[ Clos ] La Primevère [Solo/Contrainte]

[Miku Hatsune]

« Insolite »

Lorsque je pénétrai dans cet endroit maudit
Auréolé d'une atmosphère des plus sinistres,
Jamais je n'aurais pu avoir à l'esprit
Que j'allais devoir redevenir herboriste !

Car au premier abord, le Marais n'était pas
Semblable au Jardin des Concordes de Nalcia ;
Sombre, humide, et peuplé de créatures honnies,
Il n'était qu'un habitat aux couleurs ternies.

Un voile de fange et d'ébène entourait la flore
Qui poussait dans la boue avec la prétention
D'échapper à la bile acide qui dévore
Jusqu'aux plus développées des ambitions...  

Dans cet environnement, j'étais sans aucun doute
La seule qui paraissait avoir perdu sa route !
Çà et là, sur les arbres, dans la boue et dans l'eau,
Les créatures du lieu évoluaient sans accroc.

Lorsque j'entendis un tout petit cri plaintif
Tout près du promontoire où je m'étais juchée,
Je vis un Pokémon, éploré et chétif,
Dont la tête toute feuillue était morte et fanée.

À mi-chemin entre le Spectre et la Plante,
Bien loin d'inspirer la peur ou même l'épouvante,
L'arbuste contemplait son reflet avec peine,
Désolé de n'être plus que l'ombre d'une reine.

Doucement, mettant de côté mon appréhension,
Je m'approchai pour tenter de lui demander
Quelle était l'origine de son affliction
Assombrissant son joli visage printanier.

D'un mouvement vif, le Brôcélôme se retourna,
Effrayé par mon ombre, soudain il recula,
Fixant la menace que je devais incarner
Pour un arbrisseau qui se trouvait esseulé.

Avec lenteur, et dans des gestes calculés,
Je me baissai pour me mettre à sa hauteur
Et lui tendre la main, comme pour l'inviter
À me confier sans hésiter toutes ses peurs.

Tremblotant, le corps agité de soubresauts,
Le fantôme lévita juste au-dessus de l'eau,
Avisant finalement le drôle de membre tendu,
Il finit par s'y poser, l'air un peu perdu.

Défilant directement dans mon esprit,
Les images de sa plante préférée dansèrent,
Puis elles s'évaporèrent, tandis que dans un cri
Mon protégé laissait filer les éphémères.

Ainsi, un végétal était le responsable
Du chagrin du petit Pokémon incapable
De faire cesser ses pleurs ! Avec un grand sourire,
Je promis d'apporter l'objet de ses désirs.

Il s'agissait d'une fleur légère et délicate,
Aux pétales d'une jolie forme ronde et courbée
Et dont la couleur, un ravissant écarlate,
Jurait avec la morosité du Marais.

Décidée à réussir, je me mis en quête
Du précieux présent qui mettrait à la fête
L'arbrisseau, dont la jolie mine attristée
Par un joli sourire serait illuminée.

Pataugeant dans la fange, tentant tant bien que mal
D'avancer dans ces eaux souillées et délaissées
Par tous ceux qui en avaient fait un tribunal
Pour leurs concitoyens qu'ils avaient exilés,

Je vis enfin, au terme de longues heures de lutte,
Une lumière dans la nuit, comme celle qui percute
Le Rêveur en proie aux plus noirs de ses cauchemars !
Là, fière et solitaire, comme un fol avatar

Du Marcheur venu tirer du songe l'errant,
La primevère brillait, dans un sublime appel,
Et quand je l'effleurai, tout juste en osant
L'extirper de son lit, son éclat éternel

Explosa, dans une délicieuse apocalypse,
Qui parut créer dans l'espace-temps une ellipse
Qui faillit me happer, me laissant interdite
La fleur à la main, nouvellement conscrite

Dans un clan qui m'était jusqu'alors inconnu.
Avec un sentiment tenace d'appartenance
À un monde nouveau, et encore jamais vu,
Je rebroussai chemin pour brandir mes croyances

Au visage de la créature éplorée
Qui, en fin de compte, s'était fait consoler
Par la très agréable et douce compagnie
D'une drôle de citrouille au ventre rebondi !

Ravalant ma fierté d'avoir réussi
À cueillir la précieuse clé du bonheur
Du fantôme, d'un geste furtif, je lui mis
La primevère rouge tout contre son cœur.

D'un même élan, les Spectres, très reconnaissants,
M'entraînèrent dans un joyeux ballet dansant
Qui me fit, comme présent, en sus du tournis,
L'assurance d'avoir deux nouveaux drôles d'amis !