’apprendre dans la forêt enneigée qui jouxtait le village… Peut-être Suzu souhaitait-elle que sa fille découvrit de nouveaux environnements, extérieurs à Mizuhan ? Mais si Mako n’avait pas quitté le pays de l’eau depuis son arrivée à Loukai, elle avait beaucoup voyagé avant d’arriver dans ce village, et Suzu, qui avait lu tous les souvenirs de sa fille avant de lui proposer de rester au village, ne pouvait manquer de l’ignorer.

Toutefois, cette incompréhension ne remettait absolument pas en question la loyauté de Mako envers son village : si une ancienne, et a fortiori sa mère adoptive, lui demandait de faire plusieurs centaines de kilomètres pour ramener trois fleurs, elle y allait sans discuter. Et si elle lui avait demandé d’éliminer un ennemi du village, elle l’aurait fait aussi. A contrecœur peut-être, mais sans hésitation. C’était une des raisons pour laquelle sa mère avait accepté de l’adopter : la jeune kunoïchi savait se montrer impitoyable, et elle ne souhaitait pas décevoir ses parents adoptifs sur ce point.

Depuis son arrivée dans la forêt, elle n’avait croisé qu’un seul homme, visiblement un chasseur armé de son arc qui était accompagné d’un Caninos. Elle n’avait pas cherché à dissimuler sa présence, car après tout elle ne faisait rien de répréhensible, mais malgré cela, l’homme lui avait à peine accordé un regard. Si elle avait été dans la forêt de glace, Mako aurait sans doute gardé ses distances et pisté cet homme pour voir s’il n’était pas un braconnier ou un voleur. Mais ici, elle n’était pas chez elle, et les activités de cet homme ne la concernaient pas tant qu’il ne s’en prenait pas à elle. De plus, elle doutait qu’il fut mal intentionné : malgré la brièveté de leur rencontre, elle avait eu le temps de remarquer de grosses callosités sur les mains du chasseur, typiques des travailleurs des champs. Cet homme n’était donc apparemment pas un traqueur de métier, mais probablement un paysan venu du village voisin de Kabana afin d’améliorer son ordinaire.

Plus le temps avançait et plus Mako devait faire des efforts pour repousser son constat : cela faisait à peine trois heures qu’elle était là et elle avait trouvé assez d’herbes médicinales pour remplir sa sacoche… Certes, sa mère n’avait jamais dit que sa mission de récolte serait longue ou même difficile, mais pour sa première sortie de Mizuhan depuis près de six mois, elle s’était attendue à quelque chose d’un peu plus… motivant ! Mais bon, elle n’avait aucune autorité, aucun pouvoir de décision au village concernant ses tâches à accomplir. C’était le rôle des anciens de lui en assigner et elle, elle exécutait, sans poser de questions… Mais elle ne pouvait s’empêcher de SE poser des questions, tout en faisant consciencieusement son travail.

Et si… Et si sa mission n’avait aucune importance ? Et si sa mère ne l’avait envoyée aussi loin que pour l’éloigner le plus possible de Loukai ? Mais dans ce cas, pourquoi ? Quel péril fuyait-elle ? Non, cela ne tenait pas. Si un danger planait au-dessus d’elle, sa mère lui en aurait parlé… Elle fut tirée de ses réflexions par des croassements de Léo, qui sautait sur place à quelques mètres d’elle.

« Quoi, qu’est-ce que tu as… »

La jeune femme ne termina pas sa phrase. Jusqu’ici, elle avait évolué sur un sol herbu, tout à fait typique de la végétation de cette forêt. Mais là où se trouvait Léo, il n’y avait que de la terre, comme si quelqu’un avait labouré le sol et l’avait retourné. Mais à première vue, il ne s’agissait pas d’une intervention humaine : les sillons, au nombre de trois, se rejoignaient en un point, comme si… Comme si quelque chose pourvu d’une patte gigantesque et pourvue de trois griffes était passé par là. Qu’est-ce que c’est que ça ?

La jeune femme n’avait jamais rien vu de semblable… Certains Pokémon avaient sans doute des empruntes similaires, mais certainement pas aussi grosses ! Même un Drattak adulte n’était à son avis pas assez imposant pour laisser des telles empruntes… Les seuls Pokémon qu’elle connaissait qui étaient assez gros pour laisser ces traces étaient Léviator et Onix… Mais aucun des deux n’avait de griffes…

L’instinct de combat s’éveilla alors en Mako et elle sut ce qu’elle avait à faire : d’un geste, elle demanda à Léo de grimper sur son épaule, puis, sans bruit, elle grimpa à l’arbre le plus proche. Là, accroupie sur une branche feuillue, elle se tut et écouta, tous ses sens en alerte. Peut-être y avait-il une menace par ici… La jeune femme n’était pas particulièrement bien cachée, mais au besoin, elle pouvait se réfugier derrière un gros tas de feuille. Malgré tout, elle préférait rester un peu à découvert pour avoir une meilleure vue des environs.

Elle attendit une bonne minute sans faire le moindre bruit… Rien… Suzu ne pouvait pas être au courant pour ce monstre, elle ne pouvait pas l’avoir envoyée ici pour enquêter là-dessus… Autrement elle lui aurait parlé des traces géantes… N’est-ce pas ? Une autre question se posa alors dans son esprit : devait-elle prévenir le chasseur du danger, au risque de se faire surprendre par la… Créature ?

[Z'êtes pas obligés de poursuivre mon idée de traces de pas, mais si ça vous inspire, libre à vous ! MP si souci]

[Hako]

Après des années de vagabondages sur l’île volante, Hako avait fini par revenir sur le continent érasien. Parler de revenir d’un pays étranger pour retrouver sa terre natale n’avait pas beaucoup de sens ; outre la forêt de son île, Io Maï, dont même le nom officiel sonnait faux à ses oreilles, la jeune femme sauvage était en terre inconnue partout. Néanmoins, elle avait choisi sa destination avec beaucoup de soin, et autant d’hésitation. Son rêve, lorsqu’elle était tombée sans conscience au temple de Viridium, ne l’avait plus lâchée. L’idée avait lentement germé dans son esprit, et maintenant sa curiosité était plus forte que tout. Hako avait donc décidé de se rendre à Kabana, et d’y chercher des informations sur elle et sa famille.

Il avait fallu quelques mois de préparation, pour laisser le temps à Pomone de se remettre de ses blessures, et de s’entraîner pour le long vol de retour. Ça, c’était l’excuse officielle. Il avait aussi fallu beaucoup de temps à la Terrosienne pour rassembler son courage, et être prête à affronter ce que la vie allait mettre sur son chemin. Les souvenirs d’abandon qui lui étaient revenus étaient terriblement douloureux ; Hako avait craint de les revivre en se rendant dans la ville forestière, et en étant rejetée. Et s’il n’y avait plus eu personne pour la rejeter, si personne n’avait été capable de répondre à ses questions… Elle s’était demandé si ça n’était pas pire. Son instinct animal, qui lui dictait de fuir devant la peur de subir la douleur à nouveau, se heurtait à sa raison humaine, qui lui rappelait qu’elle n’était pas seule, qu’elle savait se battre, et que personne n’allait lui faire de mal. Lorsque Pomone avait été en excellente forme, et prêtre à rejoindre le monde d’en-bas, Hako n’avait plus eu d’excuses. La jeune femme avait fait le grand saut, sur le dos de sa monture.

Elle avait atterri à proximité de la frontière entre Terros et Flamen. En tout cas, c’est ce que disait sa vieille carte, car pour elle, il s’agissait simplement d’une forêt, avec une plaine au Nord, et une plaine au Sud. En marchant un peu, elle avait pu faire le tour de son nouveau territoire ; une rivière, une vallée autour d’un lac, les ruines d’un temple, et, finalement, la ville de Kabana. Hako s’en était approchée, timidement au début, puis plus franchement. Elle en avait fait le tour, était passée sous les ponts sans oser y monter, et avait toujours évité les habitants dès qu’elle en voyait s’approcher d’elle. La jeune femme ne se sentait pas encore le courage de chercher sur leur visage les signes qu’ils étaient, peut-être, de la même famille. Elle n’avait pas le courage de leur demander s’ils connaissaient Lukas, Elise, ou Rose.

Les choses se feraient en temps et en heure, cela ne l’inquiétait pas trop. Elle avait trouvé en cette forêt un nouveau foyer. Il y faisait plus chaud qu’à Io Mai, et la végétation étaient encore plus dense. Les plantes n’étaient pas les mêmes, non plus. Mais, après avoir vécu dans la Canopée de Dyrinn, c’était appréciable d’être au sec, et de ne pas avoir besoin de nager pour se déplacer. Par ailleurs, l’environnement était idéal pour apprendre à développer ses nouvelles forces avec l’aide de ses disciples, qui, semblait-il, aimait prendre le rôle de professeurs le temps de quelques leçons, et se montraient aussi impitoyable avec Hako qu’elle l’était avec eux. Mariposa et Serpies, les deux créatures qui l’avaient rejointe sans vraiment lui laisser le choix, à Dyrinn, veillaient à ce qu’elle s’entraîne jusqu’à l’épuisement à la maîtrise des plantes, comme si leur vie en dépendait. Léto, de son côté, transmettait à l’humaine tout ce qu’elle savait de la maîtrise des ombres et des forces ténébreuses. Autant le premier exercice semblait naturel à la Hako, comme si la force des plantes l’avait toujours habitée, et qu’elle n’avait juste jamais su comment utiliser son potentiel ; autant le second demandait plus d’efforts, comme s’il s’agissait de créer quelque chose en elle, d’atteindre un état qu’elle n’avait jamais eu et qu’il fallait construire à la force de ses bras, de son mental, de son endurance, petit à petit. Sa Grahyéna pouvait lui montrer comment fondre sa patte avant dans une zone sombre pour ne faire qu’un avec l’ombre, Hako ne parvenait pas plus à l’imiter qu’à se transformer en sable.

Un jour comme tous les autres, Gaï s’agita sur l’épaule de sa maîtresse. Quoi qu’il ait vu ou senti, il sauta sur le sol et se mit à courir sur ses petites pattes, cherchant à attirer l’attention de Hako. L’humaine lui répondit en grognant. Les grognements, les sifflements et les soupirs étaient devenus leurs modes de communication privilégiés. Laissant Léto, Sepies et Mariposa avec Pomone, elle suivit le Ningale accompagnée par Io. Son Ymphect était parti de son côté, sans doute pour déraciner un arbre ou deux. Il était parfois pris de pulsions destructrices, comme ça, sans raisons apparentes. Hako avait abandonné l’idée de le retenir quand il était dans cet état-là.

Gaï la conduisit devant un carré de terre abimée. Quelque chose avait déchiré le sol avec force. Hako leva un sourcil, sans trop comprendre ce qu’elle avait à voir avec ça, et ce que voulait lui dire son insecte. C’était Gaé qui avait fait ça ? Et quand bien même c’était lui, et alors ? Mais le Lucario, lui, semblait avoir repéré quelque chose d’autre. Il gardait les yeux levé vers les branches au-dessus d’eux. La Terrosienne suivit son regard, mais ne vit rien. Cela ne voulait rien dire. L’Aura de son disciple était souvent plus perçante que sa propre vue. Il y avait probablement quelque chose... ou quelqu'un. Elle attendit quelques secondes… Et cria.

“Eh !”

