[ Clos ] L'eau suit son cours, la vie aussi [Solo]

[Kiel Wind]

[Contrainte 8 : retourner dans son passé]

Kiel ressortit du château familial après avoir passé une bonne heure à essuyer les regards dégoûtés de certains membres éloignés de sa famille. En effet, pour la première fois de sa vie, il avait imposé la présence de sa Pokémon aux siens, à l’intérieur des murs de leur château à Alfen. Mais aujourd’hui, il n’avait pas agi par pur égoïsme, ni par désir de défier une quelconque autorité. Son père l’avait invité officiellement, comme il le faisait pour tous les jeunes élémentalistes externes à la famille qu’il prenait sous son aile avant de les envoyer passer leurs épreuves de guerrier élémental.

N’étant pas présent en tant que Wind, mais en tant qu’élève, Kiel avait gardé Orali sur son épaule tout au long de la cérémonie, non sans un large sourire de satisfaction. Contraints à ne rien faire, par respect pour les coutumes extérieures aux leurs, ses nombreux cousins et cousines s’étaient contentés de chahuter dans son dos pour se moquer de lui, le traitant tour à tour de faible et de renégat. Selon leur vision des choses, il leur était inférieur… et si son père n’avait pas été présent, Kiel leur aurait probablement prouvé le contraire.

Mais fort heureusement, il ne s’était rien passé de désagréable, si ce n’est quelques remarques désobligeantes, et Kiel pouvait à présent reprendre la route en direction de son épreuve, sa convocation en main. Pleinement satisfait, il caressa délicatement la tête de la sirène sur son épaule, dont la queue pendait dans son dos. Ils avaient bien changé tous les deux… lui avait muri, atteignant presque la majorité, tandis que sa Pokémon avait évolué. Par contre, les deux amis semblaient souffrir d’un même problème : leur taille. Le jeune homme paraissait aisément deux ans de moins que l’âge qu’il avait réellement. Quant à sa petite protégée, son évolution précoce semblait avoir altéré sa croissance, et elle faisait toujours la taille d’une jeune Evoli. Ce n’était pas pour déplaire à Kiel : au moins, elle tenait dans ses bras et sur ses épaules. Il espérait simplement que cela n’aurait aucune autre incidence sur son avenir.

Ce jour-là… il avait eu tellement peur… il s’en rappelait comme si c’était hier…

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Comme tous les jours durant ces longues années de solitude, Kiel avait passé la journée à s’entrainer. Le jeune homme gagnait en puissance, se rapprochant chaque jour un peu plus du monstre qu’il était devenu lors de la distorsion de Dialga. Progresser était sa seule préoccupation : il souhaitait empêcher qu’une tragédie similaire à celle qu’il avait déjà vécue ne se reproduise. Il avait tant perdu durant cette guerre, à cause de sa faiblesse… Mizuki ? Démolosse ? Etaient-ils seulement en vie ? Cela faisait si longtemps qu’il n’arrivait plus à y croire. Alors il reportait ses sentiments sur la seule qu’il lui restait… Orali. Une petite Evoli pleine de vie, dont la gaieté n’avait d’égal que la douceur de son pelage.

Kiel s’était réfugié auprès de la rivière qui traversait Nalcia, non loin d’Alfen pour rester en contact avec son père. Et chaque jour, après s’être entrainé, il allait piquer une tête dans l’eau en compagnie d’Orali pour se rafraîchir les idées.
La minuscule fennec avait appris à nager avec l’aisance d’un nouveau née, comme si ce geste était naturel pour elle. Elle s’amusait même à plonger sous l’eau de temps en temps, pour essayer de toucher le fond de la rivière avant de remonter. Mais malheureusement, cette rivière était bien trop profonde pour elle, et elle était encore incapable de retenir son souffle assez longtemps. Pourtant, tout comme Kiel progressait en utilisant le vent, elle, de son côté, semblait s’enfoncer un peu plus dans le liquide translucide chaque jour. Bien qu’inquiet pour sa petite protégée, Kiel la laissait faire, croyant qu’il ne s’agissait que d’un nouveau jeu, et que l’enfant finirait pas se lasser après plusieurs jours. Mais contrairement à ce qu’il s’imaginait, sa Pokémon ne plongeait pas chaque jour exactement au même endroit pour jouer. Non… il y avait quelque chose de beaucoup plus important pour elle qu’un simple jeu dans cette histoire : la curiosité.

