Scrogneugneu ! [Anthere/Sylver]

[Sylver Belister]

Voilà trois heures que j’étais levé je déambulais dans les rues de la capitale, complètement désœuvré, laissant les plus jeunes de mes Pokémon s’amuser bruyamment devant moi. BlackJack et Yuko avaient remarqué ma morosité mais ni l’une ni l’autre ne pouvaient m’aider à en sortir. J’étais face à un problème insoluble que je ruminais depuis plus de vingt-quatre heures.

Après avoir récupéré mes chères compagnes de voyage, j’avais décidé qu’il était temps pour moi de faire une pause dans mes aventures et de profiter un peu de mon chez moi. Ou plus exactement de ma région natale puisque ma demeure avait été vendue suite à ma disparition et celle de ma sœur.

J’avais donc vécu quelque temps en louant une petite maison au Cosmo Canyon avant d’apprendre qu’un de mes vieux amis, Kern, s’y était lui aussi établi pour passer ses vieux jours. Il m’avait donc cordialement invité à emménager chez lui avec sa femme, Ollia. Leurs enfants étaient partis depuis des années et un peu de compagnie leur ferait le plus grand bien.

Les premières semaines s’étaient très bien passées, jusqu’à ce que je découvre qu’il y avait une autre raison pour que Kern m’invite chez lui que notre belle amitié. Une raison bien plus triste : mon ami était malade et se savait condamné. Lorsqu’il fut certain que j’avais deviné son état, il me demanda de rester quelques temps avec sa femme après son décès pour la soutenir, ce que j’avais accepté sans hésiter.

Il mourut moins de trois mois après m’avoir fait faire cette promesse. Et dire que j’avais voulu rentrer chez moi parce que j’en avais assez du danger et des morts… J’étais donc resté près de six mois seul avec la femme de mon défunt camarade, à l’aider du mieux que je pouvais tout en sachant pertinemment que rien de ce que je pourrais dire ou faire ne soulagerait son chagrin. Seul le temps le pouvait. Peut-être.

Alors que je commençais à trouver la situation pesante, ma sœur nous rejoignit, Ollia et moi, offrant une parenthèse bien venue. A deux pour nous relayer auprès de la veuve, il m’était plus facile de prendre du recul. Malgré tout, je ne cessais de me demander si j’avais bien fait de revenir…

A vrai dire j’étais de plus en plus gêné d’habiter chez Ollia et pas uniquement parce que j’abusais de son hospitalité : bien que nous ayons le même âge, elle portait dignement ses plus de soixante printemps tandis que moi, j’avais l’air d’un jeune trentenaire dans la force de l’âge. Quant à ma sœur, c’était encore pire : alors qu’elle n’avait que trois ans de moins que nous, elle en paraissait à peine plus de vingt !

Je me sentais en décalage complet par rapport à mon hôte, comme si j’étais un imposteur qui se faisait passer pour moi. Normalement, j’aurais dû à minima être aussi décrépit qu’elle voire avoir déjà rejoint son mari. Et pourtant, j’avais encore la vie devant moi, la force et la jeunesse…
Cette impression d’imposture ne me quittait pas et  avait instauré une gêne entre Ollia et moi, tant et si bien que ma sœur avait insisté pour que je parte en voyage jusqu’à Omatsu afin d’acquérir pour elle et moi une petite maison proche de Cosmo que j’avais repérée et qui me plaisait bien.

Ollia semblait plus à l’aise avec ma sœur qu’avec moi, peut-être parce que cette dernière acceptait pleinement d’être redevenue une gamine de vingt ans avec l’expérience d’une femme mûre, là où j’avais bien plus de mal avec cette dissonance.

De plus, les voyages semblaient avoir apporté à ma sœur une capacité d’empathie que je ne lui connaissais pas tandis qu’ils avaient assurément érodé la mienne. J’avais passé tellement de temps à craindre pour la survie de ma sœur et de mes Pokémon que j’avais désormais du mal à faire preuve de la moindre patience, moi qui était pourtant si placide autrefois… A moins que Yuu ne veuille simplement parler à Ollia d’affaires qui ne concernaient pas les hommes. Mais dans ces cas là, elle n’aurait pas eu besoin d’inventer un motif. Je crois surtout qu’elle voulait que je me change les idées avec ce petit voyage.

Mon trajet jusqu’à la capitale à dos de Yuko s’était déroulé sans incident notable mais il ne m’avait pas non plus tiré de ma morosité. J’y avais rendez-vous avec le propriétaire de la maison de Cosmo, qui était une de ses résidences secondaires. Il vivait la plupart du temps à la capitale.

L’usage chez les marchands de Flamen voulait que le plus jeune ou le plus pauvre des partenaires commerciaux fasse le voyage chez l’autre dans ce genre de transactions en gage de déférence. La plupart du temps, les deux allaient de pair, mais pas ici. Comme mon entreprise avait été vendue puis racheté suite à ma disparition, je ne possédais quasiment plus rien mais le vendeur avait presque dix ans de moins que moi. Du moins sur le papier. Physiquement, il en paraissait vingt de plus, évidemment…

La petite fortune qui me permettait malgré tout de lorgner sur cette maison venait de ma sœur qui l’avait amassé grâce à ses spectacles de magie « plus deux ou trois petites affaires » qu’elle avait menée, selon ses dires. A vrai dire, je n’avais pas forcément envie d’en apprendre davantage sur l’origine des fonds.

Malheureusement, l’argent seul était loin d’être suffisant pour acquérir le bien. La faute à l’actuel propriétaire, qui était aussi attaché à la réputation des gens qu’un Kokyas à la queue d’un Flagadoss. Si le nom de Sylver Belister lui avait d’abord fait bonne impression, il avait vite déchanté quand il avait découvert que je n’étais pas l’homme mûr auquel il s’attendait. Comme souvent, je m’étais présenté comme mon propre fils afin de cacher mon âge réel. Malheureusement, comme la naissance de ce fils n’était pas officieuse, le propriétaire en avait déduit que j’étais un enfant inavouable, Sylver Belister junior, bâtard de Sylver Beslister Senior. Et bien sûr, il avait eu peur que sa réputation soit entachée si l’on découvrait qu’il avait vendu son bien à un fils illégitime issu de bonne famille. J’avais eu beau batailler âprement, insistant sur le fait que j’avais déjà l’argent, je n’avais pu obtenir de sa part qu’un délai de réflexion de trois jours, durant lesquels il devait prétendument rencontrer d’autres acheteurs potentiels.