[Mako]

La fille les cherchait du regard. Son Pokémon lui avait indiqué qu’il y avait quelque chose de caché dans les arbres. Mako en l’occurrence. La jeune femme semblait un peu plus jeune qu’elle, et elle avait de long cheveux noirs lâchés et les yeux verts, nota la jeune kunoïchi. Un tel physique était relativement commun sur Midgard. Mais Mako était certaine de ne l’avoir jamais rencontrée, que ce soit là-bas où sur Erasia.

Il y avait la fille… Et il y avait son Pokémon. La fille savait qu’il y avait quelque chose, mais elle ne savait pas – encore – quoi ni exactement où. En revanche, son Pokémon… Mako connaissait son espèce. Kusaki, un ninja du village avec qui elle s’entraînait à l’occasion possédait un Pokémon lupin identique. Un Lucario. Ces facultés faisaient que ce Pokémon était apprécié par les ninjas, notamment grâce à son pouvoir de détection des auras. Avec ça, aucun ennemi ne pouvait échapper à sa vigilance. Aussi Mako savait qu’elle n’avait pas vraiment de raisons de se cacher. Elle était déjà repérée.

Aussi, elle sortit du couvert épais des feuillages en veillant à ne pas faire de mouvement brusques. De ce qu’elle avait pu voir, la fille n’était pas une braconnière et elle ne semblait pas ici pour chercher querelle. Ce qui n’empêchait pas Mako de se méfier.

La fille avait elle aussi inspecté les traces. Donc a priori, elle n’en était pas à l’origine. Et elle aussi les avait remarquées. Fidèle à elle-même, Mako posa directement la question qui l’intéressait avant même de se présenter :

« Une idée de ce qui a pu faire ça ? »

Outre la taille de ces traces, le détail qui le dérangeait le plus était la direction pointée par les griffes. Elles indiquaient que la bête se dirigeait vers le village. Pourtant… L’homme à la canne à pêche qu’elle avait croisé un peu plus tôt s’éloignait de Kabana. Or, s’il avait croisé une créature géante inhabituelle sur son chemin, il aurait dû manifester sa surprise… Sauf s’il n’en avait pas eu le temps, bien entendu… Mais cela ne tenait pas. S’il l’avait croisée, vu que Mako avait continué dans la même direction, alors le chasseur avait croisé le monstre avant de passer devant la jeune femme… Et puis, elle n’était pas dans la forêt enneigée ici, elle n’avait aucune obligation envers ces gens…

A moins que sa mère ne l’ait envoyé ici spécialement pour ça ? Non, c’était impossible voyons ! Comment aurait-elle su pour la créature ?

Une fois parfaitement visible -et elle veilla à ce que son sabre le fut autant que sa personne, juste au cas où – elle sauta lestement à terre, puis se présenta brièvement :

« Mako, de Loukai »

Elle n’avait pas grand-chose à dire de plus, et de toute manière, elle n’aimait pas particulièrement les longues présentations devant des inconnus, d’autant plus que les Erasiens non-Mizuhaniens qu’elle avait rencontrés, des marchands de passage à Loukai, s’étaient souvent montrés incommodés par son accent.

Jusqu’ici, elle avait parlé Erasien car elle ne parlait pas un traitre mot de Terrosien. Mais alors que les ninjas parlaient, comme la plupart des habitants de Mizuhan, un français teinté d’accent japonais, elle, qui avait appris l’Erasien avant de trouver refuge à Loukai, parlait à l’origine un français mâtiné d’accent espagnol, qui avec le temps s’était transformé en un accent latino-japonais assez surprenant lorsqu’on l’entendait pour la première fois. Pour cette raison Mako préférait de loin parler le mizuhanien ou sa langue natale. Mais comme elle n’était pas sûre que la jeune fille en face d’elle comprenne ces deux langages, elle avait opté pour l’idiome le plus répandu sur ce continent.

Finalement, poussée par une curiosité mêlée à son fort sens du devoir, elle rebroussa chemin sans se préoccuper de l’autre fille autrement que pour vérifier qu’elle n’allait pas l’attaquer dans le dos. Avec son air farouche et son Pokémon qui semblait bien entraîné et qui était capable de la pister partout dans cette forêt, Mako ne lui faisait pas vraiment confiance. Mais la jeune femme n’était pas venue ici pour chercher baston. Elle était soigneuse, et une petite voix dans son esprit lui soufflait que le village aurait malheureusement bientôt besoin de ses services…

Comme pour répondre à ce murmure intérieur, un effrayant rugissement retentit dans la forêt, à proximité du village. Cela déclencha aussitôt un réflexe chez la jeune ninja. Un réflexe de protection. Elle grimpa en un éclair sur un arbre proche et se déplaça de branche en branche en direction de la source du bruit. Cette forêt… Ressemblait bien trop à la forêt blanche de Mizuhan, et elle ne pouvait tout simplement pas faire abstraction de ce qui se passait ici…

Le cri retentit encore deux fois avant qu’elle n’arrive à sa source, et lorsqu’elle découvrit enfin cette dernière, Mako en resta un instant sans voix. Un Nidoking gigantesque – il devait tutoyer les trois mètres – était en train de frapper rageusement un nid de Fermite à grand coup de Telluriforce. Mais bien évidemment, les insectes d’acier ne se laissaient pas faire et mordaient férocement cet intrus qui venait détruire leur chez eux. Mais le plus grave n’était pas le spectacle qui se déroulait sous les yeux de la jeune femme mais plutôt celui qui risquait de se produire. Car de là où elle était, elle voyait distinctement le village de Kabana qui n’était qu’à trois cents mètres devant elle. Lorsque le montre en aurait fini avec lafourmillière, il continuerait sa route et tomberait droit sur le village…

Sur cette observation, Mako décida d’agir, et elle commença par observer attentivement les pattes du Nidoking, ce qui n’était pas très difficile car ce dernier donnait régulièrement des coups de pieds dans l’air pour essayer de se débarrasser des fourmis qui grimpaient dessus. La griffe du milieu était effectivement plus longue que les deux autres, comme sur la trace au sol… Elle avait trouvé son monstre. Et maintenant, que fallait-il faire ? Avertir les villageois ou tenter d’intervenir directement. Elle ne réfléchit que deux secondes à la question avant de continuer son chemin sylvestre vers Kabana. Elle n’était pas de taille face à ce monstre mais si les Fermite leur offraient assez de temps, les villageois pourraient peut-être faire quelque chose contre ce géant… Ou à défaut évacuer pour ne pas subir sa colère dévastatrice…

[Raiyoko]

Ah Ah Ah Ah Ah Ah ! Enfin ! Enfin ce jour est arrivé ! Ce jour que je attend depuis si longtemps ! Je peux enfin partir à l’aventure avec mon petit Evoli ! D’ailleurs je lui ai pas donné de surnom depuis que le vieux m’a donné ce Pokémon… comment vais-je l’appeler ? Je pourrais lui donner le nom de Papa ! Ça serait un bel honneur ! Je sortis l’Évoli de sa Pokéball. En fait il est moche… Peut-être que Papa va prendre ça comme un affront de là où il est… Ah au pire bas les steaks… Ok, il s’appelle Ryono, c’est décidé ! Je savais pas vraiment où j’étais, j’étais parti un peu en mode random de chez moi. Mais en tout cas, c’était beau ! Des arbres resplendissants tout autour de moi, quelques Pokémons de types insectes. Je  m’émerveillais de toute cette nature mais après une trentaine de minutes à m’extasier devant l’œuvre de Mère Nature, je vis quelque chose qui faisait tache dans le décor. Il y avait une gigantesquement immense empreinte de pas. Bah, je pensais que c’était des empreintes de pas. J’étais pas vraiment sûr de moi à ce moment. Mais je pensais pas vraiment aux dangers qu’il pouvait y avoir à ce moment. En fait, j’ai été plutôt insouciant. Plusieurs autres empreintes se suivaient juste après. Donc je les suivi, tout en gardant Evoli à côté de moi. Ah non, pas Evoli, Ryono ! J’avais du mal à m’y habituer. Il y en avait beaucoup d’empreintes, si bien que cette fichu empreinte me resta dans la tête. J’en étais devenu fou ! Chaque endroit où je regardais se trouvait cette trace. Comment ça j’exagère ?  C’est pas vrai !

Future On

« Papa t’éxagère ! »

« Oh tu vas me laisser finir mon histoire ?  On arrive à la partie intéressante ! »

Future Off

Mais à un moment, les traces disparurent ! Nada, finito, niet, iié ! Je vais pas te cacher que j’étais plutôt déçu… Sérieusement, je pensais que j’allais trouver un méga Pokémons trop stylé ! Mais non. Je continuais à marcher, la tête basse, Ryono à mes côtés. De temps en temps, il se permettait d’aller jouer avec des Pokémons sauvages. Je le ramenait vite avec moi. Mais je vis au loin, un super gros Pokémon. De mon point de vue, il devait avoisiner les trois mètres. Je couru rapidement vers le Pokémons qui était agressif et qui faisait toute sorte de gestes sans grande cohérence. C’était un gros Nidoking qui détruisait tout sur son passage. Notamment son acharnement sur un nid de Fermite. Je me approcha des deux femmes.

« Mesdames désolé de vous déranger mais puisque je suis extrêmement faible, je ne pourrais pas intervenir par risque de tuer mon Pokémon, peut-être devriez vous intervenir ?

Ces femmes semblaient assez forte, c’était notamment pour ça que je leur demandais De faire ça. Elles avaient des airs assez assuré. Je ne voulais pas non plus rester inutile, mais je ne voulais pas non plus que Ryono meurt dès son premier combat… donc je restais d’un air stoïque derrière ces deux femmes, qui semblaient avoir de l’expérience dans ce monde.

« Je pourrais aussi vous aider, mais Ryono ne sera pas d’une grande aide… »

[Hako]

Hako cligna ses yeux noirs aux reflets ambrés en voyant une femme apparaître sur une branche, comme si elle n’y avait pas été la seconde d’avant et venait de se matérialiser. Encore une fois, le sixième sens de Io avait fait mouche.

"Une idée de ce qui a pu faire ça ?"

La Terrosienne baissa son regard sur les traces une nouvelle fois. À part le fait que Gaé préférait se propulser à l’horizontale que verticalement, Hako supposait effectivement que c’était le fait de son Ymphect.

“Je crois que c’est mon Pokémon.”

Et après ? Il ne manquerait plus que cette femme soit là pour lui faire une quelconque leçon au sujet de la destruction de l’environnement. Au pire, elle pouvait toujours essayer de se mettre entre Gaé et l’une de ses cibles si elle n’aimait pas voir ce genre de dégâts.
Hako admira la jeune femme descendre de son perchoir avec une habilité qui n’avait rien à envier à celle de la fille des forêts. Elle avait remarqué l’arme qu’elle portait mais n’avait pas spécialement l’impression que cette personne allait l’attaquer. En tout cas, Io n’avait pas réagi outre mesure ; il était généralement le premier à se mettre à l’affût lorsqu’il y avait du danger. L’inconnue se mit devant Hako, qui put la détailler un peu. Elle remarqua l’oeil caché immédiatement, évidemment, et qu’elle était plus grande et plus vieille. Mais à part ça, les deux femmes se ressemblaient un peu. Fines, musclées, et brunes. Et pas spécialement bavardes avec ça ; l’autre se présenta aussi sobrement que l’aurait fait la Déployeuse elle-même.