Elle était là. Depuis des mois, elle était restée là, immobile, comme si elle l’attendait ! Mais pourquoi était-ce aussi loin ? Pourquoi devait-elle mettre autant d’effort, simplement pour assouvir sa curiosité ? Un énorme caillou brillant gisait au fond de l’eau, et elle souhaitait absolument l’attraper, ou même simplement le toucher ! Peut-être aurait-elle dû demander à Kiel de l’aider ? Mais non, ça n’aurait pas été pareil ! C’était son jouet… son caillou ! Et elle le ramènerait à Kiel sitôt qu’elle aurait réussi à l’attraper, fière de sa première pêche au trésor !
Et en effet, après de nombreuses tentatives, la petite fennec réussit à atteindre son but et toucha du bout de ses pattes cette mystérieuse pierre brillante. Pour Kiel, qui ne faisait jusque-là que se prélasser dans l’eau, ce fut comme si la guerre reprenait. Une lumière intense s’échappa de la rivière, à l’endroit exact où Orali venait de plonger. Pris de panique, l’humain plongea à son tour pour venir en aide à sa petite Pokémon… mais en vain. Il fit plusieurs tentatives, balayant même l’étendue d’eau du regard pour essayer de repérer la jeune Orali, mais elle s’était comme volatilisée !  

Et le pire restait encore à venir. Complètement paniqué, et ne voyant plus son amie dans l’eau, il s’imagina que la fennec était simplement sortie de l’eau sans qu’il ne la voit. Il l’appela donc aussi fort que possible, utilisant même le vent pour porter sa voix au loin… mais rien. Il ne la voyait toujours pas, il ne la retrouvait toujours pas ! Et finalement, alors qu’il commençait à devenir fou d’inquiétude… il sentit comme une anguille passer entre ses jambes. Surpris et plein d’espoir, il reporta son regard dans l’eau, cherchant à distinguer cette créature qui venait de le frôler : mais la rivière semblait toujours aussi vide que l’instant d’avant.
Pourtant, il la sentit à nouveau ! Dans son dos, sur son ventre, partout autour de lui ! Il sentit même comme une léchouille atteindre sa joue qui dépassait du liquide, alors qu’aucune autre créature vivante que lui-même ne perturbait l’écoulement de la rivière ! Se croyant devenir fou, l’adolescent se laissa aller au seul sens qui ne pouvait pas lui mentir : D’un geste vif, il leva ses deux bras en direction des cieux. Et immédiatement, un immense geyser se forma autour de lui, tandis que Kiel propulsait hors de de son lit la moindre petite goutte d’eau qui l’entourait par la force du vent.

L’eau retomba mollement autour de lui, la rivière reprenant son cycle infini sans se préoccuper plus longtemps des perturbations du Nalcien. Quant à Kiel… il repéra enfin ce qu’il cherchait : un petit cri de surprise lui fit lever la tête. Et au milieu de cette masse liquide qui lui retombait dessus, il aperçut une petite créature bleue qui chutait également dans sa direction. Agissant plus par instinct qu’autre chose, l’humain forma un nuage d’air pour ralentir la chute de cette pauvre créature et l’amena jusque dans ses bras.

Une petite queue de sirène bleue, une belle collerette blanche, et d’étranges oreilles en formes de nageoires… malgré ses maigres connaissances en Pokémon, Kiel identifia immédiatement cette créature comme étant une Aquali, l’une des nombreuses évolutions potentielle de sa petite Orali. Mais de là à faire le rapprochement entre les deux, il lui restait un pas à franchir !
Ce n’est qu’en entendant la petite créature rire aux éclats qu’il comprit. Et exactement comme l’aurait fait sa petite Orali dans la même situation, l’Aquali se redressa sur ses petites pattes-arrière pour venir léchouiller le visage de son dresseur.

Alors c’était ça ?... souhaitant vérifier sa théorie, Kiel rabaissa légèrement ses bras, jusqu’à ce que la petite sirène se retrouve en partie immergée. Et sans plus tarder, l’Aquali s’évapora dans le liquide. Elle réapparut un peu plus loin, ayant enfin trouvé le moyen de contrôler cet étrange camouflage qui avait tant inquiété son maître.
En voyant sa Pokémon réapparaitre, Kiel se jeta sur elle pour l’attraper, et la harceler de chatouilles pour se venger de cette frayeur qu’elle venait de lui faire ! Bien qu’étonné de cette évolution imprévue, Kiel ne semblait pas déboussolé. Sa petite Orali était heureuse, c’était vraiment tout ce qui comptait. Et puis, elle semblait apprécier l’eau, cet élément serait donc parfait pour elle !

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C’est ainsi qu’Orali passa d’une minuscule Evoli pleine de vie à une minuscule Aquali encore plus vivace. Car si son physique la rendait méconnaissable, son caractère était resté parfaitement identique, pour le plus grand plaisir de Kiel. Elle était sa petite Orali, sa seule véritable amie pour ces longues années d’entrainements… et aujourd’hui encore, alors même qu’il se rendait à son épreuve de guerrier, il l’emmenait avec lui pour lui permettre de garder espoir en toute circonstance.