J’étais prêt à parier tout l’argent de l’achat que ce dernier point était faux. Je m’étais renseigné auprès des habitants de Cosmo avant de partir et ces derniers m’avaient affirmé que personne n’était venu visiter cette maison depuis des années. Non seulement la  petite ville n’intéressait pas grand monde en tant que lieu de résidence principale mais en plus la maison était trop excentrée pour convenir à la plupart des gens.

Une nouvelle fois je soupirais d’agacement. J’en voulais à ma sœur de ne pas être venue à ma place ou au moins avec moi. Elle avait toujours été bien meilleure négociante que moi. Elle aurait fait ses recherches sur le propriétaire avant de lui rendre visite. Elle aurait su quoi lui dire et surtout quoi lui cacher à l’avance. Ou elle aurait pu le deviner sur le moment. Bref elle aurait mieux fait le job que moi.

La seule chose qui m’avait permis de garder mon sang-froid pendant ce long et pénible entretien était le contact psychique avec Calicot, mon Abra, qui m’avait soutenu pendant cette pénible épreuve… Ainsi que la proposition de Lalaak de menacer de brûler la maison du vieux grincheux pour l’inciter à coopérer.

« Mais vous comprenez, que vont dire les guildes marchandes si je commence à vendre mes bien au premier venu ? Que vont dire mes clients ? Mon succès repose autant sur la qualité de ce que je vends que sur celle de mes estimés partenaires ! »

J’avais dû faire appel à tout mon self-control pour ne pas partir en claquant la porte. Un type comme lui devait se branler chaque soir sur l’imposant codex des règles commerciales de Flamen. Eh bien qu’il les bouffe, ses pages remplies de foutre !

« Ca va ?
-Ouais... »

Ce court dialogue avec Calicot me permit de sortir quelques temps de mes sombres pensées. Du coin de l’œil, je vis l’enseigne d’un usurier. Est-ce qu’un peu plus d’or pouvait inciter le vieux récalcitrant à acter la vente ? Bah inutile. Il avait bien des défaut, à commencer par son Steelix dans le cul, mais il ne semblait pas vénal. Et de toute façon, je n’avais absolument rien de valable  à donner en gage.

[Anthere Osarian]

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Sortir des Calanques de Braises, au sud du pays à la jonction du Désert de Lamakan et de la Jungle de Thâ, n’avait pas spécialement été une partie de plaisir. La jungle, qui ne connaissait aucun sentier, laissait des racines aussi immenses que nombreuses nervurer la surface du sol, le tout caché par une luxuriante végétation dont il était difficile de s’extirper. Pour éviter des entorses à répétition à Ourasi, ou Shaitaan, elle ne savait plus trop… Elle avait donc décidé de le rentrer dans sa Pokéball, ainsi qu’Horizon. Inutile de se perdre dans la jungle chacun de son côté ! La jeune femme n’avait donc gardé que son Natu, éternellement accroché à son épaule. Grâce à lui, elle avait pu traverser la jungle sans gros problèmes.

Mais se frayer un chemin en esquivant les milliers d’insectes et autres prédateurs n’avait pas été une mince affaire. Aidée de sa Clef Lunaire Éthérée, son élégant bourdon magique et de ses merveilleuses cartes enchantées, elle avait néanmoins réussi à se glisser discrètement hors de la jungle. Pour cela, il lui avait fallu se concentrer particulièrement sur son environnement, les émotions des Pokémon qu’elle était maintenant capable de ressentir, et communiquer les siens, force et tranquillité. Cet exercice, Anthere savait le faire depuis peu de temps et c’était généralement avec Akasie qu’elle y arrivait le mieux, car la nymphe était sans conteste la plus sensible à son environnement, de tous ses Pokémon.

Elle n’avait pu se retenir de penser, cependant, qu’apprendre à maîtriser la Téléportation ne serait pas un mal… Car son passage aux Calanques de Braises était un hasard : c’était après avoir délivré Ourasi de la tribu de Rajat et d’Achala, des natifs du désert, qu’elle avait utilisé la Carte de l’Endroit. Alors certes, le frère et la sœur n’étaient pas près de la retrouver, l’ennui, c’est qu’elle avait dû remonter la moitié du pays pour se rendre à Omatsu ! La Mizuhanaise avait mis des semaines à sortir de cette jungle ! Elle devait être plus prudente… Et plus concentrée. En fait, en ne pensant qu’à s’enfuir le plus loin possible, la Carte avait effectivement exaucé son vœu, mais sans aucun contrôle. Elle aurait dû, à ce moment-là, ne penser qu’à Omatsu, cela lui aurait évité de perdre des semaines et des semaines de voyage.

Par la suite, atteindre Omatsu sur le dos de son gigantesque étalon n’avait été qu’une formalité, mais pas sans conséquence, hélas ! Toute sa petite équipe était fatiguée. Elle avait été évidemment obligée de les laisser se dégourdir les pattes de temps à autre, ne pouvant les garder trop longtemps enfermés dans leurs Balls et ils s’étaient beaucoup fatigués. Elle aussi. AInsi, depuis plusieurs jours, la jeune femme louait une chambre dans une des auberges de la ville et passait son temps entre détente, jeux et reflexion. Elle pensait à son prochain match bien sûr, qu’elle devrait apparemment passer seule. Ce n’était pas ce qui avait été prévu depuis Geffen, mais… De toute façon, Anthere passait son temps à tenter de s’adapter à tout, car décidément, son voyage entreprit bien des années avant ne ressemblait pas du tout à ce qu’elle s’était imaginé !


Mais pour l’heure, Anthere était concentrée sur tout autre chose. A cheval sur son Galopa, elle attendit que la cloche retentisse, signe que c’était à son tour d’entamer le parcours du concours auquel elle participait.