"Mako, de Loukai"

Même leurs noms se ressemblaient. En revanche, Hako n’avait aucune idée de ce qu’était Loukaï, mais ça n’était pas bien important. Elle répondit à Mako en se présentant à son tour, se demandant un peu si l’autre n’allait pas croire qu’elle se moquait d’elle.

“Hako.”

Peut-être avait-elle cru à une blague, ou peut-être qu’elle ressemblait encore plus à la Terrosienne que ce qu’elle voyait : en tout cas, la borgne repartit sur son propre chemin sans ajouter un mot. La jeune femme en aurait bien fait de même de son côté sans se poser plus de questions, mais Gaï semblait encore plus tourmenté qu’un peu plus tôt. Il gigotait d’un bout à l’autre de la trace sur ses petites pattes. Sa maîtresse renifla, sans comprendre ce qu’il cherchait à lui montrer.

Il y eut alors un rugissement qui fit sauter Hako sur ses pieds, prête à se défendre, tandis que le Ninjask lui grimpa dessus - un peu de la même manière que Mako grimpa au sommet d’un arbre pour se cacher. Voilà au moins un point sur lequel elles ne se ressemblaient pas. Immobile, la Terrosienne attendit de voir si la créature qui avait hurlé représentait une menace pour elle ou non, s’il se rapprochait… Il y eut un autre rugissement qui semblait venir du même endroit qu’avant. Dans le doute, et n’ayant pas spécialement envie que ses camarades se retrouvent seuls face au monstre, ou à une autre menace, Hako siffla trois coups bref, signalant le rassemblement à ses troupes. Léto arriva en portant sur son dos Serpies, et, du ciel, Pomone s’approchait en volant, chevauchée par Mariposa. Evidemment, il en manquait un. La jeune femme n’était pas tellement étonnée. L’idée que Gaé soit d’une façon ou d’une autre derrière tous ces bruits lui était très vite venue à l’esprit. Il allait falloir aller voir, et l’aider s’il s’était mis dans la panade avec un Pokémon du coin.

Suivie par sa bande, Hako s’avança à allure modérée vers le son, prenant garde à rester furtive, et laissant Io et sa perception de l’Aura la guider. Elle remarqua avec une certaine appréhension qu’elle s’approchait beaucoup plus de Kabana qu’elle ne l’aurait souhaité, mais ne s’arrêta pas et ne recula pas pour autant. Elle finit par atteindre le coupable de l’agitation présente, en prenant soin de faire un grand tour pour éviter de lui tomber droit dessus. Un monstre géant frappait le sol avec violence - Hako pouvait sentir les tremblements de là où elle se trouvait, à plusieurs dizaines de mètres - pour récupérer de la nourriture. Pas de quoi casser trois pattes à un Couaneton, donc. En tout cas, Gaé n’était pas en cause, pour une fois.

À moins qu’elle n’ait parlé trop vite. L’Ymphect, attiré par le fracas comme un Ursaring par du miel, s’était avancé vers le Pokémon violet, intrigué par ce qu’il faisait. Les chocs dans le sol redoublèrent d’ardeur lorsqu’il décida qu’il trouvait ça très drôle, et qu’il se mit à charger le sol lui aussi. Sans vraiment y croire, Hako siffla le signal de rassemblement, mais soit la nymphe ne l’entendit pas, soit il choisit, plus probable, de l’ignorer. C’est seulement quand les créatures grises et rampantes sur lesquelles il était en train de taper commencèrent à répliquer, semblant lui faire plus de mal qu’à la bête pourpre, qu’il sembla regretter son emportement. La Terrosienne souffla d’exaspération, consciente qu’elle allait devoir venir en aide à son compagnon. Abruti d’Ymphect.

“Mesdames désolé de vous déranger mais puisque je suis extrêmement faible, je ne pourrais pas intervenir par risque de tuer mon Pokémon, peut-être devriez vous intervenir ?”

Hako se tourna vers la voix et avisa un jeune garçon accompagné d’une petite boule de poils. Qui était-il et de quoi se mêlait-il ? Peut-être s’agissait-il du maître du monstre, auquel cas il faisait une piètre démonstration de ses capacités.

"Je pourrais aussi vous aider, mais Ryono ne sera pas d’une grande aide…"

… ajouta-t-il en désignant son compagnon. Oui, Hako voulait bien le croire. Au mieux, il servirait de diversion quelques secondes avant de se faire manger par les créatures d’acier, écraser par le monstre, ou tacler par Gaé qui se débattait pour se défaire de la horde de bestioles qui lui montaient dessus. C’était mieux qu’il ne s’approche pas, dans de telles conditions. La Dompteuse donna un coup de tête en direction du combat, pour signifier à ses deux plus forts Pokémon, Léto et Io, qu’ils allaient s’avancer pour voir ce qu’ils pouvaient faire. Relativement furtivement, même si c’était un effort qui semblait inutile avec un tel vacarme ambiant, les trois combattants s’approchèrent, tentant de ne pas perdre leur équilibre à chaque secousse du sol. Suffisamment proche, Hako siffla de nouveau, et cette fois Gaé semblait croire qu’il valait mieux obéir s’il ne voulait pas se faire manger tout cru. Il se projeta à vitesse élevée en direction du son, droit sur sa maîtresse, qui ne dut son salut qu’à la réactivité de Io. Le Lucario s’interposa entre l’Ymphect et l’humaine et contra sa charge. La propulsion de la nymphe avait projeté pas mal d’insectes en arrière, mais d’autres s’étaient retrouvés écrasés entre les corps des deux Pokémon. Cela ne chagrina personne, après tout il en restait plein d’autres, mais il valait sans doute mieux ne pas plus attirer l’attention de la fourmilière sur eux.

Hako et sa troupe firent demi-tour et rejoignirent le petit garçon.

[I tried ]

[Mako]

Tandis qu’elle se rapprochait à grande vitesse du village sylvestre, Mako entendit des échos de voix qui provenaient de là où elle avait laissé l’autre fille. Mais malheureusement elle était trop loin pour comprendre ce qui se disait, et surtout, elle n’avait pas le temps de faire demi-tour. Maintenant qu’elle avait choisi d’aider ces gens, elle ne pouvait plus reculer.

La fille avait proposé son Pokémon comme source des empruntes… Non, c’était bel et bien le Nidoking. Les traces étaient trop plates et trop larges pour appartenir à l’Yphecté, même si ce dernier était au moins aussi sauvage que le mastodonte violet, pour le peu qu’elle en avait vu.

Peut-être était-ce cela que sa mère avait voulu lui enseigner en l’envoyant ici : parfois, il fallait soi-même s’imposer des missions à remplir en fonction de ce que l’on jugeait bon. Il fallait faire preuve d’indépendance d’esprit en somme, une vertu qui n’était pas vraiment enseignée à Loukai, où on apprenait à tous les guerriers à se sacrifier pour le village -pour la communauté - si besoin. Mais les ninjas n’étaient pas pour autant de simples chiens serviles. Certains étaient aussi de grand stratège, et Mako comprenait à présent que ces derniers n’avaient pas acquis leur expérience en restant cloitrés à Loukai.

Arrivée au village, où elle pénétra en sautant depuis un arbre par-dessus l’enceinte sommaire qui le protégeait, elle s’aperçut qu’une certaine effervescence régnait déjà. Les gens s’activaient dans tous les sens, notamment ceux habitant les maisons les plus proches de l’entrée, qui quittaient précipitamment leur chez eux. Mais les villageois n’étaient pas pour autant des Poussifeu mouillés : un homme, grand et musclé à la longue crinière, l’avait vu faire, et il l’accueillit plutôt fraîchement en la menaçant de son arme dès qu’elle posa le pied au sol.

« Halte étrangère ! Qui es-tu, et que fais-tu ici ?
-Je suis simplement venue vous prévenir pour le Nidoking. Mais je vos que vous êtes déjà au courant.
-Voyez-vous ça. Une bonne âme de la forêt. M’est plutôt d’avis que t’es une sale pillarde !
-Si j’avais voulu vous piller, j’aurais attendu que vous soyez effectivement en train de l’affronter. Vous savez manifestement vous battre, mais de ce que j’ai vu, votre village ne compte pas tant de guerriers que ça, si ? »

L’homme grogna, pas encore convaincu. Mais il n’attaqua pas

« Vous voulez une preuve de ma bonne volonté ? Très bien. J’ai croisé un vieil homme tout à l’heure dans la forêt, un chasseur, probablement l’un des vôtres. Il avait un Caninos avec Est-il rentré ?
-Le vieux Jonas ! S’exclama l’homme. S’il cherche à revenir au village, il va se faire massacrer !… Vous l’avez vu. Où est-il ?
-Il se dirigeait vers l’est. Je n’en sais pas plus pour le moment, mais je peux le retrouver.
-En tant que défenseur du village, il est de mon devoir de le retrouver…
-Mais vous devez aussi défendre les vôtres. Et croyez-moi, je connais bien votre charge. Parce que j’ai la même. Je vais retrouver cet homme.
-Et pourquoi feriez-vous cela ? L’homme semblait relativement soulagé d’être déchargé de cette tâche, mais sa méfiance n’avait pas disparu.
-Parce que telle est ma mission. » Répondit Mako sans hésiter. Et elle repartit aussi vite qu’elle était venue, faisant un détour pour esquiver en passant par la voie des arbres le champ de bataille où aucun vainqueur ne semblait encore se décider.

Elle n’avait pas menti au guerrier. Entraînée au pistage par les ninjas, elle saurait retrouver le vieil homme. Mais elle était ici en terrain inconnu et ses recherches progresseraient beaucoup moins rapidement que si elle avait été dans la forêt enneigée. Mais de toute façon, les gardes ne pouvaient pas aider le vieil homme actuellement, et si on ne le prévenait pas, il risquait de vouloir rentrer chez lui par là où il était sorti du village. Sauf que la petite clairière qui menait à cette entrée de Cabana était à présent envahie de fourmis féroces et d’un gros monstre.

Mako doutait d’être capable de sauver le vieil homme si jamais il se faisait attaquer par un des parties en présence. Elle était Défenseur, pas Arceus. Et si elle ne le retrouvait pas à temps, le pire risquait de se produire. Heureusement, elle connaissait un moyen d’accélérer ses recherches. Elle se laissa donc guider par un bruit caractéristique pour atteindre sa destination : les violents chocs produits par l’Ymphect colérique. Elle découvrit avec surprise que « Hako » s’était elle aussi rapprochée du village. Et elle n’était plus seule. Une jeune garçon l’accompagnait. C’était donc sa voix qu’elle avait entendue un peu plus tôt. Elle s’aperçut rapidement que le jeune homme avait un Pokémon assez mal en point.

« Ca va ? Lui demanda-t-elle rapidement ? Ton Pokémon ou toi avez besoin de soins ou vous pouvez tenir ? Je suis médecin.«

Inutile de songer à sauver le vieillard si celui-là ou son Evoli devaient y passer avant ! Mais elle n’était pas là que pour ça. Si elle était revenue, c’était avant tout pour demander son aide à la jeune femme. Mais elle comptait pas attendre bien longtemps sa réponse. Sauf si le jeune homme ou son Evoli avaient vraiment besoin d’assistance, elle partirait à la recherche du vieil homme. Sa vie était en jeu.