Bien qu’il fût élevé pour courir et engendrer des poulains d’une qualité sans égale, Ourasi était un sauteur né. Anthere l’avait vu très tôt après sa capture, alors qu’il s’était échappé de son élevage. L’immense Galopa dominait tous les autres chevaux, du haut de son mètre quatre-vingt au garrot et trépignait sur place. Encolure ronde, ronflements, il avait hâte de partir et tentait de prendre la main. Mais Anthere n’était plus une débutante depuis très longtemps et maintenant Ourasi sur place avec légèreté. Le danger  venait surtout des autres cavaliers, mais son attitude et sa carrure dissuadait les autres cavaliers de s’approcher de trop près, facilitant la tâche de la cavalière.

La cloche tinta.

Dès qu’Anthere ouvrit ses doigts sur la cordelette nouée autour de l’encolure de son cheval, celui-ci bondit comme une flèche. L’étalon entama son parcours tambour battant. Ourasi effaça avec puissance le premier obstacle, un tronc simplement posé. Anthere dû le reprendre en douceur, afin qu’il ne s’excite pas inutilement; s’il continuait à foncer et à sauter trop haut, il risquait de mal évaluer la difficulté des sauts et perdre du temps. Sans compter que les obstacles fixes de ce derby, il risquait également une chute pour lui-même et sa cavalière. Jouant avec la fine corde qui reposait sur les épaules du cheval, Ourasi se reprit et sa silhouette s’arrondit un peu plus, lui permettant d’enchaîner un directionnel (une espèce de triangle en bois) dont la pointe paraissait ridiculement petite à côté du Galopa et de fait, plus difficile à passer.

Mais Ourasi ne fit pas l’erreur de se dérober à l’extérieur de la pointe. Concentré et moins nerveux, grâce à la maîtrise et au calme d’Anthere. Les obstacles de volée et le gué qui suivirent ne furent qu’une formalité et la jeune femme, dans  la dernière ligne droite, se contenta de retenir un peu son cheval. En effet, dans les derby, il ne suffisait pas de sauter et de courir pleine balle jusqu’à la ligne d’arrivée : il fallait arriver dans le temps imparti, sous peine de prendre des pénalités !

Mais le parcours fut parfait tant sur les obstacles fixes que les autres (de simples barres rondes en bois). Dès qu’il passa la ligne, Ourasi ralentit de lui-même et Anthere le laissa trotter un peu avant de le remettre au pas. Au loin, elle aperçut une fille blonde sur un Galopa, dont elle était certaine de l’avoir déjà croisé en concours. Les heures suivantes se passèrent tout aussi bien. Anthere n’avait certes pas remporté son épreuve, mais ce n’était pas son but. Cela faisait trop longtemps qu’elle n’avait plus concouru et elle se remettait juste dans le bain. Le stress, l’agitation, la reconnaissance des parcours, tout cela lui avait beaucoup manqué ! Et rien de tel qu’un bon parcours pour oublier l’épisode du désert et se remettre dans de bonnes dispositions pour le match !


Parce qu’il restait sa priorité, Anthere avait décidé d’étudier un peu la chose. Elle s’était occupée d’Ourasi, après son effort, s’était débarbouillée, puis installée près d’une fontaine, dans une rue animée. Assise en tailleur sur le rebord de la fontaine, entourée de ses Pokémon, elle lisait un dépliant qui concernait l’Arène locale.

« Akasie, Mesmer et Quidam, vous avez déjà combattu lors du dernier match contre Shira. Mais là, je ne sais pas… Il paraît qu’il est très agressif…»

Anthere avait déjà croisé un Champion de ce style et n’en gardait ni un bon souvenir, ni un bon a priori.

« Son style se base sur l’environnement et le climat, il utilise en majorité des Pokémon de type Feu et Electrique… »

Anthere s’interrogeait sur la manière de s’en sortir, car il y avait de grande chance pour que le Champion décide d’utiliser une équipe complète. Après tout, avec cinq Badges (bien visibles sur son vêtement) et en conquête du sixième, le Champion d’Omatsu ne lui ferait pas de cadeau ! Elle risquait d’avoir beaucoup de mal à le battre, car Akasie et Horizon étaient des atouts à double tranchant… Quant à Quidam… Anthere soupira.

« Ça ne va pas être facile et… Je pense qu’on devra finalement l’affronter seuls. Ce n’était pas prévu, mais… »

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[Sylver Belister]

Alors que je continuation d’avancer, perdu dans mes ruminations, une question innocente m’obligea à m’intéresser à mon environnement immédiat :

« Pourquoi ya une grotte en plein milieu de la ville ? »

La question de Lucy – pourtant assez banale pour qui connaissait la Funécire - attira mon attention. Je connaissais cette grotte. A une époque, j’avais d’ailleurs longtemps hésité à y entrer…

« C’est l’arène de la ville. Elle ressemble à une grotte parce qu’elle est censée évoquer un volcan. Il fait chaud comme dans un four à l’intérieur et on y trouve même des rivières de lave. J'ai failli y entrer à une époque...
-Aaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaah ! »

Calicot prit le relais des questions :

« Et pourquoi tu hésitais à y entrer ?
-En fait j’y suis déjà entré. En tant que spectateur pour regarder des matchs publics. Les fois où j’ai hésité à entrer, c’était en temps que challenger pour un match officiel.
-Tu as fais la quête des badges ? Mais pourquoi tu m’en as jamais parlé ?
-Non. J’ai hésité à la faire quand j’étais plus jeune. Mais je ne me suis jamais lancé. C’était il y a plus de quarante ans.
-Pourquoi ? »

J’observais intensément la jeune Abra avant de répondre, incapable de déterminer si elle était sincèrement curieuse ou si elle essayait de jouer à ma conscience. Avec ses yeux clos en permanence, c’était difficile à dire ! Je ne savais pas trop si j’avais envie de lui répondre et d’approfondir le sujet. Mais bon, je n’avais rien de mieux à faire…

« Parce que j’avais un travail qui occupait tout mon temps. Un travail que je n’aurais envisagé de quitter pour rien au monde à l’époque. Et surtout pas pour une lubie de jeune homme naïf.
-Mais ça t’est pas venu comme ça de courir les arènes si ? Tu te débrouillais bien en combat Pokémon ?
-Plutôt pas trop mal…
-Pas trop mal comment ? »

Contrairement à Lucy, Calicot était suffisamment mature pour sentir que je n’étais pas forcément à l’aise avec ce sujet. Elle posait donc ses questions à dessein malgré tout. Et même si cela me coûtait de lui répondre en faisant remonter à la surface des souvenirs pas forcément plaisants, une partie de moi souhaitait replonger dans les ombres du passé…

« J’avais fini troisième au tournoi annuel de Cosmo Canyon quand j’avais vingt-quatre ans. Et j’avais participé à cinq ou six tournois de même envergure dans la région. Je m’étais toujours classé dans les seize premiers sur une cinquantaine de participants. C’était pas la Ligue mais ça m’encourageait à poursuivre. Et puis j’ai arrêté au fur et à mesure que je prenais des responsabilités dans les affaires familiales. Je me sentais aussi coupable de laisser ma sœur tout gérer pendant mes voyages.
-Je vois. Mais tu avais une équipe Pokémon pour les matchs ? Je croyais que ton seul Pokémon pendant très longtemps avait été le père de Yuko ? »

A ces mots, je ne pu m’empêcher de caresser ma plus ancienne compagne de voyage, qui me le rendit bien. Bien évidemment, elle avait compris que je parlais d’elle.

« C’est vrai. Je n’ai jamais participé qu’à des matchs en un contre un, faute d’avoir le temps d’entraîner correctement d’autres Pokémon. Et un seul Pokémon, c’ était un peu juste pour des matchs d’arène.
- Mais maintenant, tu as le temps. Et toute une équipe avec toi ! Et même des Pokémon très puissants ! »

Elle n’avait pas tort. BlackJack et Yuko étaient probablement aujourd’hui plus puissante qu’Estribille – le père de mon Arcanin et mon tout premier compagnon – ne l’avait jamais été de son vivant. Et tous les autres avaient du potentiel. Seulement…

« Je ne suis pas sûr d’avoir encore envie de combattre les arènes maintenant. Tu en as envie toi ? »

Cette fois-ci ce fut au tour de Calicot de réfléchir avant de répondre. En fait j’aurais carrément pu lui dire que je me sentais trop vieux pour ces conneries. Mais je voulais vraiment être honnête avec moi même, j’aurais dû avouer que penser à mon passé me faisait mal. Parce que cela me ramenait à une époque paisible aujourd’hui révolue.

« Pas spécialement de combattre en arène, surtout si ça t’intéresse pas. Mais j’aimerais bien progresser en combat ! Je connais que l’attaque Téléport pour le moment, c’est pas l’idéal pour combattre même si c’est très utile dans plein de situations... »

Je sentais du regret dans sa voix et j’eus instantanément de la peine pour elle. La jeune Abra avait mal vécu de se retrouver impuissante pendant les opérations de sauvetage de Yuko et BlackJack, faute de pouvoir jouer un rôle plus offensif. Et elle supportait mal de savoir que Lucy, portant plus jeune qu’elle, disposait de plus d’attaques. Je lui pris la main avant d’affirmer :

« Ne t’inquiète pas, on va bientôt arranger ça ! »

Elle me répondit d’un sourire.

A présent que mes pas m’avaient ramené dans les beaux quartiers de la cité, les rues étaient de plus en plus peuplées. Mon groupe et moi finîmes par déboucher dans une allée au centre de laquelle trônait une majestueuse fontaine.

Aussitôt qu’elle la vit, Lalaak se précipita vers l’eau. La petite lézarde était particulièrement téméraire, même pour quelqu’un de son espèce et elle éprouvait une sorte de fascination mêlée de défi pour les étendues d’eau : dès qu’elle voyait quelque chose de plus grand qu’une flaque, elle se sentait obligée de s’en approcher, comme si elle voulait prouver sa supériorité à cet élément ennemi...

Une jeune femme était assise non loin de l’endroit où la jeune Salamèche admirait avec méfiance son reflet mais heureusement, mon Pokémon ne semblait pas avoir envie de l’importuner avec des jets d’eau. En revanche, Lucy avait suivie son amie et elle ne manqua pas de remarquer la passante qui semblait absorbée dans la lecture d’un papier.

Contrairement à Calicot, Lucy ne savait lire aucun des langages humains, mais elle ne manqua pas de repérer l’image de la « grotte » que nous avions vue un peu plus tôt au dos du prospectus. Comme elle se sentait d’humeur extravertie, elle apostropha l’inconnue par l’esprit :

« Bonjour madame ! Vous aussi vous voulez affronter le champion de l’arène ? »

Comment ça « vous aussi » ?! Enfin, puisqu’elle ne s’était pas présentée, je suppose que c’était à moi de le faire… Je m’avançais donc en compagnie de mes Pokémon, toutes hors de leur ball :

« Cette jeune Funécire s’appelle Lucy et elle est avec moi. Sylver Belister, enchanté. »

Simple, rapide, efficace. Plus de courbette ni de ton affable de vieux monsieur gâteux. J’avais passé l’âge pour ces idioties !

[Anthere Osarian]

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Assise en tailleur, Anthere détaillait la brochure. Un portrait suivit de quelques commentaires présentait les Pokémon du Champion.

« Tout ça n’est pas très bon… Akasie, tu pourrais te charger du Pachirisu, mais il y a une chance pour que le Zébibron résiste aux attaques Plantes… Quant au Statitik, c’est un insecte, ça risque d’être compliqué. Il pourrait être gênant pour vous aussi.»

A ces mots, Anthere regarda tour à tour Mesmer et Khan.

« Mais ces deux derniers n’ont pas atteint leur dernier stade d’évolution, alors, ça pourrait aller. Pour les autres, Horizon, tu seras notre fer de lance, c’est toi qui t’en sortiras mieux. Mais Quidam et Ourasi pourraient aussi s’occuper des autres. Motisma, Morphéo… Je ne connais pas du tout ceux-là.  Pyronille… Je ne crois pas en avoir déjà croisé non plus. Je crois que le match va beaucoup dépendre des règles de l’Arène, si le Champion interdit les changements de Pokémon ou non et si lui-même se le permet. »

Anthere se redressa et plia le papier pour le ranger.