« Dis-moi, demanda-t-elle à Hako en lui expliquant succinctement la situation, est-ce vous acceptez, ton Lucario et toi, de m’aider à retrouver un vieux chasseur ? C’est un villageois qui est sorti du Kabana il y a un moment mais il n’est pas au courant de la bataille en cours et s’il décide de faire demi-tour maintenant, il risque de mourir en voulant rentrer chez lui. »

Les gardes étaient trop peu nombreux pour défendre le village des deux menaces simultanément, c'était un fait. Et une seule paire de bras ne changerai pas l'issue des combats. En revanche, cette même paire pouvait toujours sauver la vie d'un vieil homme...

Mako ignorait au juste jusqu’où s’étendait la colonie de Fermite, mais si jamais cette dernière entourait une bonne partie du village, alors aucun abord de la cité sylvestre n’était sûr et il était impossible pour une seule personne de tout surveiller en attendant le retour du vieux. Mako n’attendrait qu’un seul mot de la jeune fille, et si le jeune homme ne se manifestait pas d’ici là, elle partirait. Et tant pis si on lui opposait un refus. Il n’y avait pas de temps à perdre.

[Hako]

Hako crut d’abord que la question de la femme ninja, qui était revenue aussi rapidement qu’elle était partie, lui était adressée. Elle répondit un bref “non”, pas tellement par fierté, mais surtout parce qu’elle n’avait rien, Io en avait vu de pire, et Gaé ne devait ses blessures qu’à lui-même, et les subir un peu pourrait sans doute lui faire entrer du plomb dans le crâne. Le garçonnet n’avait pas dû se sentir très concerné par la question de la femme médecin, de toute façon. Comme il avait laissé Hako faire tout le travail (elle ne le lui reprochait pas, ça aurait été parfaitement stupide d’y aller lui-même), ni lui ni son Pokémon n’avait pris de coups.

Mako attendit quelques instants avant de reprendre. Cette fois, il était clair qu’elle s’adressait à la Terrosienne ; elle la regardait dans les yeux. Pourtant, la requête qu’elle lui fit était si inattendue que la jeune femme se demanda si elle ne parlait pas à quelqu’un d’autre.

"Dis-moi, est-ce vous acceptez, ton Lucario et toi, de m’aider à retrouver un vieux chasseur ? C’est un villageois qui est sorti du Kabana il y a un moment mais il n’est pas au courant de la bataille en cours et s’il décide de faire demi-tour maintenant, il risque de mourir en voulant rentrer chez lui."

Hako ne comprenait pas vraiment. À moins d’être un imbécile complet, ce chasseur n’allait probablement pas chercher à entrer par cet endroit s’il voyait (ou entendait, ce qui était plus probable) le combat entre la colonie métallique et le Nidoking. Ce n’était pas comme si c’était la chose la plus furtive qui soit ! Evidemment, comme elle n’avait pas bougé d’ici, contrairement à Mako, et qu’elle n’y connaissait rien à ces créatures métalliques, elle n’avait aucune idée de l’étendue des dégâts.

En plus de ça, qu’est-ce qu’elle en avait à faire, d’un vieux chasseur ? La probabilité qu’il ait des informations ou le moindre lien avec sa famille était extrêmement mince. Et de toute façon, est-ce que ça n’irait pas plus vite de nettoyer la place que de chercher l’inconnu pour… ?? Le faire passer par les arbres s’il souhaitait regagner son village ? Hako ne voyait vraiment pas l’intérêt de cette quête qui ne ferait que la retarder dans la sienne, et Arceus savait qu’elle avait déjà traîné plus que nécessaire. Elle déclina l’offre en secouant la tête et en s’éloignant du groupe, prête à chercher un autre passage pour atteindre Kabana.

“Rmph.”

Io venait de bougonner son désaccord. Contrairement à sa maîtresse, il y avait un peu d’altruisme parfaitement illogique et désintéressé en lui. Il semblait vouloir trouver et sauver ce vieil homme. Hako n’aimait pas vraiment qu’il remette en cause ses décisions comme ça, mais elle savait que son disciple avait un bon instinct, et sans doute de bonnes raisons derrière ses actions. Elle haussa les épaules en acquiesçant, signifiant par là quelque chose comme “fais comme tu veux, tu sauras où me trouver quand tu auras fini”. Léto et Gaé passèrent leurs regards de leur maîtresse au Lucario, qu’ils considéraient un peu comme leur alpha, mais finirent par rejoindre l’humaine tandis qu’elle s’éloignait vers le village, à la recherche d’un autre passage. Elle ne s’intéressait pas vraiment au sort du jeune garçon et de son Pokémon, qui regardaient toujours l’affrontement entre le gros monstre et les petits insectes.

Io resta sur place et la regarda partir, puis s’inclina devant Mako. Il était près à la suivre pour retrouver le vieil homme, et à l’aider avec ses pouvoirs de l’aura. Contrairement à sa dresseuse, il avait le sentiment qu’ils ne pourraient pas avancer sans aider cette femme à réaliser sa mission.

[Mako]

Mako s’éloigna sans même attendre la réponse de l’autre fille. De toute manière, elle se doutait que cette dernière n’était pas du genre à affirmer à voix haute qu’elle acceptait solennellement d’accéder à sa requête. Si elle voulait l’aider, elle la suivrait, sinon, non. C’était aussi simple que ça. Et apparemment, son Pokémon était bien plus enclin à aider la ninja que sa dresseuse. Soit. Mako connaissait assez bien les Lucario qui, grâce à leur pouvoir d’aura, faisaient partie des Pokémon favoris de certains ninjas à Loukai. Elle remercia le loup d’un signe de tête. Son aide lui serait précieuse. La jeune femme se reconcentra sur son objectif.

D’après ses souvenirs, elle avait rencontré le vieil homme un peu plus à l’ouest par rapport à sa position actuelle… Et bien plus en profondeur dans la forêt, évidemment.

Toutefois, rien n’indiquait qu’il n’avait pas bougé. Elle allait devoir le pister pour le retrouver. La première chose à faire était de délimiter une zone de recherche dans laquelle le vieil homme avait de grandes chances de se trouver. Depuis combien de temps l’avait-elle quitté ? Une trentaine de minutes… Et vu la vitesse à laquelle il marchait… Il ne devait pas avoir parcouru plus de deux kilomètres, trois grand maximum. Cela restreignait quand même pas mal le champ des recherches. D’autant plus qu’elle avait un point de départ.

Le jeune homme et son Evoli semblaient à peu près d’attaque. Vu la situation, s’ils avaient besoin d’aide, Mako reviendrait s’occuper d’eux après. Mais le vieillard était prioritaire.

La fameuse plante qu’elle avait demandé à Léo de cueillir un peu plus tôt, juste avant qu’elle ne croise la route du monsieur, ne se trouvait que dans une certaine partie de la forêt. En se servant de ce repère visuel, elle retrouva rapidement le lieu où elle avait croisé l’homme et sauta au sol. Bien évidemment, il s’était déplacé depuis. Et bien évidemment, de nombreuses traces, humaines et Pokémon, de diverses tailles et de différentes formes jonchaient le sol, rendant encore moins facile le repérage de celles du vieillard et de son Pokémon.

« C’est là que je l’ai perdu de vue, expliqua-t-elle au Pokémon dont on disait qu’il comprenait le langage des humains. Si tu as une piste, je te suis. » Elle lui communiqua également brièvement ses estimations sur la zone de recherche à couvrir.

A partir d’ici, mieux valait laisser faire les spécialistes. Sans être une néophyte de la traque, Mako n’était pas une experte et en terrain inconnu, ses compétences étaient très réduites. Contrairement aux Lucario ou à certains ninja maître du sang, elle ne disposait d’aucun don mystique pur traquer ses proies. Oh, elle n’accusait pas le loup de tricher, loin de là. Au contraire, dans des situations potentiellement dangereuses comme celles-ci, l’aide d’un spécialiste était très précieuse pour ne pas dire inespérée.

En revanche, Mako ignorait une chose. Les Lucario étaient-ils… Télépathes grâce à leur maîtrise de l’aura ? Si oui, elle aurait bien aimé lui expliquer la situation plus en détail en lui communiquant ses souvenirs et sa discussion avec le garde… Peut-être aurait-il pu ainsi convaincre à son tour sa dresseuse de les aider ?

La kunoïchi n’était pas du genre à réclamer de l’aide en permanence, mais elle n’était pas stupide et savait que le péril qui menaçait le village était grand. Suffisamment grand pour que l’on fasse appel à toute l’aide disponible. Et rien qu’à sa manière de se déplacer, MAko savait que Hako aurait pu être d’une aide précieuse… Finalement, elle demanda au loup :

« Tu arrives à voir mes pensées ? »

S’il lui répondit oui, elle aviserait. Sinon, tant pis. Afin d’en être sûre, elle se retourna mais ne vit aucun signe de la Terrosienne. En soi, cela ne prouvait rien : en adepte du camouflage, elle pouvait très bien se dissimuler ou encore les suivre à distance par pure curiosité, grâce à un autre de ses Pokémon comme son Grahyena par exemple.

Laissant le loup humanoïde travailler en paix, elle siffla Léo qui était resté dans les arbres à scruter les alentours. C’était inutile désormais ; Si le vieil homme avait pu être repéré de là-haut, la grenouille l’aurait fait et se serait manifestée depuis un bon moment. Et Mako préférait qu’elle et son Pokémon soient à proximité du Pokémon lupin au cas où il déciderait subitement de les entraîner sur une piste.

La jeune femme avait du mal à s’expliquer elle-même pourquoi elle s’inquiétait autant pour un homme qu’elle avait à peine aperçu et qu’elle ne connaissait même pas. Déformation professionnelle ? Peut-être. Et peut-être qu’au fond, une partie d’elle-même espérait que ce sauvetage désintéressait lui permettrait de se faire pardonner d’une partie de ses crimes et des manquements dont elle s’était rendue coupable en tant que soldat… En tant que capitaine, pour être exacte, de la garde d’Abyan. Mais malgré ces pensées troubles qui s’entrechoquaient dans son esprit, son entraînement ninja lui permit de ne rien laisser paraître tandis que le Lucario continuait son analyse.

[Comme il a l’air de vouloir m’aider, je laisse la main à ton Lucario^^]

[Hako]

Hako tressaillit à peine lorsqu’elle entendit les bruits d’herbe signalant que son Pokémon et l’inconnue étaient partis. C’était la deuxième fois que le Lucario ignorait ses directives… Bon, la première fois, il avait eu des circonstances atténuantes (et la situation était largement plus catastrophique). L’humaine se demanda s’il n’était pas en train de faire sa crise d’indépendance, un peu comme elle-même l’avait fait environ dix ans plus tôt. Cette étape de sa vie lui avait beaucoup appris, mais elle avait aussi failli mourir plus d’une fois. Elle voulait bien ne pas être sur le dos de son disciple en permanence, mais il valait mieux pour lui qu’il sache ce qu’il faisait en la jouant en solo.

De son côté, il fallait qu’elle trouve un entrée vers le village. Elle avait avancé un peu jusqu’à presque atteindre la marée d’insectes. Ils n’étaient pas difficiles à repérer, entre le bruit qu’il faisait et les reflets de leurs corps métalliques. Maintenant qu’elle était là, elle ne pouvait que faire le tour jusqu’à trouver une zone de passage, tout en restant à distance de la marabounta. Elle marcha, suivie par Gaé et Léto, longtemps. Elle ignorait la taille de Kabana, donc il n’était pas facile de savoir si elle s’en éloignait en tournant ainsi autour de la horde de fourmis. Ses deux partenaires commençaient à montrer des signes de lassitude, mais ni l’un ni l’autre des Pokémon ne voulaient se risquer à approcher, après avoir vu ce dont étaient capables les bestioles.

Néanmoins, après de longues minutes, qui finirent par devenir des dizaines de minutes, Hako dut se rendre à l’évidence lorsqu’elle entendit les cris du monstre violet devant elle. Elle avait fait le tour, et il n’y avait pas d’autres entrées. Io en avait probablement eu conscience quand il avait décidé de partir accompagner la ninja dans sa mission. Bien bien bien. Hako grogna légèrement d’agacement. Elle n’avait plus qu’à retrouver le loup bleu, sauf qu’elle, contrairement à son Pokémon, ne possédait pas le pouvoir de l’Aura pour se simplifier la tâche.

“Léto”, aboya-t-elle, non pas parce qu’elle était fâchée, mais parce qu’elle communiquait de manière plus animale que la plupart des humains.

Comprenant sans mal l’ordre, la hyène se mit à renifler le sol, tentant de trouver la piste de leur compagnon.

De son côté, Io suivait consciencieusement l’humaine ninja, prêt à lui prêter ses services. Le groupe s’immobilisa quelques instants, et Mako fournit quelques informations supplémentaires au Lucario.

"C’est là que je l’ai perdu de vue. Si tu as une piste, je te suis."

Le loup acquiesça pour signifier qu’il avait bien compris la demande, et se mit en position. Fermant les yeux, il avança la patte arrière droite, et tendit la paume du même côté devant lui. Ses appendices derrière la tête se dressèrent et se mirent à vibrer, alors qu’il analysait les auras tout autour de lui. Sans connaître celle de sa cible, il n’était pas simple de faire un tri parmi les différentes nuances de bleu qu’il distinguait. Une à une, les traces des créatures qui étaient passées ici se dessinèrent dans son esprit, de manière à ce qu’il puisse les traquer mentalement. Il y en avait beaucoup… cela risquait de prendre du temps. Il entreprit de suivre la première, avançant derrière une piste bleue claire et découvrant autant de détails que s’il était, réellement, en train de se déplacer dans la forêt, en version accélérée. L’aura était celle d’un Pokémon, cependant, une petite créature ressemblant à un oignon. Le loup revint à son point de départ et en sélectionna une nouvelle.

" Tu arrives à voir mes pensées ?"

Io ouvrit un oeil pour observer Mako, et secoua légèrement la tête. Oh, non. La maîtrise de l’Aura n’avait rien à voir avec de la lecture de pensée, même si l’une et l’autre étaient souvent confondues. Le Lucario était capable d’anticiper et d’analyser des mouvements et de distinguer la nature des êtres vivants autour de lui… Mais connaître leurs pensées, il en était bien incapable, à part avec sa dresseuse, plus ou moins, avec laquelle il avait une relation quelque peu fusionnelle. Ne pouvant pas apporter plus d’information à sa compagne, il referma l’oeil pour reprendre sa tâche. Une trace, puis une autre…

Il finit par tomber sur la trace d’une des fourmis qu’il avait vues tout à l’heure… Celle-ci semblait bien loin de son nid et bien agitée. Io décida de s’y intéresser de plus près, et augmenta la portée de sa détection d’Aura… Quatre silhouettes étaient en train de se débattre, et l’une était celle d’un vieil homme. Io se mit à grogner et à montrer les dents pour attirer l’attention de Mako. Il s’agissait probablement de leur cible, et il était aux prises avec trois insectes. Peut-être portait-il des phéromones qui avaient attiré quelques individus de la marabounta. En tout cas, s’ils voulaient le récupérer en un seul morceau, il allait falloir s’y mettre, et vite !

Gardant les yeux fermés pour ne pas perdre la piste de l’homme, Io se mit en route à travers les arbres pour le rejoindre aussi vite que possible.

[Mako]

Mako se fiait complètement à son guide pour se diriger dans la forêt. Il semblait savoir ce qu’il faisait. Leurs pieds battaient depuis dix bonnes minutes le sol de la forêt quand soudain, elle perçut un changement dans son attitude : alors que jusqu’ici il avait conservé son visage impassible, il montra brièvement les crocs alors qu’ils arrivaient à une sorte de croisement.

Mako remarqua ce qui avait attiré l’attention du loup quelques instants plus tard. Enfin elle le vit. Le vieil homme se trouvait à une centaine de mètres devant eux, et il semblait en très mauvaise posture : deux Fermite lui mordaient chacun un pied tandis qu’une troisième avait grimpé sur sa jambe et menaçait de planter ses mandibules de fer dans son genou. Plaqué contre le tronc d’un arbre, le vieillard ne pouvait même pas espérer fuir, il ne pouvait qu’hurler et battre futilement des bras pour essayer de faire fuir ses agresseurs.

Par réflexe, Mako porta la main à son arme, mais la retira presque aussitôt. Ayant grandi sur Midgard, elle connaissait bien les Fermite, et surtout, elle avait appris à s’en méfier. Chaque coup de mandibule de ces Pokémon frappait avec la force d’une lame et leur peau métallique était plus résistante que la plupart des armures. Contre eux, les armes perçantes ou tranchantes classiques n’étaient d’aucun secours. Le seul moyen d’espérer s’en débarrasser avec une arme stanard était d’utiliser une arme contondante, par exemple une masse et de leur asséner des coups suffisamment puissants pour essayer de briser les organes qui se trouvaient à l’intérieur de cette armure naturelle.

Heureusement, ces fourmis n’étaient pas habituellement belliqueuses, mais gare à qui pénétrait par erreur sur leur territoire. Lorsqu’elle était soldat d’Abyan, elle avait entendu parler de l’histoire de marchands itinérants qui avaient par erreur emprunté leur territoire. La patrouille dépêchée sur place deux heures plus tard par le seul survivant du groupe ne put que constater que les corps avaient été réduits en bouillie sanglante par la horde d’insectes furieux.

Le sabre de Mako était de bonne qualité, mais il restait un simple katana, et serait donc inefficace, sauf à vouloir le briser, mais la jeune femme tenait trop à son arme – le symbole de sa nouvelle vie de ninja - pour la sacrifier. A la place, elle préféra se rapprocher du vieillard en sprintant à toute vitesse, puis, exécutant des gestes complexes de ces deux mains, elle invoqua sa maîtrise des plantes pour faire pousser brutalement un buisson épineux qui se trouvait à côté de la scène de bataille.

Le volume dudit buisson tripla, emprisonnant rapidement les fourmis. Le vieil homme aurait probablement subi le même sort si Mako ne l’avait pas tiré à elle avec ses liens d’eau.

« Vous pouvez marcher ? » Demanda-t-elle au vieil homme.
Ce dernier gémit tout en se tenant la jambe qui avait été mordue au mollet. Merde ! Il ne manquait plus que ça. Heureusement, le vieillard était du genre petit et gringalet. Elle allait pouvoir le transporter s’il s’accrochait à ses épaules. A moins que…

« Nous devons fuir. Et il nous faut une couverture pour repousser les fourmis » déclara-t-elle au loup. Et elle chargea le vieillard sur ses épaules et repartit dans la direction opposée, tandis que les bruits de mastication se faisaient de plus en plus frénétiques. Visiblement, les fourmis étaient en colère et elles auraient bientôt fini de se dégager de leur prison naturelle…

Ceci dit, Mako ne s’inquiétait pas trop pour ça. Même avec le vieux qui s’accrochait à ses épaules, elle était assez rapide pour distancer les fourmis, surtout avec l’aide du Lucario.

« Qui… Qui êtes-vous ? Demanda alors une voix faible dans son dos.
-Une amie.
-Et Koppa ?
-Qui ça ?
-Mon Caninos ?
-… »

Mako s’abstint de répondre malgré l’insistance du vieux. Elle n’avait vu aucun cadavre de chien, mais cela ne voulait pas dire que ce dernier avait survécu. Mieux valait ne pas donner de faux espoirs à Jonas. Lorsqu’elle jugea qu’ils avaient mis une distance de sécurité suffisante entre les insectes et leur groupe, Mako ralentit puis s’arrêta, fit délicatement descendre le vieillard au sol, puis lui demanda d’enlever ses chaussures et chaussettes, qu’elle puisse inspecter ses plaies. Bien, elles n’étaient pas très profondes, les fourmis des pieds s’étaient surtout acharnées sur les chaussures. Quelques bandages et ce serait bon. En revanche, la fourmi du mollet avait eu le temps de faire une entaille plus profonde dans la chair, semblable à un coup d’épée. Elle passa plus de temps à désinfecter cette dernière plaie que les deux autres avant de la bander. Pour finir, elle sortit de son sac une flasque d’alcool qu’elle fit boire au vieillard. Ce dernier était hébété et ne cessait de répéter le nom de son chien. Il accepta le breuvage sans broncher, mais sembla avoir retrouvé ses esprits suite à l’ingestion d’alcool. Il finit par se redresser et s’asseoir contre un arbre. Mako s’accroupit auprès de lui et lui demanda s’il allait mieux.

« Vous, jeune fille… Vous devez m’aider, déclara-t-il en essuyant les dernières gouttes de liquide marrons qui coulaient de ses lèvres.
-Pour votre chien ?
-… Si possible. Mais surtout à calmer ces créatures. J’ai bien peur d’avoir provoqué… Tout ça… »

Mako crut que le vieil homme était encore affaibli par le choc. Que des fourmis veuillent punir un imprudent qui s’était aventuré chez elle, soit. Mais de là à encercler tout un village. Et puis il y avait ce Nidoking…

« Merci pour votre aide au fait. Je m’appelle Jonas, et je suis Dompteur, Meneur et Déployeur pour être précis. Dans ma jeunesse, j’ai été garde du village de Kabana, et j’ai affronté nombre de dangers, dont pas mal de guerre. Tout ceci m’a rendu… Méfiant. »

Il marqua une pause mais Mako choisit de ne pas rompre le silence.