« Du coup, Horizon, tu seras l’arme secrète de ce match, je te ferai sortir aussi tard que possible et… Je ne sais pas trop. Quel que soit celui d’entre vous que j’enverrais en premier, je suis presque certaine, qu’il enverra un type fort. Jusque-là, nous avons eu pas mal de chance, mais on ne doit pas compter dessus pour ce nouv…  »

Anthere n’eut pas le temps de finir sa phrase. Un Salamèche venait de se précipiter vers la fontaine, à quelques mètres d’elle, et aussitôt, Anthere évalua le danger. Le Salamèche comptait-il plonger dedans ? LA jeune femme pensait bien sûr à la flamme qui brulait à l’extrémité de sa queue, si elle venait à s’éteindre… Mais non. Anthere relâcha son attention du Salamèche, lorsqu’elle qu’on l’interpella. Elle reconnut immédiatement la connexion mentale due à la Psy.

En cherchant du regard qui venait de lui parler à l’esprit, elle remarqua alors la petite bougie qui venait de lui apparaître. Sans nul doute, le Funécire était apprivoisé. Elle hésita entre lui répondre avec le même langage ou pas, mais en voyant approcher un homme (qui devait être son dresseur?) d’environ son âge, Anthere se retint. L’idée était surtout de ne pas trop se faire remarquer, ce qui était déjà assez compliqué quand on participait aux matches d’Arène…

« Oui, absolument. » dit-elle avec un sourire pour le petit spectre. Anthere se releva, quand l’homme arriva à sa hauteur et lissa ses vêtements. « Enchantée. Anthere Osarian. » A la manière de son pays, Anthere s’inclina respectueusement.

Anthere détailla rapidement la petite équipe de Sylver. L’équipe était intéressante et pouvait trouver de quoi répondre face au Champion… Si ce n’était qu’en dehors de deux Pokémon, aucun n’avait évolué. Cela étant, le poids plume de Khan éternellement posé sur ses épaules, lui rappelaient que cela ne voulait rien dire ; le Natu n’avait jamais évolué et il était pourtant le plus puissant de toute son équipe, qui n’avait franchement pas à rougir de ce côté-là !

Anthere sentit également Ourasi et Quidam détailler les nouveaux venus. La Mizuhannaise posa une main apaisante sur le grand Galopa et l’autre sur le Nidorino. Ourasi baissa immédiatement ses oreilles en signe de menace, pour décourager Sylver de l’approcher, tandis que , pour une fois, Quidam ne sembla pas vouloir se mesurer aux autres Pokémon. Elle tapota la tête de Quidam, pour rassurer son étalon.

« Tout va bien… » lui murmura t-elle.

Ourasi baissa légèrement l’encolure, renâcla, mais ne quittait pas l’homme des yeux. Elle observa un moment son cheval, avant de déclarer :

« Ca va aller. Ne lui en voulez pas, il a de bonnes raisons de ne pas aimer les humains.
Alors, vous comptez défier le Champion local ? Avez-vous déjà réfléchi à la tactique que vous utiliserez  ? »

[Sylver Belister]

« Ah, vous venez de Mizuhan... »

Ce n’était pas vraiment une question. J’avais suffisamment rencontré de monde venant des quatre coins d’Erasia au cours de ma vie pour reconnaître les saluts typiques de chaque pays.

Je n’eus pas le loisir de pousser plus en avant la conversation car mon attention fut attirée par le Galopa qui accompagnait de la jeune femme. Ce dernier eut un mouvement de défi en me voyant approcher sa dresseuse. Je levai les mains dans sa direction et reculai d’un pas pour montrer que je n’avais pas d’intentions hostiles.

« Oh ne t’inquiète pas, je ne vous veux aucun mal ».

Bon, mon ton n’était pas des plus amicaux mais il n’était pas menaçant non plus ! Et puis je savais à quoi m’en tenir avec ces chevaux ardents, pour en avoir eu un moi-même ! Anthere me demanda alors si je souhaitais défier l’arène locale.

« Je crois qu’il y a méprise. J’ai expliqué à Lucy que quand j’étais plus… Qu’il y a quelques années , j’avais hésité à défier le champion d’Omatsu avant de renoncer en fin de compte. J’avais d’autres obligations qui m’empêchaient de me consacrer suffisamment aux combats Pokémon pour espérer vaincre un champion. »

Un trentenaire n’utilisait pas une expression comme « quand j’étais plus jeune » pour parler de ses vingts ans, si ?

Mon attention se porta alors de nouveau sur le Galopa. Sa méfiance à mon égard semblait toujours intacte. Sa dresseuse avait pourtant six Pokémon avec elle mais c’était lui qui m’attirait le plus. Déjà parce qu’il était le plus menaçant, mais aussi parce que je connaissais plutôt bien ces Pokémon. Et à voir celui d’Anthere, cette dernière s’en occupait très bien, mieux que je ne l’avais jamais fait avec le mien… Puisqu’elle tenait à son équidé, peut-être qu’elle apprécierait écouter cette histoire ? Bah après tout, je n’avais rien de mieux à faire pour le moment et j’étais vieux donc j’avais bien le droit de radoter un peu sur le bon vieux temps !

« J’ai eu un Galopa comme le vôtre pendant des années. Un Pokémon magnifique que j’ai hérité de mon père. C’était un cheval puissant, rapide et robuste mais aussi incroyablement fier. Je n’ai jamais pu recréer avec lui le lien qu’il entretenait avec mon père. Alors que mon paternel pouvait le monter des jours durant, c’est tout juste s’il me supportait sur son dos plus d’une heure !

Mais bon, il faut dire que les Galopa n’ont jamais été ma monture de prédilection. Je leur ai toujours préféré les Arcanin. »

Entendant le nom de son espèce, Yuko s’approcha gentiment de moi pour réclamer des caresses que je lui offris volontiers. Puis elle s’avança de la même façon vers Anthere pour lui faire comprendre son intention de se faire chouchouter sans toutefois trop se rapprocher, pour ne pas passer pour une menace au yeux du cheval de feu.