« Et puis, il y a quelques années, peu après l’attaque de Mewtwo, j’ai remarqué ces Pokémon qui étaient apparus en petit nombre dans la forêt. Des… Fermite, si j’en crois les habitants de Tenkei. Comme j’étais à la retraite, j’ai eu l’idée… D’utiliser mon temps libre pour dresser ces Pokémon pour les faire défendre le village. Avec l’attaque du dieu fou, cela me paraissait indispensable, vous comprenez ? Surtout qu’à cette époque, les pillards n’hésitaient pas à profiter du chaos ambiant pour attaquer les petits villages comme le nôtre… »

Mako nota qu’il cherchait autant à la convaincre qu’à se persuader lui-même du bien-fondé de son action. Il poursuivit :

« Je les ai bien observés et j’ai noté leur fonctionnement hiérarchisé, semblable à celui des Apitrini, avec une reine à leur sommet. J’ai donc capturé une femelle que j’ai dressée à protéger le village des intrus. Rapidement, elle a eu une grande descendance. Au début, tout se passait bien, mais cette première reine vient de mourir, et sa remplaçante n’a aucun lien avec moi, si bien qu’elle considère tous les humains qui vivent par ici comme des intrus, moi y compris… »

Mako commençait à comprendre le rôle et le pourquoi de la présence du Nidoking. Le vieil homme avait probablement utilisé ses talents de Déployeur pour augmenter sa force et l’envoyer combattre les fourmis… Mais un seul Pokémon, aussi puissant soit-il pour arrêter toute une colonie ? Voilà qui était très intrépide de sa part…

« Les Fermite sont connus pour avoir peur des Pokémon feu. Pourquoi ne pas avoir fait appel à un d’entre eux ?
-Je suis au courant, répondit le vieil homme. Dans la nature, la population de Fermite est régulée par son prédateur naturel, l’Aflamanoir, qui empêche ces monstres d’acier de se répandre. Mais il n’y en a pas ici. En fait, il n’y a aucun Pokémon de feu dans cette forêt. Et Koppa ne fait clairement pas le poids, il est trop jeune… Et de toute façon, une telle stratégie représentait un gros danger pour la forêt… »

Mako s’abstint de préciser qu’elle savait tout ce qu’il y avait à savoir au sujet des Aflamnoir. Ce n’était pas important. Elle attendit simplement que Jonas arrive enfin au cœur du sujet :

« Comme je ne pouvais pas les combattre directement, j’ai pensé à utiliser un puissant Pokémon sol pour faire s’effondrer leurs galeries souterraines et les forcer à partir pour se trouver un territoire moins fréquenté… Mais même renforcer grâce à mes talents de dompteur, ce brave Nidoking n’est pas assez fort… Malheureusement, ce n’est pas mon Pokémon, juste un Pokémon sauvage que j’ai dompté en catastrophe pour contrer la menace. C’est probablement pour cela qu’il manque de puissance, il n’est pas dressé… Tous mes Pokémon sont morts de vieillesse, excepté Koppa, qui est le petit de deux de mes plus fidèles compagnons de jadis… Vous devez les arrêter où ils finiront par tout détruire ! »

Le vieil homme s’arrêta là, les yeux embués. Mako saisissait mieux la teneur du problème à présent, et il était plus grave que prévu car ces fourmis avaient été spécifiquement entraînées à chasser les « intrus », autrement dit les humains. Elle n’hésita pas une seule seconde. Elle allait agir. C’était son devoir… Elle proposa donc au Lucario, qui l’avait suivie :

« Je pense que l’aide de ta dresseuse serait la bienvenue, non ? »

Vu la gravité de la situation, TOUTE l’aide disponible serait la bienvenue…

[Hako]

Io ne connaissait rien de ces petites bêtes qui n’étaient pas originaires de sa terre natale, mais il put sans trop de mal deviner que les créatures étaient faites d’un métal qu’il pouvait détruire à la force de ses points. Tandis que Mako récupérait le vieil homme, le Lucario déploya des Aurasphères pour frapper chacun des insectes, les explusant à plusieurs mètres et, avec un peu de chance, les assommant suffisamment pour qu’ils n’y reviennent pas. Voilà qui leur ferait un souci en moins pour quelques minutes, et qui ferait office de “couverture”, comme demandait la ninja.

Néanmoins, il valait mieux suivre l’exemple de l’humaine et ne pas traîner plus que nécessaire dans les parages. Io suivit la femme, fermant la marche pour pouvoir intervenir si un insecte les avait suivis. Lorsque Mako s’arrêta et commença à s’occuper du survivant, le loup s’installa en position de méditation et reprit sa séance de maîtrise de l’Aura, cette fois pour s’assurer que rien ne s’approchait pour les attaquer. Il ne pouvait rien faire pour le vieil homme, de toute façon, ni pour son Caninos duquel, malheureusement, il ne trouvait aucune trace dans son monde en teintes de bleu.

Bien qu’étant incapable d’en déterminer la cause avec certitude, il ressentait une grande agitation. Vu les circonstances, il ne pouvait pas s’empêcher de craindre que cela ait quelque chose à voir avec la colonie de Fermite, et de s’inquiéter pour Hako, en conséquence. Bien sûr, il savait la Dompteuse parfaitement capable de prendre soin d’elle-même, ainsi que de Gaé et Léto, mais là elle risquait d’être submergée par le nombre d’ennemis.

D’ailleurs, de son côté, Hako progressait à petit pas dans ses recherches. Le flair de Léto était généralement efficace, mais aujourd’hui il semblait flotter dans l’air un parfum qui l’empêchait de pister correctement. À moins que Io ne soit réellement en train de zigzaguer entre les arbres, auquel cas la Grahyèna reproduisait ses mouvements avec exactitude. Mais connaissant son loup bleu, la Terrosienne doutait qu’il se soit amusé à ce genre de choses. La frustration montait dans le groupe, tant chez la hyène qui se sentait incapable d’accomplir sa tâche que chez sa dresseuse qui n’avait pas l’impression d’avancer dans ses recherches. Seul Gaé flottait tranquillement, lâchant de temps en temps un bruit de propulsion pour avancer de quelques mètres, sans paraître agacé d’une quelconque façon. Il profitait de la balade.

Soudain, l’humaine fit signe à ses disciples de s’immobiliser. Un bruit trop familier se faisait entendre à proximité, ce même son de claquement métallique qui entourait tout Kabana. Elle ne connaissait pas suffisamment cette forêt pour savoir si elle avait tourné en rond et était revenue vers le village. .. Néanmoins, le son était beaucoup, beaucoup moins fort, comme s’il n’y avait que quelques individus de la marabounta dans le coin. S’ils étaient peu nombreux, elle ne devrait pas avoir de problèmes pour les chasser… D’un mouvement de doigt, elle indiqua à ses camarade qu’ils se remettaient en route vers le bruit afin de l’identifier avec précision. De là où ils étaient, ils ne voyaient que deux fourmis… Et de la fumée. Le tout à quinze ou vingt mètres à peine. Les insectes se tortillaient autour de ce qui ressemblait à des restes de feu. En y regardant mieux, Hako constata qu’elles brûlaient.

Il se passait clairement quelque chose d’anormal. La jeune femme s’avança plus rapidement et ne put qu’assister à l’agonie des insectes, en train de fondre à côté d’un autre Pokémon roux qui saignait à plusieurs endroits du corps. Il ne semblait pas effrayé par l’humaine, en tout cas ; il la regarda même avec un des yeux suppliants avant de se laisser glisser au sol, la respiration saccadée. Connaissant leur dresseuse, Léto et Gaé commencèrent à repartir en voyant la scène, sachant qu’elle n’était pas du genre à sauver la veuve et l’orphelin. Hako, pourtant, observa l’animal. Il portait un collier, et c’est ce qui la décida à intervenir. La fille de la forêt n'interferait pas avec les actions de la Nature, et donc laisser les Pokémon sauvages se battre, survivre ou mourir selon ses lois. Mais cet animal était très clairement apprivoisé, et les règles du jeu n’étaient alors pas les mêmes. En agissant suffisamment vite, elle pouvait essayer de le sauver.

Agissant au plus vite, l’humaine retira donc sa chemise pour presser le linge sur les blessures et arrêter l’hémorragie autant que possible. Ayant subi pas mal de choses ces dernières années où elle s’était retrouvée livrée à elle-même, la jeune femme avait acquis des réflexes pour ce genre de situations. Après, c’était la première fois qu’elle appliquait son expérience à un chiot de feu. La jeune femme tamponnait son vêtement sur la fourure de la créature, vérifiant l’état des saignements. La bestiole avait eu de la chance, elle avait réagi suffisamment vite en enflammant ses ennemis, puisqu’elle n’avait pas pris de coups trop graves… Juste en assez grand nombre.

L’hémorragie se calma assez rapidement, et Hako put s’occuper de nettoyer les blessures. Elle appliqua des cataplasmes de plantes et d’argile sur la peau du Pokémon, demandant à Léto de maintenir le blessé au sol car celui-ci n’avait pas l’air d’apprécier le traitement du tout !

Du côté de Io et Mako, le vieil homme avait fini de raconter son histoire. Le Lucario n’avait écouté tout cela que d’une oreille distraite, et sursauta légèrement quand la ninja s’adressa directement à lui.

"Je pense que l’aide de ta dresseuse serait la bienvenue, non ?"

Probablement, songea le loup. De toute façon, lui-même estimait qu’il était temps qu’ils se réunissent. Le maître de l’Aura se mit donc à analyser celle-ci exclusivement pour retrouver sa maîtresse. L’exercice était plus simple, puisqu’il la connaissait par coeur.

Urf. Elle était un peu loin… Elle n’était pas partie dans la bonne direction pour le rejoindre. Mais au moins, ils n’auraient pas à traverser la horde d’insectes pour se rejoindre. Fallait-il qu’il parte devant pour la conduire ici, ou qu’ils y aillent, Mako, le vieil homme et lui, et la retrouvent à mi-chemin ?

De toute façon, lui devait y aller, et il ne pouvait pas établir de plan avec la ninja, faute de communication. Si elle décidait de le suivre, ou si elle retournait directement vers Kabana, il serait capable de la localiser. Le Lucario s’en alla donc rejoindre sa dompteuse sans ajouter un mot.

[Mako]

Lorsque le Lucario fit mine qu’il voulait partir, Mako pointa simplement la direction du village du doigt, sachant que le Pokémon la comprendrait. Pour le moment, mieux valait ramener le vieil homme à l’abri. Si toutefois elle arrivait à passer à travers le champ de bataille. Oh, il y avait forcément un moyen de contourner l’endroit où le Nidoking affrontait les insectes, mais comme l’avait révélé Jonas, les fourmis avaient élargi leurs galeries tout autour du village. La zone autour du village était onc devenue un danger mortel. Et comme elle portait quelqu’un, elle aurait bien du mal à sauter de branche en branche comme elle en avait l’habitude…

S’avisant que le vieil homme grognait dans son dos, toujours assis au sol, elle lui demanda :
« Vous avez dompté certaines de ces fourmis… Vous ne connaîtriez pas leur point faible ?
-Elles… Elles n’en ont pas, mis à part le feu ou le sol, comme je vous l’ai déjà dit. C’est bien pour cela que je les ai dressées en tant que gardiennes…
-Pour le moment, je ne cherche pas à les vaincre, mais juste à détourner leur attention… En tant que Pokémon souterrains, elles doivent avoir une certaine affinité avec la terre ?
-Ce ne sont pas des Pokémon sol… Mais vous avez raison, elles ont bien certaines facultés qui leur permettent de s’adapter à leur milieu de vie. Par exemple, leurs antennes leurs permettent de tâter la topographie du terrain et d’en ressentir les vibrations…
-Donc, reprit Mako, qui venait d’avoir une idée, une faible secousse terrestre pourrait brouiller leur vision souterraine quelques secondes et les empêcher de les « entendre » marcher au-dessus de leurs têtes ?
-Oui… Mais je ne suis pas maître de la terre, je vous l’ai dit…
-Pas besoin d’être maître de la terre pour faire trembler le sol. »

Mako n’était pas certaine à cent pour cent que son plan marcherait pour la bonne et simple raison qu’il reposait surtout sur l’environnement des abords du village. Mais elle avait rencontré des arbres comme ceux dont elle avait besoin lors de son premier passage, un peu plus tôt. Elle attendit donc encore quelques minutes, le temps pour Jonas de récupérer, puis elle reprit :

« Bon, la pause est finie, nous repartons.
-D’accord… »

Mako le prit sur ses épaules et lui dit :

« Je vais avoir besoin de votre aide. Nous sommes à l’opposé de la zone où se bat actuellement le Nidoking. Mais à votre avis, où sommes-nous par rapport à la colonie de Fermite ? Sur quelle distance autour du village s’étend-elle dans cette partie-là de la forêt ?
-Une cinquantaine de mètres, je dirais. Et nous sommes… A une cinquantaine de mètres de cette zone. »

Cinquante mètre… Soit environ autant que la partie par laquelle elle était passée un peu plus tôt… C’était assez long, mais réalisable… En se donnant à fond. Elle se dirigea donc à vitesse réduite vers le village. Grâce à l’aide du Lucario, les trois fourmis les avaient laissés tranquilles, elle n’avait donc pas à se presser. Mieux valait économiser ses forces.

« Et votre Lucario, remarqua alors Jonas tandis que Mako avançait, il est où ? Son aide pourrait nous être utile pour passer les fourmis. Ce n’est pas avec votre petite grenouille bleue que nous allons les effrayer… »

Léo croassa de mécontentement et sa dresseuse la rassura d’un signe de tête. Il était peut-être petit mais il avait maintes fois démontré son « utilité ». Et il allait encore le faire maintenant. Et lui n’avait jamais mis en danger tout un village suite à des actes irréfléchis. Mais Mako préféra garder ses remarques pour elle. Elle n’avait pas le temps de se disputer avec le vieux dompteur. Elle devait rester focalisée sur ce qu’elle s’apprêtait à faire, comme tout ninja. Et puis, ce n’était pas comme si elle n’avait pas l’habitude d’encaisser les commentaires plus ou moins désobligeants des vieux grincheux.

Ce fut finalement Jonas qui rompit à nouveau le silence :

« Attention, nous arrivons tout près de la zone des Fermite ! »

Mako hocha simplement la tête pour montrer qu’elle avait compris, puis elle s’arrêta et scruta les alentours et plus particulièrement la végétation.

Ici, elle commençait à se raréfier, et un certain nombre de troncs morts de plus ou moins grande taille jonchaient le sol. Cela n’avait rien d’étonnant : à force d’accroître la superficie de leur fourmilière, les Fermite avaient rongé énormément de racines pour creuser leurs tunnels, ce qui expliquait pourquoi les arbres étaient tombés au premier coup de vent. Mais un autre détail intéressait la jeune femme : parmi les arbres encore debout, la plupart était infesté par une espèce de lierre très dense. Enfin elle trouva le végétal adapté à ses plans : déjà mort mais encore dressé, pas trop gros, et parasité par les lianes.

Jonas avait remarqué son manège et tout à coup, une lueur de compréhension passa dans ses yeux lorsqu’il lança : «Vous comptez abattre un de ces arbres, pas vrai ? C’est pas bête, l’onde de choc sur le sol et ses écho masqueront les vibrations de nos pas sur le sol pendant quelques secondes… Mais je sais pas si ça suffira… Et puis, vous comptez l’abattre comment ? Sauf votre respect, vous avez pas l’air taillée pour l’arracher à mains nues… A moins que vous n’ayez une hache ? »

La jeune kunoïchi ne répondit pas. Avec la maîtrise des plantes, nul besoin de hache ! Se concentrant, elle fit croître démesurément la taille du végétal. Non pas celle de l’arbre, puisqu’il était mort, mais celle du lierre, et elle le fit de manière à ce que les lianes ne pèsent que sur un seul côté de l’arbre afin de le faire pencher en avant. Bien évidemment, elle ne pouvait pas concurrencer le poids de l’arbre uniquement avec du lierre, mais en y ajoutant son propre poids et un peu d’élan…

Le tronc commençait déjà à ployer dangereusement sur le poids croissant du lierre. Lorsqu’elle eut accru ce dernier jusqu’à la limite de ses capacités, elle déposa Jonas qui heureusement pu rester debout, puis escalada l’arbre jusqu’à une longue branche et attrapa dans chaque main une des lianes qu’elle avait créées. Elle recula avec les plantes en main puis couru jusqu’à la limite de la branche et sauta au sol en jetant tout son poids en avant. Elle fut récompensée par un craquement sourd mais ne prit pas le temps de fêter sa victoire. S’écartant rapidement sur le côté grâce à ses réflexes de ninja, elle ordonna au dompteur de monter sur son dos.

Puis elle courut avec le Viel homme accroché à ses épaules, entrant à toute vitesse sur le territoire des insectes. Sous ses pieds, elle sentait parfois de très légers tremblements, signes que les fourmis s’affairaient en dessous, et en nombre. Hersement, elle avait l’impression qu’elles s’éloignaient d’elle pour s’approcher de l’arbre qui venait de tomber. A bout de souffle, elle passa les portes du village avec Jonas sur le dos. Comme prévu, grâce au message que venait de lui apporter Léo en passant par les arbres, le garde avec qui elle avait discuté lors de son premier passage leur avait ouvert les portes… Avant de les faire fermer dès son passage. Tandis qu’il s’occupait de Jonas, Mako, enfin libérée de son fardeau, elle demanda à un autre guerrier du village si on n’avait pas vu arriver un Lucario et sa dresseuse. Pour repousser l’invasion des fourmis, il allait leur falloir un plan de bataille un peu plus conséquent que simplement abattre un arbre…

[Si tu veux corser le choses, on peut toujours dire qu'une fois le Nidoking vaincu, les fourmis en colère vont attaquer le village^^]

[Hako]

Suivant l’aura de sa dresseuse, Io avança en bondissant sur plusieurs mètres, plus rapide seul qu’accompagné par la ninja et sa grenouille (même s’il devait reconnaître qu’elle surpassait de loin ses comparses humain en terme de vitesse). Il ne lui fallu que quelques minutes pour rejoindre Hako, Léto et Gaé, autour d’un petit chien qui venait d’être soigné par l’humaine. Io ressentit du soulagement en supposant qu’il s’agissait de l’ami du vieillard.

“Pas trop tôt”, l’accueillit l’humaine. Elle avait probablement été consciente dès le sébut que la situation ne pourrait que tourner dans ce sens, avec le maître de l’Aura qui reviendrait vers eux une fois ses petites affaires terminées. “Alors ?”

Il n’était pas utile de lui parler de la tribu de fourmis qui entourait complètement le village, puisqu’il y avait fort à parier qu’il l’avait su depuis largement avant eux. Et évidemment, l’humaine n’attendait pas vraiment un rapport détaillé de la situation, puisqu’Io ne pouvait ni parler ni écrire. Hako voulait juste savoir s’il avait avancé dans sa quête de sauver le vieil homme que cherchait Mako - d’ailleurs, elle n’était plus avec lui ? Et s’il avait un plan pour la suite. Parce qu’après tout, la Terrosienne était toujours censée rejoindre Kabana, et ladite Kabana était manifestement entourée de Pokémon sauvages dangereux. Même si elle pouvait toujours contourner le problème (en passant par les arbres, par exemple), laisser la situation telle quelle faisait un peu désordre.

Le Lucario semblait avoir un plan, en tout cas. Il indiqua au groupe de le suivre et repartit en direction du village. Hako faisait confiance à son disciple, mais les deux autres levèrent les yeux au ciel et montrèrent des signes d’agacement. Ils venaient justement de là, ça avait été bien la peine de faire toute cette route pour rien ! Enfin, évidemment, il aurait été peine perdue de penser arrêter la jeune femme. Ils suivirent donc, en silence mais en soufflant bien fort pour marquer le coup. L’humaine porta le petit chien blessé, songeant qu’il serait plus en sécurité si elle le laissait au village - où vivait peut-être ses maîtres - que si elle l’abandonnait maintenant.

Alors qu’ils arrivaient à la marabounta, un bruit fort résonna dans la forêt. Hako s’immobilisa, ainsi que ses Pokémon, pour tenter d’en déterminer la source et, surtout, s’il signifiait l’arrivée d’un danger imminent. Le groupe nota que les insectes, eux aussi, semblaient perturbés par le choc, mais pas suffisamment pour que la traversée se fasse sans danger de ce côté-là. Sans se laisser distraire, Io bondit dans un arbre, de branche en branche, et indiqua à sa dompteuse de le suivre. Elle le regarda faire, puis baissa les yeux sur Léto et Gaé. La hyène préparait déjà sa traversée par les ombres, peu friande d’escalade, mais l’Ymphect n’avait pas beaucoup d’autres choix que celui d’être rappelé dans sa sphère de capture. Elle confia aussi le chien de feu à Léto, pour qu’elle le transporte en lieu sûr par le sol. Après quoi, la Terrosienne suivit l’exemple de son loup et grimpa aux arbres pour passer par un chemin sylvestre.

De là-haut, il était bien moins dangereux de rejoindre le village, qui était lui-même en hauteur. Hako rejoint une des passerelles du village et fut rapidement accueillie par des hommes armés.

“Décidément, c’est le jour ! Encore une étrangère qui débarque par au-dessus de nos barricades ?”

Io s’était mis devant la jeune femme, sur la défensive, mais quelqu’un interrompit le garde agressif.

“Attends, l’autre a demandé si on avait vu une femme avec un Lucario, je pense qu’elles sont ensemble.”

“Ah. Sans doute. Eh, vous êtes avec la kunoichi ? Elle est en bas.”

Et les deux hommes partirent, ayant d’autres Persian à fouetter avec cette histoire de fourmis tueuses. La Terrosienne supposa que la kunoichi faisait référence à Mako, et elle repéra un chemin vers la terre ferme pour la retrouver. Elle était effectivement “en bas” comme l’avait dit le garde, et elle était accompagnée d’un vieil homme blessé. Le fameux ? Non loin apparurent Léto et son passager. En le voyant, les yeux de l’homme s’éclairèrent.

“Koppa… Koppa ! Vivant ! Par Célébi !”

“Mako”, lança la Terrosienne, relativement insensible à ces émouvantes retrouvailles, pour attirer l’attention de son aînée. “Apparemment les fourmis entourent entièrement la ville.”

Enfin, elle était probablement déjà au courant. Est-ce qu’elle avait une idée pour s’en débarrasser, ou des infos supplémentaires à leur sujet ? Avant qu’elle ne puisse poser la question, un son de trompe retentit, alarmant. Des cris l’accompagnèrent rapidement.

“Le Nidoking est tombé, elles nous attaquent !!”

Ca laissait largement moins de temps pour mettre une stratégie en place.

[Eh bien écoute, maintenant qu'on est finalement ensemble et prêtes à casser des gueule, ça me paraît être un excellent plan ]

[Mako]

Mako était encore en pleine discussion avec la garde du village lorsque la terrosienne la rejoignit. Bien, une alliée de plus. Et aux cris de joie qu’elle entendait, le Caninos du vieil homme avait été retrouvé. Il n’avait pas exactement été sympathique avec elle mais il semblait tenir sincèrement à son Pokémon et Mako ne savait que trop ce que provoquait la perte d’un compagnon.

Mais elle n’avait pas le luxe de s’appesantir là-dessus : Hako l’informait déjà que les fourmis encerclaient le village. En écho à cette mauvaise nouvelle, l’un des gardes cria que le Nidoking venait d’être vaincu. Au temps pour le plan de bataille. Il fallait agir.

La jeune femme connaissait bien les techniques de défense de Loukai, comme tous les guerriers qui habitaient le village. Même si ce village n’était pas peuplé de ninjas, peut-être disposait-il de mesures similaires ? Après un simple regard pour Hako lui signalant qu’elle avait compris son message, elle remonta sur les remparts pour discuter avec le premier garde qu’elle avait rencontré, et qui s’avéra être un des chefs de la garde locale. Comme elle avait sauvé un des doyens du village, ce dernier semblait bien plus enclin à lui parler.