« Cette majestueuse chienne au cour tendre s’appelle Yuko et je crois qu’elle a très envie de vous dire bonjour à sa façon… Si vous acceptez bien sûr ! »

Ce moment de grâce terminé, je repensai à l’histoire de mon Galopa et un soupir de regret voila ma voix alors que je racontais la fin de notre histoire :

« Finalement, comme nous ne nous entendions pas, je l’ai de moins en moins monté pour lui préférer mon Arcanin et j’ai fini par en céder la garde au palefrenier qui s’occupait de lui tous les jours. J’espère qu’ils ont passé de bons moments ensemble... »

Je ne me repris pas d’avoir parlé au passé mais portant, j’avais en effet de bonne raison de penser que le cheval et son nouveau maître n’étaient plus de ce monde : j’avais légué le cheval à mon employé environ cinq ans avant la mort de ma famille et l’homme était déjà bien âgé, il devait avoir soixante ans bien passés. Mais il avait un don avec les chevaux que je n’avais jamais vu chez quelqu’un d’autre.

Quant au Galopa de mon père, ce Pokémon était presque aussi âgé que moi et ses forces commençaient à décliner lorsque je l’avais cédé. Mais au moins, cela lui avait permis ainsi qu’à son dresseur d’échapper au massacre…

Je chassai ces pensées d’un soupir. Je n’avais pas envie de ressasser ce passé. Je m’intéressai alors aux autres Pokémon d’Anthere. Calicot semblait vouloir entamer une discussion psychique avec la Gardevoir de la Mizuhannaise mais elle paraissait également intimidée par la beauté du majestueux Pokémon Etreinte.

Lalaak semblait décidée à intimider le Marill de la jeune fille dans ce qui ressemblait à un concours de grimaces. Bien évidemment, la jeune Salamèche défiait autant les Pokémon eau que l’eau elle-même… Tant qu’ils n’étaient pas trop effrayants ! Heureusement, je la savais suffisamment maligne pour s’en prendre à un Pokémon apprivoisé en dehors d’un match… Ce qui ne l’empêchait pas de vouloir crâner. Quant à BalackJack, elle était la seule qui était restée à mon niveau et ses yeux balayaient l’assistance sans trace de méfiance, mais avec une intense concentration, particulièrement lorsqu’elle croisait le Galopa ou le Nidorino.

Son attitude me fit comprendre qu’il était nécessaire de continuer les présentations pour briser la glace ;

« Vous connaissez déjà Yuko et Lucy… Cette jeune Abra s’appelle Calicot. La terreur qui n’a pas du tout peur de l’eau c’est Lalaak. Et ma chère garde du corps s’appelle BlackJack. Et vous, qui sont vos Pokémon ? »

Lorsque les présentations furent terminées, l’attitude de BlackJack changea : ses oreilles retombèrent légèrement et une tension sembla quitter son corps. Si j’avais présenté toute l’équipe, c’est que nus allions passer un petit moment avec Anthere et la sienne et qu’ils n’étaient pas une menace. Elle me regarda alors et je comprit ce qu’elle me demandait. Elle aussi voulait son lot de caresses… Mais sans cesser d’observer les deux Pokémon d’Anthere du coin de l’oeil. Même détendue, elle ne relâchait pas sa vigilance… ce qui était tout à fait logique quand on savait ce qu’elle avait vécu.

En terme de puissance brute, j’aurai dit que Yuko était légèrement plus forte que la Persian. De plus, BlackJack ne disposait pas de ses impressionnantes attaques de flammes. Mais sa ruse et son sens du combat en faisaient in fine un adversaire bien plus coriace que mon Arcanin, surtout lors d’un combat sans règles… En parlant de règles, mon attention se reporta sur Anthere. Elle m’avait posé une question de stratégie à laquelle je ne savais pas répondre mais ce n’était pas une raison pour ne pas discuter du sujet. Qui sait, cela me rappellerait peut-être le bon vieux temps ?

« Et vous alors, vous savez comment vous allez affronter ce champion ? C’est un spécialiste du type feu c’est ça ? Je crois qu’il n’avait pas d’autres spécialités quand je m’étais intéressé à lui... »

[Anthere Osarian]

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Quel dommage de ne pas avoir donné suite ! Mais Anthere comprenait très bien; elle-même avait dû mettre sa quête en suspens, et même toute sa vie, pendant une longue période… Sylver n’était donc pas un habitué des Arènes… Curieusement, Anthere n’en rencontrait que très peu, à croire que toute cette population s’était envolée, alors que lorsqu’elle écoutait les histoires d’autres voyageurs dans différents relais et auberges, les Dresseurs en quête semblaient pulluler de partout ! A croire que de récents évènements avaient eu pour effets de plonger le monde dans une longue léthargie.

« C’est un peu un luxe, cette quête des Badges… » Opina Anthere.

La conversation se tourna ensuite sur Ourasi, Sylver partageant sa propre histoire au sujet d’un cheval bien particulier. C’était amusant, car quelque part, elle ressemblait un peu à celle du sien. Il arrivait que certains chevaux ne soient les montures que d’une personne. Peut-être était-il trop habitué à son ancien maître ou trop bien dressé pour se conformer à un nouveau cavalier ? Ou peut-être, et c’était tout aussi probable, que la perte de son vieil ami l’avait beaucoup touché. Après tout, les Pokémons avaient des émotions et des sentiments tout aussi bien que les humains. Et il fallait du temps, parfois beaucoup de temps, pour tisser des liens. Sylver sembla exprimer des regrets à propos de ce Galopa.

« Je suis sûre que oui ! Il est très courant que les chevaux s’attachent à leurs soigneurs, après tout, ils passent beaucoup de temps avec eux. Vous avez bien fait de le lui confier, après tout, ce n’est pas qu’une histoire de niveau d’équitation… »

Anthere se tut laissant à Sylver le temps de se remettre. C’était du moins, ce dont elle avait l’impression.

Amicale, la Gardevoir répondit à Calicot, commençant les présentations comme le font tous les enfants “comment t'appelles-tu, d’où viens tu…” Quant à Horizon, loin de se laisser impressionner ou de se fâcher, il tenta une approche amicale envers le Salamèche; celui-ci le défiait très sérieusement et l’Azumarill lui répondit en crachant une petite bulle en l’air, comme les bulles de savon qui amusent tant les petits enfants.