« Vous avez de l’huile bouillante ? Lui demanda-t-elle.
-Tout à fait madame. Rassurez-vous, avec tout ce qu’on va leur balancer, ces saloperies de fourmis vont avoir une sacrée surprise ! On n’en est pas à notre première invasion… Même si d’habitude on affronte plus des humains que des Pokémon…
-Vous avez un maître du feu parmi vous pour enflammer la mixture ?
-Ouip. Lawson, un vétéran. Enfin, il n’est pas exactement maître du feu mais Gardien de terre et de feu. Mais pour embraser cette huile, ce sera amplement suffisant. »

Mako ne répondit pas tout de suite. SI la vigie et Hako avaient vu les fourmis encercler le village et avancer, c’était parce que certaines d’entre elles étaient à l’air libre. Si elles faisaient trop mine de s’approcher des rempart, l’huile enflammée leur règlerait effectivement leur compte. Mais Mako aussi avaient vu les fourmis. Elles étaient bien trop nombreuses pour être vaincues en une seule frappe, aussi dévastatrice soit-elle. Mais il y avait pire…

« Avez-vous pensé que les survivantes pourraient très bien se cacher dans le sol pour venir nous attaquer directement par-dessous ? »

Elle avait dit « nous » sans même s’en rendre compte. Le garde réfléchit une seconde puis répondit :

« Vous… Vous avez raison. Vous avez une idée ? Des maîtres de la terre peut-être…
-J’ignore exactement jusqu’à quel point ces bestioles sont résistantes mais c’est effectivement une bonne idée… Au moins cela les ralentira.
-Je vais aller regrouper nos maîtres de la terre au centre du village, sur la grande place. De là ils pourront percevoir toutes les avancées des fourmis. Ensuite seulement nous verseront l’huile.
-D’accord… Vous avez des guerriers qui les combattent à l’extérieur ?
-Oui, pour les empêcher de s’attaquer aux remparts et les ralentir le temps que nous préparions l’huile. »

Malgré son assurance, Mako était loin d’être une experte en stratégie. Elle ne connaissait que les bases, que tout ninja de Loukai se devait de maîtriser. Et cet homme en savait autant, sinon plus qu’elle. Il manquait simplement d’informations sur les fourmis, ce qui l’avait empêché d’anticiper une attaque souterraine. Mais pour le reste, il se débrouillerait mieux sans elle. Et elle pouvait se rendre utile ailleurs.

« Je peux rassembler vos maîtres de la terre pendant que vous supervisez les opérations d’ici, si vous voulez…
-Je n’osais pas vous le demander. Merci pour votre aide. »

Le chef ordonna ensuite à deux de ses hommes, des élémentaux, de suivre Mako et de l’aider à rassembler les autres

La jeune femme s’éloigna sans un mot. Repérer les maîtres de la terre fut assez facile. Il lui suffisait de remonter jusqu’à la zone d’origine des rochers qu’elle voyait parfois voler et à demander aux maîtres de la terre de la suivre. Heureusement, la rumeur comme quoi elle avait secouru Jonas s’était vite répandu et la présence de deux géokynésiste à ses côtés l‘aidèrent grandement dans cette tâche.

Une fois tous rassemblés sur la grande place, Mako leur expliqua rapidement la situation actuelle, ce qui risquait de se produire et le rôle qu’ils avaient à jouer. Puis elle laissa ses deux compagnons, qui semblaient diriger le petit groupe d’élémentaux, se charger des détails techniques.

Maintenant qu’ils étaient en place, elle allait pouvoir retourner voir le chef de la garde pour lui indiquer qu’il pouvait évacuer ses soldats et envoyer l’huile. Mais d’abord, elle devait retourner voir Hako. Elle avait une proposition à lui faire et devait lui expliquer la situation.

Heureusement, elle n’était pas passée inaperçue et le chef eut tôt fait de lui donner sa position. Lorsqu’elle arriva en face de la Terrosienne, la jeune kunoïchi entra directement dans le vif du sujet :

« Les soldats qui défendent les remparts depuis le sol vont évacuer et on va verser de l’huile bouillante pour ralentir les fourmis. Mais ces dernières risquent de vouloir tenter une attaque souterraine. Des maîtres de la terre vont les retarder mais d’après ce que m’a dit Jonas, ils ne suffiront pas.

Le chef de la garde a donc prévu de refaire sortir une partie de ses soldats pour affronter aussi bien les fourmis à l’intérieur qu’à l’extérieur du village. Toi et moi sommes bien plus rapides et agiles que cette milice locale, donc je pense qu’on devrait se repartir la tâche et choisis chacun un champ de bataille où on pourra combattre mais aussi faire circuler les informations.

Si tu comptes les aider, bien entendu. »

Quel que soit son choix, Mako ne la jugerait pas. Hako et son Pokémon avaient déjà fait beaucoup pour un village de parfaits étrangers et la jeune ninja elle-même n’arrivait pas à trouver de raisons valable du point de vue d’un ninja qui expliquaient pourquoi elle s’attardait ici. Elle repartit ensuite vers le chef pour lui annoncer qu’elle avait accompli sa mission. L’huile allait être jetée.

[Hako]

Lorsque Mako s’éloigna pour retourner discuter d’une stratégie avec les personnes sur les remparts, Hako en profita pour se tourner vers Io. Léto les rejoignit, après avoir fait descendre le Caninos de son dos. Par des gestes et des regards, elle demanda à son Lucario s’il comptait vraiment que leur groupe se mêle de cette situation apparemment épineuse. Certes, maintenant qu’ils étaient arrivés à Kabana, autant aider à gérer le problème, mais tout de même, cela ne réjouissait absolument pas la jeune femme. Elle avait eu d’autres choses à penser jusqu’alors, mais désormais, elle réalisait pleinement qu’elle était, réellement, dans la ville. Et elle se sentait extrêmement mal à l’aise, un peu comme ce qu’elle avait ressenti à Dyrinn. Sauf que cette fois, les sons et les odeurs étaient réels… Hako surveillait ses arrières, comme si elle craignait que son passé la prenne en embuscade derrière un arbre. Oui, elle avait voulu venir, mais si cela faisait des jours qu’elle procrastinait sa visite, ce n’était pas pour rien.

Puisqu’ils étaient tous plus ou moins d’accord - à savoir, Io tenait à aider les Kabanois, Léto s’en fichait pas mal, Hako s’était laissée convaincre en trainant les pieds -, ils se mirent à la recherche d’une stratégie ou d’un moyen d’arrêter les insectes dans leur marche meurtrière.

“Par Célébi ! Par Shaymin !! Par toutes les divinités de la vie et de la forêt !”

Hako tourna vaguement la tête en entendant au milieu des ordres lancés et des cris de panique une voix semblant prier. Elle eut un mouvement de recul en constatant que la femme qui en appelait aux divinités la regardait fixement et semblait avoir vu un fantôme. L’inconnue semblait choquée, triste et au comble du bonheur tout à la fois. Elle s’avança vers la Terrosienne avant que celle-ci n’ait pu prendre la fuite, redoutant ce qui allait se passer.

“Élise… Vous êtes Élise, n’est-ce pas ?”

“Je… non.”

“Non, évidemment”, ajouta la femme avec un visage extrêmement triste. “Vous ne pouvez être elle, et pourtant… Vous êtes son portrait craché… Oh, Élise !”

L’inconnue l’avait attrapée, désormais, et bien que sa poigne fut plutôt faiblarde, Hako eut l’impression qu’elle n’aurait pas la force de s’en détacher. La Kabanoise s’accrochait désespérément à ses manches comme à l’espoir d’un possible miracle, pleurant toutes les larmes de son corps. La Guerrière était, elle, extrêmement mal à l’aise de cette attention non désirée, et d’être incapable de réagir correctement.

“Vous êtes elle, c’est impossible autrement… Vous êtes Élise von Hengelblumen !”

Hako sentit ses jambes faiblir. Son rêve de deux ans plus tôt n’avait jamais vraiment quitté sa mémoire, et il lui revint en tête aussi clairement que si elle l’avait fait la veille, avec des détails précis. Elle savait ce que ce nom signifiait.

“Je ne suis pas Élise”, se contenta-t-elle de répondre en se secouant pour se libérer. Cette simple phrase sembla éclaircir la situation pour l’inconnue.

“Vous êtes Rose”, déclara-t-elle.

“Laissez-moi”, conclut Hako en parvenant à se détacher. “S’il vous plaît”, crut-elle bon d’ajouter.

La femme, trop hébétée, ne fit rien pour la retenir. La Terrosienne s’échappa sans demander son reste, trop heureuse de se dérober aux regards et à son passé. C’était exactement le genre de choses qu’elle avait voulu éviter et qui l’avait retenue de venir plus tôt. Merde. Merde ! Ca datait de vingt ans ! Pourquoi était-elle revenue, bon sang ?! Pourquoi Io et Léto, qui avaient regardé la scène avec incompréhension, n’avaient pas réagi ?! Elle trouva un coin du village où personne n’avait entendu l’échange, et elle essaya de se calmer.

Mako vint la rejoindre, et la jeune femme tenta de faire bonne figure pour écouter ce qu’elle avait à lui annoncer. Elle lui présenta le plan : de l’huile bouillante et des maîtres de la Terre pour empêcher une attaque souterraine. D’accord… Mais Hako n’approuvait pas vraiment ce plan. La ninja allait repartir, mais Hako l’attrapa par le bras.

“Attends. L’huile me semble être une très mauvaise idée. On ne pourra pas la contrôler et il risque d’y avoir d’autres victimes...”

Elle pensait là majoritairement à la végétation. C’était étonnant que les Kabanois prennent aussi peu ce fait en compte, sachant qu’ils vivaient eux-même dans des arbres ! Mais ce n’était pas tout.

“Nous sommes dans une forêt, dans un village fait de bois. L’huile et le feu risquent de faire des dégâts à la ville.”

Hako ne parvenait pas à croire que les autres soient trop aveuglés par la peur pour ne pas voir les nombreux inconvénients, voire dangers, de leur stratégie. En plus, comment voulaient-ils affronter les fourmis à l’extérieur si la zone de combat était en feu (ou couverte d’un liquide brûlant, ce qui n’était pas mieux) ? Enfin, balancer quelque chose sur les ennemis impliquaient qu’ils soient déjà bien avancés, au niveau des remparts. Hako n’avait bien sûr aucune éducation militaire ou expérience concernant la défense d’une ville assiégée, mais est-ce que ça n’était pas simplement du bon sens ? Il y avait pourtant d’autres possibilités.

“Cette meute a sûrement un chef. Si on le dompte, toute la horde devrait suivre, en théorie.”

La Déployeuse s’estimait en tout cas pleinement capable de soumettre une de ses bestioles s’il le fallait. Et elle n’était probablement pas la seule dans ce village, tout de même. Elle préférait dans tous les cas appliquer son idée, quitte à y aller seule, pour éviter des dommages qu’elle jugeait inutiles. Elle ne s’attendait pas à ce que les autorités, ou même Mako, la suivent dans son délire et ne comptait pas perdre de son temps en les forçant (ou en essayant de les convaincre), mais si elle pouvait au moins avoir le minimum d’informations nécessaires, ça ne pouvait pas faire de mal.

“Je ne connais rien à ces Pokémon mais je m’y connais en domptage. J’ai besoin de savoir comment reconnaître le leader.”

Au pire des cas, Io serait sans doute capable de le localiser sans indice ; ceci dit, si les stratèges de Kabana restaient sur leur idée de départ, la dompteuse aurait vraiment peu de temps pour trouver sa cible et s'occuper d'elle, avant de finir ébouillantée. Très honnêtement, elle préférait éviter. Rien que d'imaginer la chose était effrayant.

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