Alors qu’Anthere répondit au désir du Arcanin, elle vit du coin de l’oeil son immense Galopa baisser les naseaux vers le Persian en ronflant. Il n’était pas très sûr de l’attitude du grand chat, mais il ne représentait aucun danger pour elle. Légèrement indécis, il pointait ou abaissait ses oreilles tour à tour, suivant qu’il regardait le Persian, ou bien Sylver. Il y avait plus à se méfier de Quidam, mais pour une fois, celui-ci ne s’occupait pas tellement des autres Pokémon. Ce qui laissa penser à Anthere que…

« Tous vos Pokémon sont des femelles n’est-ce pas ? »

Du reste, leurs prénoms le laissait supposer.

« Et bien, voici Ourasi, qui n’aime pas trop les humains, et Quidam et qui a du mal à supporter les autres Pokémon… Les mâles en général. L’Azumarill, c’est Horizon, et la Gardevoir, Mesmer.
Enfin, il y a Khan le Natu et Akasie, ma Phyllali. »

Anthere aurait eu du mal à les décrire, ils avaient tous quelque chose de spécial, mais de difficile à déterminer. Pour toute réponse à ces présentations, le Nidorino passa en revu du regard, chacun des Pokémon de Sylver, Mesmer fit un signe de la patte, Akasie vint s'asseoir sagement et Khan, fidèle à lui-même, resta aussi immobile qu’une statue.

« Il y a aussi un grand absent, qui est également mon premier Pokémon et quelques autres que j’ai dû confier : la Ligue ne permet le transport que de six Pokémon pour les Arènes. »

Ce qui était bien dommage, car Anthere était presque convaincue qu’il devait maintenant surpasser tous les autres en termes de puissance… Mais saurait-elle toujours le contrôler ?

« C’est la grande question, ses spécialités vont nous poser un problème, mais heureusement, tout n’est pas qu’une question de types, dans un match ! Et puis, j’essaye de faire tourner les participants, je ne veux pas les surmener, ces matches sont très fatigants. »[/block]

[Sylver Belister]

Je hochai la tête lorsque Anthere évoqua le caractère de luxe de la quête des badges. C’en était effectivement un et à plusieurs niveaux. Déjà c’était un luxe d’argent car n’importe qui ne pouvait pas se payer des voyages à travers les quatre pays dans le simple but de mener des matchs Pokémon. Ensuite, c’était un luxe de temps. Même avec des Pokémon volants, il fallait parfois plusieurs jour pour se rendre d’un bout à l’autre d’Erasia et on n’était jamais certain de pouvoir disputer un match dès son arrivée : tout dépendait des disponibilités du champion. A cela se rajoutait un luxe de chance : avec les nombreux conflits qui secouaient Erasia, voyager de ville en ville n’était pas toujours facile et même parfois franchement risqué. Mais il y avait autre chose encore…

« Je suis bien d’accord, c’est un luxe. Sans même prendre en compte l’investissement en argent et en temps que demande les matchs eux-mêmes et ce qu’il faut faire pour y participer, cela demande une énorme implication constante pour entraîner ses Pokémon dans ce but et se perfectionner. En fait je dirais même que l’argent et le temps passent après cette configuration. J’ai connu des dresseurs qui avaient rarement un sou vaillant mais cela ne les empêchaient pas d’investir la moindre pièce qu’ils gagnaient dans leur rêve d’atteindre le rang de maître. Mais là, on parle plus de vocation que de loisir ou même de carrière professionnelle… »

N’ayant pas envie de parler davantage des Galopa, je ne rebondis pas sur le sujet. Tandis que Anthere me présentait à son tour ses Pokémon, mon regard se porta sur chacun d’entre eux au fur et à mesure qu’ils m’étaient introduits. Seule la Gardevoir me salua directement d’un geste, que je lui rendis. Quant à l’Azumarill, il était occupé à essayer de dérider Lalaak, ce qui marchait plutôt bien : son masque menaçant disparu, la petite lézarde bondissait dans tous les sens pour tenter d’éclater les bulles du lapin bleu avant qu’elles ne s’envolent hors de sa portée. Après tout, c’était encore une autre façon de se battre contre l’eau, de son point de vue… Même s’il était clair qu’elle s’amusait plus qu’elle ne combattait !

Une fois les présentations terminées des deux côtés, je répondis à la question d’Anthere :

« Oui, ce sont toutes des femelles… Et d’ailleurs je crois que c’est la première fois que je le remarque moi-même. Il faut dire que pendant un bon moment, j’ai eu un Ptera mâle dans mon équipe mais j’ai dû me séparer de lui il y a quelques années. Un Pokémon magnifique, aussi fier que loyal. Je l’ai confié… A un ami qui avait plus besoin de son aide que moi. »

Un bon moyen de résumer l’histoire de Kaiser sans trop en dire sur mon passé.

« Et puis un autre Pokémon non femelle assez… Notable de mon équipe est un Zarbi. Je n’ai jamais pu déterminer son sexe, mais je crois que tous les spécialistes se sont cassés les dents sur cette question avec ces lettres vivantes. Lui est en voyage, il explore Erasia de son côté, mais je suis certain qu’il me reviendra un jour… Malheureusement… C’est sûrement le Pokémon avec le pire caractère que j’ai jamais rencontré... »

A la mention de l’insupportable portion d’alphabet, BlackJack poussa un léger grognement. Elle non plus ne l’aimait pas beaucoup, et Tetro le lui rendait bien. Qu’il prolonge donc encore un peu son voyage, la chatte n’y voyait aucun inconvénient !

Ainsi Anthere et moi avions fait le tour de nos absents. Et en parlant d’absents… Cela me fit repenser à la remarque de la jeune femme concernant la fonte du nombre de participants au défi des arènes. Était-ce vrai ? Cela faisait tellement longtemps que je ne m’intéressait plus aux matchs professionnels que je n’avais plus aucune connaissance des rumeurs du milieu. Mais avec les conflits entre pays qui gagnaient en intensité ces derniers temps, cela n’aurait rien de surprenant. Et pourtant, durant tout ce temps, les arènes étaient restées ouvertes…

Un geste que je captai m’arracha à mes réflexions. Calicot était en train de se tortiller les doigts, les mains jointes devant sa poitrine. Je connaissais ce tic. Elle voulait dire quelque chose mais n’osait pas. Parce que pour cracher le morceau, elle devrait reconnaître qu’elle avait lu dans mes pensées sans mon accord. Par bonheur, elle ne le faisait pas souvent et uniquement lorsqu’elle pensais que j’allais mal. Parce qu’elle ne voulait que m’aider, je passais l’éponge la plupart du temps… Un jour, elle comprendrait qu’il y avait de meilleure façon d’aider ses amis que de les espionner contre leur gré…

Je me tournai vers elle, une expression neutre sur le visage. Je n’étais pas très content de son voyeurisme mental mais je ne tenais pas à la réprimander pour autant. Je me contentai donc d’une simple question :

« Qu’est-ce qu’il y a ? »

L’Abra prit un petit moment avant de répondre par la pensée et lorsqu’elle le fit, à son ton j’étais presque certain qu’elle faisait en sorte qu’Anthere puisse l’entendre aussi :

« Je… Tu… Désolée d’avoir écouté aux portes, mais… Est-ce que… Enfin je veux dire… »

Devant sa contrition sincère, je poussai un soupir, ce qui détendit mes traits, puis je réitérai mon invitation :

« Vas-y, parle. Je vois bien que quelque chose te tient à cœur
- En fait… Je t’ai dit que je voulais pas faire de match d’Arène si ça t’intéressait pas et je reviendrai pas dessus mais… Est-ce qu’on pourrait assister au match que va livrer Anthere ? J’aimerais vraiment voir à quoi ça ressemble ! »

Le ton de la jeune Pokémon transpirait de quelque chose que j’avais tendance à oublier ses derniers temps. De l’envie. Du désir. De l’intérêt. De la fascination. Tout ça à la fois Elle était captivée par Anthere et ses Pokémon et tenait absolument à les voir en action. Occupé à ressasser le passé, je ne l’avais même pas remarqué !

« Eh bien… Pourquoi pas après tout. »

Je me tournai alors vers Anthere :

« Vous savez quand votre match aura lieu ? Ca ne vous dérange pas d’avoir des spectateurs ? »

[Anthere Osarian]

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Son équipe semblait très intéressante et pour ce qui était du Zarbi, elle n’en avait jamais rencontré. Avoir un Pokémon avec un fort caractère n’était pas toujours facile. Anthere en savait quelque chose, constituer une équipe faite d’espèces, mais surtout d’individus différents n’était pas une mince affaire, rien ne les prédisposait à s’entendre… Ni avec les autres Pokémon, ni avec leur dresseur. Anthere avait connu les deux, la guerre permanente entre Persik et Khan, qui avait valut le départ du premier, l’adoption, puis l’abandon de son ex-Medhyena… Cela relevait du confiage, mais Anthere le ressentait encore comme un abandon… Le travail du Dresseur Pokémon allait bien au-delà de juste attraper et entraîner. Elle n’en avait pas toujours eu conscience.

Il y eut un moment de silence durant lequel chacun resta un peu dans ses pensées. Elle sentit Ourasi se détendre à ses côtés. Horizon jouait avec le Salamèche… Sylver brisa alors le silence, s’adressant directement à son Abra. Anthere ne put s’empêcher de penser en Dresseur Professionnel : les Alakazam étaient une vraie plaie en match, rapides, puissants… C’était limite du gâchis de ne pas en entraîner un pour les Arènes ! En réponse à sa question, l’Abra répondit à pensée haute. La Pokémon était du genre très timide et osait à peine répondre à son maître. Les matches permettaient aussi de s’entraîner sur d’autres plans, comme la confiance en soi. Qui sait, peut-être qu’un bon petit match bien mené aurait pu aider la Pokémon Psy ? Elle avait visiblement très envie de parler, mais ne savait pas par quel bout commencer.

Quand elle prit enfin son courage à deux mains, Anthere interpréta l’envie de la Pokémon. Elle en tira la conclusion qu’elle aurait aimé essayer un match au moins, mais que le désintérêt de Sylver l’en empêchait. Dommage… Pour sa part, Anthere essayait toujours de répondre aux besoins et aux envies de ses Pokémon et chacun d’eux savaient qu’ils pouvaient tout lui demander. Y compris de cesser les matches, si cela ne leur plaisait plus. l’idée saugrenue qu’elle aurait pu lui proposer de participer avec elle lui vint à l’esprit, mais ce n’était pas possible. Ce n’était pas une question de chose trop importante pour elle, mais il risquait d’être beaucoup trop éprouvants et de trop haut niveau pour un Pokémon qui n’avait aucune expérience, ni même aucune idée du déroulement d’un match ! Et puis, vu la réputation du Champion… Mauvaise idée.

Elle ne put s’empêcher de s’attendrir aussi. C’était trop mignon ! Et puis, si ce n’était que ça…

« Je comptais me présenter demain. Nous avons fait un très long voyage pour arriver jusqu’ici et ça n’a pas été sans difficulté. Et puis, Ourasi et moi avons participé à un petit concours hippique un peu plus tôt, il n’est donc pas question de faire un match aujourd’hui… »

Anthere ne connaissait que trop bien les efforts que demandaient les disciplines sportives aux chevaux et ceux qui négligeaient leurs chevaux n’allaient jamais très loin. Certes, ils pouvaient faire des carrières brillantes… Mais courte et pas sans conséquence. Et puis, elle aussi avait besoin de repos ! Contrairement aux préjugés ridicules qui circulaient parmi ceux qui n’avaient jamais posé leurs fesses sur un cheval, non, ce n’est pas lui faisait tout ! C’était un vrai sport, fatiguant physiquement et mentalement et non, ce n'était pas parce que c’était une passion, qu’on ne ressentait aucune fatigue et que c’était facile !

« Bien sûr que non, ce n’est pas rare d’ailleurs. Certains matches se font plutôt en tête-à-tête, mais j’ai déjà aussi eu des matches avec pas mal de monde pour regarder. »

Inconnus ou non d’ailleurs. Cela dépendait assez du Champion, du moins, elle en avait l’impression.
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